dimanche 21 décembre 2014

Quelle maison pour le Seigneur ?

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Lecture biblique : 2 Samuel 7.1-16

David est roi d'Israël. Son autorité est désormais reconnue... mais ça n'a pas été simple pour en arriver là. D'une manière générale, l'établissement de la royauté en Israël a été assez chaotique.

Après la période des juges, où « chacun faisait ce qui lui semblait bon », le peuple a voulu un roi. Le Seigneur, lui, n'était pas très chaud. C'est lui qui devait être leur roi. Mais la théocratie, c'est une utopie ici-bas. Le cœur de l'homme étant ce qu'il est, ça ne peut pas fonctionner. Alors Israël aura un roi... Mais la première expérience n'est pas vraiment concluante : Saül sera finalement destitué par Dieu. David lui succédera, d'abord en secret, puis sa royauté s'affermira. 

Au moment de notre texte, David est à l'apogée de son règne... et il est pris de scrupules ! En effet, il s'est bâti un palais, une belle maison, et Dieu, lui, n'a rien d'autre qu'une tente. 

Il s'en ouvre au prophète Nathan, son conseiller.  « Tu vois, moi, j’habite une maison en bois de cèdre. Mais le coffre sacré a seulement une tente de toile comme maison. ». Le prophète comprend le sous-entendu. Et il estime que les intentions du roi sont louables. Il l'encourage. Dieu ne peut qu'être d'accord : « Tu as sûrement une idée à ce sujet. Fais ce que tu penses, le SEIGNEUR est avec toi. »

Mais le Seigneur ne l'entend pas de cette oreille. Il se révèle alors à Nathan : il ne veut pas que David lui construise une maison. Il faut le lui dire et le stopper dans ses intentions... Mais pourquoi ?


Dieu n'a pas besoin de maison

Dieu n'a jamais demandé à ce qu'on lui construise un temple ! Il se contente bien d'une tente. Ça lui va bien d'être un Dieu nomade, accompagnant son peuple dans son voyage. Comme lors de la sortie d'Egypte, dans la traversée du désert, ou dans la conquête du pays promis. 

D'ailleurs, dans l'épisode du désert, la tente est moins une maison qu'un lieu de rencontre. Dieu guidait son peuple par une nuée le jour et une colonne de feu la nuit. C'est lui qui décidait quand s'arrêter et quand repartir. Et quand le peuple s'arrêtait, on installait la tente en dehors du camp. Il manifestait alors sa présence en mettant la nuée à l'entrée de la tente. C'était le lieu privilégier pour Dieu pour rencontrer Moïse mais aussi pour le peuple d'aller consulter le Seigneur :

« Quand les Israélites installent leur camp, Moïse prend la tente sacrée et il la dresse en dehors du camp, assez loin. On l'appelle « la tente de la rencontre ». Tous ceux qui veulent consulter le SEIGNEUR sortent du camp et ils vont vers cette tente. » (Exode 33.7)

Le Seigneur est plus du genre à planter sa tente où il veut et quand il veut pour rencontrer son peuple qu'à se laisser enfermer entre les quatre murs d'une maison ! Dieu est, fondamentalement, nomade : toujours en mouvement. Il ne se laisse jamais enfermer ou limiter par quoi que ce soit : un temple, une église, un dogme ou une religion... 

Et ce Dieu nomade finira par s'incarner en devenant homme. Toujours en mouvement... D'ailleurs, dans le prologue de son évangile, Jean le dit bien :

« La Parole s'est faite chair, et elle a fait sa demeure (littéralement : elle a planté sa tente) parmi nous » (Jean 1.14)

L'incarnation, le Fils de Dieu devenu homme que nous célébrons à Noël, c'est le Dieu nomade qui a planté sa tente parmi nous, pour venir à notre rencontre. Et parce que Dieu est toujours en mouvement, après sa résurrection, le Fils est remonté auprès du Père. Et le Saint-Esprit a été envoyé, pour planter sa tente chez le croyant, pour faire de notre corps le temple de Dieu. Aujourd'hui, nous sommes les temples du Dieu nomade qui chemine avec nous.


C'est Dieu qui va construire une maison à David

La deuxième raison pour laquelle le Seigneur ne veut pas que David lui construise un temple, c'est que c'est lui, le Seigneur, qui va construire une maison à David. Dieu renverse la perspective : « ce n'est pas toi qui va me construire une maison, c'est moi qui vais t'en construire une ». Évidemment ici, on joue sur les mots. La maison dont parle le Seigneur pour David n'a rien à voir avec le palais qu'il s'est fait bâtir, c'est une dynastie. Et Dieu promet qu'elle sera établie pour toujours. 

On a vu, à juste titre, une dimension messianique à cette promesse. Elle est, certes, encore voilée. Mais elle se précisera petit à petit, notamment dans le discours des prophètes où le titre « fils de David » finira par devenir un titre messianique, appliqué à Jésus dans le Nouveau Testament. Car en effet, cette dynastie établie pour toujours, ce règne sans fin ne peut que pointer vers Celui qui est venu pour établir le Royaume de Dieu, le Fils de Dieu, Jésus, le Christ.

Il faut tout de même dire qu'un temple sera bien construit finalement pour le Seigneur. Mais selon les conditions fixées par Dieu lui-même : non par David mais par Salomon, son fils, premier représentant de cette dynastie promise. 

Et le jour de l'inauguration du temple, il sera bien dit clairement que cette « maison » de Dieu ne peut en aucun cas le contenir. Salomon lui-même le dira dans sa prière :

« Est-ce que Dieu peut vraiment habiter sur la terre ? Le ciel est immense, mais il ne peut pas te contenir, toi, mon Dieu. Et ce temple que j'ai construit est beaucoup trop petit pour toi. » (1 Rois 8.27)

J'aime cette idée de construire un temple, une maison pour Dieu, tout en sachant qu'il sera beaucoup trop petit. Il faut nous en souvenir ! Tous les temples que nous construisons pour Dieu sont trop petits. Nos églises sont trop petites, nos vies sont trop petites, nos théologies sont trop petites. Penser le contraire, c'est succomber à la dérive sectaire, ou l'orgueil spirituel. 

Quelle conclusion en tirer ? Dieu accueille ce que nous construisons pour lui. Et comme il a rempli le temple de Salomon de sa gloire, il habite les temples que nous lui offrons. Il habite nos églises et nos vies. Mais ce qui compte avant tout, c'est ce qu'il construit pour nous. C'est son projet pour nos vies et nos églises. C'est son Royaume appelé à croître dans notre cœur, dans nos églises, dans le monde. 


Conclusion

Finalement, le projet de David de construire un temple pour le Seigneur a abouti, mais pas comme il le pensait. Les projets de Dieu étaient différents. La construction du temple a juste été différée, et réalisée par Salomon. Mais le grand projet de Dieu a été révélé à David. Celui d'une autre maison, une dynastie, ferment d'un autre royaume, le Royaume de Dieu inauguré par le Messie. 

Nous pouvons faire des projets, mais c'est le projet de Dieu qui s'accomplit. Un projet qui n'est pas toujours conforme à ce que nous imaginons. Mais un projet dont la portée dépasse ce que nous pouvons penser. Il ne peut en être autrement de notre Dieu nomade, toujours en mouvement et toujours prêt à planter sa tente pour que nous puissions le rencontrer. 

dimanche 7 décembre 2014

La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, commence ici


Lecture biblique : Marc 1.1-8

Marc commence son évangile avec une phrase qui pourrait passer inaperçue, une simple formule banale : « La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, commence ici. »

Mais y a-t-il vraiment des formules banales dans les évangiles ? Chaque phrase a son importance. Même celle-ci, qui nous en dit finalement bien plus qu'on pourrait le croire à la première lecture.


La Bonne Nouvelle, c'est Jésus !

Le mot évangile est entré dans le langage courant. Et pour nous, ça désigne un livre. Ou plutôt quatre livres du Nouveau Testament. Et on oublierait presque parfois que ce n'est qu'une transcription d'un terme grec qui a une signification très simple : évangile signifie bonne nouvelle.

Or, quel étrange prophète de bonne nouvelle ce Jean-Baptiste, qui apparaît dès le début de l'évangile selon Marc ! Derrière son apparence hirsute d'ermite retiré dans le désert, vêtu d'habits sommaires, avec un régime alimentaire des plus rudimentaires, il proclame un message radical et exigeant : « changez votre vie ! »

Mais en réalité, la Bonne Nouvelle, ce n'est pas Jean-Baptiste, ni même son message. La Bonne Nouvelle, c'est un personne. C'est celui qui vient après lui. Celui dont Jean dit qu'il n'est pas digne d'ôter ses sandales... Ce n'est pas nous, les chrétiens, ou l’Église, et encore moins une religion... La Bonne Nouvelle, c'est Jésus.

Et ce n'est pas fini ! C'est aussi le fait que cette personne soit le Christ, le Messie, celui que Dieu a choisi pour accomplir son plan de salut. Et ce n'est pas fini ! C'est aussi le fait que ce Messie est le Fils de Dieu, Dieu lui-même. Voilà la Bonne Nouvelle : Jésus est le Christ, le Fils de Dieu.

Est-ce que nous vivons l’Évangile comme une bonne nouvelle ? Est-ce que nous l'annonçons comme une bonne nouvelle ? Est-ce que les gens voient dans notre vie, dans notre Église, que c'est une bonne nouvelle ?


La Bonne Nouvelle commence (presque) ici...

En réalité, on devrait dire que la Bonne Nouvelle commence presque ici... Parce que si la Bonne Nouvelle, c'est Jésus-Christ, Marc ne nous en parle pas tout de suite.

Il y a d'abord les prophètes, et notamment Esaïe qui annonce l'émergence d'une voix qui crie dans le désert. Et donc il y a aussi d'abord Jean-Baptiste, et sa prédication publique invitant les foules à se préparer à l'accueil du Messie qui doit venir. Il y a d'abord ce baptême d'eau proposé par Jean qui annonce un autre baptême, celui de l'Esprit saint, que le Christ apportera.

Bref, la Bonne Nouvelle ne tombe pas comme ça du ciel, du jour au lendemain. Son émergence est préparée. Vous connaissez le cantique traditionnel :

« Depuis plus de 4000 ans, nous le promettaient les prophètes,
Depuis plus de 4000 ans, nous attendions cet heureux temps... »

Dans le calendrier liturgique, le temps de l'Avent, tout un mois durant, nous rappelle cette attente. Noël, la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ venu sur terre, arrive au terme d'un temps de préparation. Et il y a là une vérité importante : pour recevoir la Bonne Nouvelle, il faut y être préparé, comme la bonne terre de la parabole, prête à accueillir la semence.

Comment avons-nous été préparés à recevoir la Bonne Nouvelle ? Par notre éducation ? Par des rencontres ? Par des circonstances, des événements heureux ou non, qui ont émaillé notre existence ? Nous avons tous un chemin, propre à chacun, dans lequel pourtant nous pouvons sans aucun doute discerner des jalons que Dieu a posé dans notre vie pour nous préparer à l'accueil de la Bonne Nouvelle.

Et puis cette Bonne Nouvelle, on ne la reçoit pas une fois dans sa vie et c'est terminé. L'Evangile nous rencontre et nous interpelle sans cesse. Nous nous réunissons pour entendre tout à nouveau cette Bonne Nouvelle... Mais comment nous y préparons-nous ?


La Bonne Nouvelle commence... mais ne se termine pas

Avec un tel début pour son ouvrage, on pourrait s'attendre à une fin similaire. Du style : « La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, se termine ici... ». Mais si on va à la fin de l’Évangile selon Marc, on se rend compte que ce n'est pas le cas. Pas du tout.

En réalité, l’Évangile selon Marc a la particularité d'avoir une fin abrupte, une fin ouverte. Il est communément admis aujourd'hui que les versets 9-20 sont un ajout postérieur à la rédaction de l’Évangile. Rien d'hérétique dans ces versets, qui empruntent leur contenu aux autres évangiles et au livre des Actes des apôtres. Mais à l'origine, l'évangile selon Marc s'arrêtait au verset 8, de façon surprenante :

« Les femmes sortent de la tombe et partent en courant. Elles tremblent, elles sont bouleversées, et elles ne disent rien à personne, parce qu'elles ont peur. »

Je ne sais pas si vous aimez les fins ouvertes dans un roman ou dans un film. Elles peuvent nous frustrer parce qu'elles ne proposent pas une fin claire et précise. C'est ce qui explique l'ajout à la fin de l'évangile selon Marc... Mais elles peuvent aussi nous stimuler parce qu'elles nous laissent imaginer la suite. Les fins ouvertes nous interpellent, elles nous invitent à continuer l'histoire.

Dans la Bible, le livre de Jonas aussi a une fin ouverte. Avec une question que Dieu pose au prophète sans qu'il y ait de réponse explicite :

« Alors, est-ce que je ne peux pas, moi, avoir pitié de cette grande ville de Ninive ? » (Jonas 4.11)

La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ a un commencement... mais pas de fin. Elle commence avec sa naissance, elle se poursuivra avec sa mort sur la croix. Mais ce ne sera pas la fin : elle se poursuivra avec sa résurrection. Voilà pourquoi elle n'a pas de fin, parce que Jésus-Christ est ressuscité et il est vivant pour toujours !

De plus, le fait qu'il n'y ait pas de fin à l’Évangile selon Marc nous invite aussi à continuer l'histoire. L'Evangile ne doit pas rester un livre, il doit devenir pour nous une Bonne Nouvelle, il veut poursuivre son histoire dans chacune de nos vies.


Conclusion

Dès le début de son ouvrage, Marc nous rappelle que l’Évangile est une Bonne Nouvelle parce qu'il ne s'agit ni d'un simple message ni d'une religion, mais d'une personne. Jésus-Christ, Fils de Dieu.

Et cette Bonne Nouvelle est vivante parce que Jésus-Christ est vivant. Recevoir l’Évangile, c'est laisser le Christ entrer dans notre vie, et nous tenir prêt à l'accueillir tout à nouveau chaque jour.

Pour chacun de nous, la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, peut commencer ici et maintenant.