dimanche 19 août 2018

Jonas - épisode 4

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Résumé des épisodes précédents : Au VIIIe siècle avant J-C, alors que l'Assyrie terrifie toute la région, le Seigneur envoie son prophète Jonas annoncer la destruction de Ninive, la capitale assyrienne. Contre toute attente, Jonas refuse d'obéir à Dieu et prend un bateau pour Tarsis, aux antipodes de Ninive. Il faut que le Seigneur déclenche une tempête et suscite un grand poisson qui engloutit Jonas pour faire entendre raison au prophète. Une fois recraché sur la terre ferme, Jonas se voit confier à nouveau la même mission par le Seigneur... et cette fois il obéit. Mais il n'a pas fini de parcourir Ninive en annonçant sa destruction qu'un grand mouvement de repentance gagne toute la ville, jusqu'au roi. Et, surprise, Dieu renonce alors à la destruction de Ninive !

Le livre de Jonas aurait pu s'arrêter au troisième épisode, sur un happy end... Toute une ville qui se repent grâce à la proclamation de Jonas : c'est le rêve de tout prophète ou de tout prédicateur ! Mais on n'est jamais au bout de nos surprises avec Jonas... Nous allons le voir avec ce quatrième et dernier épisode.


Lecture biblique : Jonas 4

1 Jonas n'est pas content du tout, vraiment pas du tout. Il se met en colère. 2 Il fait cette prière au SEIGNEUR : « Ah ! SEIGNEUR, je le savais bien quand j'étais encore dans mon pays. C'est pourquoi je me suis dépêché de fuir à Tarsis. Je le savais bien, tu es plein de tendresse et de pitié, patient, plein d'amour, et tu regrettes tes menaces. 3 Maintenant, SEIGNEUR, laisse-moi mourir. Oui, je préfère la mort à la vie. » 
4 Le SEIGNEUR répond à Jonas : « Est-ce que tu as raison de te mettre en colère ? » 
5 Jonas sort de la ville et il s'arrête à l'est de Ninive. Là, il se construit un abri et s'assoit dessous, à l'ombre. Il veut voir ce qui va se passer dans la ville. 6 Alors le SEIGNEUR Dieu fait pousser une plante au-dessus de Jonas. De cette façon, il aura de l'ombre et sera guéri de sa mauvaise humeur. Jonas est rempli de joie à cause de la plante. 7 Mais le jour suivant, un peu avant le lever du soleil, Dieu envoie un ver. Le ver pique la plante, et la plante sèche. 8 Puis, quand le soleil se lève, Dieu envoie de l'est un vent brûlant. Le soleil tape sur la tête de Jonas. Il va bientôt s'évanouir. Alors il souhaite la mort et dit : « Je préfère la mort à la vie. » 
9 Dieu demande à Jonas : « Est-ce que tu as raison de te mettre en colère à cause de cette plante ? » 
Jonas répond : « Oui, j'ai bien raison de me mettre en colère et de souhaiter la mort ! » 
10 Le SEIGNEUR lui dit : « Toi, tu as pitié de cette plante. Pourtant, elle ne t'a demandé aucun travail. Ce n'est pas toi qui l'as fait pousser. En une nuit elle a grandi, en une nuit elle a séché. 11 À Ninive, il y a plus de 120 000 habitants qui ne savent pas ce qui est bon pour eux. Il y a aussi beaucoup d'animaux. Alors, est-ce que je ne peux pas, moi, avoir pitié de cette grande ville de Ninive ? »


Jonas : un homme en colère

« Je le savais ! » Voilà la réaction de Jonas. « Je le savais et c'est pour ça que je ne voulais pas obéir ! »

Jonas est en colère. Il éclate. Ce qu'il tenait enfoui dans son coeur (et qui n'échappait pas à Dieu qui connaît notre coeur...), ce qu'il se retenait de dire jusqu'ici, il l'exprime enfin et on comprend enfin pourquoi il a voulu désobéir à Dieu !

Ce n'était pas parce qu'il ne comprenait pas pourquoi Dieu lui confiait cette mission. C'était au contraire parce qu'il le comprenait trop bien ! Jonas sait qui est le Seigneur. Sa confession de foi est parfaite : « tu es plein de tendresse et de pitié, patient, plein d'amour, et tu regrettes tes menaces. » Et c'est justement ce que Jonas n'accepte pas : que Dieu puisse pardonner aux habitants de Ninive. Il ne supporte pas que Dieu soit bon et compatissant. Ou du moins que cette compassion s'exerce en faveur des habitants de Ninive ! Jonas voulait en quelque sorte décider qui a droit à la compassion de Dieu ou non. Et pour lui, Ninive n'y avait pas droit.

Ca ne vous est jamais arrivé d'avoir envie de « donner des conseils » à Dieu ? De vous dire que là, quand même, il devrait faire quelque chose, il devrait intervenir, il devrait répondre... Peut-être que vous ne l'avez pas fait avec la même véhémence que Jonas, peut-être vous êtes-vous contenté d'y penser, de façon implicite... Mais quand même...

L'histoire de Jonas nous enseigne que lorsque nous ne comprenons pas le Seigneur (et bien-sûr que ça arrive!), même lorsque ce qu'il fait (ou ne fait pas) nous paraît injuste, le problème ne vient pas de Lui mais de nous...


Une bonne leçon pour Jonas

Plutôt que de s'expliquer avec Jonas, d'argumenter pour se justifier, le Seigneur va lui donner une leçon. C'est le maître de la Création qui se manifeste une fois de plus : après la tempête et le grand poisson, il utilise une plante (un ricin), un ver et un vent d'est étouffant.

Il s'agit pour le Seigneur de confondre Jonas et de lui montrer l'absurdité de sa réaction. Il va donc faire en sorte que le prophète se mette en colère... à cause d'une plante ! Et la situation est cocasse : Jonas se met est en colère parce que Dieu détruit une plante alors qu'avant il était en colère parce que Dieu n'a pas détruit une ville entière ! En d'autres termes, il est capable de pitié (et encore, avec des motifs tout à fait égoïstes) pour une plante et il n'accepte pas que Dieu puisse avoir pitié de 120 000 hommes et femmes qui se repentent !!! Si Jonas trouve une raison (même égoïste) d'épargner une plante, ne peut-il pas trouver une raison d'épargner 120 000 êtres humains perdus ?

D'autant que, comme le dit le Seigneur, Jonas s'émeut pour une plante qu'il n'a pas fait pousser. Dieu, lui, a non seulement fait pousser le ricin mais il a aussi créé les habitants de Ninive... En réalité, si Dieu est bon avec les humains, toujours prêts à nous pardonner, c'est qu'il nous a créé et qu'il nous aime. Tout simplement...

Ce n'est pas à nous de dire à Dieu ce qu'il convient de faire ou non. C'est lui qui fait pousser, c'est lui qui crée, c'est lui qui est à l'origine de toutes choses et qui seul peut dire ce qui doit être détruit ou non. L'ironie de cette histoire, c'est que les hommes reprochent souvent à Dieu les malheurs et les catastrophes alors que Jonas reproche à Dieu sa bonté... Mais qui sommes-nous pour contester avec Dieu ?

En réalité, Jonas voulait un Dieu bon pour lui (n'oublions pas qu'il lui a donné une seconde chance et qu'il l'a secouru dans le ventre du poisson) mais implacable pour les autres... Sommes-nous prêts à vouloir pour les autres, ce que nous espérons pour nous ? Ou, comme le dit Jésus dans le sermon sur la Montagne, à faire aux autres ce que nous aimerions qu'ils nous fassent ? » (cf. Matthieu 7.12)


Conclusion

Nous voilà donc arrivés au terme du feuilleton de Jonas... Avec une fin qui peut paraître un peu abrupte. On aurait pu s'attendre à un cinquième chapitre qui décrirait la réaction du prophète à leçon que le Seigneur lui a donnée. On aurait peut-être voulu savoir si Jonas s'est obstiné dans sa rébellion ou s'il a finalement capitulé devant la bonté de Dieu. Ou connaître l'évolution du comportement des habitants de Ninive, d'autant que quelques décennies plus tard, Ninive sera bel et bien détruite... Mais non, rien de tout cela.

L'auteur du livre de Jonas préfère une fin ouverte qui, au-delà de susciter notre imagination nous invite à l'interrogation, à l'appropriation. Plus que la réaction de Jonas et la suite de l'histoire des habitants de Ninive, c'est notre attitude qui compte, notre réponse aux questions et aux interpellations de l'histoire de Jonas.

Acceptons-nous que la bonté de Dieu soit la même pour tous, que nous n'avons aucun privilège à faire valoir ? Ou sommes-nous comme Jonas, jaloux de la miséricorde divine, espérant un Dieu bon pour nous et implacable pour les autres (en particulier ceux que nous avons du mal à aimer...) ?

Qu'avons-nous fait, aujourd'hui, de nos repentances passées ? Ont-elles changé notre vie, durablement ? Avons-nous un nouveau chemin de repentance à emprunter aujourd'hui ? Comment percevons-nous la souveraineté de Dieu dans notre vie ? Avec inquiétude voire dans la crainte ou dans la paix et la confiance ?

Voilà autant de question, et peut-être d'autres encore, que la fin ouverte du livre de Jonas nous laisse... A chacun de nous d'y répondre, devant Dieu !



dimanche 12 août 2018

Jonas – épisode 3

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Résumé des épisodes précédents : Au VIIIe siècle avant J-C, alors que la redoutable Assyrie terrifie toute la région, le Seigneur envoie son prophète Jonas annoncer la destruction de Ninive, la capitale assyrienne. Contre toute attente, Jonas refuse d'obéir à Dieu et prend un bateau pour Tarsis, à l'exact opposé de Ninive. Mais le Seigneur déclenche une tempête qui ne pourra être apaisée qu'en jetant le prophète à la mer. Dieu envoie alors un grand poisson dans le ventre duquel Jonas passe 3 jours et 3 nuits. Un temps qu'il met à profit un retour à Dieu, dans la prière. Alors, Dieu donne l'ordre au poisson de recracher Jonas sur la terre ferme...

Lecture biblique : Jonas 3

1 Une deuxième fois, le SEIGNEUR dit à Jonas : 2 « Debout ! Va à Ninive, la grande ville. Annonce-lui le message que je te donne. » 3 Alors Jonas se lève. Il part, mais cette fois, il va à Ninive, comme le SEIGNEUR l'a demandé.  Ninive est une ville extraordinairement grande. Il faut trois jours pour la traverser. 4 Jonas entre dans la ville, il marche pendant un jour entier. Il annonce aux gens : « Dans quarante jours, Ninive sera détruite ! » 5 Aussitôt, les gens de Ninive croient à la parole de Dieu. Ils décident de ne rien manger. Tous mettent des habits de deuil, les riches comme les pauvres. 6 Le roi de Ninive apprend la nouvelle. Il se lève de son siège. Il enlève son habit royal, il met un habit de deuil, et s'assoit sur de la cendre. 7 Puis le roi et ses ministres donnent cet ordre : « Criez dans la ville ces paroles : “Il est interdit aux habitants et aux bêtes, bœufs, moutons et chèvres, de manger et de boire ! 8 Tout le monde doit mettre des habits de deuil, les gens et les bêtes ! Chacun doit crier vers Dieu de toutes ses forces. Chacun doit abandonner sa mauvaise conduite et arrêter les actions violentes qu'il fait ! 9 Qui sait ? Dieu changera peut-être d'avis. Il abandonnera sa colère contre nous, et nous ne mourrons pas.”  »
10 Dieu voit leurs efforts pour abandonner leur mauvaise conduite. Il change d'avis. Il regrette le mal qu'il voulait leur faire, et il ne le fait pas.

Les rebondissements continuent dans notre mini-série de l'été ! Et ce troisième épisode des aventures de Jonas est celui des repentances.
Celle des habitants de Ninive, bien sûr. Radicale et spectaculaire.
Mais aussi celle de Jonas. Ou du moins, c'est un test pour voir si sa repentance dans le ventre du poisson a vraiment porté ses fruits.
Et enfin la plus étonnante des repentances, celle de Dieu !


Jonas : un repenti

Au début de ce troisième épisode, on reprend le déroulement de l'histoire, presque comme si rien ne s'était passé sur la mer. La tempête, le gros poisson... on n'en parle plus ! Le Seigneur redonne à Jonas le même ordre de mission, mot pour mot. Notez juste la mention supplémentaire que Dieu s'adresse « une deuxième fois » à Jonas... C'est bien une seconde chance que le Seigneur lui donne.

Voilà incontestablement un signe de la grâce et de la patience de Dieu. Sa grâce permet au prophète de repartir à zéro. C'est toujours la promesse que Dieu lie à la repentance. Le vrai pardon restaure la relation et exclut la rancune. Il n'y a pas de « je pardonne mais... » dans le pardon de Dieu... comme trop souvent dans les nôtres ! Et parce que Dieu est patient, il continue avec Jonas, malgré la mauvaise volonté manifestée jusqu'alors de sa part. Dieu ne se lasse pas de nous appeler à le suivre et le servir, malgré nos défaillances et nos infidélités... Il ne se lasse pas de pardonner, preuve de son amour pour nous.

Bref, pour la seconde fois, Dieu appelle Jonas à se lever et à aller à Ninive. Et cette fois le prophète obéit... Ceci dit, avait-il vraiment le choix ? A moins de vouloir faire un nouveau séjour dans le ventre d'un poisson ou Dieu sait où encore !

Jonas finit donc par aller à Ninive et y délivrer le message de la part de Dieu. On n'a pas vraiment l'impression qu'il y mette tout son coeur... Il fait le minimum syndical : « Dans 40 jours Ninive sera détruite... » C'est tout ! Mais après tout, ça semble bien être le message que Dieu lui a demandé de proclamer. Mais il ne fait rien de plus...


Ninive : une repentance soudaine 

Le moins qu'on puisse dire, c'est que l'effet de la prédication de Jonas est radical ! Rapidement, un élan de repentance monte jusqu'au roi de Ninive qui proclame un édit invitant tout le peuple à la repentance : que tout le monde, y compris les animaux, portent le deuil, que tous crient à Dieu et changent de comportement !

Pourtant la parole proclamée par Jonas ne semblait pas laisser d'espoir : Ninive sera détruite. Point. Pas de condition, pas d'appel à la repentance... Rien. Et on peut compter sur Jonas pour ne pas l'avoir suggéré ! Ce n'est certainement pas sa persuasion ou son éloquence qui a poussé les habitants de Ninive à la repentance... Mais ne sous-estimons pas la puissance de la parole de Dieu. Au temps de Jonas comme aujourd'hui. Car la parole de Dieu a touché les coeurs et les habitants de Ninive se disent : « Qui sait ? Dieu changera peut-être d'avis... »

Il y a quelque chose de presque excessif dans la repentance de Ninive, entraînant jusqu'aux animaux dans le mouvement. D'ailleurs, leur attitude ne correspond pas à celle des païens, qui auraient apporté des offrandes, des sacrifices, pour calmer la colère des dieux (comme l'ont fait les marins au milieu de la tempête, dans le premier épisode). Non, ils font ce que le Seigneur demande sans cesse à son peuple : non pas des sacrifices mais la repentance.

Et c'est là qu'on comprend le ton polémique de cet épisode... Ce que Ninive a compris ici, les Israélites sont incapables de le comprendre. N'oublions pas que le livre est écrit non pas pour des païens mais pour le peuple d'Israël. Au temps de l'Exil, c'est une repentance comme celle des habitants de Ninive que Dieu aurait attendue de la part son peuple. C'est pour cela qu'il a envoyé des prophètes... mais le peuple ne les a pas écouté !

Le message que Dieu adresse à son peuple est clair : « Ninive s'est repentie et n'a pas été détruite. Si vous vous étiez repentis, vous n'auriez pas été exilés... » D'ailleurs, il n'y a pas que dans le livre de Jonas où les non-croyants donnent l'exemple à la place des croyants... C'est, malheureusement, encore bien le cas aujourd'hui ! En cela le livre de Jonas garde une criante actualité et nous interpelle : quelle est l'authenticité de nos conversions ? Nos repentances changent-elles vraiment nos comportements ?


Le Seigneur : une repentance surprise

A la repentance de Ninive, Dieu répond aussi par une « repentance ». Il change d'avis, il regrette le mal qu'il voulait faire aux habitants de Ninive. Finalement, contrairement à ce que Jonas a annoncé de la part de Dieu, au bout des 40 jours, Ninive ne sera pas détruite ! C'est la repentance surprise !

Voilà qui souligne encore plus le scandale du refus de repentance des croyants. Dieu lui-même est capable de repentance. Ça n'a pas exactement le même sens que pour les hommes, bien-sûr. C'est une façon humaine de parler. Dieu change d'avis, non pas qu'il se soit trompé mais parce qu'il change d'attitude envers ceux qui se repentent.

La « repentance » de Dieu nous apprend que le but d’une prophétie de jugement, c’est d’abord de conduire à la repentance ! Le prophète Jérémie le dit clairement :

« Tantôt je parle, à propos d'une nation ou d'un royaume, de déraciner, de démolir et de faire disparaître ; mais si cette nation contre laquelle j'ai parlé revient du mal qu'elle a fait, je renonce au mal que je pensais lui faire.
Et tantôt je parle, à propos d'une nation ou d'un royaume, de bâtir et de planter ;
mais si cette nation fait ce qui me déplaît, sans m'écouter, je renonce au bien que j'avais parlé de lui faire. » (Jérémie 18.7-10)

En réalité, ce que Dieu cherche toujours, c'est de restaurer la relation perdue avec les hommes. C'est pour cela qu'il a créé les humains à son image... Et la restauration de cette relation passe par la repentance, par un changement radical de pensée et de manière d'agir.

L'histoire de Jonas soulignait jusqu'ici la souveraineté de Dieu. Dieu fait ce qu'il veut. Mais cette souveraineté ne signifie pas distance ou insensibilité. Le Dieu souverain n'est pas inflexible. Parce que ce n'est pas un Dieu distant et détaché mais un Dieu qui s'investit dans la relation. Il ne met pas à exécution ses menaces si la relation est rétablie. Il n'accomplit pas ses promesses si la relation est brisée. C'est là que se trouve l'enjeu de la repentance et du pardon : dans la relation restaurée.


Conclusion

La leçon principale de ce troisième épisode de l'histoire de Jonas concerne la repentance. Se repentir, ce n'est pas seulement regretter... C'est accepter de changer, comme les habitants de Ninive implorant le pardon à Dieu, comme Dieu lui-même qui ne met pas ses menaces à exécution. Mais pas comme Jonas, le prophète rebelle et inflexible !

Changer d'avis, changer de projet, changer de comportement, changer de pensée... voilà ce qui est nécessaire si on veut restaurer une relation brisée. Et c'est vrai autant dans notre relation à Dieu que dans nos relations les uns avec les autres.

Sommes-nous prêts à changer ? Et à accepter que les autres peuvent changer ? Le pardon et la réconciliation sont à ce prix !

dimanche 5 août 2018

Jonas – épisode 2

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Résumé du premier épisode : Au VIIIe siècle avant J-C, alors que la redoutable Assyrie terrifie toute la région, la parole du Seigneur est adressée à Jonas, prophète en Israël. Dieu lui donne la mission d'aller annoncer la destruction de la ville à Ninive, la capitale assyrienne. Mais Jonas, prophète rebelle, refuse d'obéir à Dieu et prend un bateau pour Tarsis, aux antipodes de Ninive. Mais on n'échappe pas si facilement au Dieu souverain qui déclenche une tempête terrible, forçant Jonas à raconter son histoire aux marins. Le prophète propose alors qu'on le jette à la mer pour calmer la tempête... Et ça fonctionne ! C'est donc dans cette position très inconfortable, pour ne pas dire désespérée, que nous allons retrouver Jonas pour le deuxième épisode.

Lecture : Jonas 2

1 Le SEIGNEUR envoie un grand poisson pour avaler Jonas. Jonas reste dans le ventre du poisson trois jours et trois nuits. 2 Dans le ventre du poisson, il prie le SEIGNEUR son Dieu. 3 Il dit :

« Je suis très malheureux.
Alors je crie vers toi, SEIGNEUR, et tu me réponds.
De la profondeur de la mort, j'appelle au secours et tu entends ma voix.
4 Tu m'as jeté dans un trou profond au cœur de la mer, et l'eau m'entoure.
Toutes tes vagues et toute ton eau tombent sur moi.
5 Et moi, je dis :
“Tu m'as chassé loin de tes yeux.
Pourtant, je veux revoir ton temple saint.”
6 L'eau m'arrive jusqu'au cou.
La mer m'entoure.
Des herbes s'enroulent autour de ma tête.
7 Je suis descendu jusqu'au pied des montagnes.
Je suis dans le monde des morts,
et les portes sont fermées à clé derrière moi, pour toujours.
Mais toi, SEIGNEUR mon Dieu, tu me fais remonter vivant de ce trou.
8SEIGNEUR mon Dieu, je vais bientôt mourir.
Alors je me souviens de toi, SEIGNEUR, et ma prière monte près de toi dans ton temple saint.
9  Ceux qui adorent les faux dieux n'ont aucune chance d'être sauvés.
10 Mais moi, je chanterai ta louange, je t'offrirai des sacrifices.
Je tiendrai les promesses que je t'ai faites.
Oui, c'est toi qui sauves, SEIGNEUR ! »

11 Alors le SEIGNEUR donne cet ordre au poisson : « Rejette Jonas sur la terre ! » Et aussitôt le poisson obéit.


La partie narrative de cet épisode est très courte. Elle se limite à deux versets au début et un verset à la fin du chapitre : Dieu fait intervenir un gros poisson qui avale Jonas et le recrache trois jours plus tard sur la terre ferme. C'est tout. Le plus gros du chapitre est constitué d'une longue prière de Jonas, composée essentiellement de citations de Psaumes, un vrai cantique des profondeurs. Non seulement parce qu'il est prononcé dans le ventre du poisson mais aussi parce qu'il reflète les profondeurs de l'âme du prophète dans cette expérience.


L'intervention de Dieu

Arrêtons-nous d'abord sur l'intervention de Dieu. Indirecte mais efficace. Dieu n'agit pas directement, par exemple en transportant Jonas hors de la mer, mais il fait appel à un poisson.

Dieu continue d'apparaître comme le maître de la Création. Il déchaîne la mer et la calme quand il veut. Il donne des ordres aux animaux et ils obéissent. Remarquez que dans la création, les éléments naturels et les animaux obéissent à Dieu. Il n'y a guère que l'homme pour lui désobéir et lui donner du fil à retordre ! Mais le Seigneur l'a voulu ainsi. Il a créé les humains libres et responsables, non comme des bêtes à qui il donne des ordres mais comme des partenaires d'alliance, des êtres responsables...

Tout cela n'empêche pas le Seigneur de poursuivre son projet et son projet passe, en l'occurrence, par Jonas ! Mais pourquoi a-t-il choisi de le sauver avec un poisson ? Savez-vous comment l'on écrivait le nom de la ville de Ninive dans l'Antiquité ? On utilisait un idéogramme qui représentait un poisson à l'intérieur d'un vase ! Coïncidence ? Je ne crois pas...

En faisant avaler Jonas par un poisson, présent dans l'idéogramme de Ninive, le Seigneur ramène encore le prophète à sa mission première : aller jusqu'à la capitale assyrienne. C'est comme s'il lui disait : « Non seulement je te délivre de la tempête, mais en plus je te rappelle ta mission : je t'envoie dans la gueule du poisson, à Ninive ! »

Au cas où Jonas en douterait encore, il n'échappera pas à Dieu et à la mission qu'il veut lui confier. Lorsque nous faisons la sourde oreille à son appel, le Seigneur sait utiliser tous les moyens pour nous le faire comprendre.


Les rôles du poisson

Arrêtons-nous maintenant sur le nouveau personnage de cet épisode : le poisson. Il joue un rôle clé dans l'histoire de Jonas. Il est bien-sûr l'instrument par lequel Dieu accomplit son dessein à l'égard du prophète. Mais il joue également un rôle symbolique, au moins à deux niveaux.

Le poisson – abîme

L'histoire nous dit que Jonas passe 3 Jours et 3 nuits dans le ventre du poisson. Il semble que dans l'Antiquité, c'est le temps qu'il fallait pour atteindre le séjour des morts. En tout cas, après 3 jours dans le ventre d'un poisson, normalement Jonas devrait être mort ! Et c'est bien ce qu'il exprime dans son cantique des profondeurs (v.7) :

Je suis descendu jusqu'au pied des montagnes.
Je suis dans le monde des morts,
et les portes sont fermées à clé derrière moi, pour toujours.

Du coup, si le fait d'être dans le ventre du poisson est assimilé à une mort pour Jonas, le fait d'être recraché par le poisson apparaît comme un retour à la vie, une résurrection (v.7) :

Mais toi, SEIGNEUR mon Dieu,
tu me fais remonter vivant de ce trou.

Le moment où Jonas est recraché sur la terre ferme est une nouvelle naissance : Dieu offre une nouvelle chance à Jonas, un nouveau commencement possible.

C'est bien-sûr dans cet épisode qu'il faut voir prioritairement le « signe de Jonas » dont parle Jésus à son propre sujet : « Oui, Jonas a passé trois jours et trois nuits dans le ventre du grand poisson. De la même façon, le Fils de l'homme passera trois jours et trois nuits dans la terre. » (Matthieu 12.40)

Mais c'est aussi une merveilleuse illustration de la grâce de Dieu, toujours prête à nous donner une nouvelle chance, à nous permettre un nouveau départ. Quel que soit l'abîme dans lequel nous avons pu sombrer, Dieu veut nous en faire sortir et nous faire renaître à une vie nouvelle.

Le poisson – temple

Si le poisson de Jonas est un abîme, plus surprenant, il joue aussi le rôle d'un temple. Il devient un lieu de prière où Jonas s'adresse à Dieu, comme dans le temple. D'ailleurs sa prière contient des références explicites au sanctuaire.

Au moment de prier, c'est comme si le prophète n'était plus dans le ventre d'un poisson. D'ailleurs, il parle de son expérience au passé : « je suis descendu... tu m'as fait remonter... ». Il s'engage aussi à offrir des sacrifices et s'acquitter de ses voeux, actes cultuels liés au temple.

La grande leçon de cet épisode, dans la prière de Jonas, c'est qu'il n'y a pas de lieu où Dieu soit absent... Tout est temple du Seigneur. Ou tout peut le devenir par la foi. Même le ventre d'un poisson. Où que nous nous trouvions, quelle que soit la vie que nous menons, si nous prions, le lieu où nous nous trouvons devient un temple, le lieu de la présence de Dieu !

Et Dieu entend notre prière. Il a entendu celle de Jonas. Prière de repentance, appel au secours, la prière du prophète est surtout un psaume de reconnaissance. Les supplications sont contrebalancées par les réponses de Dieu déjà reçues et la reconnaissance. L’évocation du péril qu'il subit se termine toujours dans l’assurance de revoir le temple. Les verbes sont au passé (ça ne ressort pas clairement dans la version « Parole de Vie »), comme si la prière était prononcée après la délivrance.

Le but de cette prière (comme de toute prière d'ailleurs) n’est pas de faire infléchir la volonté de Dieu : en envoyant le poisson, Dieu avait déjà décidé de sauver Jonas de la mort. La prière, pour Jonas comme pour nous, est l’occasion d’un retour à Dieu (une repentance…), ou d’exprimer notre reconnaissance et notre dépendance du Seigneur.


Conclusion

Finalement, que retenir de ce deuxième épisode ?

D'abord une nouvelle leçon sur la souveraineté de Dieu. Si Jonas pouvait jusqu'alors se sentir traqué par la souveraineté de Dieu, incapable de fuir loin du Seigneur, il peut maintenant voir cette même souveraineté sous un autre regard. N'est-ce pas aussi le Dieu souverain qui l'a délivré de la tempête par le gros poisson ? Tout est une question de perspective, et dépend de notre vision et de notre relation à Dieu.

Ensuite une leçon importante pour nous tous, pour notre prière, particulièrement si nous passons par des temps d'obscurité et d'épreuve : il n'y a pas de lieu, aussi obscure soit-il, qui ne puisse devenir le temple de Dieu, le lieu de sa présence. Ne l'oublions jamais !