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dimanche 19 mai 2024

On reconnaît un arbre à ses fruits

 

Comment reconnaît-on une femme ou un homme rempli du Saint-Esprit ? Est-ce que, spontanément, on ne pensera pas à quelqu’un qui prie avec ferveur, qui annonce la Parole de Dieu avec assurance, qui impressionne par sa foi, voire par lequel Dieu accomplit des miracles ? Voilà des femmes et des hommes remplis du Saint-Esprit !

Mais pensera-t-on à quelqu’un qui fait preuve de douceur, de bienveillance ou de maîtrise de soi ? C’est moins impressionnant que de prêcher devant une foule ou d’accomplir des miracles… mais ce sont bien trois aspects de ce que Paul appelle le fruit de l’Esprit. Et pour produire le fruit de l’Esprit, il faut bien être rempli du Saint-Esprit !

Galates 5.16-25
16Voici donc ce que j'ai à vous dire : laissez l'Esprit saint conduire votre vie et vous n'obéirez plus aux mauvais penchants. 17Car l'être humain que nous sommes a des désirs contraires à ceux de l'Esprit, et l'Esprit a des désirs contraires à ceux de l'être humain : ils sont complètement opposés l'un à l'autre, de sorte que vous ne pouvez pas faire ce que vous voudriez. 18Mais si l'Esprit vous conduit, alors vous n'êtes plus soumis à la Loi.
19On sait bien à quoi conduisent les penchants humains : la débauche, l'impureté et les actions honteuses, 20le culte des idoles et la magie, l'hostilité, les querelles, les jalousies, les colères, les rivalités, les discordes, les divisions, 21l'envie, les beuveries, les orgies et bien d'autres choses semblables. Je vous avertis maintenant comme je l'ai déjà fait : les personnes qui agissent ainsi n'auront pas de place dans le règne de Dieu.
22Mais ce que l'Esprit saint produit, c'est l'amour, la joie, la paix, la patience, la bienveillance, la bonté, la fidélité, 23la douceur et la maîtrise de soi. La Loi n'est certes pas contre de telles choses ! 24Ceux qui appartiennent à Jésus Christ ont fait mourir sur la croix leur faiblesse humaine avec ses passions égoïstes et ses mauvais penchants. 25L'Esprit nous a donné la vie ; laissons-le donc aussi diriger notre conduite.

Ce que l’apôtre Paul évoque dans ce passage, c’est le combat intérieur qui est le lot de tout chrétien. Une lutte entre, d’un côté les penchants humains, et de l’autre côté ce que produit le Saint-Esprit. Littéralement, le texte parle des « œuvres de la chair » et du « fruit de l’Esprit ». Les premières sont ce que, malheureusement, nous produisons par nous-mêmes, le second est ce que l’Esprit saint produit en nous.  

Paul n’est pas en train de dire que, naturellement, l’être humain n’est animé que de mauvais penchants et qu’il ne produit que de mauvaises choses. Il y a, heureusement, de bonnes choses qui peuvent aussi provenir du cœur humain. 

Pour bien comprendre ce que veut dire l’apôtre, il ne faut pas oublier que la lettre s’adresse à une Eglise. L’enjeu est d’abord communautaire. Juste avant, il encourageait d’ailleurs ses lecteurs à se laisser guider par l’amour en se mettant au service les uns des autres, et il les exhortait à ne pas se déchirer. 

Ce que Paul veut dire ici, c’est que dans un groupe comme une Eglise, si on se laisse diriger par ses penchants humains naturels, tôt au tard, la communauté connaîtra des tensions, des rivalités, des divisions. Et, malheureusement, ça arrive trop souvent… C’est la dimension bassement humaine de l’Eglise. « On sait bien à quoi conduisent les penchants humains ». Ou comme le traduit la TOB : « On les connaît, les œuvres de la chair… » 

A l’inverse, la seule façon de pouvoir s’édifier dans l’amour mutuel, et d’être une communauté qui reflète l’amour de Dieu, c’est de laisser l’Esprit saint agir en nous, au plus profond de notre être. C’est seulement ainsi que les penchants humains néfastes pourront être éteints et remplacés par le fruit du travail de l’Esprit en nous. 

En ce jour de Pentecôte, c’est sur le fruit de l’Esprit que j’aimerais m’arrêter, pour considérer ce que le Saint-Esprit est appelé à produire dans notre vie. Car ce qui témoigne le plus de l’action du Saint-Esprit dans une Eglise ou chez un chrétien, ce ne sont pas les manifestations plus ou moins spectaculaires de l’Esprit mais le développement, souvent plus discret, du fruit de l’Esprit.  


On reconnaît l’arbre à ses fruits

La métaphore du fruit rappelle certaines images utilisées par Jésus dans son enseignement, lorsqu’il parle de l’arbre qui se reconnaît à ses fruits. Les fruits de l’Esprit sont tout simplement les signes de la présence en nous du Saint-Esprit. 

Il y a des dons que l’Esprit distribue à qui il veut, pour l’édification commune. Ce qui signifie qu’il y a des dons qui sont accordés à certains et pas à d’autres, c’est d’ailleurs pourquoi nous avons besoin les uns des autres, pour bénéficier pleinement de toute la richesse des dons de Dieu. Toutefois, contrairement aux dons accordés par l’Esprit, le fruit de l’Esprit est le même pour tous. 

Une vie remplie du Saint-Esprit, c’est une vie qui témoigne, avec équilibre et harmonie, de tous les aspects du fruit de l’Esprit. C’est en tout cas ce vers quoi nous devons tendre. 

La liste que nous trouvons dans notre texte n’est, évidemment, pas exhaustive. Mais si vous êtes chrétiens et que vous ne témoignez d’aucun des fruits mentionnés par Paul, il y a un gros problème ! 

Bien-sûr, nous avons aussi des histoires et des personnalités différentes, qui fait que certains fruits de l’Esprit mûrissent plus facilement sur l’arbre que nous sommes, et d’autres ont plus de mal à se développer. Personne ne peut manifester l’ensemble de ces fruits de l’Esprit dans toute leur maturité. Nous avons tous des domaines que nous devons plus travailler que d’autres. 

Mais on ne peut pas considérer que l’un ou l’autre des fruits de l’Esprit ne nous concerne pas. On ne peut pas dire : « l’amour et la joie d’accord, mais la patience ce n’est pas pour moi », ou « la maîtrise de soi, ce n’est pas mon appel », ou « je n’ai pas le don de la bienveillance » ! 


Laisser le temps aux fruits de mûrir

La métaphore du fruit évoque aussi un processus naturel qui prend du temps, ce qui est tout à fait adapté à l’œuvre du Saint-Esprit en nous. En parlant de fruit de l’Esprit, l’apôtre Paul veut en effet dire que lorsque le Saint-Esprit habite en nous, et si nous ne mettons pas d’obstacle à son œuvre, il finit toujours par produire du fruit. 

Ce n’est pas nous qui faisons artificiellement ou à notre guise pousser un fruit sur un arbre. C’est l’arbre lui-même qui le produit naturellement. Et on le récolte au terme de ce processus, quand le fruit est mûr. En revanche, on prend soin de l’arbre pour qu’il produise du fruit, et du bon fruit. 

C’est un peu la même chose pour l’œuvre du Saint-Esprit en nous. C’est une œuvre en profondeur, que nous ne maîtrisons pas, et qui finit par nous façonner, nous transformer… et cela se manifeste dans des fruits visibles. Mais un fruit est récolté en son temps, il lui faut du temps pour arriver à maturité. 

L’œuvre du Saint-Esprit en nous est un travail à long terme. Il doit travailler sur notre caractère, contrer nos penchants naturels, faire avec nos blessures et nos traumatismes… Tout cela demande du temps, une lente maturation. On n’est pas dans l’immédiateté avec le fruit de l’Esprit !

Notre rôle à nous, c’est de ne pas mettre d’obstacle à l’œuvre de l’Esprit, ni chez nous ni chez notre frère ou notre sœur. Il s’agit de laisser le temps et la liberté à l’Esprit d’agir. Faire preuve de patience, envers nous-mêmes et envers les autres. On ne peut pas s’attendre à ce qu’un jeune chrétien, qui découvre la foi, développe tout de suite tous les fruits de l’Esprit. Et ce n’est pas en cherchant à le faire entrer dans un moule ou en lui imposant des contraintes qu’on va l’aider. 


Ce n’est que de l’amour !

L'amour, la joie, la paix, la patience, la bienveillance, la bonté, la fidélité, la douceur et la maîtrise de soi. 

La liste n’est pas exhaustive mais il y a déjà pas mal de boulot pour laisser tous ces aspects se développer en nous. Ce que je trouve intéressant, c’est la double dimension d’intériorité et de relation que cette liste évoque. Certains fruits tendent plus vers l’intériorité : la joie, la paix. D’autres plus vers la relation : la bienveillance, la bonté. Mais ils sont tous, d’une certaine manière, à la croisée des deux. Ils sont tous des attitudes de cœur qui se traduisent de manière concrète. 

L’intériorité, c’est le lieu de la communion avec Dieu, c’est ce « lieu secret » dont parle Jésus où Dieu nous attend. C’est là où commence l’œuvre en profondeur du Saint-Esprit, dans la méditation, la prière, dans l’écoute de Dieu, qui peut revêtir de multiples formes mais qui est incontournable. 

De cette écoute fondamentale de Dieu naît la transformation, le travail en profondeur de l’Esprit, qui fait petit à petit bourgeonner puis croître puis mûrir ses fruits. L’intériorité devient relation à l’autre. L’amour pour Dieu se manifeste dans l’amour pour le prochain.

Les fruits de l’Esprit sont la concrétisation de l’amour pour Dieu et de l’amour pour le prochain, que Jésus a cité comme les deux commandements fondamentaux, par lesquels toute la Loi s’accomplit. Voilà pourquoi Paul peut dire en conclusion que « la Loi n’est certes pas contre de telles choses ! » C’est une figure de style : non seulement la Loi n’est pas « contre » de telles choses mais elle les encourage. 


Conclusion

En ce jour de Pentecôte où nous commémorons la venue du Saint-Esprit sur les premiers disciples réunis à Jérusalem, souvenons-nous de la promesse annoncée par Pierre dans son discours. Une promesse pour toutes les générations de disciples, pour tous ceux et toutes celles que Dieu appellera et qui répondront à son appel, c’est la promesse du Saint-Esprit. La promesse d’un changement de vie possible, d’une œuvre en profondeur de Dieu dans notre cœur. 

Soyons donc remplis du Saint-Esprit, laissons-le agir en nous, laissons-lui le temps d’accomplir son œuvre en profondeur, de la faire germer puis grandir en nous, pour que nous portions du fruit à sa gloire, par notre vie, par notre amour pour Dieu et pour notre prochain. 


dimanche 28 mai 2023

Le Saint-Esprit, libre comme l’air

 

> Ecouter la prédication (à venir)

Le récit de Pentecôte est un épisode spectaculaire du Nouveau Testament qui a fasciné et intrigué les foules qui en ont été témoins. Mais l’ordinaire de l’action du Saint-Esprit est discret. Alors on pourrait presque l’oublier…

Dans le Judaïsme, Chavouot (Pentecôte) commémore le don de la Loi à Moïse sur le Mont Sinaï. En envoyant son Esprit sur les disciples réunis le jour de Pentecôte, le Seigneur accomplit la promesse du prophète Jérémie : « Je mettrai ma loi au dedans d'eux, je l'écrirai sur leur cœur ; je serai leur Dieu, et eux, ils seront mon peuple. » (Jérémie 31.33) Le champ d’action de l’Esprit, c’est notre cœur, notre être intérieur. 

Si on oublie parfois le Saint-Esprit c’est aussi qu’il se fait un peu oublier puisque sa mission n’est pas de parler de lui-même mais de révéler Jésus-Christ et d’appliquer l’œuvre de Dieu à notre vie. 

En général, le Saint-Esprit est un acteur invisible et discret. Mais sans lui, l’œuvre de Dieu nous resterait étrangère, Jésus resterait un inconnu, personne n’aurait la foi. On ne le voit pas, mais sa présence et son action sont incontournables. En fait, tout dépend de lui !

C’est un peu comme l’air qui nous entoure et que nous respirons. On ne le voit pas mais il est là, et il nous est vital. Il contient l’oxygène dont nous avons besoin pour respirer et donc pour vivre. Sans air, nous mourons ! 

C’est un peu la même chose avec le Saint-Esprit. D’ailleurs, en hébreu comme en grec, l’esprit c’est le souffle, le vent, l’air… Il est invisible et pourtant vital. Sans lui, sans sa présence, sans son œuvre en nous, impossible de vivre. Sans le Saint-Esprit, nous serions tous spirituellement morts, nous ne serions pas ici ce matin pour en parler !

Je vous invite à prendre une grande respiration, et à lire un texte de l’apôtre Paul qui sera pour nous un grand bol d’air, un rappel que le Saint-Esprit nous est aussi vital que l’air que nous respirons. 

1 Corinthiens 12.3-7
3 Je vous certifie que personne, en parlant par l'Esprit de Dieu, ne dit : « Maudit soit Jésus ! », et que personne ne peut dire : « Jésus est le Seigneur ! », sinon par l'Esprit saint.
4 Or il y a diversité de dons de la grâce, mais c'est le même Esprit ; 5 diversité de services, mais c'est le même Seigneur ; 6 diversité d'opérations, mais c'est le même Dieu qui opère tout en tous. 7 Or à chacun la manifestation de l'Esprit est donnée pour l'utilité commune.


Ce texte affirme, avec force, deux choses : 
1° On ne peut pas être chrétien sans l’œuvre en nous du Saint-Esprit
2° L’action du Saint-Esprit est caractérisée par la diversité

Je vous propose de nous arrêter sur ces deux affirmations et de voir en quoi elles nous concernent aujourd’hui, en quoi elles nous invitent à élargir notre regard sur l’action du Saint-Esprit dans notre vie.


On ne peut pas être chrétien sans l’œuvre en nous du Saint-Esprit

Le verset 3 dit deux fois la même chose, de manières différentes voire opposées : on ne peut pas dire « Maudit soit Jésus » par le Saint-Esprit et on ne peut pas dire « Jésus est le Seigneur » sans le Saint-Esprit. Il ne s’agit évidemment pas seulement des paroles prononcées mais de ce qu’elles signifient. On pourrait dire, plus simplement, qu’on ne peut pas être chrétien sans l’œuvre en nous du Saint-Esprit. Nul ne peut l’être sans lui. Et sans lui, il n’y aurait aucun chrétien sur cette terre, l’Eglise n’existerait pas, nous ne serions pas ici ce matin !

Ça veut dire aussi que nul ne peut dire qui est vraiment croyant sinon le Saint-Esprit. Or le Saint-Esprit, c’est Dieu. Il fait ce qu’il veut. Il est libre comme l’air… Il n’appartient à aucune Eglise, il n’est enfermé dans aucune confession de foi. S’il est impossible d’être croyant sans le Saint-Esprit, alors partout où il y a des croyants, il y a le Saint-Esprit ! 

Cette affirmation doit élargir nos horizons et nous mettre en garde contre tout esprit sectaire. Comprendre l’œuvre du Saint-Esprit nous invite à considérer l’unité de l’Eglise. Une unité qui dépasse nos étiquettes et nos réalités institutionnelles. L’Eglise, c’est le fruit de l’action du Saint-Esprit. C’est par lui que Jésus accomplit sa promesse de bâtir son Eglise. Croyez-vous, après 2000 ans d’histoire, que l’Eglise existerait encore si c’était l’œuvre des humains et si elle ne dépendait que de ses institutions ? 

Comment peut-on alors dire : « toi, tu n’es pas chrétien parce que tu ne pries pas comme moi, parce que tu ne penses pas comme moi, parce que tu ne vis pas ta foi comme moi… ». A priori, selon notre texte, il n’y a pas de raison de douter de la foi de celui ou celle qui déclare « Jésus est le Seigneur ! » Quelle que soit son appartenance ecclésiale, quelle que soit sa manière de vivre sa foi. 

En fait, ce n’est pas à vous ni à moi de dire qui est véritablement chrétien et qui ne l’est pas ! De quel droit je dirais « toi, tu n’es pas un chrétien authentique, parce que tu n’as pas vécu ceci ou cela, parce que tu n’as pas déclaré ceci ou cela ! » C’est l’affaire de chacun, devant Dieu. C’est l’affaire du Saint-Esprit qui agit dans les cœurs. Mon affaire à moi, c’est de m’ouvrir à l’action de l’Esprit, pas seulement en moi mais aussi chez les autres. Et demander à Dieu de m’ouvrir les yeux pour discerner mon frère et ma sœur en Christ là où ils se trouvent, et de me réjouir avec eux lorsque je les rencontre. 


L’action du Saint-Esprit est caractérisée par la diversité

L’autre accent de notre passage tombe sur la diversité. Avec l’unité, c’est l’autre face de la même pièce. A trois reprise, Paul souligne la diversité de l’action de Dieu par son Esprit : il y a diversité de dons de la grâce, diversité de services (ou de ministères), diversité d'opérations (ou d’œuvres, de façons d’agir). Et tout est rassemblé, au verset 7, dans l’expression « manifestation de l’Esprit » qui est une formule englobante : elle désigne toutes les façons dont le Saint-Esprit se manifeste dans notre vie. 

Certes, dans la suite du chapitre, on trouvera une liste de dons de la grâce qui se rapportent plutôt à la vie de l’Eglise et au culte. Mais pourquoi la liste serait-elle exhaustive ? Elle est liée à ce qui se passait dans l’Eglise de Corinthe où les problèmes et les divisions se manifestaient justement quand ils se réunissaient. D’autre part, Paul soulignera que la voie suprême par laquelle le Saint-Esprit agit, c’est l’amour. Il y consacre tout un chapitre, le fameux chapitre 13. 

Le Saint-Esprit n’est pas à l’œuvre seulement entre les quatre murs d’une Eglise ! Il accompagne et anime le croyant tous les jours de sa vie, dans toutes les sphères de son existence. 

Or, on a parfois l’impression que le Saint-Esprit n’agit que dans l’Eglise, quand les chrétiens sont réunis. Ou alors que sa seule façon d’agir « à l’extérieur », c’est à travers notre témoignage, quand nous annonçons la Bonne nouvelle du Christ. C’est extrêmement réducteur !

Il me semble légitime de considérer les termes utilisés par Paul de façon très générale : il y a les « dons de la grâce » (charisma), les « façons de servir » (diakovia) et les « façons d’agir » (energema). Ces termes couvrent l’ensemble de la vie chrétienne. Pas seulement la vie d’Eglise ! Il y a différentes façons d’agir ou de servir, en fonction des dons reçus, mais il n’y a que l’Esprit de Dieu qui donne et ordonne. 

Si l’Esprit saint a été donné à l’Eglise, le jour de la Pentecôte, c’est pour que tout le monde entende parler des merveilles de Dieu dans sa propre langue. Le Saint-Esprit est donné pour que nous allions à la rencontre des autres. Et pas seulement pour parler et délivrer un message, mais aussi pour exercer nos dons, pour servir et pour agir. 


Conclusion

Il y a une bonne nouvelle liée à tout cela : nous n’avons pas à entrer dans un moule, nous pouvons être nous-mêmes ! Car le Saint-Esprit agit et se révèle dans toute la diversité de notre humanité, il nous rejoint là où nous en sommes. 

Pas besoin de prophétiser ou d’accomplir des miracles pour expérimenter l’action du Saint-Esprit, pas besoin de prêcher avec éloquence ou de haranguer les foules pour le voir agir. Le Saint-Esprit habite ma vie, mes dons, mon service et mes actions. Il agit en moi et par moi avec ce que je suis, ce que Dieu a fait de moi et ce qu’il fera de moi demain. Le Saint-Esprit est comme l’air que je respire, c’est lui qui oxygène spirituellement ma vie, dans tout ce que je fais, tous les jours de ma vie. 

Le service de mon prochain et mon action au quotidien ne sont pas moins importants ni moins spirituels que ce que je vis le dimanche à l’église. Il y a diversité de dons de la grâce, diversité de façons de servir, diversité de façons d’agir… et c’est le même Dieu qui opère tout en tous ! 


dimanche 5 juin 2022

Pentecôte : un signe et une promesse


> Ecouter la prédication

Tout à l’heure, le début du récit de Pentecôte, en Actes 2, a été lu. Je vous propose d’en reprendre la lecture là où on s’est arrêté, à partir du verset 5, et de nous concentrer sur les réactions que les événements ont suscitées.  

Actes 2.5-13

5 À Jérusalem vivaient des Juifs qui honoraient Dieu, venus de tous les pays du monde. 6 Quand ce bruit se fit entendre, ils s'assemblèrent en foule. Ils étaient tous profondément surpris, car chacun d'eux entendait les croyants parler dans sa propre langue. 7 Ils étaient remplis de stupeur et d'admiration, et disaient : « Ces gens qui parlent, ne sont-ils pas tous Galiléens ? 8 Comment se fait-il que chacun de nous les entende parler dans sa langue maternelle ? 9 Parmi nous, il y en a qui viennent du pays des Parthes, de Médie et d'Élam. Il y a des habitants de Mésopotamie, de Judée et de Cappadoce, du Pont et de la province d'Asie ; 10 certains sont de Phrygie et de Pamphylie, d'Égypte et de la région de Cyrène, en Libye ; d'autres sont venus de Rome, 11 de Crète et d'Arabie ; certains sont nés Juifs, et d'autres se sont convertis à la religion juive. Et pourtant nous les entendons parler dans nos diverses langues des grandes œuvres de Dieu ! » 12 Ils étaient tous remplis de stupeur et ne savaient plus que penser ; ils se demandaient les uns aux autres : « Qu'est-ce que cela signifie ? » 13 Mais d'autres se moquaient en disant : « Ils sont complètement ivres ! »

La fête de la Pentecôte est une des grandes fêtes juives. On y commémore le don de la Loi à Moïse sur le mont Sinaï. C’était une fête de pèlerinage, au cours de laquelle le peuple était invité à se déplacer et monter à Jérusalem pour se rendre au Temple. C’est ce qui explique la présence dans la ville de Juifs de tous les pays, parfois exilés depuis des générations. L’hébreu n’était plus leur langue maternelle mais seulement celle de la liturgie dans les synagogues. 

C’était le moment idéal pour le Seigneur de poser un signe fort, d’envoyer un message aux foules rassemblées. La venue du Saint-Esprit sur les disciples le jour de la Pentecôte est avant tout un signe qui provoque des réactions diverses de la part de ceux qui en sont témoins. 

  • De la curiosité : ils s’assemblent pour connaître l’origine de ce bruit étonnant qu’ils entendent soudain. 
  • De l’étonnement : ils entendent des Galiléens, qui plus est pas forcément très instruits, parler dans leur propre langue maternelle
  • De la perplexité : ils sont dans la stupeur et l’interrogation. Ils ne savent pas quoi penser de ce qu’ils voient et entendent… Certains sont même plus que perplexes et prétendent qu’ils sont ivres.

Franchement, on aurait pu s’attendre à mieux ! En fait, on pourrait presque avoir l’impression que le signe de la Pentecôte était un raté, qu’il n’a pas eu l’effet escompté, voire même que Pierre a dû rattraper le coup ! En voyant les réactions de la foule, Pierre prend en effet la parole : 

Actes 2.14-16

14 Pierre se leva avec les onze autres apôtres ; d'une voix forte, il s'adressa à la foule : « Ecoutez attentivement mes paroles et comprenez bien ce qui se passe. 15 Ces gens ne sont pas ivres comme vous le supposez, car il est neuf heures du matin. 16 Mais c'est maintenant que se réalise ce que le prophète Joël a annoncé… »

Il explique ensuite longuement, en citant de nombreux textes de l’Ancien Testament, le projet de salut de Dieu qui s’est accompli dans la mort et la résurrection de Jésus. Et le résultat est spectaculaire : 

Actes 2.41

Un grand nombre d'entre eux acceptèrent les paroles de Pierre et furent baptisés. Ce jour-là, environ 3 000 personnes s'ajoutèrent au groupe des croyants.

Evidemment, j’étais un peu provocateur en disant qu’on avait l’impression que Pierre rattrapait le coup après un signe qui aurait raté sa cible ! Mais il faut bien remarquer que les choses se passent en deux temps : d’abord le signe qui suscite de nombreuses réactions, puis l’explication par Pierre qui suscite des conversions. Mais les deux temps sont bien l’œuvre de Dieu. Le dernier verset du chapitre 2 du livre des Actes le rappelle : c’est bien le Seigneur qui, chaque jour, ajoutait à l’Eglise les personnes qu’il amenait au salut (Actes 2.47). Même s’il le fait par la prédication de Pierre ou le témoignage de la communauté. 

Je vous propose de considérer cet événement de la Pentecôte sous deux angles. D’abord pour souligner en quoi il est un signe majeur dans l’histoire, ensuite pour évoquer en quoi il est une promesse et un défi pour nous aujourd’hui encore. 


Un signe majeur dans l’histoire

Un signe, c’est un événement particulier porteur de sens, qui n’est pas appelé à se reproduire. Il ne faut pas confondre ce qui se passe dans Actes 2 avec ce qui se passe ailleurs dans le NT, qui est notamment évoqué dans la Première épître aux Corinthiens, je veux parler du phénomène du parler en langues. Ici, ce ne sont pas dans des langues inconnues que l’Esprit donne aux disciples de s’exprimer mais il s’agit des langues maternelles des auditeurs présents. Pas besoin d’interprétation puisque le miracle, justement, c’est que chacun comprend ce qu’il entend ! 

Une Bonne Nouvelle pour tous

Et c’est là le premier aspect du signe : il faut désormais que tous aient accès à la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ dans sa propre langue, pour que tous puissent l’entendre. Car c’est une Bonne Nouvelle pour tous ! 

C’est un écho direct à la parole de Jésus à ses disciples avant son Ascension :

Actes 1.8

Vous recevrez une force quand l'Esprit saint descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'au bout du monde.

Le signe de la Pentecôte marque le point de départ de l’expansion de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ jusqu’aux extrémités de la terre : les merveilles de Dieu sont proclamées dans toutes les langues. 


La Loi gravée dans le cœur 

Mais on peut aller plus loin. Le fait que cela se passe le jour de la fête juive de la Pentecôte n’est pas non plus un hasard. Nous pouvons penser ici à la prophétie de Jérémie annonçant une Alliance Nouvelle : 

Jérémie 31.33

33 L'alliance que je conclurai avec le peuple d'Israël consistera en ceci, déclare le Seigneur : J'inscrirai mon enseignement non plus sur des tablettes de pierre, mais dans leur conscience ; je le graverai dans leur cœur ; je serai leur Dieu et ils seront mon peuple. 

Au don de la Loi gravée sur des tablettes de pierre répond le don de l’Esprit qui remplit les disciples réunis. Le Saint-Esprit qui remplit les croyants, c’est la Loi de Dieu qui se grave dans le cœur. On peut même voir un rappel, dans le bruit, le vent et le feu qui accompagnent l’événement de la Pentecôte, les éléments naturels déchaînés sur le mont Sinaï. 

Un anti-Babel

Mais on peut même remonter plus loin encore et penser à un événement décrit dans les premiers chapitres de la Genèse où il est question de l’apparition soudaine de multiples langues. C’est la tour de Babel (Genèse 11). Dans ce récit, les humains ont construit une tour qui monte jusqu’au ciel, pour défier Dieu. Et le récit de la Genèse nous dit que Dieu est « descendu » des cieux et qu’il a décidé d’embrouiller le langage des humains pour qu’ils ne se comprennent plus les uns les autres, afin de les disperser sur l’ensemble de la terre. 

Le signe de la Pentecôte en Actes 2 apparaît comme un anti-Babel. A la confusion des langues qui mène à la dispersion répond les merveilles de Dieu proclamées dans toutes les langues, pour unir l’humanité dans une Bonne Nouvelle adressée à tous. 

Tout cela pour dire que ce qui se passe ce jour-là à Jérusalem est une étape majeure dans le projet de Dieu. C’est un signe à la portée immense… qui symbolise l’inauguration de la Nouvelle Alliance. 


Une promesse et un défi pour nous 

Jésus avait promis à ses disciples, à plusieurs reprises, que Dieu leur enverrait son Esprit saint. Ce jour de la Pentecôte, la promesse s’accomplit. Mais comme Pierre le souligne dans son discours, la promesse n’est pas seulement pour eux : 

Actes 2.39

Car la promesse de Dieu a été faite pour vous et pour vos enfants, ainsi que pour tous ceux qui vivent au loin, tous ceux que le Seigneur notre Dieu appellera.

La promesse, c’est celle du Saint-Esprit qui vient habiter le croyant, une promesse pour tous ceux qui hier, aujourd’hui et demain répondent à l’appel de Dieu. Si le signe de la Pentecôte est un événement unique qui n’est pas appelé à se reproduire, la promesse qui s’y rattache demeure et traverse les générations. 

Et du coup, sans chercher à reproduire l’événement de la Pentecôte, nous pouvons nous demander comment il entre en écho avec notre vie de croyant, aujourd’hui. 

Un Esprit qui suscite des réactions

Je remarque d’abord les nombreuses réactions de la foule. Le Saint-Esprit, lorsqu’il remplit le croyant, suscite des réactions chez ceux qui en sont témoins. Des questions, de la curiosité, des moqueries... Les réactions ne sont pas forcément positives et enthousiastes mais en tout cas, ça ne laisse pas indifférent !

Il ne s’agit pas de reproduire les événements de la Pentecôte mais de s’interroger comment la présence du Saint-Esprit en nous se manifeste concrètement. Et peut-être, simplement, se demander : est-ce que notre vie de disciple du Christ au quotidien suscite des réactions de ceux que nous côtoyons ? Est-ce que notre vie d’Eglise, de communauté de disciples du Christ, suscite des réactions ? Pas forcément des réactions positives d’ailleurs… Mais si la vie d’un croyant ou d’une communauté de croyants remplis du Saint-Esprit laisse indifférent et ne suscite aucune réaction, c’est que nous avons raté quelque chose d’essentiel et qu’il faut nous interroger ! 

Le besoin d’un discours explicatif

Je remarque ensuite la nécessité du discours de Pierre pour accompagner le signe de la Pentecôte et l’expliquer. Bien sûr, nous ne sommes pas tous appelés, comme Pierre, à parler à des foules. Nous ne sommes pas tous appelés à être prédicateur ou évangéliste. Mais nous sommes tous appelés à être « prêts à rendre compte de l’espérance qui est en nous » pour utiliser la formule de l’apôtre Pierre (1 Pierre 3.15). 

L’essentiel, pour chacun de nous, c’est de faire l’expérience du salut, de recevoir le Saint-Esprit et d’avoir la foi. Mais la foi chrétienne n’est pas qu’une expérience à vivre, inexplicable, c’est aussi une Bonne Nouvelle à partager. Et pour pouvoir le faire, il faut que nous sachions prendre du recul sur notre expérience, que nous réfléchissions notre foi, pour pouvoir en rendre compte. 

Une foi qui ne serait qu’intellectuelle, abstraite, serait une foi sans vie. Mais une foi qui ne serait que pure expérience, inexplicable, intransmissible serait une foi incomplète puisqu’elle ne permettrait pas d’accomplir la vocation de témoin du croyant. 

Faut-il le préciser, ce travail d’approfondissement de notre foi, de réflexion, d’étude, c’est aussi l’œuvre du Saint-Esprit en nous. Jésus l’avait annoncé à ses disciples :

Jean 14.26

Celui qui doit vous venir en aide, l'Esprit saint que le Père enverra en mon nom, vous enseignera toutes choses et vous rappellera tout ce que je vous ai dit.


Conclusion

Pentecôte est une grande fête chrétienne, qu’il est important de célébrer. 

C’est un signe majeur dans l’histoire. Désormais, Dieu a contracté une Alliance Nouvelle avec les humains, sa loi n’est plus gravée sur des pierres mais sur le cœur des croyants, par son Esprit.

C’est une promesse extraordinaire pour nous, celle d’une présence de Dieu dans notre vie comme jamais auparavant : son Esprit saint vient faire sa demeure chez le croyant. 

C’est aussi, du coup, un défi. Celui de laisser l’Esprit de Dieu nous transformer, pour que sa présence en nous suscite des réactions autour de nous et nous donne l’occasion de rendre compte de l’espérance qui est en nous… et de voir ainsi la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ continuer à se répandre jusqu’aux extrémités de la terre. 


dimanche 23 mai 2021

Jésus, Noé et nous...

 

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Nous poursuivons notre lecture continue de la première épître de Pierre. Je lirai d’abord les versets 8-17 du chapitre 3, sans vraiment les commenter. Les exhortations qu’on y trouve sont dans la lignée du début de l’épître. Pierre y évoque la condition des croyants, au milieu d’une société qui leur est parfois hostile. Être fidèle au Christ dans un tel contexte n’est pas facile, et peut conduire à des souffrances. 

1 Pierre 3.8-17

8 Enfin, ayez tous les mêmes dispositions d'esprit et les mêmes sentiments ; aimez-vous comme des frères et des sœurs, avec affection, soyez bienveillants et humbles les uns à l'égard des autres. 9 Ne rendez pas le mal pour le mal, ni l'insulte pour l'insulte. Au contraire, réagissez en bénissant, car c'est une bénédiction que Dieu a promis de vous accorder en héritage quand il vous a appelés. 10 En effet, voici ce qui est écrit :

« Celui qui veut aimer la vie et connaître des jours heureux,

qu'il se garde de médire, qu'il se garde de prononcer des paroles de ruse.

11 Qu'il se détourne du mal, qu'il pratique le bien

et qu'il recherche la paix avec persévérance.

12 Car le Seigneur a les yeux fixés sur les personnes qui sont justes,

prêt à écouter leurs prières ;

mais le Seigneur s'oppose à celles qui font le mal. »

13 Qui vous fera du mal si vous êtes pleins de zèle pour le bien ? 14 Même si vous aviez à souffrir parce que vous faites ce qui est juste, vous êtes heureux ! N'ayez aucune crainte des autres et ne vous laissez pas troubler. 15 Mais reconnaissez et honorez dans vos cœurs le Christ comme Seigneur. Tenez-vous toujours prêts à vous défendre face à tous ceux qui vous demandent de rendre compte de l'espérance qui est en vous. 16 Mais faites-le avec douceur et respect ! Ayez une conscience pure, afin que ceux qui insultent votre bonne conduite de chrétiens aient à rougir de leurs calomnies. 17 Car il vaut mieux souffrir en faisant le bien, si telle est la volonté de Dieu, plutôt qu'en faisant le mal.

Cette dernière affirmation est importante. Il ne faut pas rechercher l’opposition ni se réjouir des souffrances, il faut juste être conscient qu’elles peuvent se manifester lorsqu’on cherche à être fidèle à sa foi et avoir une vie cohérente avec ce que l’on croit. Mais ça ne doit pas nous décourager de faire le bien !

Mais lisons la suite, avec les derniers versets du chapitre, où Pierre va prendre de la hauteur théologique.

1 Pierre 3.18-22

18 En effet, le Christ lui-même a souffert à cause des péchés des humains, une fois pour toutes, lui l'innocent, pour des coupables, afin de vous amener à Dieu. Il a été mis à mort dans son corps humain, mais il a été rendu à la vie par l'Esprit saint. 19 Par la puissance de cet Esprit, il est même allé proclamer la bonne nouvelle aux esprits emprisonnés ; 20 ce sont ceux qui, autrefois, ont résisté à Dieu, quand celui-ci attendait avec patience, à l'époque où Noé construisait l'arche. Un petit nombre de personnes, huit en tout, sont entrées dans l'arche et ont été sauvées à travers l'eau. 21 Ces événements étaient l'image du baptême : celui-ci ne consiste pas à laver la saleté corporelle, mais à demander à Dieu une bonne conscience. Et c'est ainsi que vous êtes sauvés maintenant, vous aussi grâce à la résurrection de Jésus Christ ; 22 celui-ci est allé au ciel et il se tient à la droite de Dieu, où les anges et les autres autorités et puissances célestes lui sont soumis.


Pierre, dans ce passage, parle d’abord du Christ. Il évoque sa souffrance injuste, sa mort, lui l’innocent, pour des coupables. Il parle de sa résurrection et de sa proclamation de la bonne nouvelle “aux esprits emprisonnés”. Nous reparlerons de ce verset qui a donné lieu à de nombreux débats entre les exégètes et les théologiens… Et enfin il parle de son ascension. Désormais assis à la droite de Dieu, il règne sur toute autorité et toute puissance. Il s’agit donc pour Pierre, dans ce paragraphe, d’évoquer l’oeuvre de salut accomplie par le Christ, dans toute son ampleur. 

Mais il parle aussi de Noé et du Déluge. De ce qui s’est passé alors, avec les contemporains du patriarche qui ont résisté à Dieu alors que Noé construisait l’arche, et Noé qui a été sauvé avec quelques-uns, les membres de sa famille, grâce à l’arche qu’il avait construite. 

Enfin il parle aussi de nous, croyants, de notre lien au Christ. Les coupables pour lesquels il est mort, c’est nous ! Il parle aussi de notre baptême, qui exprime notre salut, grâce à la résurrection du Christ. 

Et puis il entremêle ces trois fils. C’est ce qui fait la complexité de ce texte. 

  • Les souffrances injustes du Christ renvoient à celle de Noé, seul juste au milieu d’une humanité rebelle, et aux nôtres, lorsque nous souffrons à cause de notre foi, dans un contexte hostile.
  • La puissance de la résurrection du Christ est la bonne nouvelle à proclamer, c’est vrai pour nous, à travers notre baptême, mais c’est vrai même pour ceux qui, au temps de Noé, résistaient à Dieu. 

Nos souffrances, nos épreuves, nos difficultés de disciples du Christ aujourd’hui mais aussi notre foi et notre espérance s’inscrivent donc dans ce grand mouvement de salut, pleinement accompli par le Christ, mais déjà annoncé avec Noé. Nous sommes en bonne compagnie ! 


Jésus-Christ

C’est lui qui est au centre de ce passage de l’épître de Pierre : au cœur de notre foi, il y a la personne et l’oeuvre de Jésus-Christ ! On pourrait dire qu’il est le centre de gravité de l’histoire du salut. Tout tourne autour de lui. 

Ses souffrances font échos à nos souffrances et la puissance de sa résurrection est notre espérance. C’est une bonne nouvelle à proclamer à tous. Même aux “esprits en prison” mentionnés au verset 19 ! Retenons simplement ici, de ce texte difficile, que cette bonne nouvelle est non seulement pour nous qui croyons aujourd’hui, pour ceux qui sont venus après Jésus… mais aussi pour ceux qui l’ont précédé, par exemple au temps de Noé. Il faut que cette bonne nouvelle soit proclamée à tous. 

C’est bien d’ailleurs ce qui se manifeste avec éclat le jour de Pentecôte où l’Esprit saisit les disciples réunis pour qu’ils proclament dans toutes les langues les merveilles de Dieu. Cette bonne nouvelle atteint les quatre coins de la terre, et résonne à travers les siècles. 

Jésus-Christ est le centre de gravité de l’histoire du salut. Tout tourne autour de sa personne et de son oeuvre. Partout et en tout temps. Aujourd’hui, hier et pour l’éternité. 


Noé

Associé au personnage de Noé, il y a le motif du Déluge, qui évoque le jugement de Dieu face à la révolte des humains. 

Le récit biblique en dit finalement assez peu sur le personnage de Noé. Mais il apparaît comme une figure du juste fidèle, quitte à se retrouver seul contre tous. La majorité n’a pas forcément raison… et parfois il faut être prêt à nager à contre-courant. C’est le cas de le dire pour Noé… 

Noé a été fidèle à Dieu jusqu’au bout. Même seul face à tous les autres qui se moquaient de lui et ne prenaient pas au sérieux les avertissements divins. C’est en effet en particulier sur l’époque où Noé construisait l’arche que Pierre s’arrête (v.20). Avant le Déluge. Alors que le fait de construire un tel navire, à sec, pouvait sembler une folie… 

Noé est aussi une figure de l’humanité sauvée. Il a été épargné, lui et sa famille. Grâce à lui, l’humanité n’a pas été anéantie. Noé devient ainsi porteur d’une promesse, que Pierre rattache au baptême pour les croyants. C’est la promesse du salut. 


Et nous...

Jésus-Christ, Noé… et nous ! Nous sommes sauvés par le Christ et, d’une certaine façon, nous sommes embarqués avec Noé. 

Sauvés par le Christ

Même si Pierre mentionne ici le baptême, ce n’est pas lui qui sauve… c’est la résurrection du Christ, c’est-à-dire son œuvre accomplie. Le baptême est un témoignage, un engagement, en réponse à l'œuvre accomplie par le Christ, et en réponse à son œuvre en nous. 

Jésus-Christ doit être le centre de gravité de notre vie. Tout doit tourner autour de lui. Ça ne doit pas faire de nous des “grenouilles de bénitier” ou des super-spirituels qui n’ont que des versets bibliques à la bouche. 

En physique, le centre de gravité, c’est le point de concentration des différentes forces qui permet à un corps de se tenir en équilibre. Avoir Jésus-Christ comme centre de gravité de notre vie, c’est trouver en lui l’équilibre, la stabilité, la plénitude, tous rendus possibles par sa grâce qui pardonne et son Esprit qui vivifie. 

Si Jésus-Christ est le centre de gravité de notre vie, alors tous les aspects de notre vie pointeront vers lui, d’une manière ou d’une autre, parfois de manière évidente, parfois de manière discrète mais réelle.

Embarqués avec Noé 

Nous sommes aussi, d’une certaine façon, embarqués avec Noé. Il nous emmène avec lui dans son arche, si nous le suivons dans son exemple de fidélité. En fait, nous ne sommes pas embarqués seulement avec Noé mais avec tous les autres croyants, par le baptême que nous partageons, par l’engagement de foi personnel qu’il représente. 

Le croyant n’est pas seul dans sa lutte, il ne marche pas, ou il ne navigue pas, seul. Il y a, évidemment, le Christ qui l’accompagne par son Esprit. Mais il y a aussi les autres croyants. Tous ceux qui nous ont précédé et nous montrent l’exemple. Tous ceux qui nous accompagnent sur la route, aujourd’hui. C’est pourquoi, même peu nombreuse ou fragile, l’Eglise, la communauté, est essentielle à notre marche chrétienne. 

C’est par elle que nous sommes encouragés à la persévérance, à la fidélité jusqu’au bout, quelles que soient les circonstances, quelle que soit l’opposition rencontrée. 


Conclusion

Dans ce paragraphe foisonnant, Pierre veut évoquer toute l’ampleur de l'œuvre accomplie par Jésus-Christ, par sa vie, sa mort, sa résurrection, une œuvre qui traverse les siècles et atteint tous les humains, d’hier, d'aujourd'hui et de demain. 

Prendre conscience de l’ampleur de l'œuvre du Christ, c’est aussi prendre conscience de tout son potentiel dans notre vie. C’est une formidable source d’espérance, une promesse qui nous accompagne et nous aide à affronter les épreuves et les difficultés. 

En effet, la même puissance de l’Esprit de vie qui a ressuscité Jésus-Christ d’entre les morts vient faire sa demeure en nous, par la foi. C’est la promesse extraordinaire de Pentecôte. Alors non, nous n’aurons pas peur, quelle que soit l’adversité, car il vit en nous par son Esprit, celui qui “est allé au ciel et qui se tient à la droite de Dieu, où les anges et les autres autorités et puissances célestes lui sont soumis.” 




dimanche 31 mai 2020

LE DÉFI DE PENTECÔTE



Pentecôte, c’est le jour J pour l’Eglise. Le moment à partir duquel la Bonne Nouvelle va se répandre ! Jusque là, les disciples étaient réunis entre eux, parfois en présence du Christ ressuscité. Ils attendaient que la promesse de Jésus de leur envoyer le Saint-Esprit se réalise. Au début de notre récit, les disciples sont d’ailleurs réunis dans une maison... Et puis le Saint-Esprit descend sur eux, les foules accourent, intriguées, et l’Evangile est annoncé. 

Bref, la descente de l’Esprit saint sur les disciples, c’était un peu le déconfinement de l’Eglise… C’est donc un assez joli symbole que nos cultes puissent reprendre en ce dimanche de   Pentecôte !

Actes 2.1-13
1 Quand le jour de la Pentecôte arriva, les croyants étaient réunis tous ensemble au même endroit. 2 Tout à coup, un bruit vint du ciel, comme un violent coup de vent, et il remplit toute la maison où ils étaient assis. 3 Ils virent apparaître des langues pareilles à des flammes de feu ; elles se séparèrent et se posèrent une à une sur chacun d'eux. 4 Ils furent tous remplis de l'Esprit saint et ils se mirent à parler en d'autres langues, selon ce que l'Esprit leur donnait d'exprimer.
5 À Jérusalem vivaient des Juifs qui honoraient Dieu, venus de tous les pays du monde. 6 Quand ce bruit se fit entendre, ils s'assemblèrent en foule. Ils étaient tous profondément surpris, car chacun d'eux entendait les croyants parler dans sa propre langue. 7 Ils étaient remplis de stupeur et d'admiration, et disaient : « Ces gens qui parlent, ne sont-ils pas tous Galiléens ? 8 Comment se fait-il que chacun de nous les entende parler dans sa langue maternelle ? 9 Parmi nous, il y en a qui viennent du pays des Parthes, de Médie et d'Élam. Il y a des habitants de Mésopotamie, de Judée et de Cappadoce, du Pont et de la province d'Asie ; 10 certains sont de Phrygie et de Pamphylie, d'Égypte et de la région de Cyrène, en Libye ; d'autres sont venus de Rome, 11 de Crète et d'Arabie ; certains sont nés Juifs, et d'autres se sont convertis à la religion juive. Et pourtant nous les entendons parler dans nos diverses langues des grandes œuvres de Dieu ! » 
12 Ils étaient tous remplis de stupeur et ne savaient plus que penser ; ils se demandaient les uns aux autres : « Qu'est-ce que cela signifie ? » 13 Mais d'autres se moquaient en disant : « Ils sont complètement ivres ! »

Ces dernières semaines, nous avons tous vécu une expérience commune, universelle. La pandémie que nous traversons, et surtout l’expérience du confinement qui lui est liée, sera inscrite dans les livres d’histoire : plus de la moitié de l’humanité a été confinée en même temps ! Cette expérience commune a été vécue dans des circonstances variables, selon que vous avez été atteint par le virus ou non, en fonction des conditions dans lesquelles vous avez vécu le confinement, seul ou avec d’autres, avec ou sans jardin, avec des enfants scolarisés à la maison, en télétravail ou si vous avez continué de travailler pour assurer des services essentiels… Il y a donc eu une expérience commune, partagée par tous, mais elle a été vécue différemment par chacun. 

N’est-ce pas, d’ailleurs, le propre d’une expérience universelle ? Elle est partagée par tous mais vécue différemment par chacun. L’événement de la descente de l’Esprit saint à la Pentecôte a indéniablement un caractère universel, et on y retrouve cette tension entre le “tous” et le “chacun”.

Lorsque le Saint-Esprit se manifestent, il est dit : “Ils virent apparaître des langues pareilles à des flammes de feu ; elles se séparèrent et se posèrent une à une sur chacun d'eux.” (v.3)
C’est le même Saint-Esprit qui descend sur tous les disciples réunis, mais cela se manifeste par des langues de feu qui se séparent pour se poser une à une sur chacun. 

Plus loin, ce qui cause l’étonnement de la foule réunie à Jérusalem ce jour-là, c’est d’entendre parler des merveilles de Dieu dans la propre langue de chacun. Et que sont ces grandes oeuvres de Dieu sinon l’Evangile, la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ ? Il suffit de lire le discours de Pierre dans la deuxième partie du chapitre pour en avoir la preuve. Or, les foules disent : “Comment se fait-il que chacun de nous les entende parler dans sa langue maternelle ?” (v.8)
Autrement dit, c’est la même Bonne Nouvelle qui est proclamée à tous, mais dans la langue maternelle de chacun. 

L’Evangile, la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, est véritablement universelle. Elle est la même pour tous, mais elle est aussi entendue, reçue et incarnée différemment par chacun. Et cette tension entre le “pour tous” et le “pour chacun” de l’Evangile, constitue un des grands défis de l’Eglise, qu’on pourrait formuler ainsi :

Il y a une seule Bonne Nouvelle pour tous, à traduire dans la langue de chacun, et à recevoir dans sa propre langue maternelle. 


Une seule Bonne Nouvelle pour tous 

Il faut qu’elle soit la même pour tous, sinon chacun invente une Bonne Nouvelle à sa mesure… qui ne sera donc plus une Bonne Nouvelle pour tous ! Et il faut en même temps que cette Bonne Nouvelle soit personnelle, pour qu’elle rejoigne chacun. 

Comment transmettre une Bonne Nouvelle qui soit à la fois unique pour tous et personnelle à chacun ? Quel est le message dont nous sommes porteurs ?

Nous n’avons pas une religion à proposer, avec ses rites et ses traditions, nous n’avons pas à doctrine à proposer, avec ses certitudes et ses dogmes. Nous avons une personne à faire connaître : Jésus-Christ, le Fils de Dieu devenu homme, mort et ressuscité ! Il veut nous rencontrer et nous sauver. C’est ça la Bonne Nouvelle !

Il me semble donc que c’est seulement si la Bonne Nouvelle que nous annonçons est centrée sur la personne de Jésus-Christ qu’elle peut être à la fois pour tous et pour chacun. Parce qu’elle n’est pas alors un énoncé doctrinal ou un ensemble de précepts religieux. Elle est l’occasion d’une rencontre, par la foi, avec quelqu’un. Une rencontre qui débouche sur une relation personnelle. Ce que nous partageons, c’est la rencontre avec le Christ vivant. Mais notre relation avec lui est personnelle à chacun. 


Traduite dans la langue de chacun

Pour qu’elle soit accessible, cette Bonne Nouvelle doit être traduite dans la langue de chacun. Je me suis rendu compte que nous avons dans ce récit la première traduction de l’Evangile ! L’hébreu et le grec, qui sont les langues d’origine de l’AT et du NT, ne sont pas des langues sacrées. Ce qui compte, c’est le message. Et parce que c’est une Bonne Nouvelle, et qu’elle est pour tous, il faut la traduire dans toutes les langues !

Or la traduction est un art difficile ! Vous avez peut-être des souvenirs douloureux d’étudiants devant votre version anglaise ou latine... ou de la difficulté de votre apprentissage du français si ce n’est pas votre langue maternelle !

Or tout chrétien est appelé à être un traducteur de l’Evangile. Pas tellement pour écrire des versions de la Bible en différentes langues, mais pour le rendre compréhensible par nos contemporains, nos amis, nos proches. Et vous savez qu’il n’est pas toujours facile de trouver les mots justes pour témoigner de notre foi… Mais il ne faut pas oublier que la meilleure traduction de l’Evangile est sans doute sa traduction concrète, dans nos vies. 

Nous ne sommes pas responsable de l’accueil que les autres vont réserver à la Bonne Nouvelle, mais nous sommes responsables de la façon dont nous la traduisons, dans nos mots et dans notre vie quotidienne. L’élément important que nous révèle le récit de Pentecôte, c’est que cette traduction est une oeuvre du Saint-Esprit. C’est lui qui donne aux disciples la capacité de parler des merveilles de Dieu dans d’autres langues… C’est lui qui pourra rendre notre témoignage accessible et pertinent envers notre prochain. 


Reçue dans sa langue maternelle

L’Evangile est une Bonne Nouvelle, non pas seulement quand elle est annoncée mais quand elle est reçue. 

Cela s’exprime, dans la récit de Pentecôte, par l’émerveillement des foules qui entendent parler des oeuvres de Dieu “dans leur langue maternelle”. Littéralement, en grec, on parle de “la langue dans laquelle nous sommes nés”. C’est la langue qu’on a apprise enfant, celle de nos parents, de notre éducation. Une Bonne Nouvelle traduite dans ma langue maternelle, c’est une Bonne Nouvelle qui parle mon langage, qui rejoint mon histoire. 

Le Fils de Dieu, en devenant homme, nous a rejoint dans notre histoire humaine. Il est devenu l’un des nôtres, comme nous tous. Par son Esprit, il me rejoint, aujourd’hui, dans mon histoire. Il nous appelle chacun à le suivre et il habite notre quotidien. C’est la Bonne Nouvelle pour tous et pour chacun !

D’où l’importance, dans l’Eglise, de partager notre foi commune, de la vivre et de l’exprimer ensemble. C’est pour cela que nous sommes heureux de pouvoir reprendre nos cultes ! Mais d’où l’importance aussi de ne pas enfermer chacun dans des stéréotypes ou des carcans mais de savoir accueillir la diversité de nos spiritualités, une même foi exprimée dans un langage propre à chacun !


Conclusion

Juste avant son Ascension, Jésus avait donné à ses disciples cet ordre de mission : “Vous recevrez une force quand l'Esprit saint descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'au bout du monde.” (Actes 1.8)

Depuis le jour J de la Pentecôte, cet ordre de mission reste valable. Le flambeau nous est parvenu, de génération en génération. Le défi de Pentecôte se poursuit : il y a une seule Bonne Nouvelle pour tous, à traduire dans la langue de chacun, et à recevoir dans sa propre langue maternelle. 

Et n’oublions une autre excellente nouvelle liée à Pentecôte : c’est le Saint-Esprit, qui habite en nous, qui nous rendra capable de dire les merveilles de Dieu de façon appropriée, dans le langage de notre prochain !



dimanche 3 février 2019

Vivre la fraternité (2) Le défi de la diversité

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La semaine dernière, nous avons commencé une série de prédications sur la fraternité. Florence vous a rappelé pourquoi nous sommes frères et soeurs dans l'Eglise, et pourquoi nous sommes appelés à nous aimer. C'est un des fondamentaux de la vie chrétienne. La fraternité est toujours un défi. Et une des raisons de ce défi, c'est la diversité que nous représentons. Regardez autour de vous ! Ne voyez-vous pas cette diversité ?

Dans l'Eglise, on est confronté à une diversité, parfois grande, et à plusieurs niveaux. Il y a celle qui se voit tout de suite, hommes et femmes, de couleurs de peau différentes, d'âges différents... En allant plus loin, la diversité de fait que s'accentuer : elle est culturelle, socio-économique, d'arrière-plan spirituel, elle concerne les caractères, les histoires personnelles, les cheminements de foi, etc. Et ce n'est pas toujours facile. On a beau être ensemble dans un même lieu le dimanche, des barrières d'incompréhension, voire de méfiance subsistent. Le mélange n'est pas une évidence.

On pourrait même se demander si la diversité est vraiment souhaitable dans l'Eglise ? Est-ce qu'il ne serait pas plus facile, plus efficace, de constituer une église avec des gens qui se ressemblent, de former un groupe homogène ? N'y aurait-il pas moins de conflits, moins de malentendus ?

Le récit biblique que nous avons choisi pour notre Eglise l'année dernière, la rencontre entre Pierre et Corneille (Actes 10-11), nous donne déjà une indication. La différence culturelle pouvait sembler être un obstacle insurmontable. Un Juif ne pouvait pas accepter l'hospitalité d'un non-Juif, ne serait-ce que pour les règles alimentaires : ce que les uns considéraient comme impur, les autres le considéraient différemment. Alors Dieu a donné une vision à Pierre, celle d'une grande toile dans laquelle se trouvaient tous les animaux possibles, purs et impurs selon la loi de Moïse, et une voix qui retentit, invitant Pierre à manger de tout ! La réponse de Pierre est sans appel : "En aucun cas, Seigneur ! Je n'ai jamais rien mangé de souillé ni d'impur !"

Même si le sens de cette vision est moins dans la remise en cause des interdits alimentaires que dans l'invitation à aller au-delà des blocages et des barrières culturelles, le défi était grand. On mesure sans doute mal l'effort et le courage que cela a représenté pour Pierre de briser ces barrières.

Pour aller plus loin, je vous propose de lire le récit de l'événement qu'on peut considérer comme le moment fondateur de l'histoire de l'Eglise, en de nous demander ce qu'il nous dit sur cette question de la diversité.

Actes 2.1-11
1 Quand le jour de la Pentecôte arrive, les croyants sont réunis tous ensemble au même endroit. 2 Tout à coup un bruit vient du ciel. C'est comme le souffle d'un violent coup de vent. Le bruit remplit toute la maison où ils sont assis. 3 Alors ils voient apparaître des langues, comme des langues de feu. Elles se séparent et se posent sur chacun d'eux. 4 Tous sont remplis de l'Esprit Saint et ils se mettent à parler d'autres langues. C'est l'Esprit qui leur donne de faire cela.
5 À Jérusalem, il y a des Juifs venus de tous les pays du monde. Ce sont des gens fidèles à Dieu. 6 Quand ils entendent ce bruit, ils se rassemblent en foule. Ils sont profondément surpris, parce que chacun entend les croyants parler dans sa langue. 7 Ils sont très étonnés et pleins d'admiration et ils disent : « Tous ces gens qui parlent sont bien des Galiléens. 8 Alors, comment chacun de nous peut-il les entendre parler dans la langue de ses parents ? 9 Nous venons du pays des Parthes, de Médie, d'Élam, de Mésopotamie, de Judée et de Cappadoce, du Pont et de la province d'Asie, 10 de Phrygie, de Pamphylie. Nous venons aussi d'Égypte, de la partie de la Libye qui est près de Cyrène, de Rome, 11 de Crète et d'Arabie. Parmi nous, certains sont juifs, et d'autres aussi obéissent à la loi de Moïse. Et pourtant, chacun de nous les entend annoncer dans sa langue les grandes choses que Dieu a faites. »

Pentecôte était une fête de pélerinage pour les Juifs, qui se déplaçaient à cette occasion à Jérusalem, pour se rendre au temple. Il y avait donc dans la ville des Juifs de tout l'empire Romain, issus de la diaspora. Si la langue liturgique était l'hébreu, les Juifs de la diaspora avaient pour langue maternelle celle du pays où ils se trouvaient. On devait donc entendre toutes les langues du monde connu dans les rues de Jérusalem dans ces jours là ! D'autant qu'il n'y avait pas que des Juifs qui faisaient le déplacement mais aussi des prosélytes, des non-Juifs qui avaient embrassé la foi juive et "obéissaient à la loi de Moïse".

C'est dans ce contexte qu'arrive l'événement étonnant qui nous est relaté dans ce chapitre du livre des Actes des apôtres. Le miracle de la Pentecôte, c'est l'Esprit de Dieu qui donne aux disciples la capacité de parler des merveilles de Dieu dans la langue maternelle de tous ceux qui étaient réunis dans la foule. C'est un signe de l'universalité de l'Evangile : une bonne nouvelle pour tous les peuples, à proclamer dans toutes les langues.

Cet épisode de la Pentecôte est l'événement fondateur de l'Eglise. Plus loin dans le texte, on parle de nombreuses conversions et du coup, de la naissance de la première Eglise, dans laquelle les prières et la proclamation de l'Evangile pouvait, dès l'origine, résonner dans toutes les langues !

La diversité est dans l'ADN de l'Eglise : elle en est une caractéristique dès l'origine. Et ce n'est pas qu'une question de langues. Ces Juifs dispersés étaient aussi imprégnés de la culture où ils vivaient. Et puis très tôt dans l'Eglise l'accueil de la diversité est devenu un vrai défi pour l'unité de l'Eglise, avec la coexistence de chrétiens d'origines juive et de chrétiens d'origine païenne.

Cette diversité n'est pas un accident. Elle est conforme au projet de Dieu pour l'Eglise. Il suffit de voir, par exemple, l'image biblique souvent utilisée du corps : il y a un seul corps mais une diversité de membres. Un projet qui atteint son apogée dans une vision de l'Apocalypse, celle d'une foule innombrable issus de "tous les pays, de toutes les tribus, de tous les peuples et de toutes les langues." (Apocalypse 7.9).

Si elle est conforme au projet de Dieu, la diversité dans l'Eglise doit donc être valorisée, Dieu lui-même étant le garant de l'unité. On le voit dans le récit de la Pentecôte, à travers deux éléments : l'action de son Esprit et l'évocation du récit des merveilles de Dieu :
Sous la forme de langues de feu, le Saint-Esprit est répandu sur tous les disciples réunis. C'est l'Esprit de Dieu qui unit l'Eglise dans sa diversité, c'est lui qui fait de nous des enfants de Dieu, des frères et des soeurs en Christ.
Bien que parlant dans diverses langues, tous les disciples annonçaient le même message, celui du récit des merveilles de Dieu. Or quel est ce récit sinon celui qui nous est relaté dans la Bible ? C'est le socle commun que nous partageons et que nous proclamons.

Dans l'Eglise, la diversité n'est pas une valeur en soi... mais elle est le signe de l'universalité de l'Evangile.

Si quelqu'un arrive dans une église et qu'il voit des gens tous d'une même culture et/ou d'une même couleur de peau et/ou tous habillés de la même façon et/ou tous d'une même origine sociale... il se dira, à moins d'être comme eux, que ce n'est pas pour lui !

L'Evangile est pour tous et il faut que ça se voie ! La diversité n'est donc pas une option facultative pour l'Eglise. Si elle est vécue dans l'unité, elle est un signe de l'universalité de l'Evangile.


Travailler sur notre seuil de tolérance

Vivre la diversité est un défi qu'il est légitime et bon de relever. Il s'agit même d'une vocation de l'Eglise. Je pense à ce qui touche à la culture, à l'éducation, au niveau social, aux histoires et aux cheminements individuels, aux personnalités... Cette diversité là est essentielle dans l'Eglise parce qu'elle témoigne de l'universalité de l'Evangile. Dieu aime en Jésus-Christ tout homme et toute femme, c'est un message pour tous, sans discrimination. Et il faut que ça se voie dans l'Eglise !

Il y a toutefois certaines limites à la diversité. On ne peut pas non plus accepter ou justifier n'importe quoi dans l'Eglise, au nom de l'amour et de la tolérance. Il y a certaines doctrines et certaines pratiques qui sont en opposition avec le message de la Bible. Il y a des paroles ou des façons de se comporter qui contredisent l'Evangile. Accueillir la diversité, ce n'est pas accepter tout et n'importe quoi !

Mais entre ces deux repères, il y a de la place pour une diversité féconde, qui sera une source d'enrichissement mutuel. Tout le monde n'aura pas forcément le même seuil de tolérance à la diversité, et pas forcément dans les mêmes domaines. Pour certains, ce sera plus difficile d'accepter la diversité dans les convictions théologiques, pour d'autres ce sera dans des questions éthiques, pour d'autres encore dans les formes de piété...  Mais j'ai la conviction que nous avons tous, au moins dans l'un ou l'autre de ces domaines, à travailler sur notre seuil de tolérance.

Ca demande un effort de discernement, pour accepter de distinguer entre ce qui est essentiel et ce qui est secondaire. Ca demande une démarche d'humilité, pour ne pas penser avoir toujours raison.


Passer de la cohabitation à la communion

Depuis toujours dans les Eglises, le beau discours sur l'accueil de la diversité se traduit trop souvent par une cohabitation seulement, alors que nous sommes appelés à la communion. Ce n'est pas nouveau : on le voyait déjà apparaître dans les Eglises du Nouveau Terstament ! On voit transparaître clairement dans les épîtres les difficultés de cohabitation entre les chrétiens d'origine juive et ceux d'origines païenne, ou entre les riches et les pauvres par exemple.

Dans une perspective de cohabitation, on accepte la différence, on veut bien partager le culte, voire un groupe de prière ou d'étude biblique, mais on se méfie surtout des risques de la diversité, des dangers potentiels, on a tendance à penser que ce sont les autres qui refusent de s'intégrer dans la communauté... et on se rassure avec ceux qui, dans l'Eglise, nous ressemblent.

Dans une perspective de communion, on se réjouit de rencontrer les autres, différents de nous. On voit la diversité comme une chance, une occasion de découverte et d'enrichissement. On ne la craint pas mais on cherche à la mettre en valeur. Plutôt que d'attendre que l'autre s'intègre, on va à sa rencontre.

Accueillir la diversité, vraiment, ce n'est pas seulement accepter dans son entourage des gens différents de nous, c'est chercher à valoriser l'autre différent de moi. Nous avons sans doute chacun à nous interroger personnellement sur la façon dont nous vivons la diversité dans nos relations. Nous avons aussi à nous interroger en tant qu'Eglise sur la façon dont nous valorisons, ou pas, la diversité dans notre communauté !


Conclusion

Vivre la fraternité dans l'Eglise, c'est aussi vivre la diversité ! Parce que l'Eglise est, dès son origine, marquée par la diversité, à tous les niveaux. Comment pourrait-il en être autrement si nous croyons à l'universalité de l'Evangile, cette bonne nouvelles pour tous les humains, quels qu'ils soient ?

Pour y arriver, essayons chacun, et tous ensemble, de relever ce double défi : travailler à notre seuil de tolérance et ne pas nous contenter d'une cohabitation pour chercher plutôt la communion.

dimanche 15 mai 2016

Échos de Pentecôte




Actes 2
1Quand le jour de la Pentecôte arrive, les croyants sont réunis tous ensemble au même endroit. 2Tout à coup un bruit vient du ciel. C'est comme le souffle d'un violent coup de vent. Le bruit remplit toute la maison où ils sont assis. 3Alors ils voient apparaître des langues, comme des langues de feu. Elles se séparent et se posent sur chacun d'eux. 4Tous sont remplis de l'Esprit Saint et ils se mettent à parler d'autres langues. C'est l'Esprit qui leur donne de faire cela.
5À Jérusalem, il y a des Juifs venus de tous les pays du monde. Ce sont des gens fidèles à Dieu. 6Quand ils entendent ce bruit, ils se rassemblent en foule. Ils sont profondément surpris, parce que chacun entend les croyants parler dans sa langue. 7Ils sont très étonnés et pleins d'admiration et ils disent : « Tous ces gens qui parlent sont bien des Galiléens. 8Alors, comment chacun de nous peut-il les entendre parler dans la langue de ses parents ? 9Nous venons du pays des Parthes, de Médie, d'Élam, de Mésopotamie, de Judée et de Cappadoce, du Pont et de la province d'Asie, 10de Phrygie, de Pamphylie. Nous venons aussi d'Égypte, de la partie de la Libye qui est près de Cyrène, de Rome, 11de Crète et d'Arabie. Parmi nous, certains sont juifs, et d'autres aussi obéissent à la loi de Moïse. Et pourtant, chacun de nous les entend annoncer dans sa langue les grandes choses que Dieu a faites. »


L'épisode de la venue du Saint-Esprit le jour de la Pentecôte accomplit la promesse de Jésus à ses disciples. Au début du livre des Actes, il leur disait : « vous allez recevoir une force, celle de l'Esprit Saint qui descendra sur vous. Alors vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'au bout du monde. » (Ac 1.8) On peut même dire que cet épisode marque le point de départ de l'histoire de l’Église.

Mais il entre aussi en écho avec d'autres récits bibliques importants. Des échos qui viennent enrichir notre compréhension de l'événement de la Pentecôte.


Un écho au don de la Loi

Pentecôte, c'est d'abord une fête juive où l'on commémore le don de la Loi au temps de Moïse.

L'épisode est relaté dans le livre de l'Exode (chapitre 19). Dieu convoque Moïse sur le mont Sinaï et invite le peuple à se rassembler mais surtout sans approcher de la montagne, sous peine de mourir. Moïse monte donc à la rencontre de Dieu et les éléments naturels se déchaînent : tonnerre, éclairs, fumée, feu. Alors Dieu parle à son peuple depuis la montagne et lui donne les 10 commandements. Plus tard ces paroles seront gravées sur deux tablettes de pierre par Dieu lui-même.

Or, dans le livre des Actes, les phénomènes spectaculaires rappellent ceux du mont Sinaï : le bruit violent, la tempête, le feu. Et Dieu parle aussi, mais cette fois par la bouche des apôtres. Pierre expliquera aux foules le sens de cet événement. Les promesses des prophètes s'accomplissent : l'Esprit de Dieu est répandu sur tous. On peut penser aussi à la promesse de nouvelle alliance chez Jérémie, où Dieu promet de graver sa loi, non plus sur de la pierre mais directement sur les cœurs (Jr 31.33).

Pentecôte, c'est une promesse qui s'accomplit. Une promesse qui reste vraie aujourd'hui : Dieu, par son Esprit, grave sa Loi dans notre cœur. Il nous rend capable de faire sa volonté, parce qu'il habite en nous. Quelle bonne nouvelle !


Un écho à l'appel d'Abraham

L'événement de la Pentecôte fait aussi écho à un autre épisode fondateur, celui de l'appel d'Abraham.

Quand Dieu appelle Abraham à quitter son pays, il lui donne la promesse d'une descendance nombreuse par laquelle seront bénies « toutes les familles de la terre » (Gn 12.3). Cette portée universelle de la promesse de Dieu sera reprise chez les prophètes et trouve un accomplissement particulier le jour de la Pentecôte. Grande fête de pèlerinage, elle rassemblait des croyants de tous les pays qui ont entendu parler des merveilles de Dieu dans leur propre langue. C'est le point de départ de l'annonce universelle de l’Évangile.

Désormais, la bonne nouvelle sera annoncée jusqu'au bout du monde, selon le commandement de Jésus. Et par cet Evangile proclamé à tous, par cette bonne nouvelle du salut, offerte à tous les hommes, toutes les familles de la terre seront bénies. Ainsi la promesse faite à Abraham est aujourd'hui encore en cours d'accomplissement.

Pentecôte, c'est un appel qui retentit. Un appel auquel répondre aujourd'hui comme hier. Un appel à retransmettre à tous les peuples, dans toutes les langues, celui du message de l’Évangile.


Un écho à la tour de Babel

Enfin, Pentecôte entre aussi en écho avec un épisode moins heureux de l'histoire biblique : la tour de Babel.

La Genèse (chapitre 11) dit que l'humanité parlait alors une seule langue. Contrairement au commandement reçu du Créateur de se multiplier et de remplir toute la terre, les hommes décident de s'arrêter, de bâtir une ville et de construire une tour qui va jusqu'au ciel. Un défi lancé à Dieu. Mais Dieu descend pour plonger l'humanité dans la confusion en créant les différentes langues, si bien que, ne se comprenant plus, les hommes sont obligés d'arrêter la construction de la tour et de se disperser.

Pentecôte, c'est un anti-Babel. A Babel, l'humanité voulait monter jusqu'à Dieu par défi et a été dispersée par la confusion des langues que Dieu a jetée sur elle. A Jérusalem, en ce jour de Pentecôte, c'est Dieu qui est descendu parmi les hommes par son Esprit, pour les réconcilier. Le miracle des langues en est le signe. Alors que l'humanité de Babel s'est divisée par la confusion des langues, l'humanité de Pentecôte est réconciliée, dans toutes ses langues, par l'unique message de l’Évangile.

Pentecôte, c'est un signe dans l'histoire. Le signe d'une humanité réconciliée, qui est au cœur du projet de Dieu. Une humanité réconciliée avec Dieu, et les uns avec les autres.


Quel écho dans ma vie ?

Mais il ne faut pas en rester là. Pentecôte est une promesse qui s'accomplit. Mais comment s'accomplit-elle dans ma vie ? C'est un appel qui retentit. Mais comment est-ce que j'y répond aujourd'hui ? C'est un signe dans l'histoire. Mais comment ce signe marque-t-il mon histoire ?

Bref, quels échos Pentecôte a-t-elle dans ma vie ? Voilà la question à se poser...

Pour nous aujourd'hui, la Pentecôte ne sert à rien si elle n'est qu'un événement du passé, un moment dans l'histoire de l’Église. Dans ce cas, c'est juste l'occasion d'avoir un long week-end de plus avec le lundi de Pentecôte.

Non. Pentecôte doit être plus que cela pour le croyant. C'est une fête chrétienne importante. Si Pâques est la fête centrale rappelant l'oeuvre accomplie par le Christ, mort et ressuscité. Pentecôte est la fête qui rappelle qu'en venant habiter le croyant, le Saint-Esprit nous met en marche.

A Pâques, le Seigneur nous dit : « J'ai tout accompli ». A Pentecôte, il nous dit : « A vous de jouer maintenant !  Soyez mes témoins ! »

Pentecôte est une réalité à vivre tous les jours. Celle de la présence en nous du Saint-Esprit qui nous rend capable de faire la volonté de Dieu. Dans quelle mesure est-ce vrai dans ma vie ?

L'appel de Pentecôte à faire entendre dans toutes les langues les merveilles de Dieu nous concerne aussi, évidemment. Quelle part je prends à l'annonce de la bonne nouvelle du salut, ce message universel par lequel toutes les familles de la terre doivent être bénies ?

Et ce signe de réconciliation que constitue Pentecôte, comment s'incarne-t-il dans ma vie ? Comment je fais œuvre de réconciliation ? Conformément à l'exhortation de l'apôtre Paul aux Corinthiens : « Tout vient de Dieu, qui nous a réconciliés avec lui par le Christ et nous a confié le ministère de la réconciliation » (2 Co 5.18 – TOB)

La réalité de Pentecôte aujourd'hui, dans notre vie, dans notre Église, elle se manifestera dans nos vies transformées par la Parole de Dieu, dans notre proclamation de l’Évangile à tous, et dans notre engagement pour la paix et la réconciliation.

Quel écho Pentecôte a-t-elle dans notre vie, dans notre Église ?


Conclusion

N'oublions pas la fête de Pentecôte. Elle est non seulement la commémoration d'un événement historique dans l'histoire de l’Église, mais elle est aussi une fête à vivre aujourd'hui. Nous devons laisser résonner en nous le message de Pentecôte. C'est une promesse, un appel et un signe qui nous encouragent, nous interpellent, nous bousculent.


Entendons donc ce que le Seigneur nous dit en ce jour de Pentecôte : « J'ai tout accompli et je t'ai donné mon Esprit. Maintenant, à toi jouer ! Sois mon témoin ! »

dimanche 24 mai 2015

Le fruit de l'Esprit : un défi du quotidien

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Galates 5.16-25 (TOB)
Ecoutez-moi : marchez sous l’impulsion de l’Esprit et vous n’accomplirez plus ce que la chair désire. Car la chair, en ses désirs, s’oppose à l’Esprit – et l’Esprit à la chair ; entre eux, c’est l’antagonisme– pour que, ce que vous voulez faire, vous ne le fassiez pas. Mais si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes plus soumis à la loi.
On les connaît, les œuvres de la chair : libertinage, impureté, débauche, idolâtrie, magie, haines, discorde, jalousie, emportements, rivalités, dissensions, factions, envie, beuveries, ripailles et autres choses semblables ; leurs auteurs, je vous en préviens, comme je l’ai déjà dit, n’hériteront pas du Royaume de Dieu.
Mais voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi, douceur, maîtrise de soi ; contre de telles choses, il n’y a pas de loi. Ceux qui sont au Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses désirs. Si nous vivons par l’Esprit, marchons aussi sous l’impulsion de l’Esprit. 


Pentecôte, c'est la commémoration d'un événement majeur de l'histoire de l’Église, c'est même son événement fondateur : la descente du Saint-Esprit sur les croyants. Le livre des Actes des apôtres nous en fait le récit et en souligne le caractère spectaculaire.

Mais depuis ce jour, le Saint-Esprit habite chaque croyant, tous les jours, dans la banalité de notre quotidien, loin parfois de la gloire et de l'éclat du jour de Pentecôte. Pour l'évoquer, l'apôtre Paul parle de fruit de l'Esprit.


Ce n'est pas une option !

Mais commençons par la fin de notre texte et sa conclusion en forme d'exhortation forte et sans ambiguïté : « Si nous vivons par l’Esprit, marchons aussi sous l’impulsion de l’Esprit. » (v.25) Une exhortation qu'on pourrait transcrire ainsi, de façon prosaïque : il ne suffit pas d'être chrétien, il faut que ça se voie dans notre conduite. Bref, le fruit de l'Esprit n'est pas une option !

Vivre par l'Esprit, c'est avoir reçu la vie éternelle, le don gratuit de Dieu, son salut. C'est être chrétien, au sens le plus fort du terme. Et c'est bien l'oeuvre de l'Esprit.

Marcher par l'Esprit (ou sous l'impulsion de l'Esprit), c'est voir sa vie changée par Dieu, avoir un comportement conséquent avec notre foi. Et c'est aussi l'oeuvre de l'Esprit.

Voilà pourquoi le fruit de l'Esprit n'est pas une option mais un impératif pour le chrétien, qui est tout entier au bénéfice de l'oeuvre du Saint-Esprit. Du début de sa vie chrétienne jusqu'à la fin. L'oeuvre de l'Esprit, c'est de semer la vie éternelle en nous et de la faire germer pour nous amener à porter du fruit pour la gloire de Dieu. On ne peut pas se contenter de vivre par l'Esprit, il nous faut marcher par l'Esprit.

Mais si l'exhortation est là, c'est que ce n'est pas si évident que cela dans la pratique...


C'est un combat

La preuve : il y a un combat, une lutte au quotidien. Paul parle d'un antagonisme entre la chair et l'Esprit. Dans le langage de l'apôtre, la chair, c'est notre être en tant qu'humain pécheur. C'est ce que nous sommes tous, loin de Dieu, marqués par le péché. L'Esprit, ici, c'est le Saint-Esprit, qui renouvelle notre être intérieur.

L'un et l'autre n'agissent pas de la même façon en nous. La chair est là, en chacun de nous. Et elle nous pousse, par des pulsions, des envies, des inclinations. C'est cette part de nous-mêmes qui fait dire à l'apôtre Paul en Romains 7 : « Ce que je veux, je ne le fais pas, et ce que je déteste, je le fais. » (Romains 7.15) On connaît tous cette lutte contre la tentation, ce combat pour ne pas nous laisser emporter par des pulsions contraires à ce que Dieu attend de nous.

L'Esprit saint, lui, vient habiter le croyant. Il s'installe, il remplit le chrétien petit à petit pour le changer de l'intérieur. Il est comme un nouveau moteur à notre vie, qui nous donne une nouvelle impulsion. Et il peut nous donner la force de résister et de contrer les inclinations de la chair.

La chair produit des œuvres. C'est ce que nous sommes tout à fait capables de faire par nous-mêmes... malheureusement ! L'Esprit produit du fruit. C'est ce qui grandit naturellement en nous lorsque l'Esprit de Dieu agit. C'est la conséquence naturelle de la semence de vie de l'Esprit, plantée en nous.

Tout l'art de la vie chrétienne, c'est d'apprendre à ce que nos œuvres deviennent le fruit de l'Esprit... alors que naturellement, notre vie est le fruit de nos pulsions et de nos envies, pas toujours saintes. C'est un combat de tous les jours, dans le quotidien. Mais c'est une lutte qui en vaut la peine parce qu'ils sont beaux les fruits produits par l'Esprit, et ils sont bons pour nous et ceux qui nous entourent.


Dans le quotidien

La force de ce texte, c'est de nous parler du quotidien de la vie dans l'Esprit saint. On a quitté le côté spectaculaire de l'événement de la Pentecôte pour la banalité du quotidien et de ses luttes. Un quotidien qui peut être sombre ou lumineux, selon que s'exprime la chair ou l'Esprit. Car notre vie est tiraillée entre ces deux pôles. Entre ce que nous sommes encore (les œuvres de la chair) et ce que Dieu par son Esprit veut faire de nous (le fruit de l'Esprit).

Comme le dit l'apôtre Paul, les œuvres de la chair, on les connaît. Et pas seulement chez les autres ! Cette liste nous est familière... On ne les rencontre bien-sûr pas toutes en même temps chez la même personne ou dans la même Église ! Mais on les connaît...

Ces « œuvres de la chair » qui sont aussi parfois notre quotidien, sont multiformes : sexuelles, spirituelles, relationnelles surtout. Elles se manifestent dans les comportements dépravés, conflictuels, excessifs qui n'affectent pas seulement ceux qui les commettent mais aussi ceux qui les subissent. Et elles se manifestent aussi, reconnaissons-le, dans nos Églises et dans nos vies.

Le fruit de l'Esprit, on l'oublierait presque. Parce qu'il n'a rien de spectaculaire et s'inscrit simplement dans notre quotidien. Franchement, il n'y a rien de surhumain dans l'amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la confiance, la douceur ou la maîtrise de soi. Rien de surhumain... et pourtant c'est si difficile de s'y tenir avec persévérance.

Et c'est bien dans notre quotidien que cela se joue. Cette liste du fruit de l'Esprit évoque toutes des qualités relationnelles. L'oeuvre du Saint-Esprit dans notre vie se manifeste dans la qualité de nos relations avec notre prochain. Les manifestations spectaculaires du Saint-Esprit ont été données parfois par Dieu dans l'histoire de son Église, à commencer par le jour de la Pentecôte. Mais l'enjeu principal de l'oeuvre de l'Esprit se joue dans notre quotidien, dans la banalité de notre vie de tous les jours.

Quand on nous regarde, quand on nous voit vivre au travail, avec les amis, dans notre famille, que voit-on ? Qu'est-ce qui caractérise notre relation à nos prochains ? Pas seulement le dimanche matin au culte mais aussi le lundi matin au bureau, le vendredi soir en rentrant à la maison ou le samedi après-midi dans nos loisirs ? C'est là que se manifeste on non le fruit de l'Esprit...


Conclusion

L'événement de la Pentecôte relaté dans le livre des Actes des apôtres est l'événement fondateur de l'histoire de l’Église. Il est l'accomplissement de la promesse de Jésus-Christ : ressuscité et assis auprès du Père, il envoie son Esprit pour être toujours avec nous.

Mais la réalité de la Pentecôte, pour nous aujourd'hui, se vit le plus souvent dans la banalité de notre quotidien. Un quotidien de luttes et de combat, car l'antagonisme entre la chair et l'Esprit est le lot de tous les chrétiens, jusqu'à notre dernier jour. Nous vivons dans une tension, source parfois de frustration, entre ce que nous sommes encore et ce que nous sommes appelés à devenir en Christ.

Mais notre quotidien est aussi fait de victoires, petites ou grandes, qui sont autant de marques de l'oeuvre en profondeur de l'Esprit de Dieu. C'est le fruit de l'Esprit, témoignage que le Christ vivant habite en nous.