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dimanche 14 avril 2024

Vivre dans la lumière

 

1 Jean 1.5-2.2
5 Voici le message que nous avons entendu de Jésus Christ et que nous vous annonçons : Dieu est lumière et il n'y a aucune obscurité en lui.
6 Si nous prétendons être en communion avec lui, alors que nous vivons dans l'obscurité, nous sommes menteurs, nous n'agissons pas selon la vérité. 7 Mais si nous vivons dans la lumière, comme Dieu lui-même est dans la lumière, alors nous sommes en communion les uns avec les autres. Et Jésus, son Fils qui a versé son sang, nous purifie de tout péché.
8 Si nous prétendons être sans péché, nous nous trompons nous-mêmes et la vérité n'est pas en nous. 9 Mais si nous reconnaissons nos péchés, nous pouvons avoir confiance en Dieu, car il est juste : il pardonnera nos péchés et nous purifiera de tout mal.
10 Si nous prétendons que nous n'avons pas commis de péché, nous faisons de Dieu un menteur et sa parole n'est pas en nous.
1 Mes enfants, je vous écris ceci afin que vous ne commettiez pas de péché. Mais si l'on vient à en commettre, nous avons quelqu'un qui nous vient en aide auprès du Père : Jésus Christ, le juste. 2 Car Jésus Christ s'est offert en sacrifice pour le pardon de nos péchés, et non seulement les nôtres, mais aussi les péchés du monde entier.

L’affirmation fondamentale de ce passage se trouve à son début, au verset 5 : Dieu est lumière et il n'y a aucune obscurité en lui.  L’affirmation est massive et absolue. Les deux parties se répondent : la première est positive (Dieu est lumière), la seconde négative (il n’y a aucune obscurité en lui) pour exclure toute atténuation de la première. On pourrait dire : Dieu est lumière, et il l’est de façon absolue. Rien ne vient atténuer ne serait-ce qu’un tout petit peu sa lumière. La lumière, ici, évoque la perfection, la pureté, la sainteté absolue de Dieu. 

Quand vous entendez une telle affirmation, comment réagissez-vous ? On peut se sentir tout petit voire mal à l’aise. Parce que si Dieu est lumière et qu’il n’y a aucune obscurité en lui, ce n’est certainement pas le cas pour nous ! 

On peut difficilement dire que, dans tous les aspects de notre vie, jusqu’au plus profond de notre cœur, nous ne sommes que lumière… et qu’il n’y a aucune obscurité en nous ! On a tous nos zones d’ombres, qu’on essaye en général de cacher, pour que les autres ne s’en rendent pas compte… On a tous des parties de notre vie, des aspects de notre personnalité, des pensées et des intentions dont on n’est pas vraiment fiers ! 

Et si moi je suis loin de n’être que lumière, sans aucune obscurité, alors comment pourrais-je prétendre connaître, aimer et être aimé par un Dieu qui, lui, n’est que lumière, sans aucune obscurité ? La suite du passage semble aller dans ce sens. : « Si nous prétendons être en communion avec lui, alors que nous vivons dans l'obscurité, nous sommes menteurs, nous n'agissons pas selon la vérité. »

Aïe. Est-ce à dire qu’il faut que je règle d’abord tous mes problèmes, que je révèle mes zones d’ombres, que je laisse mes parts sombres être transformées et purifiées, bref que je n’ai plus aucune obscurité en moi avant de pouvoir prétendre à une quelconque communion avec Dieu ? 

Mais la suite va corriger cette impression. Le verset 7 déclare : « Mais si nous vivons dans la lumière, comme Dieu lui-même est dans la lumière, alors nous sommes en communion les uns avec les autres. Et Jésus, son Fils qui a versé son sang, nous purifie de tout péché. »

Cette dernière affirmation change tout ! En effet, de qui Jean dit-il que Jésus les purifie de tout péché ? De ceux qui vivent dans la lumière ! Vivre dans la lumière ne signifie donc pas avoir une vie parfaite, sans aucun reproche, puisqu’il y a encore besoin d’être purifié de son péché. 

Que signifie donc « vivre dans la lumière » ?  


Vivre dans la lumière, c’est vivre dans la vérité 

Vivre dans la lumière, ce n’est pas vivre dans la perfection – c’est impossible ! – mais c’est vivre dans la vérité. Il est en effet beaucoup question de vérité et de mensonge dans notre passage. 

« Si nous prétendons être sans péché, nous nous trompons nous-mêmes et la vérité n'est pas en nous. » (v.8)

On pourrait dire que se croire sans péché est un péché ! C’est un mensonge que de prétendre que nous sommes sans péché. C’est même un double mensonge : contre nous-mêmes et contre Dieu. Jean ajoute en effet, au verset 10 :

« Si nous prétendons que nous n'avons pas commis de péché, nous faisons de Dieu un menteur et sa parole n'est pas en nous. » (v.10)

Vivre dans la vérité, c’est être lucide sur soi-même, ne pas se faire d’illusion. C’est une démarche d’humilité, une conscience de nos limites et de nos faiblesses. C’est compter sur Dieu pour mettre en lumière ce qui doit l’être dans notre vie, pour discerner ce qui est bon ou mauvais. 

Il y a là une mise en garde contre un orgueil spirituel, qui serait finalement du même ordre que celui qui nous est décrit dans le jardin d’Eden, lorsque le serpent met en doute la parole de Dieu et dit à Eve à propos de l’arbre qui est au centre du jardin : « Pas du tout, vous ne mourrez pas ! Mais Dieu le sait bien : dès que vous en aurez mangé, vous verrez les choses telles qu'elles sont, vous serez comme lui, capables de savoir ce qui est bon et ce qui est mauvais. » (Genèse 3.4-5)

En d’autres termes : Dieu vous a menti et vous pouvez très bien décider tout seul de ce qui est bon ou mauvais, vous pouvez vous débrouiller seul, vous passer de Dieu ! En cédant à la tentation du serpent, Eve, puis Adam, se sont trompés eux-mêmes et ont fait Dieu menteur. Exactement ce que Jean dit dans notre texte. 

Cela nous donne l’occasion de rappeler que le péché, d’un point de vue biblique, n’est pas d’abord une question morale mais spirituelle. Le péché, c’est tout ce qui nous éloigne de Dieu. En croyant pouvoir se passer de Dieu, Adam et Eve ont brisé leur communion avec leur Créateur. Ils se sont coupés de Dieu. 

Vivre dans la lumière, au contraire, c’est choisir de vivre dans la présence de Dieu. 


Vivre dans la lumière, c’est vivre avec Dieu

Être lucide sur soi-même ne doit pas pour autant nous conduire à baisser les bras. Il s’agit bien de s’efforcer de vivre avec Dieu. Mais il y a une tension inévitable que Jean exprime bien au début du chapitre 2 :

1 Jean 2.1-2
1 Mes enfants, je vous écris ceci afin que vous ne commettiez pas de péché. Mais si l'on vient à en commettre, nous avons quelqu'un qui nous vient en aide auprès du Père : Jésus Christ, le juste. 2 Car Jésus Christ s'est offert en sacrifice pour le pardon de nos péchés, et non seulement les nôtres, mais aussi les péchés du monde entier. 

Pour vivre avec Dieu, il s’agit bien, pour le croyant, de chercher à conformer sa vie à la volonté de Dieu : « je vous écrit ceci afin que vous ne commettiez pas de péché. » Mais il ne faut pas se faire d’illusion sur nous-mêmes. Même avec toute la bonne volonté du monde, le péché nous rejoint d’une manière ou d’une autre. Le Seigneur le sait, et il a tout prévu : « Mais si l'on vient à en commettre, nous avons quelqu'un qui nous vient en aide auprès du Père : Jésus Christ, le juste. »

Voilà la promesse de Dieu ! Il a pourvu à tout par Jésus-Christ. C’est lui qui a été juste pour nous ! Le Christ est là pour nous venir en aide. Le terme utilisé ici pour désigner le Christ est le même que Jésus a utilisé pour parler du Saint-Esprit, qui vient nous consoler, nous secourir, nous défendre. 

Par son Esprit, le Christ est là pour nous venir en aide. On peut vivre avec Dieu… parce que Dieu vit avec nous. 

Vivre dans la lumière, c’est donc vivre avec Dieu, vivre en sa présence. Et il est là, venant à notre aide, nous accordant sa grâce. La lumière de la présence de Dieu dans notre vie n’est pas inquisitrice mais libératrice, elle n’est pas là pour accuser mais pour pardonner.  « Si nous reconnaissons nos péchés, nous pouvons avoir confiance en Dieu, car il est juste : il pardonnera nos péchés et nous purifiera de tout mal. » (v.9)

Ne nous inquiétons pas de la portée de la grâce de Dieu manifestée en Jésus-Christ : elle est universelle. Le Christ s’est offert en sacrifice : le problème du péché est définitivement réglé. Et c’est le cas pour toutes celles et tous ceux qui viennent à lui. Comme l’affirme Jean, il s’agit du pardon de nos péchés « et non seulement les nôtres, mais aussi les péchés du monde entier. » (v.2) !


Conclusion

« Dieu est lumière et il n'y a aucune obscurité en lui. »

Ce qui pouvait être perçu, dans un premier temps, comme quelque chose d’intimidant voire d’inquiétant, est au contraire bienfaisant et réconfortant. La lumière absolue de Dieu n’est pas inquisitrice mais libératrice. 

Ce que Jean associe à la lumière de Dieu n’est pas le jugement mais le pardon, ce n’est pas la condamnation mais la grâce. C’est précisément ce qui nous permet d’être vrais devant Dieu, d’être nous-mêmes, tels que nous sommes, avec nos failles, nos faiblesses, nos imperfections… même notre péché. 

La lumière de Dieu est bienveillante. Dire qu’il n’y a aucune obscurité en Dieu, c’est dire aussi qu’il n’y a aucune malveillance en lui. 

Nous n’avons aucune crainte à avoir à nous exposer à la lumière de Dieu. Il connaît nos zones d’ombres, nous ne pouvons pas les lui cacher. Mais ça n’enlève rien à son amour pour nous et à ses promesses de grâce. Au contraire, par son Esprit, il veut toujours nous venir en aide. 

Vivre dans la lumière est une promesse, celle de pouvoir être soi-même devant Dieu, et de vivre avec lui, c’est-à-dire avec son aide. 


dimanche 17 mars 2024

Vivre l’alliance nouvelle aujourd’hui

 

Le rôle premier des prophètes dans l’Ancien Testament était d’interpeller leurs contemporains au nom du Seigneur. Pour cela, ils dénonçaient les infidélités et les injustices commises par le peuple d’Israël et/ou de Juda, et en particulier leurs responsables. Ils les invitaient alors à la repentance, c’est-à-dire un retour à Dieu et un changement de comportement. Et ils associaient à ce retour à Dieu des promesses de la part du Seigneur. 

Petit à petit a émergé dans le message des prophètes bibliques l’attente d’une alliance nouvelle, une alliance qui permettrait d’être vraiment au plein bénéfice de la grâce de Dieu, une alliance qui serait scellée par le Messie, c’est-à-dire celui que Dieu choisirait pour accomplir son projet. 

Le Nouveau Testament présente Jésus comme le Christ, c’est-à-dire le Messie. Et c’est par lui, par son œuvre, par sa mort et sa résurrection, puis par l’envoi de l’Esprit saint, que la nouvelle alliance est scellée. C’est ce que nous allons rappeler dans quelques jours, lors de la fête de Pâques, puis quelques jours après avec celle de Pentecôte. 

Pour nous préparer à ce temps de Pâques, il est pertinent de nous remettre à l’écoute de l’annonce de cette alliance nouvelle. Et parmi les prophètes, Jérémie est l’un de ceux qui l’a annoncée avec le plus de force. 

Jérémie 31.31-34
31 Voici les jours viennent, déclare le Seigneur, où je conclurai une alliance nouvelle avec le peuple d'Israël et le peuple de Juda. 32 Elle ne sera pas comme celle que j'avais conclue avec leurs ancêtres, quand je les ai pris par la main pour les faire sortir d'Égypte. Cette alliance, ils l'ont rompue, alors même que j'étais leur maître, dit le Seigneur. 33 L'alliance que je conclurai avec le peuple d'Israël consistera en ceci, déclare le Seigneur : J'inscrirai mon enseignement, dans leur conscience ; je le graverai dans leur cœur ; je serai leur Dieu et ils seront mon peuple. 34 Personne n'aura plus besoin d'instruire ses proches en disant : « Apprends à connaître le Seigneur. » Car du plus petit jusqu'au plus grand, tous me connaîtront, déclare le Seigneur. Et je pardonnerai leurs torts, je ne me souviendrai plus de leurs fautes.

L’alliance nouvelle annoncée par le prophète n’est pas radicalement différente de la première. Mais elle va plus loin, et d’une certaine façon, elle vient en combler les limites. 

Quelles sont les marques de cette alliance nouvelle ? On peut en distinguer trois principales :

  • L’intériorité et l’intimité. L’enseignement du Seigneur sera gravé non plus sur des tablettes de pierre mais sur les cœurs, créant ainsi une intimité nouvelle avec Dieu. 
  • L’universalité. Il n’y aura plus besoin d’instruire les autres car tout le monde connaîtra le Seigneur, du plus petit au plus grand. 
  • Un pardon définitif. Dieu pardonnera nos torts, il ne se souviendra pas de nos fautes.  Le problème du péché sera définitivement réglé.

Pour le Nouveau Testament, cette alliance nouvelle s’accomplit en Christ et est scellée en nous par le Saint-Esprit. 

  • L’intériorité et l’intimité. Le Fils de Dieu révèle le Père, Jésus-Christ rend visible le Dieu invisible. Nous entrons dans l’intimité de Dieu… Et par le Saint-Esprit, il vient habiter notre cœur et fait de nous des enfants de Dieu. Une relation dans l’intimité est désormais possible, nous pouvons l’appeler Abba, Père. 
  • L’universalité. Il y a un seul médiateur entre Dieu et les êtres humains : Jésus-Christ, le Fils de Dieu devenu homme. Celles et ceux qui croient en lui forment le peuple de la nouvelle alliance, un peuple issu de tous les peuples. 
  • Un pardon définitif. La mort et la résurrection du Christ règle de manière définitive le problème du péché. Sa mort est le sacrifice parfait : il a donné sa vie pour nous, lui l’innocent pour nous pécheurs. Par sa résurrection, il a vaincu la mort. En lui nous avons le pardon et la vie éternelle. 

Cette alliance nouvelle est bien accomplie en Christ, appliquée à notre vie par le Saint-Esprit. Ou du moins, c’est une œuvre en cours…. Pour nous, c’est un idéal, un horizon… qu’on n’atteint pas pleinement aujourd’hui encore. Il s’accomplira pleinement pour nous au jour de la résurrection. 

Tout est là, potentiellement. Grâce à l’œuvre accomplie par le Christ, mort et ressuscité. Grâce au don du Saint-Esprit qui vient faire sa demeure en nous. Tout est là, mais comment est-ce que je peux le recevoir pleinement ? Quelles leçons spirituelles pouvons-nous en tirer pour nous aujourd’hui ? 


Vivre l’alliance nouvelle aujourd’hui

L’intériorité et l’intimité

La promesse d’avoir l’enseignement du Seigneur gravé non plus sur des tablettes de pierre mais sur nos cœurs est bien une promesse d’intimité nouvelle avec Dieu. Cette intimité est rendue possible par le Saint-Esprit qui vient faire sa demeure en nous : c’est lui qui inscrit la loi du Seigneur dans notre cœur.  

Accomplir la volonté de Dieu n’est plus un impératif religieux qui demande des efforts. C’est une aspiration inscrite au plus profond de nous. C’est notre vœu le plus cher, ce que nous voulons de tout notre cœur ! 

En tout cas, ça devrait être le cas… ou ça peut le devenir de plus en plus… Ce qui nous invite à nous interroger : Qu’est-ce qui nous motive dans notre vie chrétienne ? Qu’est-ce qui nous anime ? Quel est notre moteur ? 

Je crains que, bien souvent, ce soit le devoir. Si je suis chrétien, alors je dois faire ceci ou cela. Je dois aller au culte le dimanche. Je dois lire la Bible et prier. Je dois aimer mon prochain. C’est bien d’avoir le sens du devoir… mais si c’est tout ce qui nous motive, nous allons finir par nous fatiguer ou nous décourager. Sans compter que le devoir peut nous conduire à la culpabilité (parce qu’on n’arrive jamais vraiment à faire tout ce qu’on devrait faire) ou à la peur (que va-t-il m’arriver si je ne fais pas ce que je dois ?). 

Et si, plutôt que le devoir, notre moteur était l’amour ? Finalement, c’est bien cela le double commandement fondamental : aimer Dieu et aimer notre prochain. Et justement, l’alliance nouvelle se joue dans le cœur. Attention, en parlant de cœur et d’amour, on ne parle pas d’émotions et de sentiments seulement. Dans la Bible, le cœur, c’est le centre de notre être intérieur, le siège de notre volonté, de nos aspirations profondes, de nos motivations. 

Et l’amour, ça s’entretient, dans une relation vivante. C’est là que doit se trouver le moteur de notre vie chrétienne : dans notre relation à Dieu (l’intimité de la première marque de l’alliance nouvelle) et notre relation à notre prochain. 


L’universalité

L’universalité dont parle le prophète Jérémie pour l’alliance nouvelle est avant tout sociale : il n’y aura plus des enseignants et des enseignés, des sachants et des ignorants. Tout le monde connaîtra le Seigneur, du plus petit au plus grand. Connaître le Seigneur n’est pas une question d’âge, d’intelligence ou de savoir. 

Le Nouveau Testament élargira encore cette universalité à toutes les dimensions humaines, culturelles, ou autres.  

Qui que tu sois, quelles que soient tes origines, ta langue ou ta culture, quelles que soient ton éducation, ton instruction, tes compétences ou tes connaissances, tu as ta place dans ce peuple issu de tous les peuples. La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ est pour toi. Tu peux la recevoir, l’accueillir par la foi. 

C’est ce que l’apôtre Paul dira dans son épître aux Galates : « Il n'y a plus ni Juif ni païen, il n'y a plus ni esclave ni citoyen libre, il n'y a plus ni homme ni femme ; en effet, vous êtes tous un, unis à Jésus Christ. » (Galates 3.28)

C’est aussi la formidable vision du peuple de Dieu dans Apocalypse 7.9 : « Je vis une foule immense que personne ne pouvait compter. C'étaient des gens de tout pays, de toute tribu, de tout peuple et de toute langue. Ils se tenaient devant le trône et devant l'agneau, vêtus de vêtements blancs et avec des branches de palmiers à la main. »

Le défi, bien-sûr, est de vivre cette promesse ensemble, de l’incarner dans l’Eglise. L’universalité est un défi majeur pour l’Eglise : comment le relevons-nous ? Comme s’exprime la diversité de nos origines, de nos cultures, de nos éducations, de nos personnalités ? Et comment toutes celles et tous ceux qui le veulent trouvent leur place et s’épanouissent dans l’Eglise ? 


Un pardon définitif

On peut parler de pardon définitif parce que, par la mort et la résurrection du Christ, le problème du péché est réglé, définitivement. On ne revient plus dessus. Comme la TOB traduit la fin de Jérémie 31.34 : « Je pardonne leur crime ; leur faute, je n’en parle plus. »

L’apôtre Paul le dira avec force aux chrétiens de Rome : « Tous ont péché et sont privés de la présence glorieuse de Dieu. Mais Dieu, par sa grâce, les rend justes, gratuitement, par Jésus Christ qui les délivre de leur esclavage. » (Romains 3.23-24)

Par Jésus-Christ, le problème du péché est réglé, définitivement. Mais alors pourquoi est-ce qu’on revient toujours sur le péché ? Pourquoi est-ce qu’on réduit si souvent la foi chrétienne à des questions de morale ou d’interdits ? Pourquoi est-ce qu’on laisse si souvent la culpabilité nous envahir ? Pourquoi a-t-on tant de mal à accueillir et vivre la grâce ? 

Je ne dis pas, évidemment, que la vie chrétienne n’est pas aussi une question de valeurs et même de morale. Je dis simplement qu’elle est d’abord une question de relation, relation à Dieu et relation au prochain. Et le péché, dans la Bible, c’est avant tout ce qui brise cette relation à Dieu et à mon prochain. 

L’affirmation du pardon, de la résolution définitive du problème du péché, nous invite à vivre la grâce, à en saisir toute la puissance libératrice, dans notre relation à Dieu, et dans nos relations les uns aux autres. 


Conclusion

L’alliance nouvelle annoncée par Jérémie est une formidable promesse. Une promesse qui s’est accomplie en Jésus-Christ, par sa mort et sa résurrection. Une promesse que l’Esprit saint veut appliquer à notre vie. 

C’est la promesse d’une intimité nouvelle avec Dieu, dans une relation filiale, où nous pouvons appeler Dieu notre Père. Un Père qui nous aime et prend soin de nous. 

C’est la promesse d’une universalité à vivre. Car la Bonne Nouvelle est pour toutes et tous, qui que nous soyons, du plus petit au plus grand, dans la mosaïque de toutes les couleurs de nos vies. 

C’est la promesse de la grâce, par lequel le problème du péché est réglé, définitivement. Nous n’avons pas à essayer de nous racheter ou de nous justifier. Nous avons juste à accueillir la grâce que Dieu nous offre. Il a payé le prix : Jésus-Christ est mort et ressuscité. 

Pour nous préparer à Pâques, dans deux semaines, il est bon de se souvenir de toutes ces promesses, car elles découlent directement de la mort et la résurrection de Jésus-Christ que nous allons commémorer.  


dimanche 19 février 2023

Tu aimeras ton prochain (qui est) comme toi-même !

> Ecouter la prédication

Un jour, un chef religieux a posé une question piège à Jésus : Quel est le plus grand commandement ? 

C’était une question piège parce que la Bible, dans sa première partie qu’on appelle le Pentateuque (que les Juifs désignent par le terme Torah, la Loi), contient de nombreux commandements. Aujourd’hui, dans la tradition Juive, on en dénombre 613. Alors lequel désigner comme le plus grand, sans dénigrer les autres ? Voilà le piège !

Matthieu 22.37-38
37 Jésus lui répondit : “Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de tout ton être et de toute ta pensée.” 38 C'est là le commandement le plus grand et le plus important. 

Ce début de réponse de la part de Jésus est une évidence. Le commandement qu’il cite se trouve en Deutéronome 6.5 et il fait partie du Shema Israël, ce texte biblique récité par tout croyant Juif deux fois par jour, le matin et le soir. 

Là où Jésus peut surprendre, c’est dans la suite de sa réponse, lorsqu’il ajoute un deuxième commandement :

Matthieu 22.39-40
39 Et voici le second commandement, qui est d'une importance semblable : “Tu aimeras ton prochain comme toi-même.” 40 Toute la loi de Moïse et tout l'enseignement des prophètes dépendent de ces deux commandements. »

Pour Jésus, ce deuxième commandement est d’une importance semblable au premier. L’un ne peut aller sans l’autre. Mais le choix de ce commandement, s’il paraît aujourd’hui évident pour les chrétiens, ne l’était pas forcément à l’époque. C’était, en effet, un commandement bien moins connu que le premier. Jésus va le chercher dans le livre du Lévitique, en plein milieu du chapitre 19, qui contient toute une série de prescriptions et de règles très variées. 

Il serait un peu long de lire tout le chapitre mais il y est question, en vrac, de plusieurs règles sociales (ne pas voler, tromper ou exploiter les autres, être solidaire des plus pauvres…), religieuses (interdit de l’idolâtrie, sur la façon de manger les viandes sacrifiées…) et même des prescriptions agricoles (sur la façon d’accoupler les bêtes ou de récolter les fruits des arbres fruitiers) ou corporelles (sur la façon de couper ses cheveux ou de tailler sa barbe, ne pas se faire d’incisions sur le corps…). Ça brasse large ! 

Et au milieu de toutes ces prescriptions, on trouve le commandement cité par Jésus : 

Lévitique 19.17-18
17 N'aie aucune pensée de haine contre un autre Israélite, mais n'hésite pas à le réprimander, afin de ne pas te charger d'un péché à son égard. 18 Ne te venge pas et ne garde pas de rancune contre les membres de ton peuple. Chacun de vous aimera son prochain comme lui-même. Je suis le Seigneur.

Les derniers mots, « Je suis le Seigneur », résonnent comme un refrain tout au long du chapitre. La formule y apparaît 15 fois et fait écho aux premiers versets du chapitre : 

Lévitique 19.1-2
1 Le Seigneur dit à Moïse : 2 « Communique ceci à toute la communauté d'Israël :
Soyez saints, car je suis saint, moi, le Seigneur votre Dieu ! »

Qu’est-ce que nous apporte la prise en compte du contexte dans lequel est situé le commandement cité par Jésus pour sa compréhension ? 


Au cœur de notre quotidien

Le fait que ce commandement soit un peu « perdu » au milieu de considérations de tous ordres est significatif. C’est au cœur du quotidien qu’il s’agit de le vivre et le mettre en pratique. Les implications de ce commandement général d’aimer son prochain sont multiples et concernent, finalement, à peu près toutes les sphères de notre vie. 

Il y a des circonstances où c’est évident : quand on vient en aide à quelqu’un, quand on prend soin de lui, qu’on l’écoute ou l’encourage… Mais ne devrait-on pas, finalement, considérer toute notre vie comme une occasion d’aimer notre prochain ? Non seulement par nos engagements au service des autres mais aussi dans la façon d’envisager notre travail, notre rapport aux autres, notre participation à la société dans laquelle nous vivons… 

Aimer son prochain, c’est d’abord une façon de voir et d’accueillir l’autre, une façon d’être en face ou à côté de lui. Aimer son prochain, c’est aussi d’abord le respect, l’accueil, l’ouverture à l’autre. Le contraire des réflexes de repli, qu’ils soient identitaires, communautaristes ou sectaires. 


Ni vengeance ni rancune

Si on resserre le contexte du commandement cité par Jésus, on se rend compte qu’il est comme une conclusion de la section constituée des versets 17-18.  

Littéralement, au verset 17 : « Tu ne détesteras pas ton frère dans ton cœur ». Et ensuite : « avertir tu avertiras ton compatriote… » C’est une formule hébraïque utilisée pour accentuer la force du verbe. La NFC traduit « n’hésite pas à le réprimander », on pourrait dire aussi : « il faudra que tu l’avertisses ». 

Ne pas nourrir de haine, de jalousie ou de ressentiment envers son prochain, ça ne signifie pas s’en désintéresser ou s’en désolidariser. S’il le faut, il ne faut pas hésiter à le reprendre ou l’avertir. Ça éclaire utilement la notion de l’amour du prochain. Il ne s’agit pas seulement de refuser de le détester mais de l’aimer. Ce qui ne signifie pas qu’on justifie et qu’on approuve tout ce qu’il fait. Aimer c’est aussi avertir et mettre en garde quand il le faut. 

Le verset 18 évoque la situation où notre prochain nous a causé du tort. « Ne te venge pas et ne garde pas rancune. » Même si le pardon peut être sous-entendu dans cette formule, ce n’est pas pour autant une injonction au pardon. Il y a d’autres éléments nécessaires pour qu’une démarche de pardon soit possible, sans compter le facteur temps. En revanche, il y a ici un appel à refuser de se venger, de se faire justice soi-même, d’entrer dans une surenchère. Il y a aussi un appel à ne pas laisser la rancune prendre racine en nous, justement parce qu’elle pousse au ressentiment voire à la vengeance.  

Si pardonner est sans doute une des formes ultimes de l’amour, ça demande du temps et on ne peut jamais l’exiger. Mais refuser la vengeance et ne pas laisser la rancune prendre racine en nous est bien une double discipline à mettre en œuvre par tous. C’est une façon d’aimer notre prochain car notre prochain aussi, parfois, nous cause du tort voire nous fait du mal. Comme Jésus le dira bien dans les Evangiles : « Si vous n’aimez que ceux qui vous aiment, quelle récompense méritez-vous ? » (Matthieu 5.46) 


Comme toi-même… 

Comment comprendre la formule « comme toi-même » ? On entend parfois cette formule comme un appel à aimer notre prochain comme on s’aime soi-même. Et on dit que pour aimer son prochain il faut aussi voire d’abord s’aimer soi-même... 

Mais est-ce légitime de considérer l’amour de soi comme fondement pour l’amour du prochain ? Je n’en suis pas convaincu du tout ! Ça me semble être un fondement bien fragile… 

C’est là que le contexte peut encore nous aider car un peu plus loin, au verset 34 du même chapitre, on retrouve la formule « tu l’aimeras comme toi-même ». 

Lévitique 19.33-34
33 Quand un immigré viendra s'installer dans ton pays, ne l'exploitez pas ; 34 au contraire, traitez-le comme s'il était un membre de votre peuple : tu l'aimeras comme toi-même. Rappelez-vous que vous avez aussi été immigrés en Égypte. Je suis le Seigneur votre Dieu.

Ici, ce n’est pas le prochain en général qui est concerné par la formule mais un prochain particulier, à savoir l’immigré : « Traitez-le comme s'il était un membre de votre peuple : tu l'aimeras comme toi-même. » et le texte ajoute : « Rappelez-vous que vous avez aussi été immigrés en Égypte. »

En réalité, ici, le texte dit aux Israélites que les immigrés sont comme eux, leur égal. Il faut les traiter comme s’ils étaient membre du même peuple et il faut que les Israélites se souviennent qu’ils ont eux-mêmes été immigrés, comme eux. 

« Aime ton prochain comme toi-même », ce n’est donc pas « aime ton prochain comme tu t’aimes toi-même » mais plutôt « aime ton prochain (qui est) comme toi-même » !

Pourquoi aimer mon prochain ? Parce qu’il est comme moi, il est fait de la même pâte que moi, il est mon semblable, égal en dignité. Quel qu’il soit. Il est comme moi, créé par Dieu et aimé par lui. Ce qui fonde mon amour pour lui, ce n’est pas du tout l’amour que j’ai pour moi-même ! C’est l’amour que Dieu a pour lui. 

On comprend bien alors pourquoi Jésus a lié de manière inséparable l’amour pour Dieu et l’amour pour le prochain. Pourquoi aimer Dieu de tout notre cœur ? Parce que Dieu lui-même nous aime ! Et pourquoi aimer mon prochain qui est comme moi ? Parce que Dieu l’aime comme il m’aime !  

D’ailleurs, par amour Dieu est devenu comme moi. Le Fils de Dieu s’est fait être humain. Comme moi… 


Conclusion

On pourrait s’étonner de voir un commandement nous inciter à aimer. Est-ce qu’on peut vraiment décider d’aimer ? Oui ! Et c’est même nécessaire. Car il ne faut pas considérer l’amour comme étant simplement une émotion ou un sentiment. L’amour c’est ma façon d’être avec l’autre. 

Je peux aimer mon conjoint dont je suis tombé amoureux, je peux aimer mon ami qui m’accompagne depuis des années, je peux aimer mon frère ou ma sœur en Christ qui partage la même foi que moi, je peux même aimer celui ou celle que je ne connais pas, voire qui ne m’aime pas… 

Evidemment, l’amour ne sera pas le même dans tous les cas. Je ne peux pas me forcer à avoir des émotions ou des sentiments positifs envers quelqu’un mais je peux décider :

  • de voir toute ma vie comme une occasion d’aimer mon prochain, de manière directe ou indirecte. 
  • de couper court à toute envie de vengeance et ne pas laisser la rancune prendre racine dans mon cœur. 
  • de voir mon prochain, quel qu’il soit, comme mon semblable, aimé par Dieu comme Dieu m’aime.

C’est ainsi qu’il est possible, avec l’aide du Seigneur, d’aimer mon prochain comme moi-même, ou plutôt d’aimer mon prochain (qui est) comme moi-même. 


dimanche 6 juin 2021

Une communauté de grâce


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1 Pierre 4.7-11

7 La fin de toutes choses est proche. Vivez donc d'une manière raisonnable et gardez l'esprit éveillé afin de pouvoir prier. 8 Avant tout, aimez-vous ardemment les uns les autres, car l'amour apporte le pardon d'un grand nombre de péchés. 9 Soyez hospitaliers les uns à l'égard des autres, sans mauvaise humeur. 10 Que chacun de vous mette au service des autres le don particulier qu'il a reçu de Dieu. Vous serez ainsi de bons administrateurs de la grâce infiniment variée de Dieu. 11 Que la personne qui a le don de la parole transmette les paroles de Dieu ; que celle qui a le don de servir l'utilise avec la force que Dieu lui accorde : il faut qu'en toutes choses gloire soit rendue à Dieu, par Jésus Christ à qui appartiennent la gloire et la puissance pour toujours ! Amen.

Dans son épître, Pierre se préoccupe des difficultés pour les chrétiens de vivre dans un monde qui nous est parfois hostile, ou avec lequel au moins nous nous sentons en décalage. Il nous invite à rester fermes et déterminés malgré les pressions que nous pouvons subir, solidement ancrés sur le roc de notre foi en Christ. C’est un défi de tous les jours !

Dans ce contexte difficile, Pierre a déjà évoqué l’importance de la communauté, de l’Eglise, pour le chrétien, notamment avec l’image de l’Eglise comme un édifice constitué de pierres vivantes. Elle est un secours, une aide précieuse pour se construire. 

Du coup, on pourrait croire à un schéma un peu simpliste : pour le chrétien, dans le monde c’est compliqué et dans l’Eglise c’est toujours facile. Vraiment ? 

Quand on regarde de près les exhortations de Pierre pour l’Eglise, dans ce passage, ce n’est pas ce qu’il dit. Au premier abord, certes, on voit une exhortation à l’amour mutuel, à l’hospitalité, et à servir selon ses dons. On peut se dire que tout va pour le mieux dans la meilleure des Églises… 

Sauf que c’est plus compliqué que ça… Pourquoi Pierre insiste-t-il sur l’importance absolue de l’amour ? Parce que, dit-il, il permet le pardon. Donc si on a besoin de pardon dans l’Eglise, c’est que tout n’est pas rose dans nos relations ! Quant à l’hospitalité, Pierre invite à la vivre “sans mauvaise humeur”... l’accueil généreux dans l’Eglise n’est donc pas aussi évident qu’on pourrait le penser. Moi qui croyais que tout le monde s’aimait dans l’Eglise et que c’était le paradis sur terre… 

Une autre exhortation de Pierre permet alors d’introduire explicitement une notion centrale pour l’Eglise, celle de la grâce. C’est au verset 10 : "Que chacun de vous mette au service des autres le don particulier qu'il a reçu de Dieu. Vous serez ainsi de bons administrateurs de la grâce infiniment variée de Dieu."

Et au regard des exhortations précédentes, n’est-ce pas cette notion de grâce qui est centrale ? Être de bons administrateurs de la grâce de Dieu, c’est non seulement mettre ses dons au service des autres, mais c’est aussi vivre le pardon et l’accueil. Ainsi, nous pouvons dire que l’Eglise est appelée à être une communauté de grâce.


Le pardon

“Avant tout, aimez-vous ardemment les uns les autres, car l'amour apporte le pardon d'un grand nombre de péchés.” (v.10)

Le premier impératif, un impératif absolu, c’est celui de l’amour. Et Pierre insiste. “Avant tout, aimez-vous ardemment les uns les autres…” C’est l’amour qu’il place au-dessus de tout le reste. 

Quand il parle de l’amour, il ne verse pas dans le sentimentalisme. Il ne décrit pas l’Eglise comme le monde des Bisounours où tout le monde s’aime et se fait des câlins. Cet amour ardent les uns pour les autres a un but : permettre de vivre le pardon. Et le pardon, c’est l’expression ultime de la grâce. C’est un don gratuit. On n’achète pas le pardon, on ne le mérite pas non plus. On le donne et on le reçoit.  

On pourrait traduire, plus littéralement, que l’amour “couvre un grand nombre de péchés”. La traduction est meilleure car, en réalité, on ne pardonne pas les péchés, on pardonne les personnes qui ont commis un péché. En les pardonnant, on ne tient plus compte de leur faute, on les couvre. On fait comme si elles n’existaient plus. 

Petite parenthèse. Dans le “Notre Père”, quand on dit “Pardonne-nous nos offenses”, en fait, on devrait dire, si on traduisait plus littéralement, “remets-nous nos dettes.” (c’est la traduction de la Nouvelle Bible Segond, par exemple) Quand Dieu nous pardonne, il efface notre ardoise. Et c’est ce que nous sommes appelés à faire aussi quand nous pardonnons les autres. 

Pour l’Eglise, être une communauté de grâce, c’est accepter d’être une communauté de pécheurs pardonnés. Nous avons tous reçu le pardon de Dieu. C’est notre dénominateur commun. Si nous sommes conscients d’être des pécheurs, même pardonnés, alors nous savons que potentiellement, nous pouvons attrister, choquer, blesser notre soeur ou notre frère, par nos paroles, notre attitude. 

C’est normal, dans l’Eglise, qu’il nous arrive de décevoir, d’attrister voire de blesser notre frère ou notre soeur. Parce que nous sommes pécheurs. Je ne dis pas que c’est bien ou que nous ne devons pas faire des efforts pour progresser. Je dis juste que c’est normal. Ce qui n’est pas normal, c’est que nous ne sachions pas pardonner. Dieu, lui, nous a pardonnés… 

Si l’Eglise est une communauté de grâce, alors c’est une communauté où se manifestera le pardon. Et ce pardon commence dans une posture bienveillante envers les autres. Une communauté de grâce est patiente les uns envers les autres, elle refuse l’esprit de jugement et rejette la rancune. 


L’accueil 

“Soyez hospitaliers les uns à l'égard des autres, sans mauvaise humeur.” (v.9) 

C’est intéressant ici aussi de s’arrêter sur le terme grec original. Philoxenos, qu’on traduit habituellement par hospitalier, désigne celui qui est généreux pour ses invités. Littéralement, c’est celui qui aime (philo) l’étranger (xenos). L’étranger, c’est celui que nous accueillons chez nous... Le mot grec est, d’une certaine façon, l’inverse de xénophobe, celui qui a peur ou qui rejette l’étranger ! 

Ce qui est visé par Pierre dans son exhortation, c’est l’accueil généreux, et en particulier l’accueil de celui qui nous est étranger. C’est pour cela que Pierre précise qu’il s’agit de le faire “sans mauvaise humeur”. Simplement parce que ça demande un effort supplémentaire d’accueillir celui qui est différent, qui ne me ressemble pas. 

Exercer l’hospitalité, c’est accueillir chez soi. Quand vous êtes invités chez quelqu’un pour la première fois, que faites-vous ? En tout cas moi, je regarde comment est aménagé la maison ou l’appartement, ce qui est accroché aux murs, ce qu’il y a sur les étagères… et vous pouvez découvrir plein de choses sur les gens. Parce qu’en allant chez eux, vous entrez un peu dans leur intimité. Quand on accueille quelqu’un chez soi, on s’ouvre, on s’expose à celui qu’on invite. C’est bien une attitude qui relève de la grâce. 

L’impératif de l’accueil généreux se manifeste, bien-sûr, quand on exerce l’hospitalité au sens premier, en invitant par exemple les gens à manger à la maison. Mais, plus largement, il concerne notre attitude d’ouverture à l’autre qui est différent. Parce qu’il est tout à fait possible de rester des étrangers les uns aux autres dans une Église. On peut se fréquenter sans se connaître, se parler sans s’accueillir. 


Le service

“Que chacun de vous mette au service des autres le don particulier qu'il a reçu de Dieu. Vous serez ainsi de bons administrateurs de la grâce infiniment variée de Dieu.’ (v.10) 

Nous en venons, enfin, à cet appel à être de bons administrateurs de la grâce de Dieu, en mettant au service des autres ce que nous avons reçu de Dieu. Ici, la grâce est mentionnée explicitement. Et même deux fois puisque le “don reçu de Dieu” traduit le terme charisma qui vient de charis, la grâce. 

Le choix des mots est important. L’exhortation s’adresse à chacun. Personne n’a été oublié par Dieu. A nous de le reconnaître en bons administrateurs des dons de Dieu, pour la communauté. Notez l’insistance de Pierre sur la grâce “infiniment variée, ou si diverse, de Dieu”.  

Ne cherchez pas dans une liste prédéfinie de dons lequel Dieu vous aurait réservé, avec cette question fébrile : “quel est mon don ?” J’avoue que je suis assez perplexe face à ces tests qui vous permettraient de savoir LE don que Dieu vous a donné. Je trouve que ça fait entrer les chrétiens dans des catégories, avec ceux qui ont tel don ou tel autre… Et si vous ne rentrez pas dans les cases, alors vous n’avez pas de don ? 

D’ailleurs, Pierre ne fait pas de liste. Au verset 11, il est très général. Littéralement, il écrit : “Si quelqu'un parle, que ce soit pour transmettre les paroles de Dieu ; si quelqu’un sert, que ce soit avec la force que Dieu accorde…” Parler ou servir, ça laisse un très large éventail de possibilités ! 

Ce que Pierre veut dire ici, c’est que chacun a reçu de Dieu quelque chose qu’il peut mettre au service des autres. Chacun peut être utile à la communauté. 

Une communauté de grâce, c’est une communauté de serviteurs, où chacun peut être utile à tous. Ce qui implique d’être prêt à offrir aux autres ce que nous avons reçu de Dieu, mais aussi d’être prêt à recevoir des autres ce que Dieu leur a donné. 


Conclusion

Qu'on le veuille ou non, une communauté de pécheurs pardonnés ne peut qu’être une communauté de grâce, dont les membres sont tous au bénéfice de la grâce de Dieu. Mais cette même grâce caractérise-t-elle nos relations au sein de l’Eglise ? La grâce reçue de Dieu se transforme-t-elle en grâce les uns pour les autres ? C’est le défi que Pierre nous lance… Sommes-nous prêts à le relever, avec l’aide de Dieu ? 

Si nous voulons y arriver, gardons à l’esprit ces trois mots-clés, prenons-les comme trois mots d’ordre pour chacun de nous, trois manifestations concrètes de la grâce dans nos relations : le pardon, l’accueil et le service. 




dimanche 2 février 2020

Alléger notre fardeau



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Notre vie ressemble parfois à celle du bousier... Et encore, lui il trimbale sa boule d’excréments pour une raison bien précise : il y pondra ses oeufs ou il en tirera les nutriments dont il a besoin pour se nourrir. Nous, parfois, on ne sait plus trop pourquoi on la trimbale...

Cette boule qu’on pousse ou qu’on tire, elle est faite des blessures et des remords liés au passé, des doutes d’aujourd’hui, des peurs pour demain. Elle est faite des habitudes voire des addictions qui nous rongent, elle est remplie de culpabilité, de honte, de tristesse ou de lassitude… Cette boule, elle nous pèse, elle nous fatigue.

Il y a justement une belle parole de Jésus, dans l’Evangile selon Matthieu, qui peut répondre à cette fatigue et cette lassitude :

Matthieu 11.28-30
28 Venez à moi vous tous qui êtes fatigués de porter un lourd fardeau et je vous donnerai le repos. 29 Prenez sur vous mon joug et laissez-moi vous instruire, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour tout votre être. 30 Le joug que je vous invite à prendre est bienfaisant et le fardeau que je vous propose est léger.

Ici il n’est pas question de bousier… mais bel et bien d’une charge que nous portons et qui nous fatigue. Jésus utilise des métaphores ouvrières et agricoles :

  • Même si c’est devenu un mot au sens figuré pour parler d’une chose pénible à supporter, le fardeau, c’est d’abord une charge pesante que l’ouvrier doit transporter.
  • Le joug, c’est une pièce de bois qu’on place sur la tête ou le cou des animaux de trait pour les atteler et tirer le meilleur profit de leur force de traction.


Les deux métaphores évoquent une charge que l’on porte, un poids qui provoque de la fatigue et de la lassitude dans notre vie. Et Jésus propose de nous donner du repos.


Un fardeau léger


Tout commence par un appel que Jésus nous adresse : “Venez à moi vous tous qui êtes fatigués de porter un lourd fardeau”. La réponse à cet appel, c’est la réponse de la foi : accepter ce que le Christ nous offre. C’est dire : j’accepte, à la place de mon fardeau, de porter le joug que tu me proposes. Or, le joug dont Jésus parle, ce sont ses instructions, son enseignement. Mais il précise bien que ce joug est bienfaisant. Il y a certes un fardeau mais il est léger.

Suivre le Christ, dans une démarche de foi, c’est un choix qui engage. Cela a des implications importantes pour nous, au niveau de notre vision du monde, de nos priorités dans la vie, de notre comportement... C’est bien une charge que nous acceptons. Mais si cela représente pour nous un fardeau insupportable, c’est qu’il y a un problème.

Car on peut se tromper de joug et prendre sur nos épaules ce que Dieu ne nous demande pas ! Parfois, on se met la pression pour être un croyant parfait, on cherche à mériter la faveur de Dieu, à être à la hauteur. Et le fardeau léger de l’amour et de la grâce de Dieu devient un fardeau lourd de nos efforts, de nos frustrations, de nos échecs.

Le joug que le Christ nous offre, celui de ses instructions, ne nous écrase pas sous des obligations et des interdits, il nous libère et nous allège de notre culpabilité, de notre honte et de nos remords. Par son amour et sa grâce, il nous offre le pardon et le renouvellement. Voilà qui est source de repos pour nous.


La foi : une béquille ? Pourquoi pas !


On entend dire parfois, avec un ton de mépris ou de suffisance : “la foi, c’est une béquille pour les faibles !” Eh bien c’est peut-être vrai. Mais attention : vous vous pensez inébranlable, inatteignable, suffisamment fort pour affronter toutes les épreuves ? Si c’est le cas, vous n’avez sans doute pas besoin de la foi… mais j’ai peur que vous tombiez de haut un jour ! Et ce même danger concerne aussi les croyants. On peut, parfois, penser que puisqu’on a la foi, on est inébranlable, rien ne peut nous arriver. Si c’est ce que vous pensez… c’est que vous n’avez plus besoin du Christ, et que vous avez peut-être plus foi en vous-mêmes que foi en Jésus-Christ. Mais là aussi, un jour vous tomberez de haut !

Cette belle parole de Jésus nous invite à reconnaître notre fatigue… Assumons nos faiblesses, nos coups de mou et nos failles. Ne nous prenons pas pour des super-héros, avec ou sans la foi ! Notre force c’est aussi de reconnaître nos faiblesses. Et notre faiblesse serait de croire que nous n’en avons pas…

Pas besoin d’être fort pour suivre Jésus. Pas besoin d’être inébranlable pour être un bon chrétien. Reconnaissons que nous boitons tous, d’une manière ou d’une autre, et que la foi peut être une béquille qui nous aide à avancer… et grâce à laquelle nous trouvons du repos dans nos vies plus ou moins brinquebalantes et cabossées.


L’important, c’est celui en qui on croit


Finalement, ce qui est important, c’est moins notre foi que celui en qui on croit. C’est Jésus, qui nous appelle à venir à lui, et qui est “doux et humble de coeur”. Le contraire d’un maître dominateur.

Notre vision de Dieu, de Jésus-Christ, détermine énormément la façon de vivre notre foi. Devant un maître intraitable ou un juge impitoyable, on se tait et on obéit. Mais devant un maître doux et humble de coeur, qui sait se mettre à notre hauteur et qui nous comprend, on se sent libre d’être soi-même.

La foi authentique, c’est être soi-même devant Dieu, dans la confiance et la reconnaissance. Parce qu’elle repose sur l’assurance de l’amour de Dieu pour nous. Parce qu’elle se construit dans une relation avec le Christ qui est présent, tout proche de nous.

Si votre foi vous conduit à une vie chrétienne qui est un poids lourd à porter, un fardeau insupportable, c’est que vous avez sans doute une vision faussée de Dieu. Car Jésus le dit : ”Le joug que je vous invite à prendre est bienfaisant et le fardeau que je vous propose est léger.” En réalité, c’est nous qui ajoutons du poids à ce fardeau léger, c’est nous qui le rendons lourd...


Conclusion


Notre vie ressemble parfois à celle du bousier… mais nous ne sommes pas aussi forts que le bousier. Savez-vous qu’il est capable de pousser 1141 fois son poids ? Pour un homme ça équivaudrait à pousser 6 bus double-étage remplis de passagers !

Alors à travers cette belle parole de l’Evangile ce matin, Jésus nous dit d’abandonner cette boule qu’on pousse ou qu’on tire, faite de blessures et de remords, de doute et de peur, d’habitudes voire d’addictions qui nous rongent, cette boule pleine de culpabilité, de honte, de tristesse ou de lassitude… Par sa grâce, il veut alléger notre fardeau et il nous offre de prendre à la place son joug bienfaisant et son fardeau léger.

Sa présence à nos côtés chaque jour, sa bonté et sa fidélité qui nous accompagnent, la foi qui nous relie à lui, sont source de paix et de repos. Laissons-le donc alléger notre fardeau !



dimanche 11 juin 2017

Le Dieu de grâce

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Exode 34.1-9

1 Le SEIGNEUR dit à Moïse : « Taille deux tablettes de pierre, comme celles que tu as cassées. J'écrirai sur elles les paroles qui étaient sur les premières. 2 Prépare-toi pour demain matin. Tu monteras très tôt sur le mont Sinaï et tu m'attendras là-bas, au sommet de la montagne. 3 Personne ne doit monter avec toi, personne d'autre ne doit se montrer sur toute la montagne. Et aucun animal, mouton, chèvre ou vache, ne doit rester près de cet endroit. »

4 Moïse taille deux nouvelles tablettes de pierre, comme les premières. Il se lève tôt le matin et il monte sur le Sinaï avec les deux tablettes, comme le SEIGNEUR l'a commandé. 5 Le SEIGNEUR descend dans le nuage de fumée et il se tient là, auprès de Moïse. Moïse prononce son nom, « LE SEIGNEUR ». 6 Ensuite, le SEIGNEUR passe devant Moïse et il dit d'une voix forte : « Je suis le SEIGNEUR. Oui, je suis un Dieu de pitié et de tendresse. Je suis patient, plein d'amour et de fidélité. 7 Je montre ma bonté pendant des milliers de générations. Je supporte les fautes, les révoltes et les péchés. Mais le coupable, je ne le déclare pas innocent. J'agis contre celui qui a péché, contre ses enfants jusqu'à la troisième ou la quatrième génération. »

8 Aussitôt Moïse s'incline et adore le SEIGNEUR. 9 Puis il dit : « Seigneur, puisque tu te montres bon pour moi, je t'en prie, viens avec nous ! Je le sais, ces gens ont la tête dure. Mais pardonne nos fautes et nos péchés, et considère-nous comme ton peuple ! »


Le Dieu de l'Ancien Testament est-il différent du Dieu du Nouveau Testament ? C'est ce qu'on entend parfois... Celui de l'Ancien Testament serait sévère, à la justice implacable, un Dieu saint qu'il faut craindre. Celui du Nouveau Testament serait grâce, bonté, patience, un Dieu que l'on peut aimer.

Avouons que parfois on porte un regard distant et critique sur l'Ancien Testament. On a en tête les paroles du prologue de l'évangile selon Jean : « La loi a été donnée par Moïse, mais la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ » (Jean 1.17). On pense à Paul, dans ses épîtres, qui oppose la loi et la grâce. Mais on oublie qu'il le fait en argumentant à partir de l'Ancien Testament, et de l'exemple d'Abraham en particulier.

Non, le Dieu de l'Ancien Testament n'est pas différent du Dieu du Nouveau Testament ! Le SEIGNEUR, dans l'Ancien comme dans le Nouveau Testament, est le Dieu de grâce. La preuve ici : « Je suis le SEIGNEUR. Oui, je suis un Dieu de pitié et de tendresse. Je suis patient, plein d'amour et de fidélité. » (v.6) Certes, la justice de Dieu se manifeste dans ce texte... mais c'est bien une justice marquée par la grâce !


La grâce accorde toujours une nouvelle chance

La grâce de Dieu se manifeste dès la première parole du Seigneur dans notre texte : « Taille deux tablettes de pierre, comme celles que tu as cassées. J'écrirai sur elles les paroles qui étaient sur les premières. »

Dieu accorde un nouvelle chance au peuple d'Israël. Les tablettes sur lesquels il avait inscrit ses 10 paroles ont déjà été gravées une fois... mais elles avaient été brisées par Moïse, suite à l'épisode du veau d'or. Impatient et ne voyant pas Moïse redescendre de la montagne où il était aller rencontrer Dieu, le peuple d'Israël avait alors fondu tout l'or qu'ils avaient pu récolter et avait façonné un veau en or en disant : « Voici ton Dieu qui t'a fait sortir d'Egypte » ! En voyant cela, en colère, Moïse brisa les tablettes de pierre.

Ça aurait pu être la fin de l'alliance de Dieu avec son peuple. Il n'en est rien. Le Seigneur redonne une chance au peuple d'Israël. Il demande à Moïse de retailler des tablettes et il écrira à nouveau ses 10 paroles, la charte de l'alliance.

Dieu est bien plus patient que le peuple d'Israël ! Il est bien plus patient que Moïse ! « Je supporte les fautes, les révoltes et les péchés. » (v.7) La patience est une des premières marques de la grâce. Et l'on voit bien, tout au long de l'histoire biblique, combien Dieu s'est montré patient avec son peuple, malgré ses errances, ses infidélités. Un peuple à la tête dure, comme le dit Moïse ! Et combien il se montre encore patient avec nous, je n'en doute pas... nous qui, aussi, avons souvent la tête dure.

Que se passerait-il si Dieu ne nous laissait jamais de nouvelle chance ? S'il n'avait aucune patience envers nous ? Si la moindre faute était immédiatement sanctionnée... Nul doute que cette église serait vide !

Et nous qui sommes au bénéfice de la grâce et la patience de Dieu, de quelle patience faisons-nous preuve envers nos prochains ? Savons-nous leur donner une nouvelle chance ou les enfermons-nous dans une sanction, un jugement ? Quelle est la mesure de grâce dans notre vie, nos relations ?


La grâce prend le péché au sérieux

Dans ses paroles adressées à Moïse, Dieu se présente comme un Dieu plein de grâce et de patience... Pourtant, il parle aussi du péché et du coupable qu'il ne déclare pas innocent. Mais la grâce prend au sérieux le péché. D'ailleurs, s'il n'y a pas de péché, il n'y a pas besoin de grâce !

« Je supporte les fautes, les révoltes et les péchés. Mais le coupable, je ne le déclare pas innocent. J'agis contre celui qui a péché, contre ses enfants jusqu'à la troisième ou la quatrième génération. »

La formule peut étonner, voire choquer. Mais il y a d'abord ici une question de proportion. 3 ou 4 générations contre 1000 ! Une génération, c'est quoi, 25 ans ? 3 ou 4 générations, c'est de l'ordre d'un siècle... Mais 1000 générations, ça fait 25000 ans. L'histoire de Moïse date de moins de 4000 ans par rapport à aujourd'hui... ça nous laisse 21000 ans de marge !!!

Evidemment, ce ne sont pas des nombres à prendre de façon littérale ! Mon petit calcul veut juste souligner que la bienveillance et la grâce de Dieu dépassent infiniment son jugement. On retrouve un peu ici ce que Paul appelle la surabondance de la grâce de Dieu, qui couvre le péché : « Là où le péché a proliféré, la grâce a surabondé ». (Romains 5.20)

Mais le péché lui-même doit être pris au sérieux : « le coupable, je ne le déclare pas innocent. » Il a des conséquences, qui s'étendent parfois sur plusieurs générations. Pas besoin ici de tomber dans l'écueil du péché des ancêtres dont il faudrait se repentir... Il s'agit probablement de considérer l'impact, les conséquences du péché au-delà de celui qui les commet. Et lorsque notre texte parle de trois ou quatre générations, il souligne la gravité possible de cet impact. Ce que je fais, mes choix de vie, mes actions, ne me concernent pas seulement moi mais affectent aussi ceux qui m'entourent, parfois au-delà de ce que j'imagine.

Il faut prendre le péché au sérieux pour prendre la grâce au sérieux ! Dieu ne nous aime pas parce que nous sommes aimables... Il nous aime malgré le fait que nous ne le sommes pas ! Il nous aime parce qu'il nous a créé. Il nous aime malgré notre péché, notre infidélité, malgré notre tête dure ! Et il vient à notre rencontre même si nous nous éloignons de lui. C'est cela la grâce.

Il demande à Moïse de refaire les tablettes de pierre. Il fait revenir Juda de son exil à Babylone. Il envoie son Fils dans un monde qui le rejette et le crucifie. Il vient à notre rencontre et nous appelle. Il continue de cheminer avec nous, malgré les détours et les impasses dans lesquelles nous nous engageons.


La grâce répond à nos besoins

Ce qui est aussi intéressant dans notre texte, c'est la réaction de Moïse.

« Seigneur, puisque tu te montres bon pour moi, je t'en prie, viens avec nous ! Je le sais, ces gens ont la tête dure. Mais pardonne nos fautes et nos péchés, et considère-nous comme ton peuple ! » (v.8-9)

Il a compris ce qu'est la bonté de Dieu. Et il la reçoit d'abord pour lui-même : « tu te montres bon pour moi. » Il est aussi conscient des limites de son peuple et en est solidaire. Il dit que le peuple a la tête dure mais il demande aussi à Dieu : « pardonne NOS fautes et NOS péchés... » En réalité, cette dernière phrase pourrait aussi être traduite au futur, c'est ce que font la plupart des versions françaises, comme une affirmation de foi : « Tu pardonneras nos fautes et nos péchés, et tu nous considéreras comme ton peuple. »

C'est comme si Moïse disait ici au SEIGNEUR : c'est bien d'un Dieu comme toi dont nous avons besoin. Parce que nous avons la tête dure, nous avons besoin d'un Dieu qui pardonne et qui fait grâce ! La version Parole de Vie traduit « ces gens ont la tête dure », mais littéralement, c'est un peuple « à la nuque raide ». Autrement dit, un peuple qui ne veut pas baisser la tête, qui refuse de se soumettre. Un peuple qui n'en fait qu'à sa tête... même s'il fonce droit dans le mur.

La grâce de Dieu est bien ce dont nous avons besoin ! Parce que nous avons aussi souvent la nuque raide. C'est une grâce par laquelle Dieu nous promet le pardon, et par laquelle il nous considère comme ses enfants. Une grâce aussi par laquelle il pourra, petit à petit, nous transformer. Assouplir notre nuque. Changer notre cœur. Nous rendre à notre tour plein de grâce pour les autres.


Conclusion

Il faut le dire clairement : le Dieu de l'Ancien Testament n'est pas différent du Dieu du Nouveau Testament ! C'est le même Dieu de grâce qui veut nous sauver, toujours prêt à nous donner une nouvelle chance. Sa grâce est bien ce dont nous avons besoin, aujourd'hui comme hier, et pour demain encore. Elle seule nous garantit le pardon de Dieu et peut transformer notre vie pour que nous soyons aussi des artisans de grâce au quotidien.