dimanche 17 mars 2024

Vivre l’alliance nouvelle aujourd’hui

 

Le rôle premier des prophètes dans l’Ancien Testament était d’interpeller leurs contemporains au nom du Seigneur. Pour cela, ils dénonçaient les infidélités et les injustices commises par le peuple d’Israël et/ou de Juda, et en particulier leurs responsables. Ils les invitaient alors à la repentance, c’est-à-dire un retour à Dieu et un changement de comportement. Et ils associaient à ce retour à Dieu des promesses de la part du Seigneur. 

Petit à petit a émergé dans le message des prophètes bibliques l’attente d’une alliance nouvelle, une alliance qui permettrait d’être vraiment au plein bénéfice de la grâce de Dieu, une alliance qui serait scellée par le Messie, c’est-à-dire celui que Dieu choisirait pour accomplir son projet. 

Le Nouveau Testament présente Jésus comme le Christ, c’est-à-dire le Messie. Et c’est par lui, par son œuvre, par sa mort et sa résurrection, puis par l’envoi de l’Esprit saint, que la nouvelle alliance est scellée. C’est ce que nous allons rappeler dans quelques jours, lors de la fête de Pâques, puis quelques jours après avec celle de Pentecôte. 

Pour nous préparer à ce temps de Pâques, il est pertinent de nous remettre à l’écoute de l’annonce de cette alliance nouvelle. Et parmi les prophètes, Jérémie est l’un de ceux qui l’a annoncée avec le plus de force. 

Jérémie 31.31-34
31 Voici les jours viennent, déclare le Seigneur, où je conclurai une alliance nouvelle avec le peuple d'Israël et le peuple de Juda. 32 Elle ne sera pas comme celle que j'avais conclue avec leurs ancêtres, quand je les ai pris par la main pour les faire sortir d'Égypte. Cette alliance, ils l'ont rompue, alors même que j'étais leur maître, dit le Seigneur. 33 L'alliance que je conclurai avec le peuple d'Israël consistera en ceci, déclare le Seigneur : J'inscrirai mon enseignement, dans leur conscience ; je le graverai dans leur cœur ; je serai leur Dieu et ils seront mon peuple. 34 Personne n'aura plus besoin d'instruire ses proches en disant : « Apprends à connaître le Seigneur. » Car du plus petit jusqu'au plus grand, tous me connaîtront, déclare le Seigneur. Et je pardonnerai leurs torts, je ne me souviendrai plus de leurs fautes.

L’alliance nouvelle annoncée par le prophète n’est pas radicalement différente de la première. Mais elle va plus loin, et d’une certaine façon, elle vient en combler les limites. 

Quelles sont les marques de cette alliance nouvelle ? On peut en distinguer trois principales :

  • L’intériorité et l’intimité. L’enseignement du Seigneur sera gravé non plus sur des tablettes de pierre mais sur les cœurs, créant ainsi une intimité nouvelle avec Dieu. 
  • L’universalité. Il n’y aura plus besoin d’instruire les autres car tout le monde connaîtra le Seigneur, du plus petit au plus grand. 
  • Un pardon définitif. Dieu pardonnera nos torts, il ne se souviendra pas de nos fautes.  Le problème du péché sera définitivement réglé.

Pour le Nouveau Testament, cette alliance nouvelle s’accomplit en Christ et est scellée en nous par le Saint-Esprit. 

  • L’intériorité et l’intimité. Le Fils de Dieu révèle le Père, Jésus-Christ rend visible le Dieu invisible. Nous entrons dans l’intimité de Dieu… Et par le Saint-Esprit, il vient habiter notre cœur et fait de nous des enfants de Dieu. Une relation dans l’intimité est désormais possible, nous pouvons l’appeler Abba, Père. 
  • L’universalité. Il y a un seul médiateur entre Dieu et les êtres humains : Jésus-Christ, le Fils de Dieu devenu homme. Celles et ceux qui croient en lui forment le peuple de la nouvelle alliance, un peuple issu de tous les peuples. 
  • Un pardon définitif. La mort et la résurrection du Christ règle de manière définitive le problème du péché. Sa mort est le sacrifice parfait : il a donné sa vie pour nous, lui l’innocent pour nous pécheurs. Par sa résurrection, il a vaincu la mort. En lui nous avons le pardon et la vie éternelle. 

Cette alliance nouvelle est bien accomplie en Christ, appliquée à notre vie par le Saint-Esprit. Ou du moins, c’est une œuvre en cours…. Pour nous, c’est un idéal, un horizon… qu’on n’atteint pas pleinement aujourd’hui encore. Il s’accomplira pleinement pour nous au jour de la résurrection. 

Tout est là, potentiellement. Grâce à l’œuvre accomplie par le Christ, mort et ressuscité. Grâce au don du Saint-Esprit qui vient faire sa demeure en nous. Tout est là, mais comment est-ce que je peux le recevoir pleinement ? Quelles leçons spirituelles pouvons-nous en tirer pour nous aujourd’hui ? 


Vivre l’alliance nouvelle aujourd’hui

L’intériorité et l’intimité

La promesse d’avoir l’enseignement du Seigneur gravé non plus sur des tablettes de pierre mais sur nos cœurs est bien une promesse d’intimité nouvelle avec Dieu. Cette intimité est rendue possible par le Saint-Esprit qui vient faire sa demeure en nous : c’est lui qui inscrit la loi du Seigneur dans notre cœur.  

Accomplir la volonté de Dieu n’est plus un impératif religieux qui demande des efforts. C’est une aspiration inscrite au plus profond de nous. C’est notre vœu le plus cher, ce que nous voulons de tout notre cœur ! 

En tout cas, ça devrait être le cas… ou ça peut le devenir de plus en plus… Ce qui nous invite à nous interroger : Qu’est-ce qui nous motive dans notre vie chrétienne ? Qu’est-ce qui nous anime ? Quel est notre moteur ? 

Je crains que, bien souvent, ce soit le devoir. Si je suis chrétien, alors je dois faire ceci ou cela. Je dois aller au culte le dimanche. Je dois lire la Bible et prier. Je dois aimer mon prochain. C’est bien d’avoir le sens du devoir… mais si c’est tout ce qui nous motive, nous allons finir par nous fatiguer ou nous décourager. Sans compter que le devoir peut nous conduire à la culpabilité (parce qu’on n’arrive jamais vraiment à faire tout ce qu’on devrait faire) ou à la peur (que va-t-il m’arriver si je ne fais pas ce que je dois ?). 

Et si, plutôt que le devoir, notre moteur était l’amour ? Finalement, c’est bien cela le double commandement fondamental : aimer Dieu et aimer notre prochain. Et justement, l’alliance nouvelle se joue dans le cœur. Attention, en parlant de cœur et d’amour, on ne parle pas d’émotions et de sentiments seulement. Dans la Bible, le cœur, c’est le centre de notre être intérieur, le siège de notre volonté, de nos aspirations profondes, de nos motivations. 

Et l’amour, ça s’entretient, dans une relation vivante. C’est là que doit se trouver le moteur de notre vie chrétienne : dans notre relation à Dieu (l’intimité de la première marque de l’alliance nouvelle) et notre relation à notre prochain. 


L’universalité

L’universalité dont parle le prophète Jérémie pour l’alliance nouvelle est avant tout sociale : il n’y aura plus des enseignants et des enseignés, des sachants et des ignorants. Tout le monde connaîtra le Seigneur, du plus petit au plus grand. Connaître le Seigneur n’est pas une question d’âge, d’intelligence ou de savoir. 

Le Nouveau Testament élargira encore cette universalité à toutes les dimensions humaines, culturelles, ou autres.  

Qui que tu sois, quelles que soient tes origines, ta langue ou ta culture, quelles que soient ton éducation, ton instruction, tes compétences ou tes connaissances, tu as ta place dans ce peuple issu de tous les peuples. La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ est pour toi. Tu peux la recevoir, l’accueillir par la foi. 

C’est ce que l’apôtre Paul dira dans son épître aux Galates : « Il n'y a plus ni Juif ni païen, il n'y a plus ni esclave ni citoyen libre, il n'y a plus ni homme ni femme ; en effet, vous êtes tous un, unis à Jésus Christ. » (Galates 3.28)

C’est aussi la formidable vision du peuple de Dieu dans Apocalypse 7.9 : « Je vis une foule immense que personne ne pouvait compter. C'étaient des gens de tout pays, de toute tribu, de tout peuple et de toute langue. Ils se tenaient devant le trône et devant l'agneau, vêtus de vêtements blancs et avec des branches de palmiers à la main. »

Le défi, bien-sûr, est de vivre cette promesse ensemble, de l’incarner dans l’Eglise. L’universalité est un défi majeur pour l’Eglise : comment le relevons-nous ? Comme s’exprime la diversité de nos origines, de nos cultures, de nos éducations, de nos personnalités ? Et comment toutes celles et tous ceux qui le veulent trouvent leur place et s’épanouissent dans l’Eglise ? 


Un pardon définitif

On peut parler de pardon définitif parce que, par la mort et la résurrection du Christ, le problème du péché est réglé, définitivement. On ne revient plus dessus. Comme la TOB traduit la fin de Jérémie 31.34 : « Je pardonne leur crime ; leur faute, je n’en parle plus. »

L’apôtre Paul le dira avec force aux chrétiens de Rome : « Tous ont péché et sont privés de la présence glorieuse de Dieu. Mais Dieu, par sa grâce, les rend justes, gratuitement, par Jésus Christ qui les délivre de leur esclavage. » (Romains 3.23-24)

Par Jésus-Christ, le problème du péché est réglé, définitivement. Mais alors pourquoi est-ce qu’on revient toujours sur le péché ? Pourquoi est-ce qu’on réduit si souvent la foi chrétienne à des questions de morale ou d’interdits ? Pourquoi est-ce qu’on laisse si souvent la culpabilité nous envahir ? Pourquoi a-t-on tant de mal à accueillir et vivre la grâce ? 

Je ne dis pas, évidemment, que la vie chrétienne n’est pas aussi une question de valeurs et même de morale. Je dis simplement qu’elle est d’abord une question de relation, relation à Dieu et relation au prochain. Et le péché, dans la Bible, c’est avant tout ce qui brise cette relation à Dieu et à mon prochain. 

L’affirmation du pardon, de la résolution définitive du problème du péché, nous invite à vivre la grâce, à en saisir toute la puissance libératrice, dans notre relation à Dieu, et dans nos relations les uns aux autres. 


Conclusion

L’alliance nouvelle annoncée par Jérémie est une formidable promesse. Une promesse qui s’est accomplie en Jésus-Christ, par sa mort et sa résurrection. Une promesse que l’Esprit saint veut appliquer à notre vie. 

C’est la promesse d’une intimité nouvelle avec Dieu, dans une relation filiale, où nous pouvons appeler Dieu notre Père. Un Père qui nous aime et prend soin de nous. 

C’est la promesse d’une universalité à vivre. Car la Bonne Nouvelle est pour toutes et tous, qui que nous soyons, du plus petit au plus grand, dans la mosaïque de toutes les couleurs de nos vies. 

C’est la promesse de la grâce, par lequel le problème du péché est réglé, définitivement. Nous n’avons pas à essayer de nous racheter ou de nous justifier. Nous avons juste à accueillir la grâce que Dieu nous offre. Il a payé le prix : Jésus-Christ est mort et ressuscité. 

Pour nous préparer à Pâques, dans deux semaines, il est bon de se souvenir de toutes ces promesses, car elles découlent directement de la mort et la résurrection de Jésus-Christ que nous allons commémorer.  


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