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dimanche 15 juin 2025

Une question de fierté

Je vous propose de lire un des textes bibliques prévus pour ce dimanche. Il s’agit de quelques versets dans la lettre que l’apôtre Paul a écrite aux chrétiens de Rome. C’est un des écrits les plus denses de la Bible, un trésor inestimable pour nourrir notre foi et construire notre théologie, c’est-à-dire notre discours sur Dieu, notre compréhension de Dieu et de son œuvre. Mais ça demande aussi un petit effort d’interprétation… 

Romains 5.1-5
1Ainsi, nous avons été reconnus justes par la foi et nous sommes maintenant en paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ. 2Par Jésus nous avons, par la foi, eu accès à la grâce de Dieu en laquelle nous demeurons fermement. Et nous mettons notre fierté dans l'espoir d'avoir part à la gloire de Dieu. 3Bien plus, nous mettons notre fierté même dans nos détresses, car nous savons que la détresse produit la persévérance, 4que la persévérance produit le courage dans l'épreuve et que le courage produit l'espérance. 5Cette espérance ne nous déçoit pas, car Dieu a répandu son amour dans nos cœurs par l'Esprit saint qu'il nous a donné. 

Je ne sais pas ce qu’il en est pour vous mais ce qui me surprend quand je lis ce texte, c’est l’usage par Paul du verbe traduit en français par « mettre sa fierté ». Il l’utilise deux fois.

Le verbe grec n’a pas de connotation particulière. Il ne désigne pas forcément de la vantardise ou de la forfanterie. Tout dépend de quoi on tire sa fierté… Il n’empêche que je ne suis pas sûr que ce soit un vocabulaire qu’on utilise facilement pour parler de notre foi !

Aujourd’hui, on a sans doute plutôt tendance à faire profil bas. On ne veut pas embêter les autres avec notre foi. On préfère rester discret. Et quand on est amenés à témoigner de notre foi, on le fait avec prudence. 

C’est vrai qu’il y a souvent une méfiance, peut-être moins par rapport à la foi que par rapport aux religions. Et on peut le comprendre… 

Quand on considère ce qu’on a pu faire au nom de la foi, y compris la foi chrétienne, on ne peut pas faire les fiers ! On peut même partager la colère qui s’exprime parfois, et même avoir honte de certaines choses qui ont été faites au nom de Dieu, justifiées par une instrumentalisation de la Bible. Violences, oppressions, guerres, discriminations… les exemples ne manquent pas, malheureusement. Vraiment, il n’y a pas de quoi être fier !

Et ce serait trop facile de dire : « ça, c’est chez les autres mais pas chez nous ! » On sait aujourd’hui, grâce à la salutaire libération de la parole à laquelle on commence à assister, qu’il y a bien dans les Eglises en général, et dans les familles chrétiennes, des violences sexistes et sexuelles, des phénomènes d’emprise psychologie, de graves abus d’autorité. Ça existe « chez nous » aussi !

Evidemment, il faut les dénoncer avec la plus grande fermeté, et surtout ne pas rester silencieux, refuser de les nier, ou pire encore de les couvrir. Notre Union d’Eglise a voté lors de son dernier Synode une charte d’engagement pour lutter contre les abus et tout type de violence. Et je rappelle la ligne d’écoute qui a été créée pour les protestants et dont vous trouverez le numéro dans le hall d’entrée. 

Est-ce que ça signifie que le texte de l’apôtre Paul n’est plus pertinent ? En réalité, de son temps déjà, il y avait des abus dans les Eglises, et d’ailleurs il ne se prive pas de les dénoncer quand il le faut dans ses lettres ! Ça ne l’empêche pas ici d’inviter ses lecteurs à exprimer leur fierté. Mais pour quels motifs ? 

Il ne s’agit pas de « faire les fiers » mais bien de reconnaître à sa juste valeur le trésor que représente notre foi, ou plus précisément l’objet de notre foi. Ce qui compte, ce n’est pas tant notre foi elle-même que la bonne nouvelle en laquelle nous croyons. 


Entre la grâce et la gloire

Dans les paroles de l’apôtre Paul, deux mots résument cette Bonne Nouvelle : la grâce et la gloire. On les retrouve dans le verset 2 : « Par Jésus nous avons, par la foi, eu accès à la grâce de Dieu en laquelle nous demeurons fermement. Et nous mettons notre fierté dans l'espoir d'avoir part à la gloire de Dieu (l’espérance de la gloire). »

Ces paroles traduisent la posture du croyant aujourd’hui, entre ce qui est déjà là et ce qui doit encore arriver, entre ce que nous avons déjà et ce que nous attendons encore. On pourrait dire que le croyant se situe entre la grâce et la gloire, et c’est l’espérance qui fait le lien entre les deux. 

La grâce aujourd’hui

Paul parle d’une grâce dans laquelle nous demeurons fermement. Elle est donc déjà là. On pourrait même dire qu’elle est le préalable nécessaire à tout le reste. La grâce, c’est ce qui est accordé de manière imméritée, c’est le don gratuit. C’est le contraire de la rétribution qui, elle, se base sur les mérites. Paul associe à la grâce le fait d’être justifié et celui d’être en paix avec Dieu. 

Il ne faut pas faire de la grâce un concept abstrait, théologique ou philosophique. La grâce, c’est avant tout la façon dont la faveur de Dieu se manifeste. Et elle est étroitement liée à la personne de Jésus-Christ. Recevoir la grâce, c’est recevoir le don de Dieu. Et c’est bien dans la personne de Jésus que Dieu se donne. 

Être croyant, c’est se reconnaître au bénéfice de la grâce de Dieu, c’est recevoir ce que Dieu nous donne, c’est rencontrer par la foi Celui qui s’est donné : Jésus-Christ.  De là, tout le reste découle. 

Peut-on être fiers de la grâce ? Non, pas vraiment. On peut être heureux, reconnaissants mais ce n’est pas un motif de fierté personnelle. Être croyant ne nous rend pas meilleur que les autres. Il faut se garder absolument de tout sentiment de supériorité, refuser de prendre la posture de juge de notre prochain. Ça, c’est le contraire de la grâce. C’est une négation de la grâce reçue. 

La gloire demain

Il faut comprendre que dans ce contexte, lorsque Paul parle de fierté, cela n’a rien à voir avec de l’orgueil. Justement parce qu’elle repose sur la grâce, le don gratuit de Dieu, et qu’elle nous fait entrer dans une espérance basée sur les promesses de Dieu. 

Il ne s’agit pas d’être fiers de nos soi-disant exploits de croyants ! Il s’agit d’être fier du trésor que représente la grâce de Dieu, la paix et l’espérance qu’elle nous procure. Il s’agit de reconnaître leur juste valeur et notre privilège de les connaître. 

L’aboutissement de notre espérance, c’est la gloire. Mais qu’est-ce que la gloire ? Pour faire simple, on peut dire que la gloire de Dieu, ce n’est rien d’autre que sa présence. Cette gloire promise au croyant au bout du chemin, c’est tout simplement la présence de Dieu dans toute sa plénitude. 

Ça n’a donc rien à voir avec la gloire que pourrait nous offrir la célébrité ou des exploits sportifs. Il faut d’ailleurs se garder d’envisager la foi de cette façon. Et au cas où on l’oublierait, l’apôtre Paul nous ramène les pieds sur terre en nous rappelant que notre vie chrétienne est faite aussi de paradoxes. 

Il le dit d’une façon un peu surprenante : « nous mettons notre fierté dans nos détresses… » Non pas, évidemment, qu’on se réjouisse d’être dans la détresse. Mais à cause du chemin sur lequel nous engage la foi, certes semé d’embûches, mais avec un horizon fait d’espérance : « nous mettons notre fierté dans nos détresses, car nous savons que la détresse produit la persévérance, que la persévérance produit le courage dans l'épreuve et que le courage produit l'espérance. »

Être chrétien, c’est être dans un processus d’espérance. Un processus dans lequel tout ce qui nous arrive peut se révéler utile. Parce que, au-delà des obstacles, c’est le chemin qui compte, et l’aboutissement où mène le chemin. La gloire, nous la recevons en espérance, et elle nous attend au terme d’un chemin semé d’embûches. Mais Dieu est là pour nous y accompagner. 

De quoi sommes-nous fiers finalement ? Des promesses de Dieu ! Celles qui nous garantissent un horizon éternel, et celles qui nous assurent de sa présence dès aujourd’hui, en particulier au cœur des difficultés, des détresses et des épreuves. 


Être fiers de quoi ? de qui ?

Vous l’aurez compris, la fierté dont parle l’apôtre Paul est un peu particulière. Elle n’a rien à voir avec l’orgueil. Sinon la grâce serait niée. Il s’agit surtout, pour le chrétien, d’être fier de la Bonne Nouvelle que nous portons, fier de Dieu et son amour, fier de Jésus-Christ notre Sauveur et maître ! Voilà de quoi, ou plutôt de qui nous sommes fiers !

Il ne s’agit donc pas de « faire le fier » mais de reconnaître à sa juste valeur la Bonne Nouvelle extraordinaire en laquelle nous avons cru.

Cette fierté nous décentre de nous-mêmes. C’est le contraire de l’orgueil. Elle nous décentre sur Dieu, de qui provient toute grâce. Elle nous décentre sur notre prochain, que nous sommes appelés à aimer, comme Dieu les aime. Nous refusons la posture du juge pour prendre celle du serviteur. Nous refusons la posture du donneur de leçon pour prendre celle du témoin. 

L’enjeu pour nous, ce n’est pas notre réputation, ce n’est pas notre Eglise, ce ne sont pas nos valeurs ou notre morale. L’enjeu c’est la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ. Et le témoignage que nous pouvons rendre, simplement, en paroles et en actes. Evidemment, il s’agit de le faire sans pression, sans manipulation, avec un respect total de la liberté d’autrui… sinon, une fois de plus, ce n’est plus de la grâce dont nous serons témoins.  

Si nous savons être simplement des serviteurs et des témoins, rien de plus et rien de moins, alors nous pourrons être fiers tout en restant humbles. Parce que notre fierté ne repose pas sur nous-mêmes ou nos mérites illusoires, elle réside en Dieu qui s’est donné en Jésus-Christ. 

Alors oui, soyons fiers de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, pour assumer sans complexe notre foi et en témoigner sans honte. 


dimanche 17 novembre 2024

Devant la porte du Royaume de Dieu

 

Ce matin je vais vous proposer une lecture sans doute inhabituelle d’une parabole de Jésus, une compréhension un peu différente de l’interprétation traditionnelle qu’on en fait. Je suis redevable, pour cette prédication, à un collègue pasteur à Nice, dont la récente méditation de cette parabole m’a ouvert de nouvelles perspectives. 

Les paraboles de Jésus ne sont pas simplement des jolies histoires… c’est même assez rarement le cas. Il s’agit souvent plutôt d’histoires piquantes, voire dérangeantes. Et si elles peuvent parfois créer un certain malaise, ce n’est pas un hasard. C’est le cas de la parabole que je vous propose pour la prédication de ce matin, la « parabole des dix jeunes filles ». 

Matthieu 25.1-13
1Alors le royaume des cieux ressemblera à dix jeunes filles qui prirent leurs lampes et sortirent pour aller à la rencontre du marié. 2Cinq d'entre elles étaient imprévoyantes et cinq étaient avisées. 3Celles qui étaient imprévoyantes prirent leurs lampes mais sans emporter une réserve d'huile. 4En revanche, celles qui étaient avisées emportèrent des flacons d'huile avec leurs lampes. 5Or, le marié tardait à venir ; les jeunes filles eurent toutes sommeil et s'endormirent. 6Au milieu de la nuit, un cri se fit entendre : “Voici le marié ! Sortez à sa rencontre !” 7Alors ces dix jeunes filles se réveillèrent et préparèrent leurs lampes. 8Les imprévoyantes demandèrent aux avisées : “Donnez-nous de votre huile, car nos lampes s'éteignent !” 9Les avisées répondirent : “Non, car il n'y en aurait pas assez pour nous et pour vous. Vous feriez mieux d'aller en acheter pour vous chez ceux qui en vendent.” 10Les imprévoyantes partirent donc acheter de l'huile, mais pendant ce temps, le marié arriva. Les cinq jeunes filles qui étaient prêtes entrèrent avec lui dans la salle de mariage et l'on ferma la porte à clé. 11Plus tard, les autres jeunes filles arrivèrent et s'écrièrent : “Maître, maître, ouvre-nous !” 12Mais le marié répondit : “Je vous le déclare, c'est la vérité : je ne vous connais pas.” 13Veillez donc, ajouta Jésus, car vous ne connaissez ni le jour ni l'heure.

Le titre traditionnel qu’on donne à cette histoire est la parabole des vierges sages et des vierges folles. Si les termes sont bien utilisés en grec, l’histoire elle-même devrait nous inciter à les traduire de façon moins radicale. En réalité, quelle est la différence entre les deux catégories de jeunes filles ?  Cinq d’entre elles ont prévu des réserves d’huiles et les cinq autres pas. Certes, ce n’est pas malin… mais de là à dire qu’elles sont folles ! On devrait peut-être plutôt parler simplement des jeunes filles prévoyantes et des jeunes filles imprévoyantes. 

Ensuite, quand on considère l’histoire que Jésus raconte, les éléments de surprise ne manquent pas : 

  • Il y a d’abord le fait que toutes les jeunes filles s’endorment, pas seulement les imprévoyantes… Il n’y a, certes, pas de reproche explicite qui leur sont fait dans la parabole mais quand même… La conclusion de Jésus c’est : « veillez… » 
  • Ensuite, il y a ce qui se passe au moment où l’arrivée du marié est annoncée, au milieu de la nuit. Les jeunes filles se réveillent en sursaut et les événements se précipitent. Mais on peut quand même s’étonner de la réaction des jeunes filles qui avaient de l’huile en réserve. Certes, elles sont prévoyantes… mais elles ne sont pas très partageuses. Vraiment, il n’y aurait pas eu assez d’huile pour tout le monde ? C’est ce qu’elles prétendent, mais est-ce le cas vraiment ? 
  • Et puis il y a le « bon » conseil qu’elles donnent aux autres jeunes filles : allez acheter de l’huile. Mais le marié est en train d’arriver. Elles le savent bien. Et en plus on est au milieu de la nuit ! C’est d’ailleurs en suivant ce conseil que ces jeunes filles vont se retrouver devant la porte fermée à la fin de l’histoire. On peut alors légitimement se demander si c’était vraiment un bon conseil… Que ce serait-il passé si elles avaient attendu le marié malgré tout ? Est-ce que vraiment elles n’auraient pas pu entrer ? Allez savoir même si le marié n’auraient pas dit aux autres jeunes filles de partager avec elles ! 

La fin de la parabole est assez cruelle. La porte est fermée, les cinq jeunes filles imprévoyantes n’entreront pas. Elles s’entendent même dire : « je ne vous connais pas ». Comment réagit-on à cela ? C’est bien fait pour elles ? Elles n’avaient qu’à prévoir de l’huile… Je ne suis pas sûr du tout que ce soit l’effet que Jésus voulait produire avec cette parabole. 


Veillez donc…

Regardons la conclusion de Jésus : « Veillez donc, car vous ne connaissez ni le jour ni l'heure. »  Il s’agit d’une parole qu’il a sans doute dite à plusieurs reprises, et que les évangélistes associent à différents enseignements de Jésus, en lien avec son retour, l’accomplissement ultime du projet de Dieu. 

Mais que signifie « veiller » ici, dans cette histoire ? Surtout pour une parabole où, justement, tous les personnages s’endorment ! Ça devrait quand même nous mettre la puce à l’oreille. 

Souvent, peut-être pour se rassurer, on dit que veiller, dans cette histoire, c’est prévoir de l’huile. Et on essaye tant bien que mal d’imaginer ce que peut bien signifier « prévoir de l’huile ». Evidemment, quelle que soit l’interprétation qu’on en donne, on estime toujours qu’on est, soi-même, dans le bon camp, celui des jeunes filles prévoyantes. Les jeunes filles imprévoyantes, ce sont les autres ! 

Sauf que, bien souvent, les paraboles de Jésus sont là moins pour nous conforter dans nos certitudes que pour nous interpeller. On fait en général fausse route quand on dit : cette parabole, elle est pour les autres ! 

Même si on estime qu’il faut mettre l’accent sur le fait d’être prévoyant ou non, peut-on simplement dire à la fin aux cinq autres jeunes filles : « tant pis pour vous, vous n’aviez qu’à être prévoyante ! » ?

Et si « veiller » signifiait autre chose ici ? Et si cette parabole était une mise en garde, voire un mauvais exemple à ne pas suivre ? On pourrait considérer que le malaise produit par cette histoire vise justement à nous réveiller, à nous faire prendre conscience d’une situation qui n’est pas satisfaisante. La moitié des jeunes filles prévues pour la fête restent dehors à la fin de l’histoire ! Comment peut-on s’en satisfaire ? 

On pense en général que l’interpellation de Jésus dans cette parabole concerne les jeunes filles imprévoyantes, et donc celles et ceux qui pourraient s’identifier à elles, par leur insouciance, leur laxisme, leur incrédulité… Jésus leur dirait alors : ne soyez pas comme elles ! OK… 

Mais on peut peut-être voir les choses autrement. Et si l’interpellation était aussi pour celles et ceux qui s’identifient aux jeunes filles prévoyantes ? Pour qu’elles ne se contentent pas d’envoyer les autres aller s’acheter de l’huile mais envisagent, pourquoi pas, de prendre le risque de partager leur huile avec elles. Pour qu’elles ne se satisfassent pas du « chacun pour sa pomme » mais cherchent à trouver une solution pour que les dix jeunes filles participent à la fête. 

La question serait alors : Que faire aujourd’hui devant la porte du Royaume, que nous ayons ou non de l’huile dans nos lampes ?


Devant la porte du Royaume… 

Tenons-nous donc avec les dix jeunes filles devant la porte du Royaume… Que pouvons-nous y voir ? 

La moitié des jeunes filles reste dehors

Une leçon de cette parabole, avec sa fin cruelle, c’est que la moitié des jeunes filles reste dehors. Aujourd’hui encore, une partie importante de l’humanité passe à côté du Royaume de Dieu. Peut-on s’en satisfaire, attendre le jour où il sera trop tard et dire : allez vous acheter de l’huile, vous n’aviez qu’à être prévoyant ?

Non ! Nous avons une Bonne Nouvelle à annoncer aujourd’hui : il y a une place pour vous dans le Royaume de Dieu, préparez-vous à y entrer. Attention : c’est la Bonne Nouvelle du Christ qu’il s’agit d’annoncer, pas celle de notre Eglise. C’est la bonne nouvelle du Royaume de Dieu, pas celle d’une religion ou d’une confession. Voilà une huile que nous devons partager, celle de la Bonne Nouvelle du Christ ! 

La moitié des jeunes filles garde leur huile pour elles

Si les dix jeunes filles représentent l’humanité, peut-on rester devant la porte, ensemble, chacun avec son huile et en renvoyant les autres à leur responsabilité ? Peut-on s’en satisfaire ? 

N’est-ce pas plus criant encore aujourd’hui, dans notre monde plus que jamais individualiste, où règne le chacun pour soi ? Ne doit-on pas prendre le risque de partager notre huile pour ne pas se satisfaire d’un monde où domine la compétition, la rivalité, un monde de plus en plus polarisé, conflictuel, terreau de la haine et des violences ? C’est l’huile de l’amour du prochain que nous sommes appelés à partager. Un prochain croyant ou non, sage ou fou, prévoyant ou imprévoyant… 

Deux catégories de jeunes filles

Et si les dix jeunes filles de la parabole pouvaient aussi être une image de l’Eglise du Christ ? Nous y retrouverions alors la tentation d’enfermer les uns et les autres dans des catégories (entre « vrais » et « faux » chrétiens). Toute Eglise a tendance à élaborer, plus ou moins consciemment, le modèle du « bon » chrétien… et risque d’exclure ceux qui n’y correspondent pas. 

Peut-on se satisfaire d’une Eglise de Jésus-Christ trop souvent morcelée, marquée par les divisions, les rivalités, les anathèmes ? C’est l’huile du Saint-Esprit, qui nous unit au Christ, que nous avons à partager, dans la rencontre de nos frères et sœurs en Christ, dans la reconnaissance de sa présence et de son œuvre au-delà de nos cercles habituels. 


Conclusion

La lecture que je propose de cette parabole, et ses prolongements, n’est certainement pas la lecture traditionnelle… Mais est-ce que ça ne peut pas être, au moins, une lecture complémentaire ? 

A l’écoute de cette parabole, il ne s’agirait pas de croire qu’elle est pour les autres seulement. Et si la question n’était pas seulement de savoir si nous avons ou non de l’huile dans nos lampes mais ce que nous allons faire de cette huile aujourd’hui ? 

Dans tous les cas, on ne peut se contenter de belles paroles, de « bons conseils » qui sonnent creux. Il s’agit d’agir, de vivre, d’aimer, de partager. C’est un risque à prendre… 




dimanche 27 octobre 2024

Le juste par la foi vivra

Est-ce que vous connaissez les cinq affirmations fondamentales qu’on associe à la Réforme, que l’on peut considérer comme l’héritage théologique des Protestants ? 

  • Sola fide (la foi seule). C’est par la foi seulement qu’on est sauvé. 
  • Sola gratia (la grâce seule). Le salut est une grâce, un cadeau de Dieu. 
  • Sola Scriptura (l’Ecriture seule). L’Ecriture (la Bible) est la seule autorité en matière de foi et de vie chrétienne. 
  • Solus Christus (le Christ seul). Jésus-Christ est le seul chemin qui conduit à Dieu.
  • Soli Deo Gloria (A Dieu seul la gloire). Comme tout est don de Dieu, c’est à lui seul que l’on rend gloire. 

La première affirmation, sans doute la plus fondamentale, est Sola fide. C’est elle qui a été à l’origine du changement radical de Martin Luther, et plus largement de la redécouverte de la Bonne Nouvelle du Christ par les Réformateurs. Dieu n’attend de nous que la foi, rien d’autre. Aucune œuvre, aucun mérite de notre part. Simplement la foi. 

C’est par la lecture de l’épître aux Romains que Luther a reçu cette conviction, lorsque l’apôtre Paul développe l’idée de la justice de Dieu, celle qu’il nous donne en Jésus-Christ, et que nous accueillons par la foi. 

Après les formules traditionnelles de salutation et une introduction par laquelle il exprime son désir d’aller à Rome pour y rencontrer une Eglise qu’il ne connaît pas encore, il dit, en quelques mots, la Bonne Nouvelle qu’il va développer tout au long de son épître. 

Ce sont ces deux versets qui ont changé la vie du moine Martin Luther et qui ont fait l’effet d’une bombe pour lui, faisant éclater les carcans d’une religion où la pression des mérites et le poids de la culpabilité l’oppressaient. Il a écrit ceci à propos de sa découverte :  

« Aussitôt, je me sentis renaître, et il me sembla être entré par des portes largement ouvertes au Paradis même… Autant j’avais détesté ce terme de « justice de Dieu », autant j’aimais, je chérissais maintenant ce mot si doux. Et c’est ainsi que ce passage des Écritures devint pour moi la porte du Paradis. »

Lisons maintenant ce fameux texte, et voyons comment il peut encore aujourd’hui être une formidable source de libération pour nous. 

Romains 1.16-17
16C'est sans honte, en effet, que j'annonce la bonne nouvelle : elle est la force dont Dieu se sert pour sauver toutes les personnes qui mettent leur foi en lui, les Juifs d'abord, mais aussi ceux qui ne sont pas Juifs. 17En effet, la bonne nouvelle révèle comment Dieu rend les humains justes devant lui. Cette justice vient par la foi et a pour but la foi, comme l'affirme l'Écriture : « Celui qui est juste par la foi vivra. »

Qu’est-ce qui a été si libérateur pour Luther dans ce texte ? Une compréhension toute nouvelle de la justice de Dieu. Lui qui était angoissé pour son salut, rongé de culpabilité et redoutant le jugement de Dieu sur sa vie et ses fautes, il comprend soudain que Dieu n’est pas ce juge qu’il croyait, et qu’il n’attend de nous que la foi. 

Il s’agit bien en effet d’être juste par la foi… et non pas par nous-mêmes. La justice de Dieu, et c’est cela la Bonne Nouvelle, c’est celle qui se trouve en Jésus-Christ. La question n’est pas de savoir comment on devient juste devant Dieu mais comment Dieu nous déclare juste devant lui. Il ne s’agit pas de savoir comment Dieu rend justice mais comment il nous rend juste. La justice de Dieu, ce n’est pas celle que Dieu attend de nous, c’est celle qu’il nous donne. 

C’est Dieu qui a pourvu à la justice, par son Fils Jésus-Christ, le Juste, mort et ressuscité pour nous. Nous n’avons plus à nous soucier de notre propre justice, nous devons simplement accueillir par la foi la justice que Dieu nous donne. La Bonne Nouvelle, c’est ce renversement radical. 

Notre part, c’est la foi. Un simple accueil de la justice de Dieu, qui est pure grâce. Le juste par la foi vivra ! L’apôtre Paul cite et revisite ici une affirmation du prophète Habaquq. Dans le contexte du prophète, il s’agissait d’opposer l’attitude du juste à celle de l’orgueilleux : « Celui qui est gonflé d'orgueil ignore la droiture, mais le juste vit par sa fidélité (ou sa foi). » (Habaquq 2.4) Paul élargit la portée de cette formule et l’applique à la question du salut.

Dans la formulation grecque, celle du Nouveau Testament, « par la foi » peut être rattaché à « juste » ou à « vivra ». Paul joue probablement sur ce double sens possible. Il parle bien d’abord d’être juste par la foi. Mais il évoque aussi le fait de vivre par la foi. C’est un peu ce qui ressort de la formule qu’il utilise juste avant la citation : « Cette justice vient par la foi et a pour but la foi », littéralement elle est « par la foi et pour la foi ». La justice que Dieu nous donne en Jésus-Christ se reçoit par la foi et se vit dans la foi. 

Voilà bien l’idée l’on retrouve dans la formule de la Réforme, sola fida, la foi seule. 


Une Bonne Nouvelle à annoncer

Le juste par la foi vivra. C’est un des principaux aspects de la Bonne Nouvelle du Christ. Le salut est une libération et non pas un enfermement. Il est une grâce reçue et pas une contrainte à respecter. C’est une question de foi et non pas de religion, d’efforts ou de mérites. Sinon ce n’est plus une Bonne Nouvelle… qui est, rappelons-le, le sens du mot « évangile ». 

Prenons garde, dans notre témoignage et notre annonce de l’Evangile, à ce que nous proclamons ou laissons entendre. Est-ce bien une Bonne Nouvelle que nous annonçons ? 

Veillons à ne pas réduire la Bonne Nouvelle à un message figé et stéréotypé… Je ne vois pas dans le Nouveau Testament une façon exclusive de dire la Bonne Nouvelle. En revanche, elle tourne toujours autour de la personne de Jésus-Christ. Si bien qu’on pourrait dire que, fondamentalement, la Bonne Nouvelle, c’est Jésus-Christ. Ce n’est pas un ensemble de doctrines auxquelles il faut croire à propos de Jésus-Christ, c’est la possibilité d’une rencontre personnelle avec le Christ. 

Veillons, et c’est plus important encore, à ne pas réduire la Bonne Nouvelle à la transmission d’une morale ou la défense de « valeurs chrétiennes ».  Sinon, nous laissons entendre que devenir chrétien, c’est forcément adopter ces valeurs. 

Tant que tu n’es pas « rentré dans le moule », tant que ta vie n’est pas caractérisée par ces valeurs telles que nous les définissons, tu n’es pas vraiment chrétien. Alors on doute de la conversion ou de la sincérité de la foi de ceux qui ne correspondent pas à nos standards moraux…

Et on oublie qu’annoncer la Bonne Nouvelle, c’est annoncer le Christ, sa mort et sa résurrection, et la possibilité de le rencontrer par la foi. 


Une Bonne Nouvelle à vivre

Le juste par la foi vivra. La vie dont il est question ici n’est pas seulement la vie à venir, après notre mort. C’est déjà la vie ici et maintenant. La vie éternelle commence aujourd’hui, dans la rencontre avec le Christ. 

L’accueil de la grâce, par la foi, n’est pas seulement la porte qui permet d’entrer dans le Royaume de Dieu, c’est aussi le chemin qui parcourt ce Royaume. La justice de Dieu, son salut, c’est par la foi et pour la foi. Ce n’est pas la foi au début et ensuite nos efforts, nos œuvres et nos mérites. C’est la foi. Toujours la foi. Seulement la foi. 

On trouve un exemple à ne pas suivre dans le Nouveau Testament, celui des Galates, auxquels l’apôtre Paul reproche de se remettre sous le joug de la Loi après avoir reçu la grâce. Il leur écrit ceci : « Je suis stupéfait de la rapidité avec laquelle vous vous détournez de Dieu : il vous a appelés par la grâce du Christ. Et vous, vous vous tournez vers une autre bonne nouvelle ! » (Galates 1.6) et il ajoute immédiatement que ce n’est plus, en réalité, une bonne nouvelle… Et un peu plus loin : « Comment pouvez-vous être aussi insensés ? Ce que vous avez commencé par l'Esprit de Dieu, voulez-vous l'achever maintenant par vous-mêmes ? » (Galates 3.3)

Le seul moteur de la vie chrétienne, c’est la foi. Du premier au dernier jour. La foi seule. Et c’est aussi libérateur au moment de notre découverte du salut de Dieu que tout au long de notre cheminement. Pourquoi Dieu nous accueillerait-il par grâce pour ensuite nous mettre la pression afin que nous conformions notre vie à ses exigences ? Non ! Ce qu’il attend de nous, chaque jour, c’est la foi. Toujours la foi. Seulement la foi. 

Cette foi, cette confiance placée en Dieu, qui nourrit une intimité avec le Christ, elle produira du fruit en nous. C’est l’Esprit du Seigneur, qui vit en nous, qui la produira naturellement. Mais sans contrainte ni pression. Avec patience. 


Conclusion

Vous me direz peut-être que je présente une vision un peu « gentille » des choses. Qu’on pense à Jésus envers ses disciples, ou envers les Pharisiens. Ou à Paul envers les destinataires de ses lettres. Ils ont quand même aussi parfois tapé du poing sur la table, ils ont mis la pression sur les croyants auxquels ils s’adressaient !

C’est vrai. Mais n’était-ce pas pour les appeler à revenir à la foi et la grâce ? N’était-ce pas pour dénoncer la pression abusive qu’ils mettaient sur les autres, ou sur eux-mêmes ? Bref, leur manque de grâce… et leur manque de foi en Dieu. 

Revenir sans cesse à la foi seule, et à la grâce seule, c’est la seule façon de s’en remettre pleinement à Dieu, de le laisser agir en nous, librement. C’est une Bonne Nouvelle à vivre et à partager. 


dimanche 12 septembre 2021

Disciples à plein temps ?

 

>>> Regarder la vidéo (à cause d'un problème technique, en audio seulement)

Ce matin, nous commençons la campagne de rentrée proposée par notre Union d'Églises sur le thème : “Partout et tout le temps, suivre le Christ tout simplement”. J’ai participé à la formulation de cette thématique, et je l’assume. Mais je me dis quand même que c’est facile à dire et bien plus difficile à faire ! 

Suivre le Christ, est-ce vraiment si simple que ça ? Est-ce que vous trouvez que c’est facile de vivre en chrétien aujourd’hui ? On pourrait d’ailleurs élargir la question, que vous soyez croyant ou non : est-ce que vous trouvez que c’est facile de vivre au quotidien en cohérence avec vos convictions et vos valeurs ? 

On a sans doute tous des convictions et des valeurs qui nous animent. J’espère que c’est votre cas ! C’est ce qui donne du sens à notre existence. Mais sans doute que, plus ces convictions sont fortes et plus ces valeurs sont élevées, plus il est difficile de les vivre et de les mettre en pratique. Parce que nos idéaux rencontrent la réalité, la réalité de notre monde et de ceux qui le composent, et il faut bien l’avouer aussi, la réalité de notre coeur, de notre volonté, pas toujours à la hauteur. 

Évidemment, ce serait plus facile de vivre seulement avec ceux qui partagent nos convictions et nos valeurs. En l'occurrence, suivre le Christ serait déjà plus facile si ce n’était pas partout et tout le temps… Si on pouvait choisir les jours, les circonstances et les personnes avec qui suivre le Christ. Plus largement, si on pouvait côtoyer seulement ceux qui partagent nos valeurs et discuter seulement avec ceux qui ont les mêmes idées que nous, la vie serait tranquille ! 

Apprendre à vivre parfois en décalage voire à contre-courant, avec les frustrations, voire les souffrances que cela implique, faire face à la contradiction voire à l'opposition, ce n’est, certes, pas confortable… mais c’est incontournable, sauf à se retirer complètement du monde et vivre dans sa bulle. Et c’est une option que le croyant ne peut pas choisir, puisque le Christ envoie explicitement ses disciples dans le monde, pour être témoin de leur Seigneur. 

Eh oui, nous sommes bel et bien appelés à suivre le Christ, partout et tout le temps. 

C’est dans cette perspective que l’apôtre Pierre écrit à des croyants d’Asie Mineure. Et dans son adresse, il les désigne avec des termes qui peuvent surprendre au premier abord. Mais s’ils sont bien compris, ils restent pertinents pour nous aujourd’hui. Ils permettent même de dire comment nous sommes appelés à suivre le Christ, tout simplement. 

1 Pierre 1.1-2

1 De la part de Pierre, apôtre de Jésus Christ.

À ceux que Dieu a choisis et qui vivent en immigrés, dispersés dans les provinces du Pont, de la Galatie, de la Cappadoce, de l'Asie et de la Bithynie. 2 Dieu, le Père, vous a choisis d'avance selon un projet qui est le sien ; il vous fait vivre pour Dieu, grâce à l'Esprit saint, pour que vous obéissiez à Jésus Christ et que vous soyez purifiés par le sang qu'il a versé. 

Que la grâce et la paix vous soient données en abondance !


Les termes utilisés par Pierre pour décrire la situation des destinataires de sa lettre évoquent plutôt la précarité : ils sont immigrés et dispersés. Mais c’est pourtant ainsi que Dieu les a choisis (c’est affirmé deux fois dans le texte !), selon son projet. 


Immigrés 

Être immigré, c’est être dans une situation de précarité, qui peut certes s’améliorer avec les années, grâce à une intégration réussie, mais qui est souvent synonyme de difficultés multiples, d’incompréhension, de frustrations, voire de souffrance et de rejet… 

On en parle souvent dans la Bible. Abraham et les patriarches étaient des migrants nomades. Et puis il y a eu l’Exode, avec la sortie d’Egypte et l’errance de 40 ans dans le désert, et aussi l’Exil, avec les 70 ans passées par les habitants de Juda en exil à Babylone. 

Cet omniprésence du motif de l’immigration fonde les appels répétés à accueillir et aimer les immigrés, comme par exemple :

Deutéronome 10.19

Vous donc aussi, aimez l'immigré car vous avez été immigrés en Égypte.

Et s’il y a cet appel répété à aimer l’immigré, c’est que ce n’est pas forcément naturel... Hier comme aujourd’hui, le statut d’immigré est un statut précaire. Dans le Nouveau Testament,  le motif est repris et compris de façon spirituelle : le croyant est un immigré ici-bas, il est seulement de passage sur Terre, en chemin vers sa patrie céleste. 

Et c’est parfois aussi synonyme de difficultés multiples, d’incompréhension, de frustrations, voire de souffrance et de rejet… 


Dispersés

Les destinataires de la lettre de Pierre sont non seulement immigrés mais aussi dispersés. Les provinces mentionnées ici étaient situées en Asie Mineure, la Turquie actuelle. Elles désignent sans doute des destinataires multiples d’une lettre appelée à circuler dans plusieurs Églises d’une  même région. Bien que dispersés, ils reçoivent la même lettre, qui les désignent tous de la même manière : “ceux que Dieu a choisis” (dans les versions plus anciennes ont traduisait “les élus”)

On pourrait comprendre cette dispersion comme une faiblesse... Mais en y réfléchissant, j’ai pensé à une parabole de Jésus : la parabole du Semeur. 

Luc 8.5-8

5 « Le semeur sortit pour semer du grain. Comme il semait, une partie des grains tomba au bord du chemin : on marcha dessus et les oiseaux les mangèrent. 6 Une autre partie tomba sur un sol pierreux : dès que les plantes poussèrent, elles se desséchèrent parce qu'elles manquaient d'humidité. 7 Une autre partie tomba dans les ronces qui poussèrent en même temps que les bonnes plantes et les étouffèrent. 8 Mais une autre partie tomba dans la bonne terre ; les plantes poussèrent et produisirent des épis : chacun portait cent grains. » Et Jésus ajouta : « Celui qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende ! »

Certes, quand Jésus explique cette parabole, il dit bien que la semence c’est la Parole de Dieu et que les différents terrains représentent les différentes façons d’accueillir ou non cette Parole. Mais qui sont les porteurs de la Parole du Christ aujourd’hui sinon ceux qu’il envoie, ses disciples ? Qui sont-ils sinon, au temps de l’apôtre Pierre, ces croyants dispersés dans les différentes provinces d’Asie Mineure ? Ils sont comme autant de graines que le Semeur jette et qui tombent dans différents terrains. 

Cette dispersion peut donc aussi être perçue comme une chance d’être présent partout, “dans tous les terrains”. Dans notre contexte, on peut l’entendre sans doute comme le fait d’être dispersés sur nos lieux de vie, dans nos familles, sur nos lieux de travail ou d’engagement. Là où nous sommes dispersés, du lundi au samedi…  Car c’est bien ce que nous sommes la plupart de notre temps. C’est une exception, et une exception heureuse, lorsque nous sommes rassemblés, comme ce matin. Mais la plupart du temps, nous sommes dispersés… et ce n’est pas un problème. C’est même tout à fait normal. 

On peut même dire que dans une perspective biblique, on n’est pas dispersés par hasard ni même par nécessité. On y est envoyés par Dieu, pour y vivre en disciples du Christ !


Choisis

Le problème n’est pas d’être dispersés, c’est d’être isolé. Quand la dispersion résulte de l’éclatement ou du chacun pour soi, alors c’est difficile à vivre. C’est pour cela qu’il est essentiel de comprendre que nous sommes envoyés par Dieu sur nos lieux de vie. Ce n’est pas un éclatement subi, c’est ce que Dieu veut. Et on n’y est pas seulement pour soi mais pour les autres. 

Car on peut être dispersés sans être isolés. On peut être dispersés et connectés ! Connectés les uns aux autres. Et on a plein de moyens de le faire aujourd’hui ! Et surtout connectés, ensemble, au même Dieu, qui est avec nous et qui nous unit dans un même appel.

C’est ce que Pierre souligne. Il y a bien une réalité qui unit tous ces croyants dispersés, c’est d’avoir été choisis selon le projet de Dieu. Il ne s’agit pas, ici, pour Dieu, de seulement connaître par avance ce qui va se passer. Dieu n’est pas un spectateur passif de l’histoire, même par avance… il est pleinement actif dans son projet. Et Pierre le souligne avec une formulation trinitaire : le projet du Père, l’oeuvre accomplie par le Fils à la croix et par le Saint-Esprit en nous. Dieu est tout entier, Père, Fils et Saint-Esprit, engagé dans la réalisation de son projet. 


Le projet de Dieu, c’est nous !

Immigrés… nous sommes de passage sur cette Terre. Notre horizon s’étend au-delà de ce monde, au-delà de cette vie. 

Dispersés… nous sommes envoyés par Dieu sur nos lieux de vie. Nous n’y sommes pas par hasard ou par nécessité mais parce que Dieu nous y envoie. 

Choisis… nous sommes unis à Dieu et les uns aux autres. Bien que dispersés, nous ne sommes pas seuls. 

En fait, pour faire encore plus court, on pourrait dire que le projet de Dieu, c’est nous ! Dans notre quotidien, nous sommes autant de graines semées par Dieu sur tous types de terrain, pour y porter la semence du Royaume de Dieu. 

Et nous ne sommes pas dispersés seulement pour “prêcher la bonne parole”… mais pour vivre la Bonne Nouvelle. Cette Bonne Nouvelle, c’est Jésus-Christ mort et ressuscité. C’est Jésus-Christ vivant, pour toujours avec nous. 

Bien-sûr, il s’agit aussi de dire cette Bonne Nouvelle, quand c’est le moment approprié. Mais avant tout, il s’agit de la mettre en pratique, à la maison, au bureau, sur les bancs de l’amphi, sur le terrain de sport... Il s’agit de la manifester concrètement, en laissant transparaître ce que produit l’Esprit de Dieu en nous et dont l’apôtre Paul cite une liste non exhaustive : l'amour, la joie, la paix, la patience, la bienveillance, la bonté, la fidélité, la douceur, la maîtrise de soi (cf. Galates 5.22)... Voilà une façon toute concrète d’être disciple du Christ au quotidien, partout et tout le temps !

Car être disciple de Jésus-Christ, ce n’est pas venir au culte le dimanche matin. Ou en tout cas pas seulement... C’est marcher avec le Christ vivant sur les chemins de notre vie, car il nous accompagne du lundi au samedi aussi. Car c’est alors que nous verrons si nous nous conduisons en disciples du Christ... Bref, si nous suivons le Christ, tout simplement. 


dimanche 24 janvier 2021

Une bonne nouvelle !


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Cette semaine, dans le quotidien La Croix, est sorti un dossier intitulé “La galaxie des évangéliques en France”. Et c’est plutôt un bon dossier, honnête, loin des caricatures et des clichés qu’on entend bien trop souvent sur les évangéliques, dans les médias en général, et jusque chez certains responsables politiques. 

On dit et on entend tout et n’importe quoi sur les évangéliques. Ou plutôt sur les “évangélistes” comme on en parle souvent abusivement… Faut-il le rappeler : il y a quatre évangélistes (Matthieu, Marc, Luc et Jean) et 600 000 protestants évangéliques en France, plus de 600 millions dans le monde. Mais nous appeler “évangélistes”, ça permet de faire rimer le terme avec intégriste, islamiste, populiste, complotiste, tous des mots en -iste qui font peur. 

C’est vrai qu’on a souffert depuis quatre ans d’un certain évangélisme politique en provenance des Etats-Unis qui ne nous a pas aidé dans notre image médiatique... C’est vrai aussi qu’il peut y avoir, y compris en France, des discours ou des pratiques regrettables voire condamnables dans certaines Églises évangéliques. Mais d’une manière générale, les évangéliques en France sont des gens comme les autres, respectueux des principes de la République, attachés à la liberté de conscience puisqu’ils insistent sur l’importance d’une foi personnelle et libre, et qui prient même régulièrement pour les responsables politiques en place, comme la Bible les y invitent. Franchement, il n’y a pas de quoi avoir peur de nous ! 

On peut être agacé par cette image faussée, par ces clichés… mais qu’on le veuille ou non, il y a des mots qui sont piégés. Ça ne veut pas dire qu’il faut y renoncer. Mais il faut sans doute être vigilant, et exemplaire, pour redorer le blason médiatique des évangéliques. 

Et justement, pour cela, il s’agit de s’attacher à l’essentiel, qui n’est pas l’étiquette évangélique mais bel et bien l'Évangile dont nous nous réclamons. Mais le mot Évangile lui-même n’est-il pas, aussi, un mot mal compris, y compris chez les chrétiens, y compris même chez les évangéliques ? 

Est-ce qu’on n’a pas tendance à oublier que le mot français, Evangile, n’est qu’une transcription du terme grec euangelos qui se traduit très facilement en français. Ça veut dire “bonne nouvelle”. L’Evangile, c’est la Bonne Nouvelle qui se rapporte à Jésus-Christ. Je trouve, d’ailleurs, qu’il vaudrait mieux utiliser le moins possible le mot “Evangile” pour le remplacer par l’expression qui lui correspond en français : “Bonne Nouvelle”. 

Mais en quoi est-ce une bonne nouvelle ? Et comment est-ce que ça peut l'être pour nous, et pour les autres ? 

Pour répondre à cette question, je vous propose de lire un très court texte tiré de l’Evangile (la Bonne Nouvelle !) selon Marc qui, comme à son habitude, dit en très peu de mots ce qui est l’essentiel. 


Marc 1.14-15

14 Après que Jean eut été mis en prison, Jésus se rendit en Galilée ; il y proclamait la bonne nouvelle de Dieu. 15 « Le moment favorable est venu, disait-il, et le règne de Dieu est tout proche ! Changez de vie et croyez à la bonne nouvelle ! »


La Bonne Nouvelle...

C’est Jésus !

La première chose que Jésus dit est : “Le moment favorable est venu”. Les versions plus anciennes traduisent, plus littéralement : “le temps est accompli”. Mais le temps dont il est question ici, ce n’est pas le temps qui s’écoule (le grec chronos), c’est l’instant T, le moment favorable (le grec kairos). 

La Bonne Nouvelle, c’est qu’avec Jésus, l’instant T de l’histoire de l’humanité est arrivé. C’est le moment de l’accomplissement de la promesse de Dieu. Si bien qu’on pourrait presque dire, pour aller vraiment à l’essentiel, que la Bonne Nouvelle, c’est Jésus ! C’est Dieu qui devient homme. C’est sa vie, son exemple, son enseignement, sa mort et sa résurrection. 

C’est que le Royaume de Dieu est là

Quelle bonne nouvelle Jésus proclamait-il ? Elle commence par cette affirmation : “Le règne de Dieu est tout proche !” On pourrait même traduire : “Le Royaume (ou le règne) de Dieu est là !”

Or, le Royaume de Dieu, c’est là où Dieu règne, là où sa présence se manifeste. Et la Bonne Nouvelle, c’est que nous n’avons pas à attendre l’au-delà pour vivre dans la présence de Dieu. Ce n’est pas pour demain seulement, c’est pour aujourd’hui. La vie éternelle, ce n’est pas que la vie après la mort, c’est la vie avec Dieu, dès aujourd’hui. 

La Bonne Nouvelle, c’est que le Royaume de Dieu peut faire irruption dans votre vie, là, tout de suite ! 

C’est que le changement est possible

Comment l’accueillir ? Jésus le dit : “Changez de vie et croyez à la bonne nouvelle !” C’est le fameux verbe traduit anciennement par “repentez-vous” mais qui signifie plus largement un changement radical, un changement de pensée, de compréhension, un changement de vie. Et c’est un changement rendu possible par la foi. 

Ce que dit Jésus, c’est que le changement est possible. Si on croit à cette Bonne Nouvelle, si on fait confiance à Dieu, si on ose l’aventure de la foi, le changement est possible. Et ça c’est une bonne nouvelle ! 

Le Royaume de Dieu est devenu tellement proche qu'il s’installe en nous. Dieu veut faire sa demeure dans notre vie. Et là où Dieu s’installe, tout change ! 


Une Nouvelle toujours bonne ?

C’est une Bonne Nouvelle pour tous, elle s’offre à tous. Mais elle risque, si nous n’y prenons pas garde, de perdre de sa saveur pour nous et pour les autres. Il y a un risque que la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ cesse d’être une bonne nouvelle. 

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand, au lieu de présenter une personne, elle présente un code de morale ou un corpus théologique. La Bonne Nouvelle, ce n’est pas qu’on puisse adhérer à une religion mais qu’on puisse rencontrer par la foi le Christ vivant. Pour Jésus, croire à la Bonne Nouvelle, c’est changer de vie, pas changer de croyance ou de religion. 

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand elle n’est qu’une promesse pour demain, un ticket pour le Paradis, un passeport pour l'au-delà. Le Royaume de Dieu est là, tout proche. Maintenant. Dieu est présent dans notre vie, pour peu qu’on apprenne à ouvrir les yeux. 

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand elle est réduite à des valeurs et des principes. La Bonne Nouvelle concerne notre vie quotidienne, nos préoccupations, nos luttes, nos épreuves mais aussi nos joies, nos découvertes et nos enthousiasmes. La Bonne Nouvelle, c’est la vie, la vie avec Dieu, aujourd’hui, et pour l’éternité. 

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand elle est un message archaïque, exprimé dans un langage dépassé, compréhensible par des initiés seulement, appuyée sur des valeurs d’un autre âge. Parce que Dieu chemine avec l’humanité, son Royaume est contemporain et moderne. La Bonne Nouvelle est pertinente aujourd’hui, et elle doit pouvoir se formuler dans un langage clair et moderne, dans des modes d’expression et des supports médiatiques d’aujourd’hui. 

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand nos belles paroles sont contredites par nos actes, notre vie de tous les jours. Quand ce n'est plus qu'un message abstrait, désincarné, qui n’est pas vécu. La Bonne Nouvelle s’incarne dans des vies transformées par Dieu. 

La Bonne Nouvelle n’en est plus une quand elle réduit Jésus à un homme exemplaire, un révolutionnaire pacifiste ou un théoricien de l’amour. Même devenu homme, le Christ n’en demeure pas moins le Fils de Dieu. Sa vie, sa mort, sa résurrection sont uniques. Ce n’est pas seulement une bonne nouvelle parmi d’autres. C’est LA Bonne Nouvelle, pour tous !


Conclusion

En fait, pour que la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ reste une bonne nouvelle, il faut que nous la laissions nous transformer, aujourd’hui, et que ça se voie… 

Il faudrait que la présence d’une Église soit perçue comme une Bonne Nouvelle pour la ville, la population où elle est installée. Il faudrait que la présence d’un disciple de Jésus-Christ soit une bonne nouvelle pour ses amis et ses proches. Il faudrait que l’assurance et l’espérance qui s’y rattache soient une bonne nouvelle pour un monde dans l’incertitude et la crainte. 

Alors à nous de jouer ! Avec l’aide de Dieu et de son Esprit, évidemment. Sans lui, nous n’y arriverons pas... Ne craignons pas les étiquettes, les clichés et les idées fausses. Vivons simplement et partageons cette bonne nouvelle, LA Bonne Nouvelle de Jésus-Christ. 

« Le moment favorable est venu, et le règne de Dieu est tout proche ! Changez de vie et croyez à la bonne nouvelle ! »




dimanche 31 mai 2020

LE DÉFI DE PENTECÔTE



Pentecôte, c’est le jour J pour l’Eglise. Le moment à partir duquel la Bonne Nouvelle va se répandre ! Jusque là, les disciples étaient réunis entre eux, parfois en présence du Christ ressuscité. Ils attendaient que la promesse de Jésus de leur envoyer le Saint-Esprit se réalise. Au début de notre récit, les disciples sont d’ailleurs réunis dans une maison... Et puis le Saint-Esprit descend sur eux, les foules accourent, intriguées, et l’Evangile est annoncé. 

Bref, la descente de l’Esprit saint sur les disciples, c’était un peu le déconfinement de l’Eglise… C’est donc un assez joli symbole que nos cultes puissent reprendre en ce dimanche de   Pentecôte !

Actes 2.1-13
1 Quand le jour de la Pentecôte arriva, les croyants étaient réunis tous ensemble au même endroit. 2 Tout à coup, un bruit vint du ciel, comme un violent coup de vent, et il remplit toute la maison où ils étaient assis. 3 Ils virent apparaître des langues pareilles à des flammes de feu ; elles se séparèrent et se posèrent une à une sur chacun d'eux. 4 Ils furent tous remplis de l'Esprit saint et ils se mirent à parler en d'autres langues, selon ce que l'Esprit leur donnait d'exprimer.
5 À Jérusalem vivaient des Juifs qui honoraient Dieu, venus de tous les pays du monde. 6 Quand ce bruit se fit entendre, ils s'assemblèrent en foule. Ils étaient tous profondément surpris, car chacun d'eux entendait les croyants parler dans sa propre langue. 7 Ils étaient remplis de stupeur et d'admiration, et disaient : « Ces gens qui parlent, ne sont-ils pas tous Galiléens ? 8 Comment se fait-il que chacun de nous les entende parler dans sa langue maternelle ? 9 Parmi nous, il y en a qui viennent du pays des Parthes, de Médie et d'Élam. Il y a des habitants de Mésopotamie, de Judée et de Cappadoce, du Pont et de la province d'Asie ; 10 certains sont de Phrygie et de Pamphylie, d'Égypte et de la région de Cyrène, en Libye ; d'autres sont venus de Rome, 11 de Crète et d'Arabie ; certains sont nés Juifs, et d'autres se sont convertis à la religion juive. Et pourtant nous les entendons parler dans nos diverses langues des grandes œuvres de Dieu ! » 
12 Ils étaient tous remplis de stupeur et ne savaient plus que penser ; ils se demandaient les uns aux autres : « Qu'est-ce que cela signifie ? » 13 Mais d'autres se moquaient en disant : « Ils sont complètement ivres ! »

Ces dernières semaines, nous avons tous vécu une expérience commune, universelle. La pandémie que nous traversons, et surtout l’expérience du confinement qui lui est liée, sera inscrite dans les livres d’histoire : plus de la moitié de l’humanité a été confinée en même temps ! Cette expérience commune a été vécue dans des circonstances variables, selon que vous avez été atteint par le virus ou non, en fonction des conditions dans lesquelles vous avez vécu le confinement, seul ou avec d’autres, avec ou sans jardin, avec des enfants scolarisés à la maison, en télétravail ou si vous avez continué de travailler pour assurer des services essentiels… Il y a donc eu une expérience commune, partagée par tous, mais elle a été vécue différemment par chacun. 

N’est-ce pas, d’ailleurs, le propre d’une expérience universelle ? Elle est partagée par tous mais vécue différemment par chacun. L’événement de la descente de l’Esprit saint à la Pentecôte a indéniablement un caractère universel, et on y retrouve cette tension entre le “tous” et le “chacun”.

Lorsque le Saint-Esprit se manifestent, il est dit : “Ils virent apparaître des langues pareilles à des flammes de feu ; elles se séparèrent et se posèrent une à une sur chacun d'eux.” (v.3)
C’est le même Saint-Esprit qui descend sur tous les disciples réunis, mais cela se manifeste par des langues de feu qui se séparent pour se poser une à une sur chacun. 

Plus loin, ce qui cause l’étonnement de la foule réunie à Jérusalem ce jour-là, c’est d’entendre parler des merveilles de Dieu dans la propre langue de chacun. Et que sont ces grandes oeuvres de Dieu sinon l’Evangile, la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ ? Il suffit de lire le discours de Pierre dans la deuxième partie du chapitre pour en avoir la preuve. Or, les foules disent : “Comment se fait-il que chacun de nous les entende parler dans sa langue maternelle ?” (v.8)
Autrement dit, c’est la même Bonne Nouvelle qui est proclamée à tous, mais dans la langue maternelle de chacun. 

L’Evangile, la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, est véritablement universelle. Elle est la même pour tous, mais elle est aussi entendue, reçue et incarnée différemment par chacun. Et cette tension entre le “pour tous” et le “pour chacun” de l’Evangile, constitue un des grands défis de l’Eglise, qu’on pourrait formuler ainsi :

Il y a une seule Bonne Nouvelle pour tous, à traduire dans la langue de chacun, et à recevoir dans sa propre langue maternelle. 


Une seule Bonne Nouvelle pour tous 

Il faut qu’elle soit la même pour tous, sinon chacun invente une Bonne Nouvelle à sa mesure… qui ne sera donc plus une Bonne Nouvelle pour tous ! Et il faut en même temps que cette Bonne Nouvelle soit personnelle, pour qu’elle rejoigne chacun. 

Comment transmettre une Bonne Nouvelle qui soit à la fois unique pour tous et personnelle à chacun ? Quel est le message dont nous sommes porteurs ?

Nous n’avons pas une religion à proposer, avec ses rites et ses traditions, nous n’avons pas à doctrine à proposer, avec ses certitudes et ses dogmes. Nous avons une personne à faire connaître : Jésus-Christ, le Fils de Dieu devenu homme, mort et ressuscité ! Il veut nous rencontrer et nous sauver. C’est ça la Bonne Nouvelle !

Il me semble donc que c’est seulement si la Bonne Nouvelle que nous annonçons est centrée sur la personne de Jésus-Christ qu’elle peut être à la fois pour tous et pour chacun. Parce qu’elle n’est pas alors un énoncé doctrinal ou un ensemble de précepts religieux. Elle est l’occasion d’une rencontre, par la foi, avec quelqu’un. Une rencontre qui débouche sur une relation personnelle. Ce que nous partageons, c’est la rencontre avec le Christ vivant. Mais notre relation avec lui est personnelle à chacun. 


Traduite dans la langue de chacun

Pour qu’elle soit accessible, cette Bonne Nouvelle doit être traduite dans la langue de chacun. Je me suis rendu compte que nous avons dans ce récit la première traduction de l’Evangile ! L’hébreu et le grec, qui sont les langues d’origine de l’AT et du NT, ne sont pas des langues sacrées. Ce qui compte, c’est le message. Et parce que c’est une Bonne Nouvelle, et qu’elle est pour tous, il faut la traduire dans toutes les langues !

Or la traduction est un art difficile ! Vous avez peut-être des souvenirs douloureux d’étudiants devant votre version anglaise ou latine... ou de la difficulté de votre apprentissage du français si ce n’est pas votre langue maternelle !

Or tout chrétien est appelé à être un traducteur de l’Evangile. Pas tellement pour écrire des versions de la Bible en différentes langues, mais pour le rendre compréhensible par nos contemporains, nos amis, nos proches. Et vous savez qu’il n’est pas toujours facile de trouver les mots justes pour témoigner de notre foi… Mais il ne faut pas oublier que la meilleure traduction de l’Evangile est sans doute sa traduction concrète, dans nos vies. 

Nous ne sommes pas responsable de l’accueil que les autres vont réserver à la Bonne Nouvelle, mais nous sommes responsables de la façon dont nous la traduisons, dans nos mots et dans notre vie quotidienne. L’élément important que nous révèle le récit de Pentecôte, c’est que cette traduction est une oeuvre du Saint-Esprit. C’est lui qui donne aux disciples la capacité de parler des merveilles de Dieu dans d’autres langues… C’est lui qui pourra rendre notre témoignage accessible et pertinent envers notre prochain. 


Reçue dans sa langue maternelle

L’Evangile est une Bonne Nouvelle, non pas seulement quand elle est annoncée mais quand elle est reçue. 

Cela s’exprime, dans la récit de Pentecôte, par l’émerveillement des foules qui entendent parler des oeuvres de Dieu “dans leur langue maternelle”. Littéralement, en grec, on parle de “la langue dans laquelle nous sommes nés”. C’est la langue qu’on a apprise enfant, celle de nos parents, de notre éducation. Une Bonne Nouvelle traduite dans ma langue maternelle, c’est une Bonne Nouvelle qui parle mon langage, qui rejoint mon histoire. 

Le Fils de Dieu, en devenant homme, nous a rejoint dans notre histoire humaine. Il est devenu l’un des nôtres, comme nous tous. Par son Esprit, il me rejoint, aujourd’hui, dans mon histoire. Il nous appelle chacun à le suivre et il habite notre quotidien. C’est la Bonne Nouvelle pour tous et pour chacun !

D’où l’importance, dans l’Eglise, de partager notre foi commune, de la vivre et de l’exprimer ensemble. C’est pour cela que nous sommes heureux de pouvoir reprendre nos cultes ! Mais d’où l’importance aussi de ne pas enfermer chacun dans des stéréotypes ou des carcans mais de savoir accueillir la diversité de nos spiritualités, une même foi exprimée dans un langage propre à chacun !


Conclusion

Juste avant son Ascension, Jésus avait donné à ses disciples cet ordre de mission : “Vous recevrez une force quand l'Esprit saint descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'au bout du monde.” (Actes 1.8)

Depuis le jour J de la Pentecôte, cet ordre de mission reste valable. Le flambeau nous est parvenu, de génération en génération. Le défi de Pentecôte se poursuit : il y a une seule Bonne Nouvelle pour tous, à traduire dans la langue de chacun, et à recevoir dans sa propre langue maternelle. 

Et n’oublions une autre excellente nouvelle liée à Pentecôte : c’est le Saint-Esprit, qui habite en nous, qui nous rendra capable de dire les merveilles de Dieu de façon appropriée, dans le langage de notre prochain !



dimanche 21 avril 2019

Pâques : une Bonne Nouvelle pour aujourd'hui !

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En général, les mauvaises nouvelles se propagent plus rapidement que les bonnes... surtout aujourd'hui avec les réseaux sociaux et les chaînes d'information en continu. On en a encore eu un exemple étonnant cette semaine avec l'incendie de Notre Dame de Paris. C'était impressionnant de voir la vitesse avec laquelle l'information a circulé, et puis les réactions ont rapidement afflué du monde entier... et presque aussitôt sont arrivées les fake news et autres théories complotistes !

Si vous voulez propager une nouvelle, il vaut mieux qu'elle soit mauvaise, si possible anxiogène, et si elle peut avoir un petit parfum de complot, c'est encore mieux. Ça marchera à coup sûr !

Les bonnes nouvelles, par contre, ce n'est pas très vendeur ! Elles ne font presque jamais la une des journaux. Sauf quand la France est championne du monde de foot... mais ça arrive une fois tous les vingt ans ! Les bonnes nouvelles ne tournent pas en boucle sur les chaînes d'info continue, elles sont très peu partagées sur les réseaux sociaux...

Pourtant, aujourd'hui, c'est Pâques. Et nous avons une bonne nouvelle à annoncer : Jésus-Christ est ressuscité ! Et ce n'est pas une fake news !!!

Cette bonne nouvelle, elle est répétée par les chrétiens depuis près de 2000 ans. Jésus-Christ était mort et il est ressuscité. Quelle bonne nouvelle !

Ne l'oublions jamais, lorsque nous parlons de l'Evangile, nous parlons d'une bonne nouvelle. Le mot « évangile » n'est que la transcription en français d'un terme grec qui signifie « bonne nouvelle ». Plusieurs versions récentes de la Bible n'utilisent plus le mot « évangile » et préfèrent parler simplement de « bonne nouvelle ». Et je trouve qu'elles ont raison !

Je vous invite donc ce matin à nous demander : Pourquoi le message de Pâques est-il une bonne nouvelle ? Et pourquoi est-ce que ça l'est aujourd'hui encore ?

Un des textes du jour, dans la liste de lectures bibliques pour ce dimanche, se trouve dans le livre des Actes des apôtres. On y trouve l'annonce de cette bonne nouvelle. Et en plus, c'est un extrait de « notre » texte, celui que nous avons choisi pour notre Eglise dans le cadre du parcours Vitalité. Je ne pouvais donc pas passer à côté...

Actes 10.34-43
34 Pierre prend la parole et dit : « Maintenant, je comprends vraiment que Dieu accueille tout le monde. 35 Si quelqu'un le respecte avec confiance et fait ce qui est juste, cette personne plaît à Dieu. C'est vrai dans tous les pays. 
36 Dieu a envoyé sa parole au peuple d'Israël : il lui a annoncé la Bonne Nouvelle de la paix par Jésus-Christ, qui est le Seigneur de tous. 37 Tout a commencé après que Jean a lancé cet appel : “Faites-vous baptiser ! ” Vous savez ce qui est arrivé, d'abord en Galilée, puis dans toute la Judée. 38 Vous savez comment Dieu a répandu la puissance de l'Esprit Saint sur Jésus de Nazareth. Jésus est passé partout en faisant le bien. Il guérissait tous ceux qui étaient prisonniers de l'esprit du mal, parce que Dieu était avec lui. 39 Et nous, nous sommes témoins de tout ce qu'il a fait dans le pays des Juifs et à Jérusalem. On l'a supprimé en le clouant sur une croix. 40 Mais, le troisième jour, Dieu l'a réveillé de la mort et il lui a donné de se montrer 41 non pas à tout le peuple, mais à nous. En effet, Dieu nous a choisis d'avance comme témoins. Quand Jésus s'est relevé de la mort, nous avons mangé et bu avec lui. 
42 Il nous a commandé d'annoncer la Bonne Nouvelle au peuple et de rendre ce témoignage : Jésus est celui que Dieu a choisi pour juger les vivants et les morts. 43 Tous les prophètes ont parlé de lui en disant : “Toute personne qui croit en Jésus reçoit par son nom le pardon des péchés.”  »

On oublierait presque que le terme « évangile » signifie simplement « bonne nouvelle », et il en est de même du verbe « évangéliser » qui signifie simplement « annoncer ou apporter une bonne nouvelle ». C'est ce verbe qui est utilisé ici par Pierre, au verset 36 : « il a annoncé la Bonne Nouvelle de la paix par Jésus-Christ ».


La Bonne Nouvelle, c'est qu'elle est pour tout le monde

Le message de la mort et de la résurrection de Jésus est d'abord une bonne nouvelle parce qu'elle est pour tout le monde. Pierre le comprend enfin dans notre texte. Et il s'en émerveile !

« Maintenant, je comprends vraiment que Dieu accueille tout le monde. Si quelqu'un le respecte avec confiance et fait ce qui est juste, cette personne plaît à Dieu. C'est vrai dans tous les pays. »

Cette Bonne Nouvelle n'est pas liée à une culture ou à un peuple, elle n'est pas réservée à une catégorie de la population. Elle est pour tout le monde. Pour tous ceux qui veulent bien la recevoir.

C'est pour cela qu'elle doit être proclamée, partagée. Un bonne nouvelle qui serait réservée à quelques-uns serait-elle encore une bonne nouvelle ? Ce serait un bonne nouvelle pour les uns et une mauvaise pour les autres !

Or, cela n'a pas été évident aux premiers temps de l'Eglise. Les chrétiens, qui étaient tous Juifs, pensaient que les païens n'étaient pas concernés par cette Bonne Nouvelle. Ça ne leur était même pas venu à l'esprit d'aller leur annoncer le salut en Jésus-Christ. Ce n'est que dans notre épisode du livre des Actes des apôtres que Pierre le découvre : « Maintenant, je comprends vraiment que Dieu accueille tout le monde. »

Et nous, y a-t-il des gens que nous excluons de la Bonne Nouvelle ? La question peut nous déranger voire nous choquer... mais il est légitime de nous la poser. Est-ce que vraiment nous considérons que la Bonne Nouvelle est pour tout le monde ? En théorie, j'imagine que tout le monde dira oui... mais est-ce vrai aussi en pratique, dans notre attitude, dans nos relations ?

Est-ce que tout le monde est vraiment le bienvenu parmi nous ?

Une église doit être le lieu de la Bonne Nouvelle. Pas du jugement sur les apparences, la façon de parler ou de prier, sur les choix de vie... Même par souci de pureté ou de fidélité à Dieu. C'est avec ce souci-là que les premiers chrétiens ont reproché à Pierre d'être allé manger chez Corneille... et que les Pharisiens reprochaient à Jésus de fréquenter des « gens de mauvaise vie ».


La Bonne Nouvelle, c'est l'histoire de Jésus

Mais quelle est donc cette Bonne Nouvelle ? Dans notre texte, lorsque Pierre l'évoque, il raconte l'histoire de Jésus, de son baptême à sa résurrection. D'ailleurs, les quatre Evangiles ne font pas autre chose : ils racontent l'histoire de Jésus !

Prêcher l'Evangile, c'est d'abord raconter l'histoire de Jésus. Surtout pas défendre une religion. Même pas présenter un énoncé doctrinal. Pour annoncer la Bonne Nouvelle, il ne s'agit pas tellement de présenter « les 4 points de l'Evangile » ou « les 4 lois spirituelles »... Je ne dis pas que ce n'est pas bien, je dis juste que ce n'est pas cela la Bonne Nouvelle. Annoncer la Bonne Nouvelle, prêcher l'Evangile, c'est d'abord raconter l'histoire de Jésus.

Et raconter cette histoire, c'est aussi affirmer que la mort et la résurrection de Jésus s'inscrivent dans l'histoire de l'humanité. Elles ont bel et bien eu lieu. Ce ne sont pas des métaphores.

S'il y a un point sur lequel le Nouveau Testament insiste, c'est bien celui-là. Les quatre évangiles l'affirment : il y a non seulement le tombeau vide mais aussi les apparitions répétées du Christ ressuscité, avec force détails. Jésus parle avec ses disciples, il mange devant eux, il invite même Thomas à le toucher. Dans notre texte, Pierre le dit : « Quand Jésus s'est relevé de la mort, nous avons mangé et bu avec lui. »

Il est essentiel, quand on raconte la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, de dire que ce n'est pas juste une histoire mais que c'est l'histoire ! La venue de Jésus, sa vie, sa mort et sa résurrection, tout cela s'est réellement passé. Sans la résurrection du Christ, tout s'écroule.

En fait, si Jésus-Christ n'est pas vraiment ressuscité, il n'y a plus de Bonne Nouvelle !


La Bonne Nouvelle, c'est notre histoire avec Jésus

Mais si on en reste là, et qu'on se limite à souligner l'historicité de la résurrection de Jésus, on passe à côté de toute une partie de la Bonne Nouvelle. L'histoire de Jésus appartient à l'histoire de l'humanité, mais elle rejoint aussi notre histoire personelle. Si la Bonne Nouvelle est bien l'histoire de Jésus, elle est aussi notre histoire avec Jésus. C'est aussi l'histoire de Jésus dans notre vie.

Jésus est ressuscité. Mais comme le dit l'apôtre Paul, nous sommes ressuscités avec le Christ. Ou encore : « Si quelqu'un est uni au Christ, il est créé à nouveau. Ce qui est ancien est fini, ce qui est nouveau est là. » (2 Corinthiens 5.17)

C'est la même idée que souligne Pierre en disant : “Toute personne qui croit en Jésus reçoit par son nom le pardon des péchés.” Ici, le pardon des péchés, c'est le signe d'une vie nouvelle, d'un nouveau départ.  Être ressuscité avec le Christ, c'est recommencer sa vie, effacer notre ardoise, repartir à zéro... recevoir le pardon des péchés.

C'est la puissance de la résurrection du Christ qui agit en nous lorsqu'elle nous fait naître à une vie nouvelle. Mais pas seulement. Elle agit tout au long de notre vie chrétienne.

Quand avez-vous vu pour la dernière fois la puissance de résurrection du Christ agir dans votre vie ? Ne cherchez pas seulement des événements spectaculaires ou miraculeux. Elle n'agit pas seulement dans l'immédiat, elle agit aussi dans la durée, en profondeur.

La puissance de résurrection du Christ agit en nous toutes les fois où elle nous relève ou elle nous réveille.

  • Elle agit toutes les fois où nous remportons une victoire sur les puissances de mort ou de destruction qu'on peut trouver en nous. 
  • Elle agit lorsqu'elle nous libère d'une addiction ou d'une habitude néfaste.
  • Elle agit lorsqu'elle nous relève après une chute ou lorsqu'elle nous tient debout au milieu de l'épreuve.
  • Elle agit lorsqu'elle nous réveille d'une torpeur, qu'elle nous révèle une vérité oubliée ou cachée. 
  • Elle agit lorsqu'elle nous restaure, nous transforme, nous fait grandir spirituellement. 


Cherchez bien... et vous trouverez où la puissance de résurrection du Christ a agit dans votre vie. Et vous trouverez peut-être aussi où vous devez encore la laisser agir en vous. Ça aussi, c'est une Bonne Nouvelle !


Conclusion

Jésus-Christ est ressuscité ! C'est la Bonne Nouvelle que nous apporte Pâques !

C'est une bonne nouvelle parce qu'elle proclame la victoire du Christ sur la mort, et elle nous ouvre sur une espérance éternelle. C'est une bonne nouvelle parce qu'elle est pour tous, et qu'elle nous concerne chacun personnellement. Car annoncer la résurrection du Christ, c'est dire aussi qu'il est vivant aujourd'hui encore. La même puissance qui l'a ressuscité d'entre les morts est à l'oeuvre en nous. Elle nous fait naître à une vie nouvelle, elle nous façonne, elle nous transforme... même si ça prend du temps. C'est une bonne nouvelle parce qu'elle est le gage qu'un jour, à notre tour, nous serons ressuscités, comme Jésus-Christ l'a été.

C'est quand même un sacrée bonne nouvelle, non ?

dimanche 7 décembre 2014

La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, commence ici


Lecture biblique : Marc 1.1-8

Marc commence son évangile avec une phrase qui pourrait passer inaperçue, une simple formule banale : « La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, commence ici. »

Mais y a-t-il vraiment des formules banales dans les évangiles ? Chaque phrase a son importance. Même celle-ci, qui nous en dit finalement bien plus qu'on pourrait le croire à la première lecture.


La Bonne Nouvelle, c'est Jésus !

Le mot évangile est entré dans le langage courant. Et pour nous, ça désigne un livre. Ou plutôt quatre livres du Nouveau Testament. Et on oublierait presque parfois que ce n'est qu'une transcription d'un terme grec qui a une signification très simple : évangile signifie bonne nouvelle.

Or, quel étrange prophète de bonne nouvelle ce Jean-Baptiste, qui apparaît dès le début de l'évangile selon Marc ! Derrière son apparence hirsute d'ermite retiré dans le désert, vêtu d'habits sommaires, avec un régime alimentaire des plus rudimentaires, il proclame un message radical et exigeant : « changez votre vie ! »

Mais en réalité, la Bonne Nouvelle, ce n'est pas Jean-Baptiste, ni même son message. La Bonne Nouvelle, c'est un personne. C'est celui qui vient après lui. Celui dont Jean dit qu'il n'est pas digne d'ôter ses sandales... Ce n'est pas nous, les chrétiens, ou l’Église, et encore moins une religion... La Bonne Nouvelle, c'est Jésus.

Et ce n'est pas fini ! C'est aussi le fait que cette personne soit le Christ, le Messie, celui que Dieu a choisi pour accomplir son plan de salut. Et ce n'est pas fini ! C'est aussi le fait que ce Messie est le Fils de Dieu, Dieu lui-même. Voilà la Bonne Nouvelle : Jésus est le Christ, le Fils de Dieu.

Est-ce que nous vivons l’Évangile comme une bonne nouvelle ? Est-ce que nous l'annonçons comme une bonne nouvelle ? Est-ce que les gens voient dans notre vie, dans notre Église, que c'est une bonne nouvelle ?


La Bonne Nouvelle commence (presque) ici...

En réalité, on devrait dire que la Bonne Nouvelle commence presque ici... Parce que si la Bonne Nouvelle, c'est Jésus-Christ, Marc ne nous en parle pas tout de suite.

Il y a d'abord les prophètes, et notamment Esaïe qui annonce l'émergence d'une voix qui crie dans le désert. Et donc il y a aussi d'abord Jean-Baptiste, et sa prédication publique invitant les foules à se préparer à l'accueil du Messie qui doit venir. Il y a d'abord ce baptême d'eau proposé par Jean qui annonce un autre baptême, celui de l'Esprit saint, que le Christ apportera.

Bref, la Bonne Nouvelle ne tombe pas comme ça du ciel, du jour au lendemain. Son émergence est préparée. Vous connaissez le cantique traditionnel :

« Depuis plus de 4000 ans, nous le promettaient les prophètes,
Depuis plus de 4000 ans, nous attendions cet heureux temps... »

Dans le calendrier liturgique, le temps de l'Avent, tout un mois durant, nous rappelle cette attente. Noël, la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ venu sur terre, arrive au terme d'un temps de préparation. Et il y a là une vérité importante : pour recevoir la Bonne Nouvelle, il faut y être préparé, comme la bonne terre de la parabole, prête à accueillir la semence.

Comment avons-nous été préparés à recevoir la Bonne Nouvelle ? Par notre éducation ? Par des rencontres ? Par des circonstances, des événements heureux ou non, qui ont émaillé notre existence ? Nous avons tous un chemin, propre à chacun, dans lequel pourtant nous pouvons sans aucun doute discerner des jalons que Dieu a posé dans notre vie pour nous préparer à l'accueil de la Bonne Nouvelle.

Et puis cette Bonne Nouvelle, on ne la reçoit pas une fois dans sa vie et c'est terminé. L'Evangile nous rencontre et nous interpelle sans cesse. Nous nous réunissons pour entendre tout à nouveau cette Bonne Nouvelle... Mais comment nous y préparons-nous ?


La Bonne Nouvelle commence... mais ne se termine pas

Avec un tel début pour son ouvrage, on pourrait s'attendre à une fin similaire. Du style : « La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, se termine ici... ». Mais si on va à la fin de l’Évangile selon Marc, on se rend compte que ce n'est pas le cas. Pas du tout.

En réalité, l’Évangile selon Marc a la particularité d'avoir une fin abrupte, une fin ouverte. Il est communément admis aujourd'hui que les versets 9-20 sont un ajout postérieur à la rédaction de l’Évangile. Rien d'hérétique dans ces versets, qui empruntent leur contenu aux autres évangiles et au livre des Actes des apôtres. Mais à l'origine, l'évangile selon Marc s'arrêtait au verset 8, de façon surprenante :

« Les femmes sortent de la tombe et partent en courant. Elles tremblent, elles sont bouleversées, et elles ne disent rien à personne, parce qu'elles ont peur. »

Je ne sais pas si vous aimez les fins ouvertes dans un roman ou dans un film. Elles peuvent nous frustrer parce qu'elles ne proposent pas une fin claire et précise. C'est ce qui explique l'ajout à la fin de l'évangile selon Marc... Mais elles peuvent aussi nous stimuler parce qu'elles nous laissent imaginer la suite. Les fins ouvertes nous interpellent, elles nous invitent à continuer l'histoire.

Dans la Bible, le livre de Jonas aussi a une fin ouverte. Avec une question que Dieu pose au prophète sans qu'il y ait de réponse explicite :

« Alors, est-ce que je ne peux pas, moi, avoir pitié de cette grande ville de Ninive ? » (Jonas 4.11)

La Bonne Nouvelle de Jésus-Christ a un commencement... mais pas de fin. Elle commence avec sa naissance, elle se poursuivra avec sa mort sur la croix. Mais ce ne sera pas la fin : elle se poursuivra avec sa résurrection. Voilà pourquoi elle n'a pas de fin, parce que Jésus-Christ est ressuscité et il est vivant pour toujours !

De plus, le fait qu'il n'y ait pas de fin à l’Évangile selon Marc nous invite aussi à continuer l'histoire. L'Evangile ne doit pas rester un livre, il doit devenir pour nous une Bonne Nouvelle, il veut poursuivre son histoire dans chacune de nos vies.


Conclusion

Dès le début de son ouvrage, Marc nous rappelle que l’Évangile est une Bonne Nouvelle parce qu'il ne s'agit ni d'un simple message ni d'une religion, mais d'une personne. Jésus-Christ, Fils de Dieu.

Et cette Bonne Nouvelle est vivante parce que Jésus-Christ est vivant. Recevoir l’Évangile, c'est laisser le Christ entrer dans notre vie, et nous tenir prêt à l'accueillir tout à nouveau chaque jour.

Pour chacun de nous, la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu, peut commencer ici et maintenant.