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dimanche 10 septembre 2023

Comment entendre Dieu répondre à notre prière ?

 

Dimanche dernier, nous avons commencé une mini-série de trois prédications sur la prière, à partir des enseignements de Jésus à ses disciples, dans Matthieu 6 et Luc 11. La première question à laquelle nous avons tenté de répondre était : « Pourquoi est-il important de prier ? » Et nous avons répondu en disant que la prière est importante pour le chrétien parce qu’elle tisse des liens d’intimité avec Dieu, elle nous permet de mieux le connaître et d’affermir notre confiance en lui. 

La deuxième question qui va nous intéresser, sans doute une des plus complexes concernant la prière, est celle de l’exaucement ou non, de la réponse de Dieu à nos prières. « Comment entendre Dieu répondre à notre prière ? »

Je vous propose de lire l’enseignement de Jésus sur la prière dans l’évangile de Luc, au chapitre 11. C’est un peu différent du texte de Matthieu 6 lu dimanche dernier. On y trouve aussi le Notre Père mais dans une version plus courte que chez Matthieu. Et Jésus prolonge son enseignement avec une parabole… étonnante. 

Luc 11.1-13
1 Un jour, Jésus priait en un certain lieu. Quand il eut fini, un de ses disciples lui demanda : « Seigneur, enseigne-nous à prier, comme Jean l'a appris à ses disciples. » 2 Jésus leur dit : « Quand vous priez, dites :
“Père,
que chacun reconnaisse qui tu es ;
que ton règne vienne !
3 Donne-nous chaque jour le pain dont nous avons besoin.
4 Pardonne-nous nos péchés,
car nous pardonnons nous-mêmes à tous ceux qui nous ont fait du tort.
Et ne nous laisse pas entrer dans l'épreuve.” »
5 Jésus leur dit encore : « Supposons ceci : l'un d'entre vous a un ami qu'il va trouver chez lui en pleine nuit pour lui dire : “Mon ami, prête-moi trois pains. 6 Un de mes amis qui est en voyage vient d'arriver chez moi et je n'ai rien à lui offrir.” 7 Et supposons que l'autre lui réponde de l'intérieur de la maison : “Laisse-moi tranquille ! La porte est déjà fermée à clé, mes enfants et moi nous sommes au lit ; je ne peux pas me lever pour te donner des pains.” 8 Eh bien, je vous l'affirme, même s'il ne se lève pas par amitié pour les lui donner, il se lèvera pourtant et lui donnera tout ce dont il a besoin parce que son ami insiste sans se gêner. 9 Et moi, je vous dis : demandez et vous recevrez ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l'on vous ouvrira la porte. 10 Car celui qui demande reçoit, qui cherche trouve et l'on ouvre la porte à qui frappe. 11 Si l'un d'entre vous est père, donnera-t-il un serpent à son fils alors que celui-ci lui demande un poisson ? 12 Ou bien lui donnera-t-il un scorpion s'il demande un œuf ? 13 Vous qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants. À combien plus forte raison le Père qui est au ciel donnera-t-il l'Esprit saint à ceux qui le lui demandent ! »

Qu’on ne vienne pas me dire que Jésus n’avait pas d’humour ! Quand il a dit ces enseignements sur la prière, je suis sûr qu’il l’a fait avec un large sourire aux lèvres, ce qu’il dit est plein d’ironie. 

L’idée centrale de son enseignement est simple : « Demandez et vous recevrez ! » Mais il fait précéder cette formule d’une parabole étonnante voire comique, et il la prolonge avec une métaphore ironique. 


La parabole du casse-pied

Tout d’abord, il y a cette parabole qu’on appelle pudiquement la parabole de l’ami importun. Je l’appellerais plutôt la parabole du casse-pied qui empêche son ami de dormir. Voilà une drôle d’histoire pour illustrer la prière et la question de l’exaucement ! 

Dans cette parabole, l’homme qu’un ami vient importuner au milieu de la nuit est bien la figure de Dieu à qui on adresse une prière. Et il ne veut pas répondre favorablement à la sollicitation de son ami qui vient le déranger. Il est au lit, il ne veut pas se lever. Et s’il finit par céder, c’est parce que son ami insiste lourdement, au point d’en devenir gênant. Il faut essayer de se représenter la scène : l’ami casse-pied n’a pas envoyé un SMS, il n’est même pas en train de parler avec son ami en bas de l’immeuble, par le moyen d’un interphone… Il est sans doute dehors, au pied de la fenêtre, en train de crier. Il doit réveiller son ami, on est au milieu de la nuit. Et il insiste, pour qu’il finisse par accéder à sa demande. Au risque de réveiller tout le monde, la famille de son ami, les voisins, tout le quartier…  Alors l’homme finit par céder, pour avoir la paix ! 

C’est quand même une drôle d’histoire pour parler de la prière ! Est-ce que Jésus est en train de dire qu’on doit casser les pieds à Dieu jusqu’à ce qu’il cède à nos prières, pour avoir la paix ? Ce serait quand même en contradiction avec ce que Jésus disait, dans le texte de Matthieu 6, sur la prière des païens qu’il ne faut pas imiter et qui, à force de prier et de multiplier les paroles, pensent obtenir ce qu’ils demandent.

Demandez et vous recevrez ! OK mais ce n’est pas automatique… 


Une métaphore ironique

La métaphore qui suit, à partir du verset 10, celle du père qui donne de bonnes choses à ses enfants, précise cet enseignement sur la prière et son exaucement. 

On y retrouve une relation plus conforme à celle dont on a l’habitude pour parler de la relation de Dieu avec nous. Celle d’un père envers son enfant. Mais le propos de Jésus n’est pas non plus sans ironie. Quel père donnerait à son enfant un serpent au lieu d’un poisson ou un scorpion à la place d’un œuf ? Un père indigne qu’il faudrait immédiatement signaler aux autorités judiciaires pour lui retirer la garde de son enfant ! 

L’enseignement que Jésus tire de cette métaphore obéit à un argument à fortiori : si vous qui êtes mauvais (sans forcément être des pères indignes…) vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison Dieu, qui est parfaitement bon, le fera. 

Remarquez deux choses dans cette conclusion de Jésus. D’abord, il est question de donner de bonnes choses. Pas tout et n’importe quoi. Imaginons que le même enfant demande à son père un serpent ou un scorpion, est-ce qu’il les lui donnera ? Quel père indigne le ferait ? Un enfant peut parfois demander des choses absurdes, voire dangereuses, à ses parents, même sans s’en rendre compte… et il serait irresponsable de la part des parents de céder à ses caprices. 

Quand Jésus dit à ses disciples « Demandez et vous recevrez » il n’est pas en train de dire que Dieu cèdera à tous leurs caprices. S’ils demandent de bonnes choses, Dieu les leur donnera. Et il ne faut pas craindre de casser les pieds à Dieu ! Parfois, on a peur de « déranger » Dieu par nos prières… On se dit : franchement, qu’est-ce qu’il en a à faire ? Est-ce qu’il va vraiment écouter ma demande. Il y a des choses plus graves dans le monde, des gens qui ont des besoins bien plus importants que moi… Mais Jésus dit : demandez et vous recevrez ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l'on vous ouvrira la porte. N’ayez pas peur de casser les pieds à Dieu. Jamais. C’est sans doute une des leçons de la parabole du casse-pied…

L’autre chose à remarquer dans la conclusion de Jésus, c’est la formule qui, chez Luc, n’est pas strictement parallèle. Chez Matthieu, ça l’est : « Vous qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants. À combien plus forte raison votre Père qui est dans les cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui les lui demandent ! » (Mt 7.11) Mais chez Luc, Jésus dit : « Vous qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants. À combien plus forte raison le Père qui est au ciel donnera-t-il… l'Esprit saint à ceux qui le lui demandent ! » Comment comprendre cette variante chez Luc ? 

On pourrait sans doute dire que le Saint-Esprit est bien la meilleure des choses que Dieu puisse nous accorder. Autre possibilité : c’est par le Saint-Esprit que Dieu nous accorde les bonnes choses dont nous avons besoin. Mais ne peut-on pas aller plus loin et dire que c’est le Saint-Esprit qui nous permet de comprendre quelles sont les bonnes choses que Dieu nous accorde ? 

La dissymétrie dans la formule attire notre attention. Il y a de l’implicite, du sous-entendu dans les paroles de Jésus. Oui, Dieu donnera de bonnes choses, et c’est par le Saint-Esprit que nous pourrons comprendre que ce sont de bonnes choses. D’autant qu’on pourrait aussi traduire « Dieu donnera l’Esprit saint à ceux qui le prient. » Le verbe grec utilisé ici peut signifier demander mais aussi tout simplement prier.  

C’est le Saint-Esprit qui peut nous rendre capable d’entendre la réponse de Dieu, quelle qu’elle soit, et de comprendre ce que sont les bonnes choses qu’il nous accorde. C’est bien le rôle du Saint-Esprit que d’éclairer notre esprit, nous donner la sagesse, le discernement et comprendre les intentions de Dieu. 

Si on essaye donc de résumer, en quelques mots, l’enseignement de Jésus dans notre texte, on pourrait dire : N’ayons pas peur de casser les pieds à Dieu par nos prières, il est toujours prêt à nous écouter et il veut nous donner de bonnes choses, que le Saint-Esprit nous aidera à discerner comme bonnes. 


Comment entendre Dieu répondre à notre prière ?

Maintenant, concrètement, qu’est-ce qu’on fait avec tout ça ? OK, Dieu est toujours prêt à entendre nos prières et à nous donner les bonnes choses dont nous avons besoin. Mais comment ça se passe ? Comment entendre la réponse que Dieu adresse à nos prières ? Comment discerner quelles sont les bonnes choses qu’il veut nous donner ? 

Il arrive, heureusement, que Dieu exauce nos prières. Et là, j’aurais envie de dire qu’on n’a même pas vraiment besoin du Saint-Esprit ! Parfois, c’est une évidence que Dieu a répondu à notre prière et nous ne pouvons que lui être reconnaissant. Parfois, il nous faut un petit peu de temps pour discerner la réponse de Dieu, surtout lorsqu’elle n’est pas conforme à celle que nous attendions. Mais la conviction vient petit à petit. 

Mais ce ne sont évidemment pas les prières exaucées qui posent problème mais bien celles qui ne le sont pas ! C’est quand la réponse à notre prière ne vient pas, du moins pas comme on l’attend, que nous avons besoin du Saint-Esprit. C’est lui qui pourra nous convaincre que le non-exaucement de notre prière, finalement, est une bonne chose pour nous. 

Il peut arriver qu’on s’en rende compte après coup. Et on se dit heureusement que Dieu ne m’a pas exaucé, ce que j’ai demandé était idiot, inutile voire dangereux. Ou heureusement que l’exaucement est venu plus tard, différemment de ce que j’attendais, parce qu’entre-temps j’ai appris des choses, ma foi s’est affermie. 

Mais quand on demande à Dieu une chose, avec persévérance, et qu’on est convaincu que c’est une bonne chose, pour nous ou pour celui ou celle pour qui nous intercédons, et que Dieu ne répond pas, là c’est compliqué. 

Je n’ai pas de réponse toute simple ou de recettes à vous donner… D’ailleurs, méfiez-vous des recettes dans votre vie spirituelle, pour la prière ou pour n’importe quoi d’autre. Je me contenterai de proposer quelques pistes de réflexion… plus sous la forme de questions que d’affirmations. 

Et si Dieu nous avait déjà répondu mais que nous n’avons pas su, ou pas voulu, l’entendre ? 

Parfois, plutôt que de foncer tête baissée dans la prière persévérante voire obsessionnelle, peut-être faut-il s’arrêter, observer notre vie, examiner notre quotidien, chercher à y discerner la voix ou la main de Dieu ? Et peut-être que la réponse est déjà là mais que ce n’est pas celle que nous attendions ? 

Et si les silences de Dieu étaient là, parfois, pour nous laisser parler ? 

Peut-être Dieu garde-t-il le silence parce que c’est encore à nous de parler ? Peut-être que nous ne lui avons pas tout dit, qu’il y a quelque chose en nous dont nous devons nous libérer, un poids dont il faut nous décharger, une démarche de confiance, de lâcher prise à envisager ? 

Et si la non-réponse de Dieu, parfois, était une façon pour lui de nous dire que le moment n’est plus à la prière mais à l’action ? 

Il ne faudrait pas que nos prières soient un oreiller de paresse, une façon de nous dérober à nos responsabilités. N’attendons pas le risque zéro pour agir. Levons-nous et avançons, avec confiance et espérance. Jésus n’a-t-il pas dit qu’il serait avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde ? 


Conclusion

Les réponses à ces questions ne sont pas forcément faciles… et elles sont toutes personnelles. Et parfois ce sont d’autres questions que nous devrons nous poser… Mais pour entendre la voix de Dieu, sa réponse à nos prières, cela passe souvent par un temps de discernement, parfois de tâtonnement, jusqu’à parvenir à une conviction intérieure. 

S’il y a donc une prière essentielle à faire et à refaire sans cesse, une seule, c’est de demander à Dieu de nous éclairer par son Esprit, ou de nous laisser éclairer par lui. Car il a promis de donner le Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent !