dimanche 3 septembre 2023

Pourquoi est-il important de prier ?

 

C’est la rentrée des classes… Faisons un petit exercice de conjugaison ! 

Comme on est dans une église, conjuguons le verbe prier au présent de l’indicatif :
Je prie, tu pries, il/elle/on prie, nous prions, vous priez, ils/elles prient

Mais avouons que pour nous, le verbe Prier se conjugue assez souvent à l’impératif. A l’impératif présent : Prie ! Prions ! Priez ! 
On l’entend le dimanche au culte : « Prions ! ». Mais parfois aussi comme l’appel d’une petite voix intérieure, un peu culpabilisante : « Allez, prie ! »

Plus souvent qu’on le voudrait, il se conjugue plutôt au conditionnel :
Je prierais, tu prierais, il/elle/on prierait, nous prierions, vous prieriez, ils/elles prieraient
« Si je trouvais le temps, je prierais… »

Et sans aucun doute aussi à l’imparfait, ou même à l’imparfait du subjonctif :
Que je priasse, que tu priasses, qu'il/elle/on priât, que nous priassions, que vous priassiez, qu'ils/elles priassent.
« Ma vie chrétienne aurait pu être parfaite, mais encore eût-il fallu que je priasse ! »

La prière fait partie des incontournables de la vie chrétienne. Source de joie, de paix et d’encouragement, mais aussi parfois source de frustrations et de culpabilité, lieu de lutte et de combat. Le sujet est vaste et complexe. 

Il y a deux textes des évangiles où Jésus parle de la prière à ses disciples : Matthieu 6.5-13 et Luc 11.1-13. Dans ces deux textes, nous trouvons le modèle de prière que Jésus a enseigné à ses disciples, devenu le Notre Père, dans deux versions légèrement différentes. Jésus parle plus largement de la prière, pour mettre en garde ses disciples contre certaines dérives possibles et pour souligner ce qui est important dans la prière. 

Je vous propose, sur trois dimanches, de nous appuyer sur ces deux textes pour réfléchir à la prière, et tenter de répondre à trois questions :

  • Pourquoi est-il important de prier ? 
  • Comment entendre Dieu répondre à ma prière ? 
  • Comment être (un peu plus) satisfait de ma vie de prière ?

Pour répondre à la première question, nous allons lire le texte de Matthieu ce matin. 

Matthieu 6.5-13 
5Quand vous priez, vous ne serez pas comme les hypocrites : ils aiment à prier debout dans les synagogues et aux coins des grandes rues pour que tout le monde les voie. Je vous le déclare, c'est la vérité : ils ont déjà leur récompense. 6Mais toi, lorsque tu veux prier, entre dans ta chambre, à l'écart, ferme la porte pour prier ton Père qui est là, dans cet endroit secret ; et ton Père, qui voit ce que tu fais en secret, te récompensera.
7Quand vous priez, ne répétez pas sans fin les mêmes choses comme les païens : ils pensent qu'ils seront exaucés en multipliant les paroles. 8Ne les imitez pas, car votre Père sait de quoi vous avez besoin avant même que vous le lui demandiez. 9Vous donc, priez ainsi :
“Notre Père qui es dans les cieux,
que chacun reconnaisse qui tu es ;
10que ton règne vienne ;
que ta volonté soit faite sur la terre comme dans les cieux.
11Donne-nous aujourd'hui le pain dont nous avons besoin.
12Pardonne-nous nos torts,
comme nous pardonnons nous aussi à ceux qui nous ont fait du tort.
13Et ne nous laisse pas entrer dans l'épreuve,
mais délivre-nous du Mauvais.”

« Quand vous priez… » Jésus ne dit pas à ses disciples : « Si vous avez envie de prier ou si vous éprouvez le besoin de prier… » Il leur dit : « Quand vous priez… » La prière fait partie de la vie normale du disciple de Jésus-Christ. Ce n’est pas une option facultative proposée aux disciples, elle est une évidence incontournable. 

L’enseignement de Jésus sur la prière repose ici sur deux mises en garde et deux bonnes nouvelles. 


Deux mises en garde

Voyons d’abord les deux mises en garde de Jésus, les deux écueils à éviter, représentés par deux catégories de personnes : les hypocrites et les païens. Dans les deux cas, Jésus dit : « ne faites pas comme eux ! » 

Les hypocrites « aiment à prier debout dans les synagogues et aux coins des grandes rues pour que tout le monde les voie. ». En l’occurrence, dans la bouche de Jésus, ce sont sans doute les chefs religieux, qu’il traite plusieurs fois, ailleurs, d’hypocrite. Ce sont donc des gens pour lesquels on s’attend bien à ce qu’ils prient ! Et en particulier en public. 

Les hypocrites dont parle Jésus prient mais moins pour se faire entendre de Dieu que pour se faire entendre des autres. Leurs prières semblent s’adresser à Dieu mais ce qu’ils visent c’est d’être remarqués et admirés par les autres, par ceux qui, en les entendant, seront impressionnés par leur prière belle, profonde et spirituelle. Jésus dit d’eux qu’ils ont déjà reçu leur récompense… sous-entendant qu’ils obtiendront peut-être l’admiration des humains, naïfs ou mal informés, mais qu’ils ne s’attendent à rien d’autre de la part de Dieu !  

Les païens, ce sont les non-Juifs, ceux qui ne connaissent pas la révélation de Dieu par l’alliance avec Abraham, qui ne connaissent pas la loi de Moïse et qui, globalement, sont perçus comme idolâtres. Les païens prient pour obtenir ce qu’ils veulent de Dieu. Plus ils prient, plus ils pensent avoir de chances d’obtenir ce qu’ils veulent.

En fait, ce que Jésus décrit ici, c’est une forme de pensée magique qui relève plus de la superstition que de la foi. La pensée magique, c’est quand on attribue à telle parole, telle pensée ou tel geste le pouvoir d’accomplir ce qu’on souhaite, ou d’empêcher ce qu’on redoute, comme par magie. On va croiser les doigts pour avoir de la chance, ou penser très fort à quelque chose pour que ça se passe : l’arrivée du bus qu’on attend ou le bon numéro au loto. Ou on voit les sportifs faire toujours les mêmes gestes avant d’entrer sur le terrain ou de s’élancer dans une course. Ou quand quelqu’un est de mauvaise humeur on lui demande s’il s’est levé du mauvais pied, comme si le premier pied qu’on pose à terre le matin allait conditionner toute notre journée. 

On a tous des petites manies ou des rituels qui nous rassurent et ce n’est pas très grave. Mais quand la pensée magique prend trop de place, ça devient un handicap voire une pathologie. C’est une question de mesure… comme les prières des « païens ». 

Parce qu’il ne faudrait pas penser que les mises en garde de Jésus ne concernent que les chefs religieux et les païens de son temps ! D’ailleurs, c’est à ses disciples qu’il s’adresse. Les mises en garde leur sont adressées. Ce qui signifie que, tout disciple du Christ qu’ils sont, ils peuvent tomber dans l’un ou l’autre de ces écueils. Tout chrétien que nous sommes peut-être, nous pouvons tomber, dans notre façon de prier, dans l’hypocrisie ou la pensée magique. 

Où peuvent se cacher l’hypocrisie et la pensée magique dans nos prières ? 

Le même risque que celui des chefs religieux peut nous concerner lors d’un temps de prière publique, lorsque nous voulons plus montrer aux autres combien nous savons prier, avec des mots théologiques choisis et en citant des versets pour montrer notre culture biblique. Nous pouvons, plus largement peut-être, nous interroger sur les motivations derrière les prières que nous adressons à Dieu, que ce soit en public ou en privé : nos paroles correspondent-elles toujours à ce que nous cherchons à obtenir ? 

Quant à la pensée magique, elle peut être présente dès le moment où nous instrumentalisons la prière. Par exemple quand on pense qu’en visualisant ce qu’on demande à Dieu on le recevra, ou que plus la demande est précise et détaillée plus elle a de chance d’être exaucée. Prétendre que si notre prière n’est pas exaucée c’est parce que nous manquons de foi est aussi une forme de pensée magique… Et que dire aussi de notre usage de la formule « au nom de Jésus » pour donner plus de force à notre prière, comme si c’était une formule magique ? On peut même s’interroger sur cette nécessité impérieuse que nous pouvons ressentir de prier avant chaque repas : aurait-on peur de tomber malade sinon ? 


Deux bonnes nouvelles

Jésus ne se contente pas de mettre en garde ses disciples contre des dangers liés à certaines pratiques de la prière, il affirme aussi de façon positive ce qu’est la prière, ce qu’elle procure et pourquoi elle est importante pour le croyant, avec notamment deux bonnes nouvelles :

  • Dieu nous attend dans la prière
  • Dieu sait de quoi nous avons besoin

Dieu nous attend dans la prière, c’est là qu’il veut nous rencontrer. C’est le fameux « lieux secret » dont parle Jésus. Par la prière, il s’agit d’aller à la rencontre de Dieu. C’est pourquoi le Seigneur m’appelle à aller dans le secret de ma chambre, ou de mon cœur, parce que c’est là qu’il m’attend : « Ton Père qui est là, dans le lieu secret… » Voilà pourquoi j’ai besoin de prier. 

Toutes nos prières tissent un lien d’intimité avec Dieu et nous permettent de mieux le connaître et d’être plus proche de lui. Et la diversité de nos prières témoigne de la richesse de notre lien à Dieu : adoration, louange, repentance, reconnaissance, demande, intercession… Elles sont l’expression de notre vie spirituelle. 

L’autre bonne nouvelle, c’est que Dieu sait de quoi nous avons besoin. « Votre Père sait de quoi vous avez besoin avant même que vous le lui demandiez. » On pourrait se dire : « mais pourquoi lui demander alors ? » Par ma prière, je ne vais rien apprendre à Dieu qu’il ne sache déjà. Pourtant, il est légitime d’adresser des prières de demande à Dieu. Proportionnellement, plus de la moitié du Notre Père est constitué de prières de demande, y compris pour le pain de chaque jour ! 

Adresser à Dieu une prière de demande ou d’intercession, lui demander quelque chose pour soi ou pour les autres, c’est d’abord exprimer notre confiance en lui. « Votre Père sait de quoi vous avez besoin avant même que vous le lui demandiez… » Prier, c’est dire ma confiance en Dieu. Je ne vais rien lui apprendre, il sait déjà tout ! Et mon but premier n’est pas d’obtenir de lui quelque chose qu’il rechignerait à m’accorder mais sans doute d’abord de comprendre de quoi j’ai vraiment besoin. 

Il devrait toujours y avoir, sous-entendu à toute demande - et pourquoi pas le dire explicitement ? - cette phrase que Jésus a prononcé dans sa prière à son Père, dans le jardin de Gethsémané : « Toutefois, que ce ne soit pas ma volonté qui se fasse, mais la tienne. » (Luc 22.42)

Adresser une prière de demande ou d’intercession à Dieu, c’est lui dire : « Seigneur, je m’adresse à toi pour ce qui me dépasse, ce que je ne peux pas maîtriser, ce qui me fait peur, me perturbe, m’inquiète. Je te demande ceci ou cela, parce qu’il me semble que c’est ce qui est juste de te demander. Mais je te fais confiance parce toi, tu sais ce dont j’ai besoin ou ce dont telle ou telle personne a besoin. »


Conclusion

Pourquoi est-il important de prier ? Pour cultiver notre intimité avec Dieu et affermir notre confiance en lui. Si on comprend bien ce double objectif, alors on évitera les écueils de la prière hypocrite et de la pensée magique. 

Bien-sûr, ces risques existent et il convient d’être vigilant mais il est encore bien plus utile de nous appuyer sur les deux bonnes nouvelles de l’enseignement de Jésus : Dieu nous attend dans la prière et il sait de quoi nous avons besoin. Si nous recevons vraiment ces deux bonnes nouvelles, alors notre vie de prière pourra, dans toute sa diversité, et de façon différente pour chacun, tisser notre lien d’intimité avec Dieu. 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Laissez un commentaire !