dimanche 29 octobre 2023

Vous avez dit Protestant ?

 

Est-ce que vous savez d’où vient le mot « Protestant » ? 

Non, ce ne sont pas des gens qui ne sont jamais contents, qui contestent et qui protestent tout le temps. Sinon, tous les Français seraient des Protestants ! 

C’est en 1529 qu’on parle pour la première fois de Protestants, en Allemagne. Pendant quelques années, l’empereur Charles Quint a toléré le mouvement issu de la Réforme initié par Martin Luther, et suivi par la plupart des princes électeurs allemands. Mais il a finalement ordonné à tous un ralliement inconditionnel à l’Eglise catholique romaine. C’est à ce moment-là que les princes électeurs ont « protesté devant Dieu et devant les hommes » et ont refusé de suivre un décret qu’ils jugeaient contraire « à Dieu, à sa sainte Parole, à leur bonne conscience et au salut de leur âme »

Contrairement à ce qu’on pourrait croire au premier abord, le terme n’est pas péjoratif, surtout si on le considère dans sa signification première. Et il a été adopté petit à petit par les adeptes de la Réforme, en s’appuyant sur la définition ancienne du terme, qui était la plus courante à l’époque. Et vous verrez que ça peut, je trouve, très bien nous correspondre… 

Voici ce qu’en dit le Dictionnaire de l’Académie Française : PROTESTER. XIVe siècle. Emprunté du latin tardif protestari, « déclarer hautement, témoigner ; protester », composé de pro, « en avant, devant », et testari, « attester, témoigner », lui-même dérivé de testis, « témoin ».

On pourrait donc dire que, selon cette étymologie, les Protestants attestent publiquement de leur foi ! Il s’agit moins de s’opposer à quelque chose ou quelqu’un que de se positionner pour notre foi, pour nos convictions, en toute conscience. 

Alors en ce jour de fête de la Réformation, je vous invite à nous rappeler pourquoi nous sommes Protestants, et pourquoi c’est important de le reconnaître. Je vous rappelle, au passage, la dénomination officielle de notre Eglise : Eglise Protestante Evangélique de Bouffémont… 

Alors… vous avez dit Protestant ? Qu’est-ce que ça veut dire ? 


Un héritage

Peut-être que vous vous dites : « Avant d’être Protestant, je suis chrétien, disciple de Jésus-Christ. » Oui ! Bien-sûr ! Moi aussi ! Evidemment que mon identité première, en tant que croyant, elle se trouve en Christ. Pas en Luther, Calvin ou Zwingli… 

Mais je ne vais pas pour autant oublier que 2000 ans nous séparent de la venue de Jésus sur terre. Croire qu’on peut simplement faire le raccourci de Jésus à nous, comme si tout nous tombait du ciel du jour au lendemain, c’est oublier que nous sommes au bénéfice des témoins qui nous ont précédé. Nous sommes reliés à une chaîne de témoins qui conduit, certes, jusqu’à Jésus-Christ… mais en passant, notamment, par les Réformateurs. 

Peut-être que vous vous dites aussi : « Je ne suis pas Protestant, je suis évangélique ! » Mais si tu es évangélique, alors tu es Protestant, que tu le veuilles ou non. 

Les 5 affirmations fondamentales de la Réforme sont celles de tous les Protestants, et tous les évangéliques y souscrivent. L’Ecriture seule, la grâce seule, la foi seule, le Christ seul, à Dieu seul la gloire ! On est tous d’accord, non ? On ne les comprendra pas forcément toujours exactement de la même façon mais quand même…  

Dans notre société très individualiste, on peut facilement être amené à considérer notre foi sous un angle exclusivement personnel : ma relation à Dieu. A la rigueur, on va reconnaître la pertinence d’appartenir à une Eglise locale, avec d’autres chrétiens, parce que ça nous aide dans notre cheminement spirituel. Pour autant qu’on y trouve ce qu’on y cherche… 

Mais être au clair sur notre identité de croyant, c’est comprendre que nous appartenons tous à une famille plus large que notre Eglise, plus large que notre Union d’Eglises. Si nous reconnaissons cette inscription dans une famille plus large et universelle, nous reconnaissons alors aussi être au bénéfice d’un héritage, qui s’inscrit dans une histoire en marche.

Être Protestant, c’est reconnaître cet héritage. Et cet héritage, il s’agit sans cesse de se l’approprier, de le nourrir de la Parole de Dieu pour nous, aujourd’hui. 


Un témoignage

Evidemment, la Bible ne parle pas des Protestants… puisqu’ils sont apparus plus de 14 siècles après la rédaction du Nouveau Testament ! Mais un verset biblique m’est venu à l’esprit en considérant la définition mentionnée précédemment du verbe protester : « Si, de ta bouche, tu reconnais devant tous que Jésus est le Seigneur et si tu crois de tout ton cœur que Dieu l'a ressuscité d'entre les morts, tu seras sauvé. » (Romains 10.9) Reconnaître devant tous que Jésus est le Seigneur, c’est bien « protester » de sa foi, en témoigner devant les autres !

Je vous propose de relire ce verset dans son contexte immédiat :

Romains 10.5-13
5Voici ce que Moïse a écrit au sujet de la possibilité d'être reconnu juste par la Loi : « La personne qui met en pratique les commandements de la Loi vivra par eux. » 6Mais voilà comment il est parlé de la possibilité d'être juste par la foi : « Ne dis pas en toi-même : Qui montera au ciel ? » (c'est-à-dire : pour en faire descendre le Christ). 7Ne dis pas non plus : « Qui descendra dans le monde d'en bas ? » (c'est-à-dire : pour faire remonter le Christ d'entre les morts). 8Qu'est-il dit alors ? Ceci : « La parole est près de toi, dans ta bouche et dans ton cœur » (c'est-à-dire la parole de la foi que nous annonçons). 9Si, de ta bouche, tu reconnais devant tous que Jésus est le Seigneur et si tu crois de tout ton cœur que Dieu l'a ressuscité d'entre les morts, tu seras sauvé. 10Car c'est par le cœur que l'on croit, et Dieu rend juste la personne qui croit ; c'est par la bouche qu'on affirme, et Dieu sauve celui qui fait ainsi. 11L'Écriture déclare en effet : « Toute personne qui met sa foi en lui ne sera pas déçue. » 12Ainsi, il n'y a pas de différence entre celui qui est Juif et celui qui ne l'est pas : ils ont tous le même Seigneur qui accorde ses biens à tous ceux qui font appel à lui. 13En effet, il est dit : « Toute personne qui fera appel au Seigneur sera sauvée. »

Avant d’aller plus loin, juste quelques mots d’explication de l’ensemble du passage que nous avons lu. Ce texte appartient à la section de son épître où Paul évoque, avec douleur, l’incrédulité que bon nombre de ses compatriotes Juifs montrent à l’égard de Jésus, qu’ils refusent de reconnaître comme le Christ, le Messie. Dans notre texte, il élargit le propos pour dire ce qui concerne tous les humains, Juifs ou non, quant au salut, c’est-à-dire la foi seule (une des affirmations de la Réforme…). 

Il ne s’agit pas d’essayer d’être juste devant Dieu par ses propres efforts, c’est impossible. Et essayer de le faire, c’est oublier que le Christ, lui, l’a pleinement accompli (le Christ seul, encore une affirmation de la Réforme). Il ne s’agit pas de vouloir encore le faire descendre du ciel ou de le faire remonter d’entre les morts. Il l’a déjà fait ! Le salut est mis à notre portée par Dieu, il nous est accordé par grâce (autre affirmation de la Réforme…) Tout ce qui est attendu de nous, c’est la foi : « Car c'est par le cœur que l'on croit, et Dieu rend juste la personne qui croit… » (v.10)

C’est dans ce contexte qu’apparaît notre verset 9 : « Si, de ta bouche, tu reconnais devant tous que Jésus est le Seigneur et si tu crois de tout ton cœur que Dieu l'a ressuscité d'entre les morts, tu seras sauvé. » Voilà un verset « protestant », qui nous invite à « protester » de notre foi, à l’attester devant les autres, avec au moins deux conséquences : l’importance d’affermir sa foi et le courage d’affirmer sa foi.


L’importance d’affermir sa foi

Parce qu’il est question de la bouche, par laquelle on proteste, on témoigne de notre foi, mais aussi du cœur, là où la foi prend racine et se développe. Affermir notre foi met en œuvre tout notre cœur. Et le cœur, dans la Bible, c’est le siège de tout notre être intérieur : volonté, intelligence, émotions… 

Affermir sa foi c’est la vivre et la mettre en pratique, c’est l’approfondir dans une relation de foi vivante avec le Christ, mais c’est aussi l’affermir par notre intelligence renouvelée, prendre du recul et réfléchir sa foi. Soyons des hommes et des femmes de conviction, qui savent ce qu’ils croient et qui savent pourquoi ils le croient. Ne nous contentons pas d’un prêt-à-penser ou d’un prêt-à-croire comme il y a un prêt-à-porter !

Ça ne veut pas dire forcément s’inscrire en faculté de théologie (même si ça peut être une bonne idée !) mais sans doute lire, rencontrer, dialoguer. Profiter des occasions offertes pour étudier la Bible ou creuser la foi.  

Notre foi est bien plus mise en danger par nos certitudes absolues et nos crispations que par notre ouverture et notre curiosité. Un croyant qui prend le temps de réfléchir sa foi, qui se laisse interpeller par la Parole de Dieu bien-sûr, mais aussi par d’autres croyants qui ne vivent pas ou ne disent pas sa foi de la même manière, verra sa foi s’affiner et s’affermir. Au contraire, un croyant qui s’enferme dans des certitudes absolues, des dogmes inamovibles, des lectures figées de la Bible, celui-là risque bien de voir sa foi se scléroser. 


Le courage d’affirmer sa foi

L’appel de Paul à « protester » passe du cœur à la bouche. Il ne s’agit pas seulement d’affermir notre foi dans notre cœur, il faut aussi que notre foi s’exprime par notre bouche. Une foi vivante, c’est aussi une foi qui se dit. 

Pour l’apôtre Paul, il semble aussi important de croire dans son cœur que Jésus-Christ est ressuscité d’entre les morts que de dire haut et fort que Jésus est le Seigneur. L’un ne va en tout cas pas sans l’autre. Et ça, c’est facile de le faire avec d’autres croyant, par exemple le dimanche au culte, par nos chants et nos prières. C’est plus compliqué dans notre quotidien, dans notre engagement dans la société.

Evidemment, il ne s’agit pas de l’imposer à qui que ce soit, mais d’oser l’affirmer. Dans le respect, l’écoute, le dialogue… mais avec conviction ! 

Et c’est là que nous comprenons l’importance d’avoir une foi ferme et réfléchie. Sinon, qu’allons-nous dire ? Comment avoir une parole pertinente au nom de notre foi si nous ne sommes pas au claire sur ce que nous croyons et pourquoi nous le croyons ? 


Conclusion

En ce jour de fête de la Réformation, soyons reconnaissants pour la longue lignée de témoins qui nous ont précédés et qui nous relient, historiquement, à Jésus-Christ. Et parmi ces témoins, nous pouvons être reconnaissant pour les Réformateurs, chacun avec leur sensibilité propre, qui ont rappelé ces cinq principes ancrés dans la Parole de Dieu : l’Ecriture seule, la grâce seule, la foi seule, le Christ seul, à Dieu seul la gloire !

En ce jour de fête de la Réformation, soyons stimulés par tous ceux qui ont su et savent encore « protester » de leur foi, et nous encourage à le faire à notre tour et à notre niveau. Soyons de celles et ceux qui ne cessent d’affermir et d’affirmer leur foi, qui ont une foi vivante et solide autant dans leur cœur que dans leur bouche. Voilà sans doute une belle manière d’être Protestant… 


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