dimanche 5 novembre 2023

Hommes et femmes dans l’Eglise

 

(Cette prédication a été donnée dans le cadre d'un culte spécial, à l'occasion de l'anniversaire du groupe de femmes de l'Eglise Protestante Evangélique de Bouffémont)

Je l’ai dit lors du dernier Synode de l’UEEL, où je terminais mon dernier mandat de président de la CS, une de mes plus grandes joies aujourd’hui pour notre Union d’Eglises, c’est la féminisation de son corps pastoral. 

Ce n’est pas le cas dans toutes les Eglises évangéliques, loin de là. Il y a même aujourd’hui, dans certaines Eglises évangéliques, un durcissement d’une position excluant les femmes de certains ministères, pour la seule raison qu’elles sont des femmes. Un célèbre théologien, John MacArthur, a dit : « Les femmes pasteures et les prédicatrices sont peut-être la preuve la plus évidente de la rébellion des églises contre la Bible. »

Je pense exactement le contraire ! Il me semble en effet que l’exclusion des femmes de certains ministères dans l’Eglise est une infidélité au message libérateur de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, et de ce fait un contre-témoignage envers nos contemporains. 

Je vous propose de lire un texte biblique fondamental à ce sujet, dans l’épître de Paul aux Galates : 

Galates 3.26-29
26 Car vous êtes tous enfants de Dieu par la foi qui vous lie à Jésus Christ. 27 Vous tous, en effet, vous avez été unis au Christ dans le baptême et vous avez ainsi revêtu la manière d'être du Christ. 28 Il n'y a plus ni Juif ni païen, il n'y a plus ni esclave ni citoyen libre, il n'y a plus ni homme ni femme ; en effet, vous êtes tous un, unis à Jésus Christ. 29 Si vous appartenez au Christ, vous êtes alors les descendants d'Abraham et vous recevez l'héritage que Dieu a promis.

La question centrale à laquelle l’apôtre Paul répond dans son épître aux Galates, c’est de savoir s'il est nécessaire, pour tous les chrétiens, Juifs ou non, de respecter un certain nombre de principes de la loi de Moïse, notamment la circoncision. Les Galates, eux, répondaient clairement oui à cette question ! 

Mais ce n’est pas l’avis de l’apôtre Paul. Au contraire, dès Galates 1.6, il dénonce cette attitude, de manière frontale : « Je suis stupéfait de la rapidité avec laquelle vous vous détournez de Dieu : il vous a appelés par la grâce du Christ. Et vous, vous vous tournez vers une autre bonne nouvelle ! »  Et il va garder ce ton très ferme tout au long de son épître.

Le texte que nous avons lu constitue l'aboutissement de tout le raisonnement de Paul sur le rôle de la loi, avec une affirmation absolue au verset 28 : « Il n'y a plus ni Juif ni païen, il n'y a plus ni esclave ni citoyen libre, il n'y a plus ni homme ni femme ; en effet, vous êtes tous un, unis à Jésus Christ. »


Un principe universel

Ce qui est intéressant dans cette formule, c'est que le raisonnement de Paul jusqu'ici concernait exclusivement la question des Juifs et des non-Juifs. En Jésus-Christ, il n'y a plus de distinction à faire, tous ceux qui croient sont descendants d'Abraham, par la foi, qu'ils soient Juifs ou non. Il aurait pu donc dire simplement : « Il n'y a plus ni Juif ni païen, en effet, vous êtes tous un, unis à Jésus Christ. » Mais il élargit la portée de son enseignement : non seulement il n'y a plus ni Juifs ni païens, mais il n'y a plus ni esclaves ni libres, il n'y a plus ni hommes ni femmes !

Si l'apôtre Paul se permet d'élargir son propos, c'est bien parce qu'il s'agit de l'affirmation d'un principe universel ! « Vous êtes tous fils de Dieu... vous êtes tous un, unis à Jésus Christ. » 

Et s’il élargit son propos aux esclaves et aux femmes, c’est bien parce qu’il s’agissait de problèmes rencontrés dans l’Eglise. Le verset 28 évoque trois fractures sociales qui affectaient alors l’Eglise, et qui ont alimenté de nombreuses pages du Nouveau Testament : la fracture entre Juifs et païens, celle entre esclaves et citoyens libres et celle entre hommes et femmes. 


Des fractures persistantes

La fracture entre Juifs et païens n'est plus un problème théologique depuis le concile de Jérusalem (Actes 15)... même s'il a fallu encore pas mal de temps, en pratique, pour que cela se concrétise vraiment dans les Eglises. On le voit à travers les épîtres du Nouveau Testament qui abordent, par exemple, les questions liées à la circoncision, au respect des fêtes ou au problème de la consommation de viandes sacrifiées aux idoles. Or l'apôtre Paul ne s'est pas privé d'affirmer haut et fort qu'une distinction dans l'Eglise entre chrétiens d'origine juive et chrétiens d'origine païenne était intenable. Cette fracture a pu réapparaître, sous une autre forme, dans l’histoire de l’Eglise, avec l’entretien d’un antisémitisme latent qui, malheureusement, connaît des résurgences dans l’histoire… 

La fracture entre esclaves et citoyens libres n'est plus un problème non plus dans l'Eglise. Même si on a toléré trop longtemps l’intolérable, à savoir la justification théologique de l'esclavage... mais il ne viendrait à l'idée de personne aujourd'hui de justifier bibliquement l'esclavage au nom des prescriptions de l'apôtre Paul à l'égard des maîtres et des esclaves chrétiens ! On comprend bien qu’elles étaient liées au contexte de l’époque. Et les recommandations qu'il donne aux maîtres d'esclaves chrétiens et, surtout, l'étonnante épître à Philémon, contiennent déjà en germe, au nom de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, la fin de l'esclavage.

La fracture entre les hommes et les femmes semble bien, elle, être encore un problème aujourd'hui dans l'Eglise. En tout cas dans certaines Eglises. On ne peut pas se satisfaire de cet état de fait... car l’enjeu est important. 

En effet, quel message envoyons-nous si nous disons accueillir tout le monde et que nous disons par ailleurs que les femmes, dans l’Eglise, ne peuvent pas accéder à tel ou tel ministère, simplement parce que ce sont des femmes ? 

Vous me direz peut-être qu’il y a quand même des textes bibliques qui semblent interdire aux femmes certaines responsabilités dans l’Eglise. Premièrement, avouons qu’ils sont peu nombreux. Deux ou trois à peine sur cette question spécifique. Et leur compréhension est sujet à débat… Et puis on doit quand même aussi considérer les exemples bibliques où des femmes ont clairement joué un rôle d'enseignante (comme Priscille par exemple), et les mentions dans les salutations à la fin des épîtres de nombreuses femmes, collaboratrices de l'apôtre et parfois manifestement en position d'autorité. On associe même à l’une d’elles, Junia, le titre d’apôtre : « Saluez Andronicus et Junia, qui me sont apparentés et qui ont été en prison avec moi. Ils sont des apôtres remarquables et ils sont même devenus chrétiens avant moi. » (Romains 16.7)

C’est pourquoi je suis persuadé que l’accès aux femmes à toutes les responsabilités dans l’Eglise n’est pas une concession à la modernité mais bien le signe du déploiement du Royaume de Dieu, malgré les résistances du cœur humain. 


Conclusion

Alors je me réjouis que dans notre Eglise, et dans notre Union d’Eglises, on ne fasse plus de différence entre les hommes et les femmes pour accéder à certaines responsabilités ou exercer certains ministères dans l’Eglise. 

Mais il ne faudrait pas pour autant oublier de balayer devant notre propre porte. Veillons à ne pas recréer d’autres fractures injustifiées, par exemple entre les générations, entre les origines sociales ou ethniques, entre certaines formes de piété… 

Toute discrimination dans l’Eglise, quelle qu’elle soit, est un contre-témoignage à la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ ! A cause de cette Bonne Nouvelle, et au nom du Royaume de Dieu, nous nous devons d’être irréprochables…

Car vous êtes tous enfants de Dieu par la foi qui vous lie à Jésus Christ. (…) Il n'y a plus ni Juif ni païen, il n'y a plus ni esclave ni citoyen libre, il n'y a plus ni homme ni femme ; en effet, vous êtes tous un, unis à Jésus Christ.


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