Nous avons commencé dimanche dernier une mini-série de prédications autour de ce que j’ai appelé le trépied de la vie chrétienne. Un trépied est un accessoire essentiel pour un photographe, qui lui permet d’assurer la stabilité de la prise de vue et donc de garantir des clichés nets. De même, il y a un trépied essentiel pour le chrétien, pour lui permettre de garder une vision nette et claire de sa vie, et pour trouver une stabilité, quelles que soient les circonstances. Les trois pieds de ce trépied sont la foi, l’espérance et l’amour, comme l’affirme l’apôtre Paul dans sa première lettre aux Corinthiens :
1 Corinthiens 13.13
Maintenant, ces trois choses demeurent : la foi, l'espérance et l'amour ; mais la plus grande des trois est l'amour.
Dimanche dernier nous avons parlé de la foi, nous allons nous intéresser ce matin à l’espérance.
Cette année, j’ai déjà plusieurs fois prêché sur l’espérance. Le 4 février dernier, j’ai évoqué l’espérance sous l’angle de la consolation. Le 17 décembre, sous l’angle de la joie. Le 8 octobre, sous l’angle de la promesse, celle de la venue du Christ. Il faut dire que dans le monde anxiogène que nous connaissons aujourd’hui, nous cherchons des raisons d’espérer.
Comment parler d’espérance quand on voit s’intensifier la menace écologique ? Comment parler d’espérance quand on voit la guerre faire son retour en Europe… sans compter tous les autres conflits dans le monde ? Comment parler d’espérance quand on constate une hausse de 1000% des actes antisémites en France ? Comment parler d’espérance quand on voit la montée inéluctable des extrêmes en Europe et un peu partout dans le monde ? Comment parler d’espérance quand l’horizon qu’on nous propose est le repli identitaire, la fermeture des frontières et le refoulement des migrants ?
On entendra peut-être parler d’espoir voire d’espérance chez certains candidats aux élections législatives… mais peut-on les croire ? Peuvent-ils encore nous faire rêver ? J’ai surtout l’impression que les discours politiques aujourd’hui sont essentiellement basés sur la peur : la peur de l’immigration ou la peur de voir l’extrême droite accéder au pouvoir. Il ne peut y avoir aucune espérance avec la peur.
Si nous, chrétiens, ne parlons pas d’espérance, qui le fera ? Quelle est notre espérance ? Où se trouve-t-elle ? Comment impacte-t-elle notre vie aujourd’hui ? Ecoutons ce que nous en dit l’apôtre Pierre dans sa première épître.
1 Pierre 1.3-53 Bénissons Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ ! Dans sa grande bonté, il nous a fait naître à une vie nouvelle, en ressuscitant Jésus Christ d'entre les morts. C'est pour que nous ayons une espérance vivante, 4 en attendant l'héritage que Dieu réserve aux siens. Cet héritage ne peut être ni détruit ni sali et il ne peut pas perdre son éclat. Dieu vous le réserve dans les cieux, 5 à vous que sa puissance garde par la foi, en vue du salut prêt à être révélé au moment de la fin.
Ces quelques versets ne disent pas tout de l’espérance chrétienne… mais en quelques mots, ils rappellent quelques éléments incontournables :
- Notre espérance a un fondement dans le passé : la résurrection de Jésus-Christ d’entre les morts
- Notre espérance est une réalité pour aujourd’hui : elle est une espérance vivante
- Notre espérance s’accomplira pleinement dans l’avenir : elle est un héritage que Dieu nous réserve
Un fondement : la résurrection de Jésus-Christ
L’espérance chrétienne ne repose pas d’abord sur une promesse mais sur un fait : Jésus-Christ est ressuscité d’entre les morts ! C’est de cet événement que découlent les promesses qui alimentent notre espérance.
L’affirmation de la résurrection de Jésus est le fondement sur lequel se construit toute l’espérance chrétienne. C’est parce que Jésus est ressuscité, parce qu’il a vaincu la mort, qu’une espérance est possible.
L’espérance chrétienne n’est pas un vague espoir, un rêve un peu fou ou une utopie improbable. Elle est l’assurance que le Christ nous a ouvert un chemin nouveau où il nous précède, par sa mort et sa résurrection, un chemin sur lequel aucun obstacle n’est définitif, pas même la mort. Si bien qu’on peut dire que le meilleur est encore à venir !
Un héritage qui nous est réservé
Ce « meilleur à venir » s’accomplira au jour fixé par Dieu. Pour l’exprimer, Pierre utilise la métaphore de l’héritage, un héritage qui nous est réservé par Dieu. Il s’agit du « salut prêt à être révélé au moment de la fin. » Autrement dit, le salut que nous recevons, aujourd’hui, par la foi, sera pleinement accompli au jour de l’accomplissement final du projet de Dieu. Il est un gage aujourd’hui d’un héritage qui nous est réservé et qui doit encore être révélé.
N’ayons aucune crainte, cet héritage est incorruptible. Le salut que Dieu nous donne en Jésus-Christ nous est acquis, il ne peut nous être enlevé, nous ne pouvons pas le perdre : il ne sera « ni détruit ni sali et il ne peut pas perdre son éclat. »
Et non seulement Dieu nous le réserve mais il nous garde aujourd’hui dans sa main, au moyen de la foi, même si nous pouvons connaître des hauts et des bas… C’est ce qu’on appelle communément l’assurance du salut, qui repose entièrement sur la fidélité de Dieu. C’est une expression de notre espérance.
Une espérance à vivre aujourd’hui
Entre le fondement de la résurrection du Christ et le gage de notre héritage à venir, il reste une espérance à vivre aujourd’hui. C’est la fameuse expression centrale dans le texte de Pierre lorsqu’il parle d’une espérance vivante.
Il ne s’agit pas seulement, pour nous, d’avoir une espérance pour demain… il s’agit de vivre notre espérance dès aujourd’hui. Elle se vit par la foi, dans la relation avec Dieu. Elle s’exprime dans la confiance, malgré les tempêtes que nous pouvons traverser. Elle se manifeste dans la paix face à l’agitation du monde : par-delà les troubles ici-bas, le projet de Dieu est en marche et son Royaume vient.
Au début de la prédication, je demandais comment on peut parler d’espérance quand on considère l’état de notre monde aujourd’hui, avec la menace écologique, les guerres, les discours de haine et de rejet… Comment, aujourd’hui, dans un tel contexte, vivons-nous notre espérance ? Comment s’exprime une espérance vivante face aux menaces, aux tumultes voire au chaos de notre monde ?
D’abord on garde la tête froide et on cherche la paix dans l’assurance du Royaume qui vient. Notre espérance ne repose pas sur ce monde et ceux qui le gouvernent. Le monde et les puissants peuvent s’agiter et menacer, nous croyons que Dieu demeure souverain et que son règne vient. Et si ce sont des tempêtes plus personnelles que nous traversons, Dieu n’est pas moins souverain sur notre vie que sur le monde !
Pour autant, on prend notre part et on assume notre rôle de citoyen, là où Dieu nous a placé. Il y a des élections à la fin du mois… alors on essaye de se faire une conviction en toute conscience. A défaut de voter pour ceux qui nous font rêver, on choisit peut-être les moins mauvais… et on essaye d'éviter le pire. Et puis, aujourd’hui et demain, on prie pour les autorités, quelles qu’elles soient. Ce qui ne veut pas dire qu’on soit forcément d’accord, loin de là ! Il faut nous souvenir que le contexte du Nouveau Testament n'était pas vraiment favorable aux chrétiens… et pourtant Jésus a dit de rendre à César ce qui est à César, et l’apôtre Paul exhortait à prier pour les personnes qui détiennent l’autorité.
Et surtout on ne baisse pas les bras. Une espérance vivante ne se résigne pas. Elle refuse d’accepter les discours de haine, les réflexes de rejet et de peur, la violence sous toutes ses formes, l’injustice, les manipulations, le mépris ou l’exploitation des plus faibles, et surtout elle ne s’en rend pas complice. Même si aujourd’hui, c’est peut-être de plus en plus difficile de choisir l’amour, l’écoute, l’accueil, l’humilité, la conciliation, la nuance, la douceur… C’est pourtant ce à quoi nous sommes appelés : une espérance vivante s’efforce de manifester le mieux possible les valeurs du Royaume qui vient.
Conclusion
Dans le trépied de la vie chrétienne, l’espérance est peut-être le pied le plus important quand notre vie ressemble à un terrain accidenté. C’est elle qui nous permet de rester stable, de ne pas perdre de vue l’horizon du Royaume qui vient, même quand notre vie ou notre monde chancelle, et de garder ainsi une vision claire. Solidement ancrée dans l’événement de la résurrection du Christ, notre espérance est ferme.
Mais l’espérance du Royaume qui vient ne nous désolidarise pas du monde actuel. Nous sommes, au contraire, appelés à y semer, par notre vie, notre engagement, notre témoignage, des graines d’espérance. N’oublions pas que Jésus a comparé le Royaume de Dieu aux toutes petites graines de moutarde qui peuvent, finalement, donner naissance à un véritable arbre où les oiseaux trouvent un abri.
Une espérance vivante, c’est une vie qui sait déjà manifester les germes du Royaume qui vient.
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