Dieu a de nombreux noms dans la Bible. Ils révèlent tous une facette de Dieu et on comprend bien qu’un seul ne suffit pas à le définir.
Quand les disciples de Jésus demandent à leur maître de les enseigner comment prier, Jésus les invite à s’adresser à Dieu comme à leur père. « Notre Père qui es aux cieux… » Père est un des noms donnés à Dieu dans la Bible. Il est, en soi, une métaphore qui se réfère à nos pères terrestres.
Que signifie, pour nous, d’avoir Dieu comme Père ?
Hébreux 12.5-135Avez-vous oublié l'encouragement que Dieu vous adresse comme à ses enfants ?« Mon enfant, ne méprise pas les avertissements du Seigneur,et ne te décourage pas quand il t'adresse des reproches.6Car le Seigneur éduque celui qu'il aime,il corrige celui qu'il reconnaît comme son enfant. »7Supportez les souffrances par lesquelles Dieu vous avertit : il vous traite en effet comme ses enfants. Existe-t-il un enfant que son père ne corrige pas ? 8Si vous n'êtes pas avertis comme le sont tous ses enfants, alors vous n'êtes pas de vrais enfants, mais des enfants illégitimes. 9Rappelons-nous nos pères terrestres : ils nous corrigeaient et nous les respections. Nous devons donc, à plus forte raison, nous soumettre à notre Père céleste pour en recevoir la vie. 10Nos pères nous corrigeaient pour peu de temps, comme ils le jugeaient bon. Mais Dieu nous corrige pour notre bien, afin que nous ayons part à sa sainteté. 11Quand nous recevons les avertissements, il nous semble, sur le moment, que c'est là une cause de tristesse et non de joie. Mais plus tard, ceux qui ont reçu une telle formation bénéficient de l'effet qu'elle produit : la paix associée à une vie conforme à la volonté de Dieu.
Voilà un texte qu’il faut replacer dans son contexte culturel. On comprend la métaphore comparant Dieu à un père qui corrige ses enfants. Sur le moment, ce n’est pas agréable… mais c’est nécessaire à l’éducation de l’enfant qui en reconnaîtra le bien-fondé avec le recul.
A la lecture du texte, toutefois, en voyant les mots utilisés, on pourrait penser à des méthodes éducatives d’un autre âge, justifiant les châtiments corporels. Et encore, c’est atténué dans la version de la Nouvelle Français Courant. La TOB traduit ainsi le verset 7 : « C'est pour votre éducation que vous souffrez. C'est en fils que Dieu vous traite. Quel est, en effet, le fils que son père ne corrige pas ? » Et que dire de la version Segond 1910 : « Supportez le châtiment : c’est comme des fils que Dieu vous traite ; car quel est le fils qu’un père ne châtie pas ? » Il n’y a pas que le texte original qui est marqué par son époque, les traductions aussi !
En réalité, le verset 7 dit littéralement, de manière très concise : « c’est pour l’éducation que vous endurez la souffrance ». La formule n’insiste pas sur la souffrance mais sur l’endurance. La souffrance est sous-entendue. Et ce n’est pas elle qui éduque ou corrige ! C’est le processus éducatif lui-même qui peut être source de souffrance pour l’enfant, qui se voit restreint, limité, cadré.
On aurait tort de prétendre qu’un tel texte justifie les châtiments corporels dans l’éducation. J’ai entendu des chrétiens justifier leurs violences éducatives en citant un verset des Proverbes qui parle de bâton en parlant de l’éducation des enfants ! Aujourd’hui on sait, au contraire, que toutes les violences éducatives sont à proscrire. On ne peut pas les banaliser en disant « oh mais une bonne fessée n’a jamais fait de mal à un enfant ». C’est faux ! Toute forme de violence sur un enfant est source de traumatisme.
Il y a, certes, dans la Bible, quelques textes qui semblent s’accommoder de violences éducatives. De façon plus explicite que celui de ce matin. Mais ils sont à lire dans leur contexte culturel. Et dans tous les cas, ce n’est pas la violence éducative qui est justifiée mais la nécessité du rôle éducatif des parents. Et dans notre texte, c’est le rôle éducatif de Dieu comme père qui est souligné. En laissant par ailleurs entendre, au verset 10, que nos pères terrestres font ce qu’ils peuvent, imparfaitement… alors que Dieu est un père parfait.
La métaphore de notre texte compare donc Dieu à un père, avec son rôle d’éducateur pour ses enfants. Pas besoin de coups de bâton pour cela ! Un des rôles des parents est bien d’éduquer leurs enfants, de les accompagner dans leur développement à tous les niveaux, et aussi de les corriger et leur fixer des limites. Et cela crée des frustrations et peut même être source de souffrance pour les enfants. Ce n’est jamais agréable de s’entendre dire non…
Le rôle d’éducateur est intrinsèque au statut de parents. D’ailleurs le vrai père d’un enfant est celui qui l’élève, pas forcément son géniteur. C’est vrai aussi pour la mère. On voit cela dans le cas d’adoption évidemment, ou dans le cas de familles recomposées.
Je tire de tout cela une leçon spirituelle importante. Ce qui fait de Dieu un père pour nous n’est pas seulement le fait qu’il nous a créé, ou qu’il nous a fait naître à une vie nouvelle, mais aussi le fait qu’il nous aime et qu’il nous éduque, qu’il nous accompagne dans notre vie et notre croissance spirituelle.
C’est exactement ce que dit le verset 7, que je propose de traduire ainsi : « C'est pour votre éducation que vous endurez la souffrance ; Dieu vous traite comme ses enfants. Quel est, en effet, l’enfant que son père ne corrige pas ? »
Autrement dit, du point de vue du croyant, avoir Dieu pour Père, c’est aussi reconnaître en Lui un rôle d’éducateur pour nous. Qu’est-ce que cela implique ?
Comment Dieu nous éduque-t-il ?
Si on regarde le contexte de notre texte, on se rend compte qu’il y est question d’épreuve et d’adversité. Nous sommes à la suite de la grande galerie de portraits de héros bibliques de la foi, au chapitre 11, qui sont exemplaires pour leur persévérance malgré les épreuves, qui ont supporté l’opposition voire la persécution, qui ont enduré les souffrances… Cette grande foule de témoins nous encourage nous-mêmes à persévérer.
L’auteur de l’épître dirige alors les regards de ses lecteurs vers l’exemple suprême : Jésus-Christ. Plus que quiconque, il a connu l’opposition et la souffrance. Il a accepté la mort infâme de la croix… et maintenant il siège à la droite de Dieu.
Il fait alors le lien avec l’expérience de ses lecteurs, appelés à prendre exemple sur Jésus lui-même : « Pensez à lui, à la façon dont il a supporté une telle opposition de la part des pécheurs. Et ainsi, vous ne vous laisserez pas abattre, vous ne vous découragerez pas. » (Hb 12.3)
L’intention première de l’auteur de l’épître aux Hébreux est donc d’encourager les chrétiens auxquels il écrit dans l’épreuve qu’ils traversent. Je paraphrase ce qu’il dit ainsi : Vous aussi vous faites face à de l’adversité et des épreuves. Dieu le permet pour vous, parce que, au-delà de la souffrance que cela peut représenter, cela vous sera utile, pour affermir votre foi et vous faire grandir spirituellement.
Alors comment Dieu nous éduque-t-il ? En nous permettant de vivre des expériences qui peuvent nous faire grandir spirituellement. Et ces expériences peuvent parfois être source de souffrance. La souffrance elle-même n’a pas de vertu. Mais elle est inévitable dans tout processus d’éducation, dans tout apprentissage.
On pourrait dire la même chose autrement : Dieu nous permet de percevoir nos épreuves comme des occasions d’affermir notre foi, de grandir spirituellement. Au cours de ma vie chrétienne, les exemples de foi qui m’ont le plus impressionné, et de loin, ce sont ces chrétiens qui, au cœur de l’épreuve, dans la maladie, la souffrance, témoignent d’une foi paisible, d’une espérance sans faille, d’une joie dans la communion avec Dieu... J’ai à l’esprit quelques exemples très précis.
Comment est-ce que j’accepte le rôle d’éducateur de Dieu ?
Si Dieu est notre Père, non seulement parce qu’il est notre Créateur mais aussi parce qu’il joue un rôle d’éducateur pour nous, comment est-ce que nous acceptons cela ? Je ne suis pas sûr que nous y soyons toujours prêts…
Est-ce que j’accepte que Dieu « mette son nez dans ma vie » pour me corriger ? Ou alors, je préfère me dire : « c’est ma foi, c’est ma vie chrétienne, c’est mon problème, je fais ce que je veux ! » On ne va probablement jamais le dire comme ça… mais est-ce que ça n’y ressemble pas un peu parfois ?
En tant que chrétien, on peut parfois se conduire en enfant capricieux ou en ado insolent, en refusant d’accepter que Dieu soit notre Père éducateur. Or, grandir spirituellement, c’est aussi savoir recevoir les corrections de Dieu. Ce qui implique de se laisser interpeller par sa Parole, de se laisser guider et transformer par son Esprit, de discerner dans les expériences de notre vie celles que Dieu utilise pour poursuivre son œuvre en nous.
Or, ce qui me fait grandir, ce sont aussi parfois mes échecs. Ce sont les chutes dont je me relève, les erreurs que je reconnais et m’efforce de corriger, les critiques justifiées que je prends en considération… Ce sont aussi les limites que j’apprends à accepter, les frustrations que j’apprends à surmonter, les lacunes que je cherche à combler.
Et il faut parfois que je passe par des épreuves, que je rencontre de l’adversité, pour expérimenter cela, pour le comprendre et l’intégrer vraiment.
Si on y réfléchit, les trois premières demandes du Notre Père correspondent bien à ce rôle d’éducateur de Dieu. « Notre Père qui es aux cieux, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel… » Quand nous prions cela, ces demandes ne sont pas faites pour les autres. Elles sont faites d’abord pour nous, pour qu’elles se concrétisent dans notre vie. Nous prions pour que dans notre vie soit manifeste la sainteté et la présence de Dieu, pour que son règne grandisse en nous, pour que nous sachions accomplir sa volonté.
Et si nous le prions, si nous demandons à Dieu d’agir dans ce sens, c’est parce que nous ne pouvons pas y arriver seul. C’est parce que nous avons besoin de l’œuvre de Dieu en nous. C’est parce que nous savons que Dieu doit nous transformer, nous façonner, nous éduquer par son Esprit.
Conclusion
En conclusion, je redis la leçon principale que je vous propose de retirer de notre texte : Dieu est notre Père, non seulement parce qu’il nous a créé mais aussi parce qu’il nous aime et qu’il veut nous éduquer, pour nous faire grandir spirituellement.
Dieu n’est pas seulement notre géniteur spirituel, qui nous a créé et nous a fait naître à une vie nouvelle. Il est aussi notre éducateur, Celui dont nous avons besoin pour grandir spirituellement, Celui qui, par son Esprit, nous façonne et nous transforme à l’image de Jésus-Christ.
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