Comme c’est le cas la plupart du temps dans les épîtres de Paul, la lettre commence par une adresse de la part de l’auteur (ici Paul et Timothée) aux destinataires (ici les chrétiens de la ville de Colosse).
Ensuite, il y a quelques mots personnels, avec une évocation de ces destinataires : ici il est question de la façon dont la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ est parvenue à Colosse et quels fruits elle a porté parmi les chrétiens. Paul et Timothée leur assurent alors de leur prière fidèle en leur faveur, pour que leur foi grandisse et s’épanouisse, dans la persévérance.
On ne s’arrêtera pas ce matin sur ces formules qui peuvent paraître un peu formelles, mais dans lesquelles il y a de vraies leçons spirituelles à tirer.
Nous commencerons notre lecture après la prière d’intercession, à partir du verset 12… et nous nous arrêterons au verset 14. En effet, à partir du verset 15 commence un magistral hymne christologique, inséré dans l’épître. Extrêmement dense, il décrit Jésus-Christ, le Fils bien-aimé de Dieu, à la fois comme Celui en qui tout a été créé, et Celui par qui Dieu accomplit son projet de réconciliation. On pourrait dire que Jésus-Christ est évoqué comme étant Celui qui est à l'origine de tout le monde créé, et qui est aussi Celui par qui le monde est sauvé. Il y aurait de quoi faire une voire plusieurs prédications… mais nous ne le ferons pas ce matin.
Nous allons nous concentrer sur les quelques versets qui font le lien entre l’introduction de la lettre et le grand hymne christologique, une exhortation que l’on trouve donc aux versets 12-14.
Colossiens 1.12-14 (NBS)Avec joie, 12rendez grâce au Père qui vous a rendus capables d'accéder à la part d'héritage des saints dans la lumière. 13Il nous a délivrés de l'autorité des ténèbres pour nous transporter dans le royaume de son Fils bien-aimé, 14en qui nous avons la rédemption, le pardon des péchés.
De quoi parlent ces versets ? L’idée centrale, c’est une invitation à remercier Dieu pour son salut.
Il me semble que parfois on manque un peu de vocabulaire pour parler de notre salut. On utilise un langage balisé, voire stéréotypé, au risque de réduire la portée et la richesse de l’œuvre de salut de Dieu. Ici, Paul l’évoque de plusieurs façons, à l’aide d’un langage imagé.
En grec, ces trois versets forment une seule et même phrase, qui évoque l’œuvre de salut de Dieu par trois propositions relatives. Les deux premières sont relatives au Père, la dernière est relative au Fils qui est mentionné à la fin de la deuxième proposition. On peut mettre cela en évidence de la sorte (avec une traduction légèrement remaniée) :
Qui vous a rendus capables d’avoir part à l'héritage des saints dans la lumière,
Qui nous a délivrés de l'autorité des ténèbres pour nous transporter dans le royaume de son Fils bien-aimé,
En qui nous avons la rédemption, le pardon des péchés.
Libérés, délivrés !
Le langage traditionnel pour parler du salut se trouve dans la dernière proposition relative, au verset 14, lorsqu’il est question de rédemption et de pardon des péchés.
Rédemption est un terme technique, qu’on utilise parfois sans vraiment comprendre ce qu’il signifie. Il faut bien dire que ce n’est pas un mot qu’on utilise souvent aujourd’hui ! En réalité, il désignait le fait de racheter un captif, délivrer quelqu’un moyennant rançon. Le terme s’inscrit dans un contexte où existait l’esclavage et où fallait racheter celui qui avait été vendu comme esclave pour le libérer, l’affranchir.
La meilleure façon de transcrire le mot rédemption aujourd’hui, c’est probablement en parlant de libération. Il ne s’agit pas d’être affranchi d’un esclavage mais d’être libéré de ce qui nous rend captif… ce que la Bible appelle le péché ! D’où la deuxième partie du verset qui parle du pardon des péchés.
Le salut est une libération et Jésus-Christ est le libérateur : c’est une Bonne Nouvelle libératrice. On comprend pourquoi l’apôtre Paul s’est emporté contre certains enseignants, notamment dans les Eglises de Galatie, qui prônaient pour les chrétiens un légalisme, une soumission nécessaire à des lois et des règles, ce qui constituait en réalité un nouvel asservissement.
Galates 5.1Le Christ nous a libérés pour que nous soyons vraiment libres. Tenez bon, donc, et ne vous laissez pas de nouveau réduire en esclavage.
Le salut en Jésus-Christ est une libération parce qu’il nous délivre de toute contrainte, de toute pression pour mériter ce que nous ne pouvons pas atteindre. Le salut de Dieu n’est pas une récompense en vertu de nos mérites, c’est un cadeau, un don gratuit parce que Jésus-Christ a tout accompli. Dieu nous libère par grâce, il nous accorde le pardon.
Voyons maintenant les deux autres formules, associées à Dieu le Père.
Un héritage assuré
« (Le Père) vous a rendus capables d’avoir part à l'héritage des saints dans la lumière… »
Il y a d’abord la métaphore de l’héritage. Un héritage, c’est ce que nous sommes destinés à recevoir en tant qu’héritier. Et on est héritier en étant le parent légitime ou naturel destiné à recevoir les biens d’un défunt après sa mort, ou parce qu’il nous a couché sur son testament.
Les saints désignent, dans le Nouveau Testament, tous ceux qui appartiennent à Dieu, l’ensemble des croyants. L’héritage des saints, c’est donc ce qui est promis à ceux qui appartiennent à Dieu. La lumière quant à elle fait sans doute référence à la présence de Dieu, en opposition avec les ténèbres, symbole de l’absence de Dieu.
L’héritage des saints dans la lumière, c’est donc probablement la vie dans la présence même de Dieu, qui sera pleinement accomplie au jour de l’accomplissement de notre espérance, jour de la résurrection, mais qui est déjà une réalité aujourd’hui, par la foi.
L’œuvre de salut de Dieu, c’est de nous rendre capable d’avoir part à cet héritage. Être sauvé, c’est être adopté par Dieu. Notre nom est inscrit sur le testament de Dieu parce qu’il a fait de nous ses enfants !
Le salut comme adoption est bien une conception biblique. En Jésus-Christ, Dieu fait de nous ses enfants. C’est affirmé avec force, par exemple, dans le prologue de l’évangile de Jean, qui évoque la Parole, c’est-à-dire le Fils de Dieu devenu homme :
Jean 1.12-13A tous ceux qui l'ont reçue et qui croient en elle, (la Parole) a permis de devenir enfants de Dieu. Ils ne sont pas devenus enfants de Dieu par une naissance naturelle, par une volonté humaine ; c'est Dieu qui leur a donné une nouvelle vie.
Notre part d’héritage nous est réservée : nous y avons droit parce que Dieu a fait de nous ses enfants. Nous toucherons certes notre héritage plus tard mais il nous est garanti. Le salut de Dieu nourrit une espérance, elle garantit un avenir.
Une opération de sauvetage
« (Le Père) nous a délivrés de l'autorité des ténèbres pour nous transporter dans le royaume de son Fils bien-aimé… »
On est ici dans un tout autre univers, avec une autre métaphore, celle d’une opération de sauvetage, d’une exfiltration. On pourrait presque parler d’une libération d’otages, arrachés au pouvoir des ténèbres pour être mis en sécurité dans le Royaume de l’amour de Dieu.
Qu’est-ce donc que cette autorité (ou ce pouvoir) des ténèbres ? C’est tout ce qui, en nous ou autour de nous, est mortifère et délétère. Tout ce qui détruit, asservit, humilie…
Être sauvé, c’est être en sécurité, à l’abri auprès de Dieu. Même si des traumatismes ou des cicatrices demeurent encore.
Il ne faut pas réduire le salut à un chemin d’épanouissement personnel, mais il faut tout de même reconnaître son pouvoir libérateur, dès aujourd’hui. La grâce de Dieu est un atout, une force, pour vaincre nos addictions, être libéré de nos asservissements, trouver un chemin de restauration et d’épanouissement.
Je ne dis pas que tout est facile et que la vie chrétienne n’est qu’une succession de victoires. Pour prolonger la métaphore, on pourrait dire que le transfert dans le Royaume du Fils bien-aimé est en cours… il reste encore des traces, des blessures, des traumatismes du pouvoir des ténèbres qui nous tenait otage. Les cicatrices ne sont pas encore toutes fermées et elles peuvent se rappeler à nous, parfois de manière douloureuse.
Mais nous sommes bel et bien sauvés, à bord du canot de sauvetage qui nous conduit en sécurité, vers le rivage du Royaume qui vient.
Conclusion
Annoncer la Bonne Nouvelle du salut, ce n’est pas simplement transmettre un message stéréotypé. Comme si on n’avait pas annoncé l’évangile tant qu’on n’a pas énoncé explicitement le message, en quatre points, en n’oubliant surtout pas là croix, le péché et la repentance.
Être témoin du salut, de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, c’est avant tout être témoin d’une réalité qui est réellement vécue par la foi. D’ailleurs un chrétien n’est pas témoin d’un message ou d’une doctrine, il est témoin d’une personne. Témoin de sa rencontre avec le Christ, et du chemin que le Christ fait avec lui.
Un chemin aux multiples aspects. Chemin de libération à vivre au rythme de nos combats. Chemin de découverte de Dieu comme Père. Chemin d’espérance vers un monde nouveau.
Voilà de belles promesses à vivre !
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