dimanche 16 novembre 2025

Persévérez, sans paniquer !

Le texte de l’évangile proposé dans la liste de lectures de ce dimanche résonne de manière particulière dans le contexte géopolitique troublé qui est le nôtre, source d’incertitude et d’angoisse. D’autant plus au terme d’une semaine où nous avons commémoré les 10 ans des attaques terroristes à Paris en 2015… 

En réalité, il s’agit pas du tout d’un texte qui voudrait alimenter notre angoisse. Bien au contraire, il est là pour nous donner un cap, une espérance, et nous aider à avoir la bonne attitude, y compris quand tout ce qui nous entoure chancelle. 

Luc 21.5-19
5Quelques personnes parlaient du temple et disaient qu'il était magnifiquement orné de belles pierres et d'objets offerts à Dieu. Mais Jésus dit : 6« Les jours viendront où, de ce que vous voyez là, il ne restera pas pierre sur pierre ; tout sera détruit. »
7Ils lui demandèrent alors : « Maître, quand cela se passera-t-il ? Quel sera le signe qui indiquera le moment où ces choses doivent arriver ? » 8Jésus répondit : « Faites attention, ne laissez personne vous égarer. Car beaucoup viendront en mon nom et diront : “C'est moi !” et : “Le moment fixé est arrivé !” Mais ne les suivez pas. 9Quand vous entendrez parler de guerres et de révolutions, ne vous effrayez pas ; il faut que cela arrive d'abord, mais ce ne sera pas tout de suite la fin. » 10Puis il ajouta : « Car on se dressera peuple contre peuple, royaume contre royaume ; 11il y aura de terribles tremblements de terre et, en divers lieux, des famines et des épidémies ; il y aura aussi des phénomènes effrayants et des signes impressionnants venant du ciel. 12Mais avant tout cela, on vous arrêtera, on vous persécutera, on vous livrera pour être jugés dans les synagogues et l'on vous mettra en prison ; on vous fera comparaître devant des rois et des gouverneurs à cause de moi. 13Ce sera pour vous l'occasion de témoigner à mon sujet. 14Soyez donc bien décidés à ne pas vous inquiéter par avance de la manière dont vous vous défendrez. 15Je vous donnerai moi-même des paroles et une sagesse telles qu'aucun de vos adversaires ne pourra leur résister ou les contredire. 16Vous serez livrés même par vos parents, vos frères, vos sœurs, votre famille et vos amis ; on fera condamner à mort plusieurs d'entre vous. 17Tout le monde vous détestera à cause de moi. 18Mais pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. 19Tenez bon : c'est par votre persévérance que vous sauverez votre vie.

Au début de notre texte, on peut avoir l’impression que Jésus joue au rabat-joie. Quelques personnes, sans que Luc précise de qui il s’agit, s’extasient devant le temple et sa beauté. Alors Jésus décide de s’insérer dans la discussion. Pourtant, on ne lui avait rien demandé ! Et lui, il s’adresse à ces personnes : le jour viendra où tout sera détruit ! Bonjour l’ambiance… 

Mais c’est bien ce qu’on peut constater si on va aujourd’hui à Jérusalem. Depuis près de 2000 ans, il ne reste du temple qu’une partie de mur, que l’on appelle désormais le « mur des lamentations ». 

Alors évidemment, les interlocuteurs de Jésus s’inquiètent ! Quand est-ce que ça va arriver ? Quels sont les signes qui nous avertiront ? On ne les sent pas très tranquilles… Et il faut reconnaître que Jésus ne répond pas vraiment à la question qui lui est posée. Il se refuse à parler du moment où ça doit arriver. Jésus préfère répondre en dressant un tableau sombre de l’histoire de l’humanité, fait de guerres, de violence, de catastrophes et de persécution (en particulier pour les disciples de Jésus). Ce qu’il dit d’ailleurs semble bien déborder largement le moment annoncé de la destruction du temple (qui sera plus spécifiquement évoqué à partir du verset 20). 

Il faut quand même dire que ça correspond bien à la réalité de l’histoire de l’humanité. Et on y est sans doute particulièrement sensible aujourd’hui, dans le contexte que l’on connaît. 

Soulignons toutefois que le texte se termine dans l’espoir. Après avoir évoqué en particulier la persécution à laquelle les disciples du Christ doivent s’attendre, Jésus dit : « Mais pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. Tenez bon : c'est par votre persévérance que vous sauverez votre vie. » C’est d’abord une affirmation de la souveraineté de Dieu à qui rien n’échappe, pas même un seul de nos cheveux. Quoi qu’il puisse nous arriver, cela n’échappe pas à la volonté souveraine de Dieu et nous demeurons dans sa main. C’est aussi l’affirmation de la persévérance comme valeur clé du croyant. On pourrait traduire aussi le terme grec par endurance. C’est le fait de tenir bon malgré les difficultés et les épreuves. Par la persévérance, on triomphe de toutes les adversités. Parce que rien ni personne ne peut nous ôter la vraie vie, celle qui vient de Dieu. Pas même la mort. 

Il y a là une merveilleuse promesse, sur laquelle il est précieux de s’appuyer quand on considère tout ce que Jésus dit par ailleurs dans notre texte… et quand on considère la réalité de notre monde, des difficultés et des épreuves auxquelles nous sommes tous confrontés. 

Mais au cœur de tout ce sombre tableau, il y a trois impératifs qui ont été glissés. 

  • « Faites attention, ne laissez personne vous égarer. » (v.8)
  • « Quand vous entendrez parler de guerres et de révolutions, ne vous effrayez pas… » (v.9)
  • « Soyez donc bien décidés à ne pas vous inquiéter par avance de la manière dont vous vous défendrez. » (v.14) 

Et cela doit attirer notre attention parce que les impératifs indiquent un commandement ou un conseil. Ces trois impératifs disent ce que Jésus nous invite à faire, même dans les contextes les plus hostiles, pour être vraiment animés de cette valeur clé de la persévérance. Ce sont ces trois impératifs qui feront l’objet de ma prédication ce matin.

 

« Faites attention, ne laissez personne vous égarer. » (v.8)

Littéralement : « Veillez à ne pas vous laisser égarer. » Et Jésus met en garde : beaucoup viendront et diront « c’est moi » ou « le moment est arrivé ! ». Alors que les interlocuteurs de Jésus veulent savoir quand les catastrophes annoncées par Jésus se dérouleront, ce dernier refuse de leur répondre. Et il met en garde contre ceux qui prétendront, eux, avoir la réponse… ceux qui prétendront être la réponse ! 

Jésus dit : ne les suivez pas ! Ne vous laissez pas embarquer. Ne vous faites pas avoir ! Ne croyez pas n’importe quoi et n’importe qui ! A l’heure des réseaux sociaux, des fake news et de la post-vérité, voilà un avertissement d’actualité ! 

Une des applications de cette mise en garde concerne les soi-disant révélations de ceux qui ont découvert la date du retour de Jésus ou de la fin du monde. Il y en a toujours eu, et il n’y en a sans doute jamais eu autant qu’aujourd’hui, avec les moyens de diffusion sur Internet… Je vous avoue que c’est quelque chose que je n’arrive vraiment pas à comprendre. Chercher des codes cachés dans la Bible, proposer des interprétations douteuses, prétendre avoir reçu de nouvelles révélations… Tout cela pour s’obstiner à chercher ce que Jésus a dit clairement que nous ne pouvons pas savoir ! 

C’est avant tout une mise en garde contre les faux Messie, contre des arnaqueurs et des manipulateurs qui se font passer pour le Christ, contre des personnes qui se positionnent elles-mêmes ou qui sont perçues comme des sauveurs, des « personnes providentielles », des envoyés de Dieu… qu’ils soient gourou, responsable d’Eglise ou responsable politique ! 


« Quand vous entendrez parler de guerre… ne vous effrayez pas. » (v.9)

Le deuxième impératif, au verset 9, est liée aux versets qui suivent et qui décrivent un monde secoué par les guerres, les violences, les catastrophes… Bref, le monde qu’on voit aujourd’hui dès qu’on allume une chaîne d’information en continu. Et si vous zappez de l’une à l’autre, vous en verrez une qui évoque la guerre en Ukraine, une autre la situation humanitaire à Gaza, une autre l’incendie de forêt qui ravage telle partie de la planète et une autre le dernier fait-divers violent qui a eu lieu près de chez vous. 

Face à tout cela, et tout le reste auquel vous serez confrontés sur les réseaux sociaux, comment ne pas être dans le stress et l’angoisse ? D’ailleurs, le « ne vous effrayez pas » du verset 9, on pourrait aussi très bien le traduire « ne paniquez pas ! »

Depuis 2000 ans que l’Eglise existe, combien de fois les chrétiens ont-ils cru que, cette fois, c’était la fin ? En créant d’ailleurs parfois des mouvements de panique. Sauf que cela, seul le Seigneur le sait. C’est lui qui demeure le maître souverain de l’histoire. 

C’est vrai que si notre espérance n’est que dans ce monde, il y a de quoi être inquiet. Mais notre espérance est dans un Royaume qui vient, qui va descendre du ciel sur notre terre. Et cela au temps fixé par Dieu. Alors pas de panique : Dieu tient les rênes de l’histoire. 

Je cite souvent cette parole de l’Apocalypse, au chapitre 4, quand Jean décrit la vision qu’il reçoit où il voit un trône : « Il y avait un trône dans le ciel, et sur ce trône quelqu'un était assis. » (Apocalypse 4.2). Le trône n’est pas vide ! Il y a bien un maître souverain qui règne secrètement, mystérieusement, sur l’histoire ! Alors ne paniquez pas !


« Soyez donc bien décidés à ne pas vous inquiéter par avance de la manière dont vous vous défendrez. » (v.14) 

La liste des catastrophes évoquées par Jésus se termine avec l’annonce de la persécution qui attend les disciples, l’adversité à laquelle ils vont devoir faire face, et qui pourrait même les conduire devant les tribunaux, simplement à cause de leur foi. 

Jésus utilise alors une formule étonnante, invitant à ne pas s’inquiéter à l’avance de notre défense. Et il dit même avec insistance qu’il faut s’en convaincre. Littéralement : « Mettez donc dans votre cœur de ne pas préparer votre défense. » Ou comme le traduit très bien la TOB : « Mettez-vous en tête que vous n'avez pas à préparer votre défense. »

C’est un conseil qui peut paraître paradoxal. On aurait pu s’attendre à l’inverse. Jésus annonce à ses disciples qu’ils vont être traduits devant les tribunaux, alors qu’ils s’y préparent ! Mais il dit le contraire : mettez-vous bien dans le crâne de ne pas vous y préparer à l’avance. 

Bien sûr, l’exhortation s’accompagne d’une promesse : « Je vous donnerai moi-même des paroles et une sagesse telles qu'aucun de vos adversaires ne pourra leur résister ou les contredire. » (v.15) Mais quand même, le conseil c’est : ne vous préparez pas ! Pourquoi ? Peut-être parce que sinon, vous n’allez plus penser qu’à ça. Je n’ai personnellement jamais été appelé à comparaître devant un tribunal mais j’imagine le stress que cela doit représenter. Dans une moindre mesure, quand vous avez un examen très important à passer, que faites-vous ? Vous révisez ! Sans cesse. Et vous ne pensez pratiquement plus qu’à ça jusqu’à ce que ce soit passé. 

En fait, Jésus veut nous mettre en garde contre le danger d’anticiper toujours nos malheurs, voire d’imaginer ce qui serait le pire. C’est le meilleur moyen d’alimenter une angoisse, voire de nous paralyser… et d’oublier la mission qui est la nôtre. 

Quel que soit le chaos du monde, quel que soit l’adversité que nous rencontrons, notre mission n’est pas d’anticiper nos malheurs de demain, mais d’être témoin de Jésus-Christ aujourd’hui. 

Jésus dit à ses disciples : ne vous inquiétez pas, je serai avec vous et je vous donnerai les paroles le moment venu. Votre boulot, ce n’est pas de préparer votre défense. Vous avez une autre mission. Et d’ailleurs, Jésus l’a dit explicitement au verset précédent : « Ce sera pour vous l'occasion de témoigner à mon sujet. »


Conclusion

Quelle que soit la situation du monde ou de votre vie, notre texte de ce matin, qui rappelle étrangement le contexte anxiogène que nous connaissons, n’est pas là pour ajouter une couche d’angoisse ou d’incertitude, mais pour rappeler une promesse, qui est une bonne nouvelle : Dieu est le maître souverain de l’histoire. 

Et quand on met bout à bout les trois exhortations de notre texte, voici le message que nous pouvons discerner : 

Ne vous faites pas avoir !
Ne paniquez pas ! 
N’anticipez pas vos malheurs ! 
Voilà la meilleure façon de persévérer dans l’attente du Royaume qui vient. 

 

 

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