dimanche 24 novembre 2019

Vivre à contre-courant

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(Cette prédication a été donnée dans le cadre du culte de l'Eglise persécutée, proposé par Portes Ouvertes)

“Êtes-vous prêts à vivre à contre-courant ?” La vidéo nous laisse avec cette question… Une question qui prend une dimension toute particulière quand on entend ces témoignages, quand le fait de vivre à contre-courant conduit à la prison et la persécution pour sa foi. Mais la question demeure pertinente pour nous, aujourd’hui, dans notre contexte. Même si nous ne risquons pas la prison…

C’est une question qui s’est d’ailleurs posée très vite dans l’histoire de l’Eglise, dès le chapitre 4 du livre des Actes. Dans le contexte de cet épisode biblique, ce qui a déclenché le problème, c’est la guérison miraculeuse d’un infirme ! Et aussi, évidemment, la discussion qui a suivi où Pierre en a profité pour expliquer qu’ils avaient agi au nom de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, mort et ressuscité.

Ce discours et ce miracle embarrassaient les chefs religieux. Les apôtres étaient devenus gênants, il fallait les faire taire. C’est tout de même étonnant : les apôtres étaient gênants… parce qu’ils faisaient le bien et annonçaient une bonne nouvelle ! Les raisons de leur emprisonnement étaient donc profondément injustes. Exactement comme dans la vidéo, avec le témoignage de Mojtaba.

Certes, il arrive que l’Evangile soit détourné ou instrumentalisé ! Et c’est évidemment condamnable. Il arrive aussi que les chrétiens tendent le bâton pour se faire battre, par leur attitude ou leur discours... Mais quand l’Evangile est simplement partagé, qu’il est véritablement vécu, et que c’est ça qui est perçu comme un risque de trouble à l’ordre publique, alors il y a un problème…

Portes Ouvertes nous fait part du témoignage du pasteur Wang Yi, en Chine. Lui, son épouse et d’autres responsables de leur église de 750 membres s’attendaient à être arrêtés un jour ou l’autre. Et c’est ce qui s’est passé le 9 décembre 2018 à Chengdu dans la province du Sichuan. Ce dimanche soir, plus d’une centaine de fidèles ont été interpellés à l’église, à leur domicile ou dans la rue. S’ils ont la plupart d’entre eux ont été libérés après avoir été interrogés, Wang Yi et 10 responsables sont restés en détention. Il encourt une peine de 15 ans de prison pour “incitation à la subversion contre le pouvoir de l’État.”

Quelques semaines avant d’être arrêté, le pasteur Wang Yi a rédigé sa « déclaration de désobéissance fidèle.» En voici un extrait :
« La Bible nous dit de respecter les autorités, mais elle ne nous dit pas d’aller à l’encontre de notre conscience ou du message de l’Évangile. L’Église utilise donc des moyens pacifiques pour manifester sa foi et répandre l’Évangile. En tant que pasteur, ma désobéissance fait partie du mandat de l’Évangile. Le Grand Mandat du Christ exige de nous une grande désobéissance. Le but de la désobéissance n’est pas de changer le monde, mais de témoigner d’un autre monde. » 

Le témoignage du pasteur Wang Yi fait écho aux paroles prononcées par les apôtres Pierre et Jean, devant le conseil religieux, à la fin de l’épisode du livre des Actes des apôtres :

Actes 4.18-20
18 (Les membres du conseil) rappelèrent (les apôtres) et leur interdirent catégoriquement de prononcer ou d'enseigner le nom de Jésus. 19 Mais Pierre et Jean leur répondirent : « Jugez vous-mêmes s'il est juste devant Dieu de vous obéir à vous plutôt qu'à Dieu. 20 Quant à nous, nous ne pouvons pas renoncer à parler de ce que nous avons vu et entendu. » 

L’attitude des apôtres, comme celle de nos frères et soeurs qui font face à la persécution, nous interpelle. Arrêtons-nous donc sur les paroles de Pierre et Jean.


Soyons à contre-courant mais pour de bonnes raisons !

“Jugez vous-mêmes s'il est juste devant Dieu de vous obéir à vous plutôt qu'à Dieu.”

Être à contre-courant n’est pas une valeur en soi. C’est une conséquence possible de l’impératif de fidélité à Dieu. On peut se retrouver légitimement à contre-courant quand on est dans une situation où il faut choisir entre obéir aux hommes ou obéir à Dieu. Ce n’est pas toujours le cas… mais parfois c’est nécessaire.

Alors soyons à contre-courant mais pour de bonnes raisons ! Soyons à contre-courant parce que nous faisons le bien, et parce que nous témoignons de notre foi.

On pensera sans doute en premier, aujourd’hui, à l’évolution des moeurs, celle des normes éthiques et sociétales, qui peuvent nous donner l’impression d’être à contre-courant. Et il me paraît légitime d’assumer nos convictions dans ces domaines, pour autant que nous les argumentions sérieusement d’un point de vue biblique et théologique, et que nous n’en restions pas à des discours simplistes. Et même si ce n’est pas le coeur de l’Evangile qui est touché, nous devons sans doute accepter d’être en décalage dans ces questions qui touchent à la famille, au mariage, à la sexualité... quitte parfois à être taxé de réactionnaires et de rétrogrades !

Mais il ne faudrait pas penser que ce sont les seules questions où nous devrions être à contre-courant ! Nous devons interroger nos comportements du quotidien… là où l’Evangile a aussi quelque chose à nous dire. Être à contre-courant, c’est peut-être aussi refuser les petites magouilles du quotidien “que tout le monde s’autorise”, ne pas cautionner “ce que tout le monde pense tout bas” pour désigner des boucs émissaires (les immigrés, les musulmans…), ne pas se laisser enfermer dans le moule consumériste, égocentrique, compétitif. véhiculé par la publicité, les médias sociaux… Dans toutes ces petites questions du quotidien, nous pouvons facilement nous laisser emporter par le courant !

Soyons donc à contre-courant mais pour de bonnes raisons !


Assumons-le et osons le dire !

“Quant à nous, nous ne pouvons pas renoncer à parler de ce que nous avons vu et entendu.”

Les apôtres assument ouvertement leur désobéissance ! Ils ne peuvent pas se résoudre à se taire en ce qui concerne “ce qu’ils ont vu et entendu”. Cette formule sera reprise par Jean au début de sa première épître :

1 Jean 1.1-3
1 La parole qui donne la vie existe depuis le commencement. Nous l'avons entendue. Nous l'avons vue de nos propres yeux. Nous l'avons observée. Et nos mains l'ont touchée. 2 Cette vie s'est manifestée et nous l'avons vue ! Nous en sommes témoins et nous vous annonçons la vie éternelle qui était auprès du Père et qui s'est manifestée à nous. 3 Ce que nous avons vu et entendu, c'est à vous que nous l'annonçons aussi ; ainsi vous serez comme nous dans la communion que nous avons avec le Père et avec son Fils Jésus Christ.

Ce que les apôtres ne peuvent pas garder sous silence, c’est le témoignage à propos de la personne et de l’oeuvre de Jésus. Ca, on ne peut pas le taire. C’est le coeur de notre foi, ce qui a changé notre vie, c’est la même bonne nouvelle qui est pour tous. Comment ne pas en parler ?

C’est une vraie interpellation pour nous, aujourd’hui, dans un contexte où on veut de plus en plus enfermer la foi dans la sphère privée. Et qu’on le veuille ou non, je pense que nous sommes influencés, conditionnés par cela. Est-ce que, si on en parle, ça va nous conduire à être persécuté ? Non. Pas en France. Mais être incompris, rejeté, moqué, oui, peut-être… Et on n’en a sans doute pas envie ! Alors on s’auto-censure. On arrive presque à avoir honte d’être chrétien, et pour éviter les ennuis, on ne le dit pas, on se tait…

En réalité, dire notre foi publiquement, même affirmer que les religions doivent avoir pleinement leur place dans le débat publique… c’est déjà presque vivre à contre-courant aujourd’hui !


Conclusion

Les apôtres Pierre et Paul devant le conseil religieux, Mojtaba en Iran, le pasteur Wang Yi en Chine… autant de chrétiens persécutés à cause de leur foi qui nous interpellent.

Ce n’est pas parce que nous ne risquons pas la persécution qu’il n’y a pas d’enjeu pour nous. Car le Seigneur nous appelle à être des témoins de la Bonne Nouvelle. Et il y a plein de raisons qui pourraient nous pousser à nous taire. Mais comme le dit l’apôtre Paul dans sa lettre aux Romains :

Romains 10.14
Comment feront-ils appel (au Seigneur) sans avoir mis leur foi en lui ? Et comment mettraient-ils leur foi en lui sans en avoir entendu parler ? Et comment en entendront-ils parler si personne ne l'annonce ?

Et tant pis si on répondant à cet appel, nous nous nous retrouvons à contre-courant…




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