dimanche 24 juillet 2022

Ruth - épisode 1 : "là où tu iras, j'irai"

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Le livre de Ruth est un petit livre qui raconte une belle histoire, toute simple. C’est une histoire champêtre, une histoire de loyauté et de fidélité, et même une histoire d’amour. Mais derrière cette histoire toute simple se cache un récit théologique qui parle de foi, d’alliance, de providence, avec aussi des thématiques qui gardent une grande actualité comme l’accueil de l’étranger, le soin des plus faibles, la maternité (et même la maternité de substitution !)… 

Dans la Bible hébraïque, le livre de Ruth fait partie des 5 rouleaux lus lors des grandes fêtes religieuse juives. On lit le livre de Ruth lors de la fête des récoltes, devenue la fête de Pentecôte où est commémoré le don de la Loi à Moïse. 

On ne sait pas qui l’a écrit, on ne sait même pas quand il a été écrit… Mais l’histoire est située au temps des Juges, donc entre l’arrivée du peuple Hébreux en Canaan et l’institution de la royauté. On est environ au XIIe siècle avant Jésus-Christ. C’était un temps troublé, il y avait de nombreux conflits pour les Israélites avec les peuples voisins et en interne c’était un peu chaotique et assez violent. Dans ce contexte, l’histoire de Noémi, Ruth et Booz, les trois personnages principaux du récit, apparaît comme un havre de paix. 

Notre mini-série comptera quatre épisodes qui correspondent aux quatre chapitres du livre. 

Ruth 1

1 À l'époque où gouvernaient les juges, il y eut une famine dans le pays. Alors un homme de Bethléem en Juda partit avec sa femme et ses deux fils ; ils immigrèrent pour un temps dans le pays de Moab. 2 L'homme s'appelait Élimélek, sa femme Noémi et ses deux fils Malon et Kilion ; ils appartenaient au clan d'Éfrata. Au cours de leur séjour en Moab, 3 Élimélek, le mari de Noémi, mourut et elle resta seule avec ses deux fils. 4 Ceux-ci épousèrent des Moabites ; l'une d'elles s'appelait Orpa, l'autre Ruth. Ils habitèrent là-bas pendant dix ans. 5 Malon et Kilion moururent à leur tour. Noémi resta seule, privée de ses deux enfants et de son mari.

6 Alors Noémi se leva, elle et ses deux belles-filles, et quitta le pays de Moab pour revenir chez elle. Elle avait en effet appris que le Seigneur était intervenu en faveur de son peuple et lui avait donné de bonnes récoltes. 7 Elle partit de l'endroit où elle se trouvait, accompagnée de ses deux belles-filles, et elles allèrent sur le chemin du retour vers le pays de Juda. 8 Noémi dit à ses deux belles-filles : « Allez, rentrez chez vous maintenant, chacune dans la maison de sa mère. Que le Seigneur soit bon pour vous comme vous l'avez été pour ceux qui sont morts et pour moi-même ! 9 Que le Seigneur permette à chacune de vous de trouver la sécurité, celle d'une femme dans la maison de son mari ! » Puis elle les embrassa. Elles élevèrent leur voix et se mirent à pleurer abondamment 10 et lui dirent : « Non ! nous t'accompagnons. Avec toi, nous retournerons auprès de ton peuple. » 11 Noémi reprit : « Rentrez chez vous, mes filles ! Pourquoi voulez-vous venir avec moi ? Je ne suis plus en âge d'avoir des fils qui pourraient vous épouser. 12 Rentrez chez vous mes filles, allez ! Je suis trop vieille pour me remarier. Et même si je disais : “Il y a encore de l'espoir pour moi, cette nuit même je serai à un homme qui me donnera des fils”, 13 attendriez-vous qu'ils aient grandi ? Renonceriez-vous à épouser quelqu'un d'autre ? Non, mes filles ! ma situation est plus amère que la vôtre, car la main de Dieu s'est abattue sur moi. »

14 Les deux belles-filles élevèrent la voix et pleurèrent de plus belle. Finalement Orpa embrassa sa belle-mère avant de la quitter, mais Ruth s'attacha à elle. 15 Noémi dit à Ruth : « Regarde, ta belle-sœur est retournée vers son peuple et vers ses dieux. Retourne chez toi, prends exemple sur ta belle-sœur. » 16 Mais Ruth répondit : « N'insiste pas pour que je t'abandonne et que je retourne chez moi. Là où tu iras, j'irai ; là où tu t'installeras, je m'installerai. Ton peuple sera mon peuple ; ton Dieu sera mon Dieu. 17 Là où tu mourras, je mourrai et c'est là que je serai enterrée. Je le jure par le nom du Seigneur, seule la mort me séparera de toi ! »

18 Quand Noémi vit que Ruth était résolue à l'accompagner, elle cessa d'insister 19 et elles allèrent ensemble jusqu'à Bethléem.

Leur arrivée suscita de l'émotion dans toute la localité. Les femmes s'exclamaient : « Est-ce vraiment Noémi ? » 20 Elle leur déclara : « Ne m'appelez plus Noémi, “l'heureuse”, mais appelez-moi Mara, “l'affligée”, car le Dieu souverain m'a durement affligée. 21 Je suis partie d'ici les mains pleines et le Seigneur m'a fait revenir les mains vides. Pourquoi m'appelleriez-vous encore Noémi, alors que le Seigneur s'est tourné contre moi et que le Dieu souverain a causé mon malheur ? »

22 C'est ainsi que Noémi revint du pays de Moab avec Ruth, sa belle-fille moabite. Et elles arrivèrent à Bethléem au début de la récolte de l'orge.


Ce premier épisode nous emmène dans le pays de Moab. Les moabites étaient un de ces peuples voisins souvent en conflit avec Israël. Il se situait dans une région montagneuse sur la côte est de la Mer Morte (en Jordanie actuelle). En se rendant à Moab pendant la famine, Elimélek va donc chez l’ennemi… mais il va aussi chez le cousin. Parce le peuple de Moab est apparenté au peuple d’Israël : Moab était un des fils de Loth, le neveu d’Abraham. 

Réfugié climatique en quelque sorte, Elimélek s’installe à Moab avec toute sa famille, c’est-à-dire sa femme et ses deux fils. Et cela dure plusieurs années puisqu’Elimélek meurt et que les deux fils trouvent chacun une épouse moabite. Dix années passent, les fils aussi meurent, sans qu’aucun enfant soit né. 

Il faut comprendre ici la situation de détresse que cela représentait pour Noémi : elle est réfugiée en pays étranger, veuve et sans descendance. Ça signifiait, concrètement, dans le contexte de l’époque, une réelle précarité et un avenir bouché. Ça pouvait même être perçu alors comme un signe de malédiction ! C’est d’ailleurs bien ce que Noémi sous-entend quand elle dit à ses belles-filles : « ma situation est plus amère que la vôtre, car la main de Dieu s'est abattue sur moi. » (v.13) 

On comprend bien, dans ces conditions, qu’elle propose à ses deux belles filles de la quitter et de refaire leur vie en trouvant un nouveau mari. Noémi n’avait rien à leur offrir… Sa décision de retourner en Israël n’y change rien. Elle ne sera plus réfugiée, certes, mais elle sera toujours veuve et sans descendance. Il suffit de voir dans quel état d’esprit elle se trouve en arrivant chez elle, accueillie avec surprise par toute la localité.

Ruth 1.20-21

20 Elle leur déclara : « Ne m'appelez plus Noémi, “l'heureuse”, mais appelez-moi Mara, “l'affligée”, car le Dieu souverain m'a durement affligée. 21 Je suis partie d'ici les mains pleines et le Seigneur m'a fait revenir les mains vides. Pourquoi m'appelleriez-vous encore Noémi, alors que le Seigneur s'est tourné contre moi et que le Dieu souverain a causé mon malheur ? »

Franchement, ça n’a pas dû être facile pour Ruth d’arriver dans ces conditions en Israël, un pays qui n’était pas le sien, avec sa belle-mère dans un tel état psychologique. Mais c’est ce qu’elle avait choisi. Pourtant, ce n’était pas sa mère, elle n’avait aucune obligation envers elle, surtout alors qu’elle l’encourageait à partir. 

Ruth 1.16-17

16 Mais Ruth répondit : « N'insiste pas pour que je t'abandonne et que je retourne chez moi. Là où tu iras, j'irai ; là où tu t'installeras, je m'installerai. Ton peuple sera mon peuple ; ton Dieu sera mon Dieu. 17 Là où tu mourras, je mourrai et c'est là que je serai enterrée. Je le jure par le nom du Seigneur, seule la mort me séparera de toi ! »

Pourquoi Ruth a-t-elle fait ce choix de suivre Noémi ? Par fidélité à sa belle-mère, tout simplement. Le personnage de Ruth dans ce premier épisode est l’exemple même de la fidélité. Une fidélité qui s’exprime ici dans le cadre de la famille mais qui nous dit sans doute quelque chose de la fidélité en général. Et ça nous intéresse aussi parce que la fidélité est bien une des dimensions de la foi. 

Je vous propose, en guise d’application, de souligner deux aspects de la fidélité, inspirés de l’exemple de Ruth. 


La fidélité est un choix librement consenti

Ruth n’était pas obligée de se montrer fidèle à Noémi, d’autant que celle-ci lui demande, à plusieurs reprises, de partir. Et il n’y a jamais aucun reproche fait à Opra, l’autre belle-fille, lorsqu’elle décide de laisser sa belle-mère. Il n’y a aucune raison de penser qu’elle n’aimait pas Noémi. Elle pleure autant que Ruth quand elle leur demande de la laisser partir seule en Israël. Ruth, elle, fait le choix de rester avec Noémi, elle choisit la fidélité à sa belle-mère.

On ne peut pas obliger quelqu’un à être fidèle. Sous la contrainte, ce n’est plus de la fidélité, c’est de la soumission voire de l’esclavage. Par définition, la fidélité est un choix librement consenti. Dans le mariage par exemple, la fidélité repose sur un choix libre de l’un envers l’autre, un engagement réciproque. En France, devant le Maire, chaque époux ou épouse doit publiquement consentir à prendre l’autre comme époux ou épouse. C’est un engagement à être fidèle à ce choix librement consenti. Un choix qu’on peut confirmer solennellement devant Dieu par une cérémonie religieuse.  

La fidélité, dans le mariage ou ailleurs, n’est donc pas une contrainte qu’on nous impose, c’est un choix qu’on assume. C’est tout simplement une preuve d’amour, qui ne peut se vivre que dans la liberté car sans liberté, il n’y a pas d’amour. 


La fidélité se mesure dans l’épreuve 

Ruth n’avait rien à gagner à rester fidèle à Noémi. Sa belle-mère n’avait plus rien à lui offrir et partir avec elle, dans un pays qu’elle ne connaissait pas, surtout dans ces conditions, c’était s’engager sur un chemin très incertain… Mais c’est son choix de rester fidèle à Noémi, coûte que coûte.

C’est facile d’être fidèle quand tout va bien, quand tout réussit et quand c’est dans notre intérêt d’être fidèle. Un peu comme avec les cartes de fidélité d’enseignes et de magasins. On les prend parce que c’est notre intérêt, parce qu’au bout d’un certain temps, on aura des cadeaux ou des bons d’achat. 

Mais est-ce encore de la fidélité ? C’est un avantage commercial, c’est du calcul, c’est intéressé… Et certains, plus ou moins consciemment, gèrent un peu comme ça leurs relations et leurs amitiés. De manière intéressée… et ça finit mal en général. 

On reconnaît nos vrais amis, ceux qui nous sont vraiment fidèles, quand ça va mal, quand ce n’est pas drôle d’être avec nous parce qu’on est au fond du trou. Un véritable ami est fidèle quand ça lui coûte, en temps, en argent, en énergie… 

On peut se faire la même réflexion quant à la foi. On l’a dit, la fidélité est un des aspects de la foi. Avoir foi en Dieu, c’est choisir de lui rester fidèle. C’est facile d’être fidèle à Dieu quand tout va bien dans notre vie, c’est facile d’avoir la foi quand tout nous réussit, quand Dieu répond à nos prières

Mais la vie chrétienne n’est pas toujours comme ça… Elle est faite aussi d’épreuves et de moments difficiles, Dieu ne répond pas toujours à nos prières, en tout cas pas comme on l’espère… Et c’est là, dans l’épreuve, la difficulté ou l’adversité que se mesure notre foi-fidélité. 

Certaines théologies prétendent le contraire et disent que la foi nous garantit santé, réussite et prospérité. Eh bien moi je vous dis que je vois une foi bien plus grande et une fidélité bien plus affermie chez un chrétien qui reste fidèle à Dieu dans l’épreuve et garde l’espérance dans la difficulté que chez un chrétien qui prétend ne connaître qu’abondance et bénédiction grâce à sa foi !


Conclusion

Evidemment, l’histoire n’est pas finie. Il reste encore trois épisodes à la mini-série. Nous verrons par la suite où la fidélité de Ruth la mènera. Je ne veux pas vous spoiler la suite mais il va y avoir des rebondissements !

En tout cas, ce premier épisode suffit à nous fournir un bel exemple de fidélité de la part de Ruth, qui interroge la façon dont nous faisons preuve ou non de fidélité dans nos relations, et qui stimule à vivre notre foi comme l’expression de notre fidélité à Dieu, en toutes circonstances.  


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