dimanche 16 octobre 2022

Jusqu’au bout du monde

 
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Avec Abraham, le « père de croyants », nous avons compris l’espérance comme une façon de voir et de saluer de loin l’accomplissement des promesses de Dieu, même celles que nous ne voyons pas de notre vivant. Avec les enseignements de l’apôtre Paul, nous avons compris l’espérance comme un cheminement en cours, celui du croyant qui se laisse modeler par Dieu comme de l’argile par le potier, et qui se laisse transformer, métamorphoser, par l’Esprit de Dieu au plus profond de son être… en attendant la métamorphose ultime, au jour de notre résurrection à venir. 

Et maintenant ? Comment mettre en œuvre notre espérance ? En accomplissant la mission que le Christ nous confie, en attendant le jour de son retour. C’est ce dont nous parle le texte choisi pour cette dernière prédication de notre campagne de rentrée. 

Actes 1.4-8

4 Un jour qu'il prenait un repas avec ses disciples, Jésus leur donna cet ordre : « Ne vous éloignez pas de Jérusalem, mais attendez ce que le Père a promis et que je vous ai annoncé. 5 Car Jean a baptisé dans l'eau, mais vous, dans peu de jours, vous serez baptisés dans l'Esprit saint. »

6 Ceux qui étaient réunis auprès de Jésus lui demandèrent : « Seigneur, est-ce en ce temps-ci que tu rétabliras le règne pour Israël ? » 7 Jésus leur répondit : « Il ne vous appartient pas de savoir quand viendront les temps et les moments, car le Père les a fixés de sa seule autorité. 8 Mais vous recevrez une force quand l'Esprit saint descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'au bout du monde. »


Ce texte s’ouvre sur une promesse extraordinaire, ou plutôt la confirmation d’une promesse extraordinaire : la venue du Saint-Esprit. « Attendez ce que le Père a promis et que je vous ai annoncé. Car Jean a baptisé dans l'eau, mais vous, dans peu de jours, vous serez baptisés dans l'Esprit saint. »

Une telle promesse, c’est forcément le début d’une nouvelle ère. Et c’est vrai ! Mais les disciples s’enflamment : « Seigneur, est-ce en ce temps-ci que tu rétabliras le règne pour Israël ? »

Là, ils vont un peu vite en besogne… et Jésus remet les choses en perspective : il y a des choses que nous ne pouvons pas savoir, Dieu a un calendrier mais nous ne pouvons le connaître : « Il ne vous appartient pas de savoir quand viendront les temps et les moments, car le Père les a fixés de sa seule autorité »

Bref, Jésus leur dit, en quelque sorte : « On reste calme, Dieu a tout en main et il y a des choses que vous ne pouvez pas savoir. Votre responsabilité n’est certainement pas de décrypter cet agenda secret. Vous avez une autre mission : être mes témoins jusqu’au bout du monde. » Notez au passage que cela implique que l’établissement final du Royaume de Dieu n’était pas pour tout de suite… on n’est pas témoin jusqu’au bout du monde en quelques jours ! 

Jésus calme donc les ardeurs de ses disciples en les recentrant sur leur mission : être ses témoins. Mais il y a un prérequis indispensable : la force du Saint-Esprit, et la mission s’accomplira une étape après l’autre, jusqu’au bout du monde.


Être témoin

Jésus ne dit pas à ses disciples : vous serez des évangélistes, des personnes qui proclament la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, jusqu’au bout du monde. Il leur dit : vous serez mes témoins. Ce n’est pas la même chose. Evangéliste, c’est un ministère particulier auquel Dieu appelle certains seulement. Être témoin, c’est la vocation commune à tout chrétien, tout disciple de Jésus-Christ. 

Le terme grec, marturos, a donné martyr en français. La connotation liée à la souffrance et à la mort ne vient pas du grec mais de l’histoire de l’Eglise, lorsque les chrétiens devaient faire face à la persécution et qu’ils risquaient la mort à cause de leur foi. Fidèles jusqu’au bout, ils mouraient en témoin du Christ. 

Plusieurs des disciples qui ont entendu ces paroles de Jésus sont morts en martyr, dans ce sens second. Et aujourd’hui encore, dans certains pays, être fidèle à sa foi chrétienne conduit les croyants à des persécutions qui peuvent parfois les mener jusqu’à la mort en martyr, en témoin du Christ. 

Sans aller jusqu’au martyr, être témoin du Christ, c’est lui être fidèle, être cohérent avec sa foi. La mission ne consiste pas d’abord à évangéliser, à proclamer ou même à parler. Il s’agit d’être témoin par notre vie tout entière.

Pour revenir au texte de la semaine dernière, si le culte que Dieu attend de nous, c’est l’offrande de notre vie entière, alors nous sommes témoins du Christ quand notre vie, dans tous ses aspects, témoigne du Christ. Lorsque notre comportement de tous les jours, qui inclut aussi nos paroles évidemment, pointent vers le Christ. 


Avec la force du Saint-Esprit

C’est pour cela qu’on ne peut pas être témoin du Christ sans la force que procure le Saint-Esprit. C’est lui qui nous modèle et nous transforme à l’image du Christ, c’est lui qui nous donne la force de tenir ferme face à l’épreuve et l’adversité, c’est lui qui peut nous donner les mots justes lorsqu’il s’agit de défendre notre foi. 

Pour être témoin du Christ jusqu’au bout du monde, il y a du pain sur la planche, le travail ne manque et le besoin est là, urgent. Mais Jésus demande à ses disciples d’attendre. « Ne vous éloignez pas de Jérusalem, mais attendez ce que le Père a promis et que je vous ai annoncé. » Plus tard il les enverra et leur demandera de quitter Jérusalem mais pour l’instant, ils doivent attendre. Jésus n’invite évidemment pas ses disciples à la procrastination. Ils doivent attendre parce que ce n’est pas encore le moment, parce qu’ils doivent, d’abord, être revêtu du Saint-Esprit. Autrement dit, ils ne peuvent pas être témoin du Christ sans le Saint-Esprit. 

La qualité de notre témoignage dépend aussi de notre capacité à attendre. Attendre le bon moment. Il faut arrêter de bassiner les gens avec d’incessants appels à la conversion, ou les assommer avec des versets bibliques… mais il faut aussi savoir saisir les occasions qui se présentent pour une parole appropriée. Il faut arrêter de voir nos voisins, nos collègues ou nos amis comme des cibles et n’envisager nos relations avec eux que sous l’angle de la stratégie pour qu’ils se convertissent… mais il ne faut pas non plus s’interdire toute parole et refuser de s’afficher comme croyant ! 

Et surtout, il faut savoir attendre pour prendre le temps de recevoir ce que Dieu veut nous donner par son Esprit. La qualité de notre témoignage dépend aussi largement de notre proximité avec Dieu. Pour refléter la lumière du Christ par notre vie, il faut nous y exposer par notre vie de piété personnelle et communautaire. 

Il faut donc savoir attendre, de plusieurs manières, pour répondre avec pertinence à l’appel que le Christ nous adresse d’être ses témoins.


Franchir une étape après l’autre

Ce qui est intéressant dans la façon dont Jésus exprime la mission qu’il donne à ses disciples ici, c’est qu’il indique des étapes. Il aurait pu très bien dire « Vous serez alors mes témoins jusqu'au bout du monde. » Ça aurait évidemment impliqué toutes les étapes intermédiaires ! Mais il parle explicitement de ces étapes : « Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, et dans toute la Judée, et en Samarie, et jusqu’au bout du monde. »

On va du plus porche au plus éloigné. Jérusalem, c’est la ville où ils vivaient alors. La Judée, c’est toute la région, la Samarie c’est le pays voisin et le peuple apparenté, le bout du monde c’est tout le reste. 

Et les étapes ne sont pas seulement géographiques mais aussi culturelles. La Judée, c’est l’ancien Royaume de Juda, la terre historique du peuple Juif. Les disciples sont en terrain connu. La Samarie, c’est le territoire de l’ancien Royaume du Nord d’Israël, où résident désormais les Samaritains, un peuple parent mais méprisé par les Juifs d’alors. Première barrière culturelle. Le bout du monde, c’est tout le reste, les païens, tous les non-Juifs. Et là ce n’est pas une barrière mais un mur culturel !

En insistant sur ces différentes étapes, Jésus souligne que pour accomplir leur mission de témoin, ses disciples doivent comprendre que l’enjeu n’est pas que géographique mais bel et bien culturel et spirituel. 

Aujourd’hui, le bout du monde est sur notre palier… ou sur nos écrans d’ordinateur ou de smartphone. Mais les barrières voire les murs culturels demeurent le grand défi du témoignage. Comment pouvons-nous par notre vie, nos paroles et nos actes, rejoindre ceux que nous côtoyons et qui sont parfois très éloignés de nous par leur culture, leurs valeurs ou les priorités dans leur vie ? Il faut sans doute y aller aussi par étape, avec patience, dans le respect et l’écoute. Et l’aide du Saint-Esprit, dont l’œuvre renouvelle notre intelligence, est ici la clé pour exercer un juste discernement et être créatif !


Conclusion

Et maintenant donc ? Comment mettre en œuvre notre espérance ? En accomplissant la mission que le Christ nous confie, celle d’être témoin du Christ, en attendant le jour de son retour. 

Le défi est de taille, aujourd’hui comme hier. Il peut même nous paraître insurmontable. Mais une force nous est promise, celle de l’Esprit saint qui vient habiter en nous. 

Le bon témoin sait attendre, pour discerner le bon moment et le bon moyen, et pour laisser le temps à Dieu de poursuivre son œuvre en lui. Pour refléter sa lumière dans notre vie quotidienne, il faut prendre le temps de s’y exposer dans notre piété personnelle et communautaire. Alors seulement nous serons ses témoins, partout où il nous conduira, même jusqu’au bout du monde. 

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