dimanche 14 mai 2023

Le témoignage part du cœur

 

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1 Pierre 3.13-17
13 Qui vous fera du mal si vous êtes pleins de zèle pour le bien ? 14 Même si vous aviez à souffrir parce que vous faites ce qui est juste, vous êtes heureux ! N'ayez aucune crainte des autres et ne vous laissez pas troubler. 15 Mais consacrez dans votre cœur le Christ comme Seigneur. Tenez-vous toujours prêts à vous défendre face à tous ceux qui vous demandent de rendre compte de l'espérance qui est en vous. 16 Mais faites-le avec douceur et respect, en ayant une bonne conscience, afin que ceux qui insultent votre bonne conduite de chrétiens aient à rougir de leurs calomnies. 17 Car il vaut mieux souffrir en faisant le bien, si telle est la volonté de Dieu, plutôt qu'en faisant le mal.

On le perçoit bien dans le ton de ce passage, Pierre écrit à des chrétiens qui sont sous pression, qui font face à une adversité coriace, même jusqu’à la persécution. Il suffit de souligner le vocabulaire utilisé : il parle de souffrance, de crainte, d’insultes, il évoque le fait de devoir se défendre et d’accepter, le cas échéant, de souffrir injustement. Tout cela décrit bien un contexte difficile et même hostile. 

Ce n’est certainement pas notre contexte général en France aujourd’hui. Malgré une méfiance qu’on sent quand même assez forte envers les religions, la liberté de culte et de conscience est garantie dans notre pays. On ne risque pas la persécution à cause de notre foi ! Ce qui ne veut pas dire que ce soit toujours facile de s’affirmer en tant que chrétien. On peut facilement s’attirer des réactions sinon hostiles du moins sceptiques ou moqueuses, particulièrement dans certains contextes professionnels, associatifs ou familiaux. 

Peut-être que vous avez du mal à assumer et affirmer votre foi dans votre famille ou parmi vos proches, parce qu’ils ne comprennent pas votre démarche ou qu’ils contestent votre cheminement spirituel, vous êtes peut-être même taxé de traitre ayant renié votre éducation ou d’illuminé qui s’est laissé embarqué dans une secte. Ce n’est pas de la persécution mais c’est bien une épreuve pour votre foi. 

La grande question est : comment se comporter, en tant que disciple du Christ, dans un contexte hostile ou difficile ? Faut-il fuir, se protéger, se taire, voire cacher sa foi ? 

La réponse de Pierre est claire, au verset 14 : « N'ayez aucune crainte des autres et ne vous laissez pas troubler. » OK… c’est facile à dire ! Mais comment faire ? Pierre se fait alors plus précis : il s’agit de consacrer dans notre cœur le Christ comme Seigneur et de se tenir prêt à se défendre (mais pas n’importe comment). 

C’est intéressant de noter que Pierre insiste ici sur l’attitude de cœur. C’est elle qui est primordiale. Il ne donne pas de techniques d’évangélisation, pas de trucs ou de méthodes infaillibles pour convaincre, pas d’arguments apologétiques incontestables pour clouer le bec aux détracteurs. 

Il s’agit, d’abord, de veiller sur notre cœur : d’une part pour y consacrer le Christ comme Seigneur et d’autre part pour qu’il nous dicte une attitude marquée par la douceur et le respect. Je vous propose de nous arrêter sur ces deux aspects…


1. Consacrer dans notre cœur le Christ comme Seigneur

J’ai gardé ici la formule dans la traduction de la Nouvelle Bible Segond. On pourrait traduire aussi par « sanctifiez dans votre cœur le Christ, le Seigneur ». 

Ça peut paraître un peu surprenant au premier abord. Alors qu’il est question de notre témoignage dans le monde, de notre attitude en tant que chrétien auprès de ceux que nous côtoyons, Pierre nous invite à nous centrer sur nous-mêmes, sur notre cœur, et d’y consacrer le Christ comme Seigneur. Qu’est-ce que cela veut dire ? 

Aujourd’hui, en français, quand on parle du cœur, on parle plutôt du siège de nos émotions. Dessiner un cœur, c’est dire à quelqu’un qu’on l’aime ! Dans la Bible, le cœur a un sens bien plus large. Il est, certes, le siège de nos émotions, positives ou négatives. Mais il est aussi le siège de la volonté, c’est là où se prennent les décisions, où naissent les intentions et les motivations. Mais on lui attribue aussi des fonctions que nous associons plutôt aujourd’hui au cerveau comme l’intelligence, l’imagination, la mémoire… 

En un mot, on peut dire que dans la Bible, le cœur est le centre de notre personne, le centre de contrôle de notre être intérieur. C’est ce qui, en nous, ne se voit pas, à l’inverse du corps, ce qui est caché et qui pourtant définit qui nous sommes, notre personnalité, nos aspirations et nos motivations profondes. 

Consacrer dans notre cœur le Christ comme Seigneur, c’est réserver au Christ une place à part dans notre vie intérieure, le placer au centre de nos pensées, de nos intentions, de nos aspirations, de nos préoccupations. C’est être en relation, en dialogue constant avec lui, dans une forme d’éveil et de prière continue. C’est apprendre à penser notre vie, les autres, le monde comme le Christ. 

C’est là que tout commence. Plus vous serez proches du Seigneur, plus vous serez aptes à vous conduire de façon juste et appropriée en toutes circonstances, même les plus hostiles. On peut élaborer toutes les stratégies possibles d’évangélisation et toutes les théories imaginables de présence et d’engagement dans le monde, si tout ne commence pas dans la sanctification, c’est-à-dire dans la proximité avec Dieu, ça ne servira à rien… 

Mais réserver dans notre vie intérieur une place à part au Christ, le Seigneur, c’est aussi la promesse que toutes les adversités et les oppositions que nous pouvons rencontrer seront relatives. Face à elles, nous avons le Christ, le Seigneur des seigneurs, au cœur de notre vie ! 


2. Avec douceur et respect

Cultiver notre vie intérieure dans une relation de foi avec le Christ ne nous replie par autant sur nous-mêmes, ça ne nous coupe pas des autres, mais ça modifie notre façon d’être avec les autres. Et cela se verra quand il s’agit de répondre de notre espérance ou de témoigner de notre foi aux autres, qu’ils soient hostiles ou non à notre égard. Pierre le qualifie par deux termes : la douceur et le respect. 

Première remarque : ce sont deux attitudes de cœur qui contrastent avec l’hostilité et la violence de ceux qui s’opposent voire persécutent les croyants à qui Pierre écrit. Ce contraste est bien un écho au commandement radical de Jésus invitant ses disciples à aimer même leurs ennemis… 

Pour la douceur, on peut dire que la promouvoir, aujourd’hui, c’est sans doute aller à contre-courant… Nous vivons dans un monde agressif, qui cherche constamment à provoquer l’affrontement, le clash. C’est surtout le cas quand il est question de discours, de débat ou d’échange. Aujourd’hui, on est toujours dans l’opposition, dans la polarisation. On doit choisir son camp. On est soit pour soit contre, la nuance n’a pas de place… Il faut un vainqueur et un perdant. Dans ce contexte, la douceur est perçue comme une faiblesse. 

Assumons d’être à contre-courant. A la suite de l’exhortation de Pierre, entrons en résistance par la douceur, choisissons la nuance et la modération !

Quant au respect, vous avez peut-être un autre terme dans votre version de la Bible. C’est le même terme grec que celui traduit par « crainte » au verset 14 et qui évoque alors la peur que nous ne devons pas avoir envers les autres. Et comme c’est aussi le mot qu’on utilise pour parler de la « crainte » de Dieu, de la révérence qui lui est dû, beaucoup de commentateurs estiment que Pierre nous invite ici à faire preuve de révérence envers Dieu. 

Mais il me semble plus légitime de considérer que Pierre joue ici sous les différentes nuances du même mot pour parler d’une juste attitude de respect de l’autre, y compris celui qui est notre adversaire. D’autant qu’au verset 14, il utilise une formulation différente. Littéralement : « Ne soyons pas effrayés de leur peur », c’est-à-dire de la peur de ces gens. Il y a une peur qui crée l’effroi, et elle n’est pas légitime. Mais il y a aussi une peur qui est une forme de respect et celle-là est légitime. C’est d’ailleurs aussi le cas dans notre relation à Dieu. Il ne s’agit pas d’une peur qui écrase ou paralyse mais d’un profond respect qui nous place dans une juste posture d’humilité et de soumission à Dieu. 

Avec la douceur, le respect doit donc caractériser notre attitude et notre témoignage envers les autres. Le respect, aujourd’hui, on en entend parler souvent. Mais avant tout comme un droit plutôt que comme un devoir. Le seul respect qui compte, c’est celui que je mérite, celui que les autres me doivent. Mais le respect dont parle Pierre ici, c’est celui que je dois à l’autre, même s’il n’est pas d’accord avec moi, même s’il est mon ennemi… même si lui ne me respecte pas ! 

Le respect ne peut pas se manifester dans l’agressivité… Il y a bien un lien entre la douceur et le respect. Faire preuve de douceur est une forme de respect de l’autre. Être doux envers celui qui est agressif, respecter celui qui ne nous respecte pas, c’est bien agir comme le Christ nous y exhorte, lorsqu’il invitait ses disciples à ne pas rendre le mal pour le mal et à aimer leurs ennemis ! 


Conclusion

Face à l’hostilité ou l’agressivité, le réflexe naturel serait sans doute la fuite ou l’affrontement. Mais Pierre invite à une autre voie :

  • Ne pas fuir mais tenir ferme, en étant prêt à répondre de notre foi. Et pour être prêt, il faut avant tout réserver une place à part au Christ dans notre vie intérieure. 
  • Ne pas répondre à l’hostilité par l’hostilité mais se laisser guider par la douceur et le respect.

C’est un défi, qui va à l’encontre de nos inclinations naturelles… mais c’est la seule façon d’agir à l’image du Christ. C’est pour cela que Pierre parle, à cet égard, d’avoir une bonne conscience. Avoir une attitude caractérisée par la douceur et le respect, c’est agir à l’image du Christ… c’est un signe que le Christ occupe bien une place à part dans notre vie intérieure. 

Dieu sait pourtant combien il est facile d’avoir une mauvaise conscience quant à notre vie chrétienne et notre témoignage. On a toujours l’impression de ne pas en faire assez, ou de le faire mal… c’est un domaine dans lequel on se culpabilise beaucoup. 

Et c’est sans doute vrai : on n’en fait probablement pas assez… Mais ce n’est pas dans l’activisme que nous trouverons une bonne conscience. La bonne conscience naît d’une attitude inspirée par le Christ. 

La bonne nouvelle est que nous ne sommes pas appelés à convertir ou à convaincre à tout prix les autres. Ça, c’est l’affaire de Dieu, et de chacun et chacune devant Dieu ! Mais nous sommes appelés à être témoin de notre foi, ou comme le dit Pierre, être toujours prêts à nous défendre face à ceux qui nous demandent de rendre compte de notre espérance. Nous sommes appelés à refléter le Christ, et plus il aura une place à part dans notre vie intérieure, plus ce sera le cas. C’est lui qui agira en nous et par nous. 


Appropriation 

Quelle place est-ce que je réserve au Christ dans ma vie intérieure ? 

Dans quelle mesure la douceur et le respect caractérisent mon attitude et mes paroles, y compris envers ceux que j’ai du mal à aimer et/ou qui ne m’aiment pas ? 

« Seigneur, remplis ma vie et fais de moi un témoin plein de douceur et de respect ! »


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