dimanche 4 juin 2023

Dieu a tellement aimé le monde…

 
Ecouter la prédication

Il existe une liste de lectures qui propose, pour chaque dimanche, trois textes de la Bible : un premier tiré de l’Ancien Testament, un deuxième tiré du Nouveau Testament et un troisième tiré d’un Evangile. Cette liste est commune, en France, aux catholiques et aux Protestants. C’est pourquoi j’aime bien choisir un des trois textes proposés pour la prédication du dimanche. 

Et le texte de l’Evangile proposé pour ce dimanche particulier pour nous, un dimanche de baptêmes, contient le verset biblique le plus connu de toute la Bible, au moins pour les protestants évangéliques. 

Si je vous dis Jean 3.16, vous me dites… 

Jean 3.16
Car Dieu a tellement aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que toute personne qui croit en lui ne périsse pas mais qu'elle ait la vie éternelle.

Beaucoup le connaissent par cœur. Mais il est tellement connu qu’on pourrait presque ne plus l’écouter. On le connaît, il est tellement rabâché ! 

On estime, à juste titre, que ce verset résume bien, en quelques mots, le cœur de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ. En c’est vrai. Cela dit, je ne suis pas sûr qu’en citant ce verset, même dans une version en Français courant, le message soit si facilement compris aujourd’hui. 

Je vous propose un double défi ce matin : essayer de donner un relief nouveau à ce verset pour ceux qui le connaissent par cœur, et essayer de l’expliquer et de le formuler dans des termes que tout le monde peut comprendre. 


Un mot, d’abord, sur le contexte. Ces versets font partie d’un dialogue entre Jésus et Nicodème, un Pharisien. C’était le parti religieux Juif majoritaire au temps de Jésus et dont la plupart des membres se sont farouchement opposés à Jésus. C’est pourquoi Nicodème vient le voir en toute discrétion, alors qu’il fait nuit, pour ne pas être vu. 

Il engage le dialogue avec Jésus avec des paroles très respectueuses et Jésus, qui le voyait sans doute venir, répond par une phrase énigmatique : « Oui, je te le déclare, c'est la vérité : personne ne peut voir le règne de Dieu s'il ne naît pas de nouveau. » (Jean 3.3)

Et là, Nicodème ne comprend pas… Quoi ? Comment pourrait-on retourner dans le ventre de sa mère pour naître de nouveau ? Mais la nouvelle naissance dont parle Jésus n’est pas de même nature que notre venue au monde. Il s’agit de la naissance à une vie nouvelle, qui ne relève pas du ventre de notre mère mais de l’Esprit de Dieu. C’est la « vie éternelle » dont parle notre fameux verset. 


Dieu nous aime

De quoi parle ce verset ? Il parle d’abord de l’amour de Dieu. « Dieu a tellement aimé le monde… » 

Et là, déjà, ça peut bloquer. Comment peut-on parler de l’amour de Dieu ? Quand on regarde le monde qui nous entoure, quand on voit les guerres, les injustices, les catastrophes, on se demande bien comment on peut dire que Dieu nous aime… Vous me direz peut-être que le texte dit que Dieu « a aimé le monde ». C’est au passé ! Ça voudrait dire qu’il ne l’aime plus, qu’il ne s’intéresse plus à nous, qu’il nous a laissé tomber ? 

Non bien-sûr ! Mais la formule verbale a son importance. D’autant qu’en grec c’est une forme qui fait référence à un moment du passé, un événement accompli. Il y a donc un moment, dans le passé, où l’amour de Dieu pour le monde s’est manifesté. C’est la suite du verset qui le précise : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique… »

Une autre question se pose alors : Dieu a-t-il donc un Fils ? Pas au sens où nous pouvons l’entendre pour nous qui sommes père ou mère. Ce serait aussi absurde que la question de Nicodème demandant à Jésus comment on peut retourner dans le ventre de sa mère pour naître de nouveau. C’est une façon imagée de parler de Dieu. Et même, mystérieusement, de pénétrer dans l’intimité de Dieu, d’entrevoir un peu quelque chose de la richesse et de la complexité de Dieu. 

Dieu, être unique et absolu par définition, est aussi d’une complexité extrême. Pour l’évoquer, la Bible parle du Père, du Fils et de l’Esprit saint. Le Dieu unique est aussi le Dieu multiple en lui-même, un seul Dieu en trois personnes distinctes, un Dieu en perpétuel mouvement, en perpétuelle relation, un Dieu qui vit et qui aime, par nature.  

Il y a là un mystère qui dépasse notre entendement… et qui rejoint un autre mystère qui est pourtant proclamé haut et fort par les Evangiles : Dieu a aimé le monde en donnant son Fils. Dieu n’a pas aimé le monde en solutionnant tous les problèmes d’un coup de baguette magique. Il a aimé le monde en partageant nos souffrances, solidaire avec nous jusqu’à la mort. 

Dieu a aimé le monde en devenant l’un des nôtres, en Jésus. Sa naissance l’atteste. Dieu a aimé le monde en partageant notre condition de créature. Il a vécu parmi les humains, il a fait preuve de compassion et de générosité, il a parlé de Dieu comme nul autre et ses enseignements demeurent actuels aujourd’hui. Dieu a aimé le monde en acceptant de mourir, lui l’innocent est devenu solidaire de notre humanité jusque dans ses limites et sa finitude. Dieu a aimé le monde enfin en remportant la victoire sur la mort, par la résurrection de Jésus. 

Ça, c’est ce que nous racontent les Evangiles. On peut toujours prétendre que c’est inventé ou enjolivé… Mais si c’est vrai, et je le crois, alors c’est bien la meilleure nouvelle de toute l’histoire de l’humanité ! Une Bonne Nouvelle que nos baptisés ont accueillie et qu’ils se sont appropriés, comme ils en ont témoigné. 


Croire en lui

La deuxième moitié du verset souligne le but, l’objectif de l’amour de Dieu : « afin que toute personne qui croit en lui ne périsse pas mais qu'elle ait la vie éternelle. »

Qu’est-ce que la vie éternelle ? Il ne faut pas se tromper, ce n’est pas l’immortalité. Qui voudrait vraiment de l’immortalité, c’est-à-dire de poursuivre notre vie sans jamais mourir ? Certes, la vie est belle, parfois… mais pas toujours. Notre vie est faite aussi de souffrances, de difficultés, de frustrations qu’on n’a pas du tout envie de vivre éternellement ! 

Pour que la vie éternelle soit vraiment une bonne nouvelle, il faut autre chose qu’une vie qui ne s’arrête jamais. La vie éternelle, ce n’est pas l’immortalité, c’est la vie avec Dieu. C’est une vie remplie de la présence du Dieu éternel. 

L’espérance chrétienne n’est pas d’avoir une vie ici-bas qui ne se termine jamais. La mort fait partie de la vie. D’ailleurs, Dieu, en Jésus, est venu partager nos souffrances, jusqu’à la mort. L’espérance chrétienne, c’est de laisser la vie de Dieu faire irruption dans notre vie, une vie qui, elle, n’est pas affectée par la mort. 

L’assurance chrétienne c’est que rien, pas même la mort, ne peut nous séparer de l’amour de Dieu ! 

Pour saisir et vivre cette promesse, il s’agit de croire. Non pas être crédule ou naïf. Croire. Choisir de faire confiance à Dieu et entrer dans une relation personnelle avec lui. 

La foi ne s’oppose pas à la raison ou aux sentiments. La raison a sa place dans la vie du croyant. Il y a une intelligence de la foi : il est essentiel que nous réfléchissions à notre foi, à la cohérence de ce que nous croyons et que nous soyons capables d’affirmer, d’argumenter, de défendre, d’affermir notre foi. 

Les sentiments et les émotions aussi ont leur place dans la vie du croyant, parce que la vie chrétienne n’est pas qu’une affaire de croyance abstraite et théorique, c’est une réalité à vivre, dans toutes les dimensions de notre vie. 

Mais fondamentalement, c’est la foi qui nous permet de connaître Dieu. Pas la raison ou les émotions. Si on attend d’avoir une certitude absolue de l’existence de Dieu pour devenir chrétien, on ne le deviendra jamais. Si notre vie chrétienne est portée par les seules émotions fortes d’une expérience spirituelle intense, on va au-devant de grandes difficultés. Parce que les émotions, ça va et ça vient… 

La foi, croire en Dieu, c’est choisir de lui faire confiance. Malgré les doutes et les questions. Malgré les frustrations et les blessures enfouies en nous. C’est la foi qui nous relie à Dieu, elle vient éclairer de la présence de Dieu toutes les sphères de notre existence, y compris notre raison et nos émotions. 

C’est pourquoi la vie éternelle à laquelle elle ouvre n’est pas simplement une promesse à venir, après notre mort. Elle est la réalité d’une vie nouvelle dès aujourd’hui, dans la présence du Dieu vivant et éternel. Elle fait passer de la mort à la vie, elle nous fait naître à une vie nouvelle…  la vie éternelle. 


Conclusion

Tout est dit. L’amour de Dieu a été pleinement manifesté dans la personne de Jésus. L’invitation nous est lancée de croire, de faire confiance à Dieu afin d’entrer dans une vie nouvelle, une vie avec Dieu. 

Tout est dit mais tout reste à vivre. Parce que la foi n’est pas qu’une décision prise une fois pour toute, c’est un choix à renouveler sans cesse, tout au long de notre cheminement ici-bas. Ce n’est pas parce qu’on est chrétien, ce n’est pas parce qu’on est baptisé, qu’on ne connaît plus d’épreuve et de difficulté, qu’on n’a plus jamais de doutes ou d’interrogations… Sans cesse, nous sommes appelés à croire, à choisir de placer notre confiance en Dieu. 

Nous sommes appelés à nous approprier sans cesse la promesse de Jean 3.16, comme si elle nous disait :

Dieu m’aime tellement qu’il a donné son Fils unique, il s’est donné lui-même, afin que si je place ma confiance en lui je découvre, chaque jour et pour toujours, la vie avec Dieu.  

Dans quelle mesure est-ce vrai pour moi, aujourd’hui ? Quels sont les obstacles qui m’empêchent de vivre pleinement la vie avec Dieu ?


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Laissez un commentaire !