dimanche 23 juillet 2023

Les Proverbes – Chemins de sagesse (3)

 

Nous poursuivons notre mini-série sur les Proverbes, et en particulier le début du premier recueil attribué à Salomon. 

Juste une précision importante pour commencer, un rappel pour ceux qui ont suivi les deux premiers épisodes. La spécificité des maximes qu’on trouve dans le livre des Proverbes, c’est qu’il s’agit de formules courtes et souvent condensées. Autrement dit, tout n’est pas toujours dit explicitement. Il arrive que des mots ou des parties de phrases soient sous-entendues. Si on ne prend pas le temps de creuser la maxime, d’y chercher les indices de parties manquantes, de ce qui est sous-entendu, on risque de passer à côté du sens. 

Nous commencerons donc toujours par une petite enquête pour tenter de découvrir les trésors cachés des proverbes que nous lirons. 

Reprenons donc la lecture où nous nous sommes arrêtés : 

Proverbes 10.15-22
15La fortune du riche est une ville forte ; la ruine des petites gens, c'est leur pauvreté.
16Le gain du juste est pour la vie ; le revenu du méchant est pour le péché.
17Celui qui garde l'instruction prend le chemin de la vie ; celui qui oublie les avertissements s'égare.
18Celui qui couvre la haine a des lèvres menteuses ; celui qui répand de mauvais propos est stupide.
19Avec beaucoup de paroles, les offenses ne manquent pas ; celui qui retient ses lèvres est un homme de bon sens.
20La langue du juste est un argent de choix ; le cœur des méchants a peu de valeur.
21Les lèvres du juste conduisent la multitude ; les imbéciles meurent faute de raison.
22C'est la bénédiction du SEIGNEUR qui rend riche ; il n'y ajoute aucune peine.


La fortune du riche est une ville forte ; la ruine des petites gens, c'est leur pauvreté.
(Proverbes 10.15)

Il n’y a sans doute pas besoin de chercher de mots cachés ici, la formule est claire. Mais attention : il n’y a pas d’un côté le juste et de l’autre le méchant. L’opposition est entre le riche et le pauvre. Il n’y a pas de jugement moral ou de jugement de valeur sur l’un ou sur l’autre, sinon on parlerait de juste et de méchant, ou de sage et de stupide.  

Dans notre monde, la richesse garantit bien une certaine sécurité et la pauvreté conduit à une certaine précarité. C’est un fait… Il est quand même bien plus facile de se nourrir, de se loger, de s’habiller quand on a un certain revenu. Et la vie est quand même bien plus difficile quand on a du mal à joindre les deux bouts, quand on rame pour payer ses factures et faire les courses au supermarché.  

Ce proverbe ne dit pas autre chose ! Le riche trouve dans sa richesse une certaine sécurité, et le pauvre est dans une situation de précarité, plus ou moins prononcée. 

C’est aussi une façon de dire que la richesse, l’argent, les biens matériels ne sont pas mauvais par eux-mêmes. On peut être bon et juste, tout en étant riche… ou pauvre. Et on peut être mauvais et méchant, tout en étant pauvre… ou riche. 


Le gain du juste est pour la vie ; le revenu du méchant est pour le péché.
(Proverbes 10.16)

Cette fois l’opposition est moins évidente. Et il y a bien le juste d’un côté et le méchant de l’autre. On associe au juste le gain (ou le salaire, voire le travail), et au méchant le revenu. On est bien dans le même domaine, celui du travail et ce qu’il rapporte. 

Là où l’opposition est plus subtile, c’est dans la finalité : pour la vie ou pour le péché (et pas la vie et la mort, ou la justice et le péché par exemple). Les justes comme les méchants tirent un gain de leur travail. La différence se trouve au niveau de la finalité de ce gain. Que fait-on de nos biens, comment les utilisons-nous ? Pour la vie ? C’est-à-dire pour vivre (il faut bien travailler pour vivre…), mais aussi pour le bien de la vie des autres. Ou pour le péché ? C’est-à-dire pour des usages égoïstes voire mauvais et destructeurs, pour soi et pour les autres.

Ce proverbe précise d’une certaine façon le proverbe précédent. Le problème n’est pas le montant de notre salaire mais l’usage que nous en faisons. 


Celui qui garde l'instruction prend le chemin de la vie ; celui qui oublie les avertissements s'égare.
(Proverbes 10.17)

Ici, le proverbe est limpide. Tout est explicite et souligne l’importance et l’utilité des conseils et des avertissements que nous pouvons recevoir. En tenir compte, c’est prendre le chemin de la vie, ne rien en faire, c’est s’égarer. Nous avons tous besoin de bons conseils pour vivre notre vie correctement ici-bas. 

A noter que celui qui s’égare n’est pas celui qui n’a pas reçu de conseils ou d’avertissements mais celui qui les oublie (ou pourrait traduire aussi qui les abandonne ou les néglige), sans doute parce qu’il estime qu’ils ne sont pas importants ou qu’il n’en a pas besoin… 

Vouloir toujours se débrouiller seul, penser qu’on va pouvoir tracer son propre chemin, se faire tout seul sans jamais écouter les conseils, sans jamais avoir besoin des autres, de leur expérience ou de leur expertise, c’est être sûr de s’égarer. Nous avons besoin les uns des autres. 


Celui qui couvre la haine a des lèvres menteuses ; celui qui répand de mauvais propos est stupide.
(Proverbes 10.18)

Pour une fois, les deux parties de ce proverbe n’opposent pas le sage et le stupide, ou le juste et le méchant. On ne parle que du menteur et du stupide… en soulignant deux façons de mal utiliser ses paroles. Soit on est hypocrite (on cache la haine derrière des paroles trompeuses) soit on est malveillant (on répand des calomnies sur les autres). 

C’est d’ailleurs étonnant que la deuxième partie du proverbe parle d’être stupide et non d’être méchant. Le méchant, c’est celui qui est moralement condamnable. Le fou ou le stupide c’est celui qui se conduit de manière insensée… et qui s’en mordra les doigts. Répandre des mauvais propos, des mensonges ou des calomnies est stupide, c’est un mauvais calcul parce que ça finit toujours par se retourner contre celui qui les a proférés. Lorsque la vérité éclate et que ses intentions sont révélées, celui qui a répandu les mauvais propos perd tout crédit. 


Avec beaucoup de paroles, les offenses ne manquent pas ; celui qui retient ses lèvres est un homme de bon sens.
(Proverbes 10.19)

Dans ce proverbe, il n’y a pas une opposition entre parler et écouter mais entre parler avec abondance et parler avec retenue. Parler avec abondance, c’est parler sans filtre, sans se donner le temps de la réflexion et de la pondération. Plus les paroles sont abondantes, moins elles sont réfléchies et plus il y a de chance qu’il y ait des offenses (en hébreu, c’est un des mots qui désignent le péché). 

A l’inverse, la sagesse est pour ceux qui savent retenir leurs paroles. Retenir ses paroles, ce n’est pas forcément rester silencieux, mais c’est parler avec mesure, à bon escient. C’est savoir prendre le temps de réfléchir avant de parler, évaluer la pertinence de ce qu’on s’apprête à dire et être prêt à ne rien dire si ce n’est pas le cas. Bref, retenir ses lèvres, c’est avoir des paroles réfléchies et pertinentes. La parole des sages est rare, mais elle est précieuse. 

Avec beaucoup de paroles, les offenses ne manquent pas car les paroles ne sont pas réfléchies ; celui qui retient ses lèvres est un homme de bon sens car il réfléchit avant de parler.


La langue du juste est un argent de choix ; le cœur des méchants a peu de valeur.
(Proverbes 10.20)

Un a d’un côté la langue des justes, et de l’autre le cœur des méchants. L’une est précieuse, l’autre ne vaut presque rien. Ici, la langue est l’organe de la parole, le cœur celui des pensées et des intentions. 

Ce proverbe est vraiment dans le prolongement du précédent. Un argent de choix, c’est un argent rare, sélectionné avec soin. Ce qui a de la valeur est rare… alors que ce qui a peu de valeur est banal. Le cœur des méchants est banal, sans valeur. Et on s’en rend compte dans leurs paroles, surtout si elles sont abondantes. 

Mais attention : ce n’est pas le cœur du juste qui est une richesse de choix mais sa langue. Autrement dit, ici, c’est une richesse pour les autres, pour ceux qui profitent des paroles du sage. 


Les lèvres du juste conduisent la multitude ; les imbéciles meurent faute de raison.
(Proverbes 10.21)

Avec les deux précédents, ce proverbe forme un triptyque sur la parole. Ici, c’est l’impact des paroles qui est souligné. Parce qu’elles sont rares et qu’elles ont de la valeur, les paroles des justes sont utiles et inspirantes, tout le monde peut en bénéficier. Elles conduisent la multitude. Encore faut-il qu’un cœur sage ait des lèvres justes, autrement dit que le sage partage sa sagesse avec les autres. 

Remarquez que dans la deuxième partie, on ne parle ni du cœur ni des lèvres, on parle simplement des imbéciles… Si le cœur des méchants a peu de valeur, les paroles qui en proviennent n’en ont guère plus. En réalité, elles ne sont même pas utiles à ceux qui les prononcent… 


C'est la bénédiction du SEIGNEUR qui rend riche ; il n'y ajoute aucune peine.
(Proverbes 10.22)

On pourrait traduire différemment la deuxième partie de ce proverbe en disant : « la peine n‘y ajoute rien. » La « peine » ici pourrait désigner le travail ou les efforts des humains, ou alors peut-être les soucis ou les inquiétudes. Quoi qu’il en soit, aucun effort ni aucune inquiétude ne viendront ajouter quoi que ce soit à la bénédiction du Seigneur. 

Finalement, ce proverbe invite à considérer la richesse ou la prospérité comme une bénédiction de Dieu, un bienfait qu’il nous accorde. C’est l’occasion de rappeler que tout ce que nous avons vient de Dieu. 


Application

Récapitulons. Ces proverbes abordent principalement deux thèmes déjà rencontrés auparavant : la richesse et les paroles. Mais ils le font d’une manière différente, apportant d’autres éclairages. Les deux thèmes d’ailleurs se croisent puisqu’on présente les paroles des sages elles-mêmes comme une richesse. 

En ce qui concerne la richesse, les proverbes que nous avons lus soulignent que l’argent, les biens matériels, la prospérité, tout cela n’est pas mauvais en soi. Il s’agit même de les considérer comme des bénédictions de Dieu. Mais ce qui est déterminant, c’est l’usage que nous en faisons. 

En ce qui concerne les paroles, pour qu’elles aient de la valeur, elles doivent être mesurées, réfléchies et franches. Dans ce cas, elles sont une richesse pour tous ceux qui sont prêts à les entendre et des ressources précieuse pour la vie. Ceux qui s’en privent sont stupides et ils s’égarent dans leur orgueil et leur égoïsme. 

Pour les leçons à retenir de ces proverbes, je vous propose de croiser ce qui est dit des paroles et des richesses. 

Ce qui a de la valeur est rare. 

  • Toute richesse est rare : elle n’est jamais un dû, toujours une bénédiction de Dieu
  • Les paroles de valeur sont peu nombreuses parce qu’elles sont réfléchies et mesurées

Les bénédictions sont faites pour être partagées. 

  • Savoir partager ses biens, c’est démontrer qu’on n’est pas esclave d’eux
  • Un sage ne l’est plus s’il ne fait pas bénéficier les autres de ce qu’il a appris


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