dimanche 28 juillet 2024

L’esprit olympique (4) Esprit en mouvement

 

Suite et fin de notre mini-série de l’été sur l’esprit olympique. Voici un court rappel des épisodes précédents :

  • Le premier épisode, « La vie chrétienne, c’est du sport », s’était arrêté sur la métaphore sportive la plus développée dans la Bible pour parler de la vie chrétienne comme une course ou un combat, et qu’on trouve dans la première lettre de Paul aux Corinthiens
  • Le deuxième épisode, « Plus vite, plus haut, plus fort » prenait la devise olympique comme une métaphore possible de la vie chrétienne, dans laquelle la recherche de l’excellence et le dépassement de soi ne doit pas se vivre en compétition avec les autres.
  • Le troisième épisode, « L’important, c’est de participer », partait de cette célèbre formule attribuée à Pierre de Coubertin pour évoquer la nécessité d’être acteur de sa vie chrétienne et non pas spectateur, de participer vraiment, en faisant son maximum.
  • Voici donc notre dernier épisode qui s’intitule : « Esprit en mouvement ». 

Savez-vous à quoi correspond cette formule ? C’est, depuis 2004, la devise des Jeux paralympiques ! 

En plus de leur devise, les Jeux paralympiques ont aussi un drapeau spécifique. Les cinq anneaux y sont remplacés par ces trois symboles qu’on appelle des agitos du latin agito qui signifie « je bouge ». Ils symbolisent le mouvement et la volonté de ne jamais abandonner, ils évoquent la détermination et la résilience des para-athlètes

A l’origine, la devise des Jeux Paralympiques était « l’esprit, le corps et l’âme ». Une formule biblique qui faisait aussi référence à la devise olympique « plus vite, plus haut, plus fort. » Elle a été changée en 2003, et introduite aux Jeux d’Athènes en 2004. Désormais c’est donc « Esprit en mouvement » (« Spirit in motion »). Une formule directement liée aux agitos du drapeau paralympique. 

Avec cette nouvelle devise, le Comité international paralympique voulait non seulement rendre hommage à la force intérieure des para-athlètes mais aussi à leur capacité à inspirer tous ceux qui sont témoins de leurs exploits. 

Et il faut avouer qu’assister à une compétition paralympique est un spectacle étonnant et inspirant. 

Si la nouvelle devise paralympique est moins immédiatement biblique que la précédente, elle n’en demeure pas moins une formule qui peut entrer en résonnance avec nos préoccupations de croyants. 

Tout d’abord, je me dis qu’en tant que croyant, on est souvent plus proche d’un athlète paralympique que d’un athlète olympique. Spirituellement, nous sommes tous en quelque sorte en situation de handicap. 

Par ailleurs, la formule « Esprit en mouvement » peut résonner de deux façons complémentaires pour nous. Dans une perspective biblique, le mot « esprit » peut avoir un double sens. Il peut désigner, avec un « e » minuscule, l’esprit humain, sa part intérieure et immatérielle. Mais il peut aussi désigner, avec un « E » majuscule, l’Esprit de Dieu, le Saint-Esprit qui vient habiter le croyant. Ce double sens est intéressant pour nous… 


Nous sommes toutes et tous en situation de handicap

Aux Jeux paralympiques, tous ne concurrent pas en même temps. Prenez par exemple la discipline reine de l’athlétisme, il y a plusieurs catégories, en fonction du handicap : visuel, mental, moteur cérébral, amputation de membres supérieurs ou amputation de membres inférieurs… Et il y a même des graduations au sein de ces différents handicaps, par exemple de la déficience visuelle jusqu’à la cécité. Cela rend impossible la mise en compétition directe des uns et des autres… On ne va pas faire courir dans la même course un athlète aveugle, un autre amputé d’un bras et un troisième en fauteuil roulant. 

Il n’en demeure pas moins que chaque course suscite l’admiration en voyant la façon dont les athlètes parviennent à surmonter leur handicap en réalisant parfois des performances exceptionnelles. 

On a déjà parlé du danger de la comparaison dans la vie chrétienne. Mais il me semble qu’envisager cela sous l’angle de la métaphore paralympique est éclairant. Nous sommes tous en situation de handicap spirituel à cause du péché, mais nos handicaps sont différents 

Ce qu’on a tous en commun, c’est d’être des « para-athlètes spirituels ». La source commune de notre handicap, c’est le péché. Une réalité universelle, qui touche toute l’humanité :

Romains 3.22b-23
Il n'y a pas de différence entre les êtres humains : tous ont péché et sont privés de la présence glorieuse de Dieu.

Le péché, c’est tout ce qui nous éloigne de Dieu. C’est cette réalité spirituelle mystérieuse qui fait que chaque être humain a eu lui un élan qui a tendance à l’éloigner de Dieu. Si on laisse libre court à cet élan, alors on peut tomber dans les pires des comportements, qu’ils soient néfastes pour les autres ou autodestructeurs. 

La lutte contre le péché, contre cet élan qui nous éloigne de Dieu, est le lot de tous les chrétiens. Mais la lutte est différente pour chacune et chacun. Nous sommes tous en situation de handicap spirituel à cause du péché, mais nos handicaps sont différents. Il serait donc absurde de se comparer les uns les autres, ou pire de se juger les uns les autres. C’est aussi absurde que d’aligner dans une même course un para-athlète non-voyant et un autre dans un fauteuil roulant. 


Esprit/esprit en mouvement

Venons-en maintenant à la devise paralympique. Avec, pour nous, la possibilité du double sens Esprit ou esprit en mouvement… La vie chrétienne, c’est d’abord laisser l’Esprit de Dieu nous mettre en mouvement. Et c’est aussi mettre notre esprit en mouvement, le tenir en éveil et l’utiliser avec discernement. 

Le texte biblique qui peut le mieux exprimer cette double réalité est Romains 12.2 :

Romains 12.2
Ne vous conformez pas aux habitudes de ce monde, mais laissez Dieu vous transformer et vous donner une intelligence nouvelle. Vous discernerez alors ce que Dieu veut : ce qui est bien, ce qui lui est agréable et ce qui est parfait.

Qu’est-ce qui nous transforme ici ? Dans le texte original, ce n’est pas dit explicitement. Paul dit, littéralement, « soyez transformés » ou « laissez-vous transformer » (c’est le verbe qui a donné métamorphose en français). Mais on comprend bien que c’est Dieu lui-même, par son Esprit saint, qui opère cette transformation en nous. 

Et cette métamorphose, elle se manifeste par un renouvellement de l’intelligence. C’est cette intelligence nouvelle, fruit de la métamorphose opérée par Dieu, qui nous rend capable de discerner la volonté de Dieu. Et donc de lutter contre le péché qui nous éloigne de lui… 

Il s’agit donc, pour paraphraser la devise paralympique, de laisser d’abord l’Esprit de Dieu nous mettre en mouvement, pour ensuite mettre en mouvement notre esprit. 


Laisser l’Esprit nous mettre en mouvement

Esprit en mouvement… Il s’agit en premier lieu de laisser l’Esprit de Dieu nous mettre en mouvement. C’est lui seul qui nous permet de nous mettre en marche à la suite du Christ, puis d’avancer à sa suite. 

Il faut noter que Paul s’adresse ici à des croyants, pas à des non-croyants. Il ne faut donc pas penser qu’il suffirait d’une mise en mouvement initiale pour ensuite se laisser porter par l’élan. La mise en mouvement de l’Esprit de Dieu doit se poursuivre tout au long de notre vie chrétienne. Il faut sans cesse revenir à lui, le laisser renouveler son élan, nous laisser transformer par lui. 


Mettre notre esprit en mouvement

Pour autant, l’Esprit de Dieu ne va pas tout faire à notre place. Il donne l’élan, il est la source du mouvement. Il transforme notre intelligence… pour que nous l’utilisions ! Paul ne dit pas que Dieu nous transforme et qu’il nous montre quelle est sa volonté. Il nous transforme pour que nous discernions ce qu’il veut. Il donne l’élan initial et s’attend à ce que nous mettions en mouvement notre esprit renouvelé par lui.

Et cela même si nous avons besoin, comme nous l’avons dit, d’être sans cesse renouvelé dans notre élan par l’Esprit saint.  

En jouant sur le double sens biblique du mot « esprit », on pourrait dire qu’un chrétien épanoui est un chrétien rempli d’Esprit mais aussi plein d’esprit. 

Quand on dit de quelqu’un qu’il est plein d’esprit, on dit qu’il est vif et intelligent. Un trait d’esprit est une remarque pleine d’humour. Avoir de l’esprit c’est être capable de présenter ses idées de façon originale et piquante. Faire preuve de présence d’esprit, c’est réagir avec promptitude aux situations qui se présentent. Être vif d’esprit, c’est être créatif, imaginatif. 

Or il y a de multiples occasions dans notre vie chrétienne où on a besoin de faire preuve de présence d’esprit pour réagir à des situations inattendues, ou de vivacité d’esprit pour prendre une décision éclairée, et même parfois de faire un trait d’esprit pour désamorcer des situations tendues ou délicates. 

N’est-ce pas cela aussi, le renouvellement de l’intelligence dont parle l’apôtre Paul ? 


Conclusion

La métaphore paralympique appliquée à la vie chrétienne nous rappelle que nous sommes toutes et tous en situation de handicap spirituel, à cause du péché qui est en nous, cet élan contraire qui a tendance à nous pousser loin de Dieu. Mais l’Esprit saint est là pour nous donner, et nous redonner sans cesse le bon élan. 

Esprit/esprit en mouvement. La devise paralympique revisitée à la lumière de la Bible nous appelle, en tant que croyant, à laisser l’Esprit de Dieu nous mettre en mouvement, à le laisser nous donner et nous redonner sans cesse l’élan dont nous avons besoin pour suivre le Christ. Mais elle nous invite aussi faire usage de notre intelligence renouvelée. Remplis du Saint-Esprit, nous voulons aussi être plein d’esprit pour faire preuve de discernement, de vivacité et de sagesse face aux défis quotidiens auxquels nous faisons face. 

Nous pouvons compter sur le Seigneur pour nous aider face à ces défis. Il nous aime et vient à notre aide, car il est notre Père et nous sommes ses enfants, selon cette promesse rappelée par l’apôtre Paul aux Romains : « L'Esprit de Dieu atteste lui-même à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. » (Romains 8.16). 


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